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Communiqué du comité de soutien aux inculpés du 11 novembre (+ lettre ouverte des parents des neuf mis en examen)

Hier (20 nov) près d’une centaine d’habitants de Tarnac et alentour, voire même de tout le plateau, se sont rassemblés pour partager leurs sentiments sur ce qui s’est passé mardi. Il a été décidé de monter un comité de soutien dont voici la communication. Elle est lue par Michel Gillabert, installé depuis quelque temps dans la commune voisine de Tarnac à Rempnat.

Cela fait déja maintenant trois ans que je viens régulièrement en Corrèze et plus particulièrement sur le plateau de millevaches, pour y retrouver des amis dans différents lieux, et entre autres au Goutailloux.

L’atmosphère qui a régné hier soir entre nous était un mélange de colère, d’incompréhension, et du sentiment effrayant d’une disproportion, d’une démesure humiliante. A cette occasion, un réel et très émouvant soutien s’est exprimé de la part de beaucoup des habitants de la commune et de ses environs. Il faut dire que les événements de mardi avaient de quoi impressionner. En effet, 150 policiers ont bouclé le village, paralysé la vie communale. Le village a été envahi par une armada de policiers encagoulés, d’un hélicoptère, de chiens renifleurs d’explosifs, de policiers en blouse verte, de préleveurs d’ADN et de journalistes, beaucoup de journalistes.

Les dépêches AFP tombent a 8h30 du matin, comme si les journalistes avaient déja écrit leurs papiers avant d’arriver sur la commune.

Un dispositif antiterroriste mais pas de terroristes pour leur rendre la réplique dans cette pièce de mauvais goût. En effet, quelques heures après, ce que les enquêteurs constatent, ceux qu’ils rencontrent, c’est monsieur et madame tout le monde.

Pourtant les termes sont lachés, comme on lâche des chiens ultra-gauche, terrorisme, mouvance anarcho-autonome, terroriste, violence, terreur, libertaire, anarchiste, nihiliste, groupuscule, commando, et j’en passe...

Ces termes, dès le début, ont servi à briser la présomption d’innocence, à rendre tout le monde coupable de terrorisme, termes-chocs, qui cristallisent la peur des gens, et masquent une toute autre réalité, partagée ici.

Dans ce contexte, 6 personnes ont été arrêtées.

Pour le moment, la police cherche à trouver les coupables pour des histoires de catenaires sur les lignes SNCF, pas même ces affaires de plaques en béton sur les rails de trains. On est très loin d’une attaque au gaz dans le métro Parisien. Même le chef de la DCRI a indiqué récemment "il n’y a pas de mise en danger de vies humaines dans cette affaire".

Mais de quoi s’agit-il ici ? D’une commune qui a accueilli des jeunes, des amis sont venus les voir, certains sont restés, ou reviennent, certains ont repris l’épicerie, d’autres font de l’agriculture, d’autres organisent des activités culturelles, ou comme moi, maitrisent un savoir-faire, la taille de pierre. Les gens se retrouvent sur des échanges de savoirs, des échanges de moyens, des coups de main, chers à la tradition des gens d’ici. Comment peut-on parler de planque ou de clandestinité alors qu’il s’agit d’abord ici de fuir l’anonymat et l’agressivité des métropoles ?

Mais ce qui pour nous est important à relever ce soir, c’est le caractère indécent, disproportionné et scandaleux de cette descente policière à Tarnac. Je n’ai pas besoin de répéter qu’on a là affaire à une operation médiatique et politique. Le triomphalisme du gouvernement, la rapidité d’intervention de la police après les sabotages, la disproportion du dispositif policier et médiatique, le flou général qui entoure cette ultragauche "qui ne revendique rien et n’est pas structurée" (Michèle Alliot-Marie) indiquent une volonté de produire du coupable chère à un gouvernement désavoué par ses politiques économiques et sociales qui subissent actuellement une crise sans précédent.

