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L’effondrement humain en échos-système rugissant les bruits des failles de la conscience (Partie 2)

Précédemment, nous avons postulé que l’invariance, dans le temps et dans l’espace, de l’impunité des crimes de l’Occident et l’impuissance collective des peuples, devant la dépossession de leur identité, authenticité, liberté, dignité et humanité par le capitalisme innové (par les enfumages des droits humains universels et l’intelligence artificielle), étaient en lien avec l’errance des légions militantes et révolutionnaires qui se sont lancées, comme avant-gardes des luttes des peuples, partout ailleurs, à l’assaut du capitalisme, avec les étendards du matérialisme historique. En tabulant sur les exemples de Gaza et d’Haïti, nous avons modélisé un système d’équations qui tend à montrer que cette invariance, cette impuissance et cette errance s’imbriquent et s’enchevêtrent dans les brins d’une spirale déshumanisante qui emporte le monde, non sans résistance, mais à perte de sens et d’intelligence, vers ce que nous appelons l’indigence pour tous.

Empressons-nous de dire que dans notre conception, l’indigence est un état de basculement (effondrement) de la conscience humaine vers les lignes de basses eaux culturelles et éthiques, où l’être humain, bousculé, précarisé et conditionné par les incertitudes de son existence, renonce à l’intelligence et abandonne la dignité humaine par la volonté de s’accrocher à des vacuités matérielles qui sont promues, médiatisées et donc perçues comme des valeurs existentielles. Cette quête de subsistance pour l’existence entraîne des fissures dans la conscience humaine. C’est à travers elles que le capitalisme s’infiltre pour déverser les ressources de sa géostratégie de la déshumanisation en abrutissant l’humain.

Le paradoxe comme processus d’impensé par la double pensée

Ce processus d’abrutissement, de conditionnement et d’effondrement de la conscience par le capitalisme mutant a été prédit par Pierre Bourdieu. En effet, en 1998, celui-ci écrivait, avec une précision analytique chirurgicale que "cette utopie néolibérale qui se réclame du progrès, de la raison et de la science ne cherche qu’à renvoyer dans l’archaïsme la pensée critique, en détruisant méthodiquement toutes les structures collectives et tous les acquis sociaux" (Pierre Bourdieu, Contre-feux. Propos pour servir à la résistance contre l’invasion néo-libérale, Paris, Liber-Raisons d’Agir, 1998). Dans ce même ouvrage, il écrivait en substance : L’essence du néolibéralisme est d’imposer partout un abrutissement collectif massif, en promouvant le chaos et la précarité comme les seuls modes de domination. Ce sont eux qui permettent de maintenir cet état généralisé d’insécurité et de précarités comme conditionnement psychologique pour mieux soumettre les travailleurs, asservir les peuples et les empêcher de penser aux autres possibles plus dignes pour sortir de cette impasse existentielle faisant du libre marché la seule valeur dominante, imposable à l’humanité.

Ayant généré les précarités matérielles, qui conditionnement l’être humain à s’adonner à une quête effrénée de l’accès à des ressources matérielles pour subsister et survivre, le capitalisme s’est aussi faufilé entre les lignes des fissures que génèrent ces précarités. Et cela, parce qu’apparemment, mieux que les marxistes, les théoriciens du capital ont compris que le rapport entre existence et conscience génère des boucles de rétroactions qui peuvent conduire à divers états mentaux conditionnant l’action de l’homme. Car comme l’écrit Ludwig Von Mises dans son Abrégé de L’Action humaine, traité d’économie, l’homme n’agit dans l’histoire que si sa conscience est gênée (frustrée, inconfortable) par rapport à certaines conditions d’existence. Et c’est pour empêcher ce relèvement de la conscience vers les vibrations hautes de la résistance que le capitalisme, dans ses mutations historiques, a donné à certains hommes l’illusion d’un certain rayonnement, d’un certain succès, d’une certaine médiatisation qui, non seulement va les conditionner à se soumettre, l’autorité, mais va aussi forcer l’admiration des masses qui ne voit leur avenir qu’à travers le prisme de ceux et celles qui sont anoblis par le système. Ce qui induit ce paradoxe de la performance défaillante : la même géostratégie, qui aliène et déshumanise, produit aussi une forme d’anoblissement et de médiatisation par une illusion de réussite, qui fascine les pauvres. D’où leur impuissance à sortir du verrou de l’invariance.

