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Collectif Les mots sont importants

Droits-de-lhommisme

Par Antoine Math

Dans Le Monde daté du 24 octobre, Sarkozy utilise l’expression droits-de-lhommistes pour railler les associations opposées au projet de loi sur la sécurité intérieure.

Je ne suis pas certain à 100% que ce néologisme, et l’expression droits-de-lhommisme qui va avec, ait été inventé par Le Pen lui-même, mais c’est ce dernier qui n’a cessé de l’utiliser depuis un certain nombre d’années et qui l’a fait connaître.

Que Sarkozy, dans un entretien "relu et amendé par le ministre", utilise cette expression n’est pas anodin selon moi. Il est d’ailleurs curieux que le néologisme droits-de-lhommiste soit utilisé dans un sens dénigrant voire infamant. Sans ce détournement lepéniste, je me reconnaîtrais volontiers du droit-de-lhommisme. Non seulement Sarkozy utilise une expression clairement frappée de la marque nationale-frontiste, mais il l’utilise aussi dans le même sens, contre les droits de l’Homme. L’expression "droits de l’homme" est d’ailleurs, quant à elle, utilisée entre guillemets dans cet entretien relu et amendé, une façon très claire de marquer sa distance.

En 1998, lorsque Balladur avait lancé que la préférence nationale était une idée méritant d’être étudiée, notamment pour les prestations familiales, Sarkozy avait immédiatement suivi malgré le tollé général : "cela me choque d’autant moins que l’on discute tranquillement de la préférence nationale, qu’elle existe dans la fonction publique (Référence aux emplois fermés ou discriminations inscrites dans les textes, qui sont donc être le modèle à suivre selon Sarkozy)" [1].

Rapprochements hâtifs de choses n’ayant rien à voir ? peut-être. Mais les idées d’extrême droite ne viendront plus forcément de personnes brutales, agressives, vulgaires et au passé inquiétant voire caricatural (cf. Le Pen).

En Italie, en Autriche ou au Danemark par exemple, l’extrême droite a appris à se relooker pour mieux rassurer et séduire. Est arrivée une nouvelle génération de politiciens polis, cultivés, souriants, favorables au dialogue, etc. bref plein de ces qualités (apparences ?) qui semblent faire l’admiration de tous.

Ce sont les mots, et les idées qu’ils véhiculent, qui sont importants. [2]

Collectif Les mots sont importants

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Article publié par le Collectif Les mots sont importants

Adresse de l’article original : Droits-de-lhommisme


[1Le Monde, 16 juin 1998

[2Présentation

« Les mots sont importants. Quand on parle mal, on pense mal, et quand on pense mal, on vit mal » (Nanni Morretti).

Dans le film « Palombella rosa », Nanni Moretti est interviewé par une journaliste qui ne s’exprime que par poncifs. Le cinéaste se montrant de plus en plus exaspéré et ne sachant pas quoi répondre aux questions que lui pose la jeune femme, celle-ci finit par concéder que ce qu’elle dit doit sonner « molto cheap ». A bout, Moretti la gifle et s’écrit « ma come parla ? ! Le parole sono importanti ! ! ! » (« Mais comment vous parlez ? ! Les mots sont importants ! ! ! »)

Les mots sont importants : vivre dans l’omission de cette évidence laisse la voie libre aux plus lourds stéréotypes, amalgames, sophismes et présupposés clôturant la pensée et la création mieux que ne le ferait la plus efficace censure.

Nous lançons donc un appel à tous ceux pour qui les mots sont réellement importants et qui ne veulent pas qu’on leur parle mal.

Il n’est évidemment pas question pour nous de dicter ce qui serait conçu comme la bonne manière de penser ou de parler, pas plus que de dresser une liste des mots que nous décrèterions interdits. Si nous ne considérons pas qu’il y a une bonne façon de penser ou de parler nous considérons qu’il y en a indéniablement de mauvaises. Pour les mettre à jour, il nous faut d’autres mots : témoignagnes, fictions, analyses, poèmes - toute forme d’écriture est nécessaire.


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Arundhati Roy - Capitalism : A Ghost Story (2014), p. 37

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