De telles pratiques politiques anti-terroristes ont d’ailleurs déjà été dénoncées, notamment par le syndicat de la magistrature dans un communiqué du 26 juin intitulé "la direction des affaires criminelles voit des terroristes partout" ;. Nous vivons dans une période ou les mouvements sociaux, de plus en plus rares, ne freinent en rien une situation générale qui empire chaque jour. Ces grandes démonstrations de force continuent à alimenter la paranoïa installée en occident depuis le 11 septembre surtout l’orsque la police opère dans le cadre d’une juridiction d’exception (garde à vue prolongée, accès restreint à un avocat, motif d’inculpation et concept judiciaire maléable à merci).

Nous pensons beaucoup a nos amis qui se trouvent enfermés en ce moment, et nous demandons leur libération immédiate et la création de comités de soutien partout.

http://www.soutien11novembre.org


EN COMPLEMENT

Lettre ouverte des parents des neuf mis en examens du 11 Novembre

Dimanche, 23 Novembre 2008

Lorsque la cacophonie s’accorde pour traîner dans la boue une poignée de jeunes emmurés, il est très difficile de trouver le ton juste qui fasse cesser le vacarme ; laisser place à plus de vérité.

Certains médias se sont empressés d’accréditer la thèse affirmée par la ministre de l’intérieur dans sa conférence de presse, alors que les perquisitions étaient en cours : Les personnes arrêtées étaient d’emblée condamnées.

Personne n’aura pu rater l’épisode de "police-réalité" que nous avons tous subi la semaine passée. L’angoisse, la peur, les pleurs nous ont submergé et continuent à le faire. Mais ce qui nous a le plus blessés, le plus anéanti, ce sont les marées de mensonges déversées. Aujourd’hui ce sont nos enfants, demain ce pourrait être les vôtres.

Abasourdis, nous le sommes encore, paralysés nous ne le sommes plus. Les quelques évidences qui suivent tentent de rétablir la vérité et de faire taire la vindicte.

Les interpellés ont à l’évidence bénéficié d’un traitement spécial, enfermés pendant 96 heures, cela devait faire d’eux des personnes hors normes. La police les suspecte d’être trop organisés, de vouloir localement subvenir à leurs besoins élémentaires, d’avoir dans un village repris une épicerie qui fermait, d’avoir cultivé des terres abandonnées, d’avoir organisé le ravitaillement en nourriture des personnes agées des alentours.

Nos enfants ont été qualifiés de radicaux. Radical, dans le dictionnaire, signifie prendre le problème à la racine. A Tarnac, ils plantaient des carottes sans chef ni leader. Ils pensent que la vie, l’intelligence et les décisions sont plus joyeuses lorsqu’elles sont collectives.

Nous sommes bien obligés de dire à Michelle Alliot Marie que si la simple lecture du livre "L’insurrection qui vient" du Comité Invisible fait d’une personne un terroriste, à force d’en parler elle risque de bientôt avoir à en dénombrer des milliers sur son territoire. Ce livre, pour qui prend le temps de le lire, n’est pas un "bréviaire terroriste", mais un essai politique qui tente d’ouvrir de nouvelles perspectives.

Aujourd’hui, des financiers responsables de la plus grosse crise économique mondiale de ces 80 dernières années gardent leur liberté de mouvement, ne manquant pas de plonger dans la misère des millions de personnes, alors que nos enfants, eux, uniquement soupçonnés d’avoir débranchés quelques trains, sont enfermés et encourent jusqu’ à 20 ans de prison.

L’opération policière la plus impressionnante n’aura pas été de braquer cagoulé un nourrisson de neuf mois en plein sommeil mais plutôt de parvenir à faire croire que la volonté de changer un monde si parfait ne pouvait émaner que de la tête de détraqués mentaux, assassins en puissance.

Lorsque les portes claquent, nous avons peur que ce soient les cagoules qui surgissent. Lorsque les portent s’ouvrent, nous rêvons de voir nos enfants revenir.

Que devient la présomption d’innocence ? Nous demandons qu’ils soient libérés durant le temps de l’enquête et que soient évidemment abandonnée toute qualification de terrorisme.

PS : Nous tenons à saluer et à remercier les habitants de Tarnac qui préfèrent croire ce qu’ils vivent que ce qu’ils voient à la télé.

www.comite-visible.info

www.soutien11novembre.org

http://www.hns-info.net/spip.php?article16248

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Viktor Dedaj

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