Ainsi, il n’est pas rare de voir, notamment en Haïti, des militants révolutionnaires qui combattent le capitalisme sur le terrain économique et de la lutte ouvrière, courir après les attraits culturels et académiques que le capitalisme sécrète par ses institutions. Ce qui crée un effet paradoxal qui annihile leur engagement militant. On ne peut trouver les causes de cette manifestation que dans l’effondrement de la conscience et dans une perte d’intelligence collective que le capitalisme nourrit par le biais de la culture, du savoir et des technologiques, qui sont autant de formes perçues du progrès. C’est par ses paradoxes que le néolibéralisme se perpétue en créant dans la conscience des êtres des fissures qui les empêchent de relier ces paradoxes dans un modèle de données pour faire ressortir leur reliance.

N’est-ce pas en substance ce que dit George Orwell quand il écrit dans 1984 que : « Les noms mêmes des quatre ministères qui nous dirigent font ressortir une sorte d’impudence dans le renversement délibéré des faits. Le ministère de la Paix s’occupe de la guerre, celui de la Vérité, des mensonges, celui de l’Amour, de la torture, celui de l’Abondance, de la famine. Ces contradictions ne sont pas accidentelles, elles ne résultent pas non plus d’une hypocrisie ordinaire, elles sont des exercices délibérés de double pensée.

Ce n’est en effet qu’en conciliant des contraires que le pouvoir peut être indéfiniment retenu. L’ancien cycle ne pouvait être brisé d’aucune autre façon. Pour que l’égalité humaine soit à jamais écartée, pour que les grands, comme nous les avons appelés, gardent perpétuellement leurs places, la condition mentale dominante doit être la folie dirigée ». (George Orwell, 1984, Gallimard, 1950, p. 253).

Cette folie dirigée n’est-elle pas justement cette ingénierie du chaos qui est à l’œuvre partout dans le monde ? Mais combien sont capables de savoir qu’elle est un procédé scientifique réel qui tend à assurer la confiance (donc la performance) dans un système en simulant des défaillances continues dans son environnement pour en évaluer l’impact, planifier une meilleure défense et affiner la stratégie de perduration du modèle ? N’est-ce pas à ce jeu pervers que se livrent ces hommes de l’ombre que Giulano Da Empoli, dans son livre Les ingénieurs du chaos, appelle les « ingénieurs du chaos » ? Ce son eux en effet qui mettent en place les algorithmes et les procédés de détournement de nos colères légitimes en prenant dans leurs filets la masse des publics mécontents, mais vulnérables et fragiles. Or ces publics, tout en ayant toutes les raisons de se soulever contre les élites respectives de leurs pays, ne sont pourtant pas moins sous influence des élites par la captation de leurs colères via les plateformes des réseaux sociaux qui diffusent abondamment sur des thématiques populistes, via le respect des institutions démocratiques, via le respect des pactes républicains. Autant de pseudo valeurs qui n’ont pas d’autre but que de briser la résistance collective des peuples.

Juste une manière de dire que c’est en se faufilant dans les eaux stagnantes des failles de la conscience humaine que les géostratèges de la déshumanisation assurent la résurgence de leur modèle économique. Et c’est pourquoi, il nous semble que c’est dans la conscience qu’il faut remonter pour repenser le matérialisme historique et le faire évoluer vers un matérialisme systémique.

Écouter le bruit de l’indigence du monde par-delà l’inconscience collective

Rappelons que cette tribune, dans ses parties successives, n’a pas d’autres raisons qui la motivent : nourrir, dans ce temps qui se reconfigure par les multiples bras de la spirale de l’indigence pour tous, une problématique contextuelle et constructive pour inciter ceux et celles, d’ici et d’ailleurs, qui veulent vraiment penser et innover les luttes contre la déshumanisation, à systémiser les fondements du matérialisme historique, pour radicaliser sa dialectique dans un engagement de SOI sur le terrain de la conscience, au-delà de l’engagement militant sur le terrain de l’action politique. Or justement l’action politique a foiré un peu partout dans le monde. Les gauches sont devenues plus réactionnaires et plus attirées par le fascisme technologique que les droites, jadis fascisantes. C’est comme si la relativité générale aidant, les gauches et les droites ont inversé respectivement leurs lignes idéologiques sous l’effet des courbures et des fourberies de la géostratégie occidentale. Si l’on excepte quelques rares voix d’une ultime gauche, somme toute conscientisée, tous ceux et toutes celles sur les réseaux sociaux qui portent une pensée critique contre le système sont des gens naviguant à vue sur la rive droite jusqu’à ses vagues houleuses, proches des cotes extrêmes.

Où est donc l’erreur, sinon dans la perte de sens de la boussole idéologique ? Et comme c’est dans la pratique qu’il faut que l’homme prouve la vérité, c’est-à-dire la réalité et la puissance de sa pensée dans ce monde et pour notre temps » (Karl Marx et Friedrich Engels, L’idéologie Allemande, Éditions sociales, 1968, pp. 31-32), l’incapacité des avant-gardes marxistes, dans le monde entier, à mettre en pratique la dialectique de l’histoire pour approprier les trois temps nécessaires à l’abolition de l’aliénation capitaliste (Ibid., p.60) est un échec à la fois théorique et pratique. Mais cet échec théorique n’est pas forcément celui du marxisme, il peut être seulement l’échec intellectuel (panne d’intelligence) de ceux qui l’ont interprété comme une théorie universelle et immuable de l’action révolutionnaire. En effet, selon Alex Mucchielli (Savoir Interpréter, Armand Colin, 2012) les choses n’acquièrent de sens pour un observateur que dans un contexte donné et selon la position qu’il occupe par rapport à ce contexte.

Or, beaucoup de marxistes n’ont pas encore conscience que la réalité sociale n’est pas donnée, qu’il n’existe pas une réalité vraie imposable à tous de manière identique, pour ainsi dire universelle. Ils ont du mal à admettre que la réalité est un construit qui se structure au contact des incertitudes de l’existence, et cette construction dépend de la manière dont la conscience humaine interprète ces incertitudes. Tout notre propos est de prouver que c’est là le vrai enseignement du matérialisme dialectique. Hélas, cet enseignement n’a pas été compris, parce qu’on s’est attardé davantage sur les formules frappantes qui décrètent, résonnent en profession de foi et s’imposent comme des dogmes éternels. Comme si les dialecticiens matérialistes, de par le monde, avaient lu Marx, sans trop comprendre que le marxisme, parce qu’il est une théorie scientifique, exige un effort de contextualisation, une approche systémique qui invite à dépasser la contradiction pour donner au paradoxe le statut d’un possible non exclu.

Si l’on considère qu’une approche systémique de la leçon marxienne force à admettre que la vérité de la thèse, voulant que ce soient les conditions d’existence des hommes, découlant des forces productives et de l’état social de leur contexte, qui déterminent leur conscience, les incitent à agir pour faire l’histoire et transformer leur existence, n’exclut pas des allers retours entre existence et conscience et certains états de pleine ou de vide conscience, où respectivement l’être peut être pleinement éveillé et rester en reliance avec son environnement ou être en apesanteur dans le vide cognitif et rester totalement déconnecté du monde. Cela nous permet de postuler que l’invariance de l’impuissance des peuples devant leur déshumanisation et l’arrogante et performante impunité des crimes de l’Occident sont dues au fait que c’est la conscience de la grande majorité des hommes qui n’a pas su entrer en contradiction (en lutte, en révolte, en indignation) avec la nature insupportable qu’a atteint l’aliénation capitaliste dans l’histoire. Ce que nous disons là n’est pas trop différent de ce qu’a écrit Julian Assange : « A chaque fois que nous sommes témoins d’une injustice et que nous n’agissons pas, nous formons notre caractère à être passifs... Nous finissons alors par perdre toute capacité à nous défendre [...]. »

Et c’est justement ce que fait le capitalisme : désormais, dans sa version de géostratégie de la déshumanisation globale et universelle, il forme notre conscience à être passive en nous donnant de menues distractions, de virtuelles libertés, de pseudo valeurs universelles pour nous éloigner des sphères hautes de la pleine conscience, et nous empêcher d’entrer dans cette intranquillité existentielle qui force à voir le double standard (la double pensée) dans tout ce que magnifie l’Occident. Mais pourquoi les avant-gardes marxistes dans le monde n’ont pas su saisir l’alerte bourdieusienne contre le néolibéralisme ? Alerte pourtant facilement décodable, puisqu’en nous disant que « le néolibéralisme n’est qu’un programme de destruction des structures collectives capables de faire obstacle à la logique du marché pur », elle nous invitait à prendre conscience que la force de la résistance des peuples réside désormais dans leur capacité à faire obstacle à la logique du marché (dans ses multiples manifestations), en refusant de consommer les productions qui s’avèrent dommageables pour notre humanité. Leur a-t-il manqué d’intelligence ? Ou se sont-elles faites toutes embrigadées dans les tourbillons de cette ingénierie du chaos qui s’infiltre jusqu’au cœur des avant-gardes les plus endoctrinées ?

En effet si l’histoire de l’industrie a évolué, au point que le capitalisme s’est mué en une puissance insupportable qui déshumanise tous les peuples, et que pourtant, cette double réalité n’a pas mobilisé les hommes pour rejeter les valeurs du capitalisme et se radicaliser pour transformer leur existence et se réaliser humainement dans l’histoire, c’est forcément parce qu’il y a une défaillance dans la conscience humaine. Et quand la conscience humaine est défaillante, elle ne peut que subir l’existence. C’est du reste ce que postule Marx lui-même : il est tout aussi clair qu’il est impossible de faire l’histoire quand il manque aux hommes non seulement la faculté de concevoir le sens de l’histoire et les matériaux pour l’action de transformation de l’histoire (Karl Marx et Friedrich Engels, L’idéologie Allemande, Éditions sociales, 1968, p.58).

Il y a donc dans le bruit assourdissant de cette errance les ondes de failles d’une impuissance et d’une invariance qui, quoi que précarisant et aliénant l’existence des masses humaines en écho-systèmes défaillants, n’a pas su réveiller leurs consciences pour les pousser à entreprendre la marche vers l’appropriation de leur être générique pour la réalisation de la fête de l’humanité et la fin de l’histoire. Ce sont les incertitudes qui jalonnent ce bruit qui nous rendent si insolents à questionner l’intelligence des avant-gardes marxistes dans le monde dans leur appropriation de la notion de conscience dans la théorie marxiste de l’histoire.

Une inconscience manifeste en écho-système divergent

Empressons-nous de rappeler aux papes infaillibles qui détiennent le monopole de la vérité de la dialectique matérialiste, qu’il ne s’agit pour nous, non de jouer aux spécialistes et interprètes de Marx, mais de chercher, dans la conscience humaine, la faille qu’exploitent, avec succès, les stratèges globalistes, les ingénieurs du chaos, les fabricants d’imposture, les gardiens de la résurgence du manège invariant. Car ce sont eux qui permettent au capitalisme, dans sa métamorphose incessante, d’atteindre au XXIème siècle ce que Francis Cousin appelle ce « stade où le monde tout entier [vacille et sombre] dans l’extase obscène devant sa domination » (Francis Cousin, L’être contre l’avoir, Pour une critique radicale et définitive du faux omniprésent, Le retour aux sources, 2012, p.6). Cette extase obscène fut notamment manifeste lors de la cérémonie d’ouverture des jeux olympiques de Paris en juillet dernier : tout Paris vibrait de culture, de sport et de luxuriance, alors même que parallèlement Gaza se faisait génocider, l’Ukraine continuait de se transformer par l’OTAN en territoire de chair à canon pour affaiblir la Russie, Haïti s’engouffrait dans la dépossession de son territoire par les Gangs fédérés par l’ONU, lequel territoire est depuis l’esclavage un territoire d’expérimentation de la déshumanisation.

Qui a le temps pour s’intéresser humainement, authentiquement à ces lieux lointains si ce n’est qu’en surfant, zappant sur les nouvelles, dans le tohu-bohu des réseaux sociaux, les mensonges et les propagandes des médias officiels ? Combien se doutent que les réseaux sociaux font partie de l’arsenal technologique de l’ingénierie du chaos que met en œuvre la géostratégie de la déshumanisation pour effondrer les consciences et briser toute résistance authentique contre ses structures ? Qui a le temps de trouver du temps pour donner du sens à l’inflation des messages insensés qui circulent sur les plateformes des réseaux sociaux ? Combien savent que « le traitement de ces immenses données disparates nécessite aujourd’hui l’utilisation de nouveaux outils (Big Data, intelligence artificielle) qui sont devenus des instruments de pouvoir sur la scène internationale. Et dont l’usage impacte plus généralement les modes de gouvernement politique de nos sociétés » (Amaël Cattaruzza, Géopolitique des données numériques : Pouvoir et conflits à l’heure du Big Data, Le cavalier bleu, 2019). Combien parmi les avant-gardes de luttes des peuples dans le monde savent que certains engagements nécessitent une plus grande vigilance, donc une plus grande conscience des risques ?

N’est-ce-pas, de manière divergente, un relent écho-systémique de cette inconscience qu’ébruite le sublime texte de Djamel Labidi ), paru le même jour que la première partie de cette tribune sur le site du Grand Soir ? Il y a bien une divergence entre ces échos de l’inconscience, car cette faiblesse, ces erreurs, que Djamel Labidi perçoit comme les causes des coups portés à la résistance palestinienne dans sa lutte contre cet État fabriqué pour le génocide, par ceux qui voulaient se donner bonne conscience par rapport aux crimes du nazisme, sont quelques-unes des manifestations de ce que j’appelle une défaillance humaine et une perte de l’intelligence collective dans les formes de lutte et de résistance des avant-gardes des peuples du monde entier contre la géostratégie de la déshumanisation. Si le capitalisme triomphe et se recycle, par-delà ses crises, jusqu’à menacer d’extinction toute vie sur terre, c’est au vrai par ce que les stratèges de la déshumanisation, les fabricants d’imposture ont su repérer les failles dans la conscience humaine. Ils les ont exploitées pour créer cette ingénierie du chaos qui rend les peuples impuissants, inconscients de leur déshumanisation et en perpétuelle extase devant les attraits culturels, technologiques et libertaires d’enfumage que produisent tour à tour, paradoxalement, mais sans état d’âme, les géostratèges du chaos.

Mais comment comprendre cette extase de la majorité des peuples du monde devant les artefacts culturels du capitalisme sinon par la défaillance de leur conscience ? Comment expliquer que malgré qu’il ait « obstrué [virtualisé] la réalité afin qu’elle ne puisse plus déboucher sur rien [qui soit] susceptible de la dépasser et pour qu’elle soit ainsi en situation de se reproduire indéfiniment sans ne plus renvoyer à rien d’autre qu’elle-même dans la sempiternelle démultiplication de la réification » (Francis Cousin, L’être contre l’avoir, Pour une critique radicale et définitive du faux omniprésent, Le retour aux sources, 2012, p.6), le capitalisme continue de faire profit en vendant aux masses les produits de consommation qui les abrutissent, sinon par l’équilibre invariant entre les paradoxes que génère l’ingénierie du chaos pour abrutir l’humain ?

A cette question, je suggère au lecteur l’excellent texte de Marti Michel (https://www.legrandsoir.info/classes-moyennes-societe-de-consommation-et-decadence-occidentale-avec-la-participation-involontaire-d-emmanuel-todd-et-michel.html) paru dans le Grand Soir le 5 octobre 2024 qui est, comme celui de Labidi, un écho divergent de cet effondrement de la conscience humaine que nous postulons être la faille à sécuriser.

Et en cela, malgré la justesse de l’analyse de Labidi, il faut reconnaître que les géostratèges de la déshumanisation sont forts. Car la force des uns n’est jamais quelque chose d’absolu, c’est toujours en lien avec les faiblesses des autres. Quand les peuples du monde entier se doteront de nouvelles avant-gardes qui auront la pleine conscience que leur engagement contre la déshumanisation multiforme requiert l’unité de leur être, et que la moindre de leurs expériences sensibles dans l’existence doit cristalliser l’essence de cet engagement par une lutte radicale, la force changera de mains... en espérant que d’ici demain, le monde ne disparaîtra pas.

Car en lisant dans les lignes de nos mains, moites et tremblotantes d’impuissance devant l’inhumanité et l’impunité dont font montre les dirigeants occidentaux et leurs réseaux médiatiques, pas besoin d’être Nostradamus pour comprendre qu’une réelle angoisse apocalyptique est en train de prendre possession de presque tous les peuples de la planète. Ils acquièrent se de conscience, de plus en plus grande et terrifiante, que les lignes des incertitudes, qui font tanguer le monde, depuis la crise sanitaire du coronavirus en 2019, entre l’horreur d’une humaine défaillance par la réalité virtuelle du post-humanisme et l’ingénierie du chaos, instituant la peur et les précarités comme mode de gouvernement, se sont intensifiées, se font plus précises et deviennent plus nettes en termes de menaces pour l’humain. Plus personne, sauf ceux qui vivent dans l’impensé analytique total, dans la double pensée, entre insignifiance et inconscience, n’ose encore douter qu’il existe un risque quasi-manifeste, compris entre la probabilité absolue et la certitude, de voir le monde basculer dans une folie apocalyptique entre cet automne 2024 et cet hiver 2025.

Quelque chose de lugubre dans ma pleine conscience me dit que l’équation 2+2=5, omni présente, dans l’ouvrage 1984 de George Orwell, est un code de double pensée dans lequel sens et non-sens cohabitent au point que les signes perdent leur sens dans toute équation tout ayant un sens profond, codé qui renvoie à l’élément neutre de l’opération que suggère l’équation posée.

Comme indice, je laisse aux lecteurs et lectrices le soin de remplacer dans l’équation 2+2=5 le signe plus par l’élément neutre de l’addition et de supprimer le signe égal qui n’a plus de sens.

Rendez-vous en 2025 pour la suite de cette tribune...dans l’autre monde. Tremblez humains, l’hiver de feu arrive, le grand barbare occidental de la déshumanisation prépare son nouveau banquet pour ressurgir sur ses structures barbares dans de nouvelles impostures..

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