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Le Monde Diplomatique, novembre 2017

En ce mois de novembre 2017, Serge Halimi nous invite à appeler une victoire par son nom : En octobre 2009, Le Monde Diplomatique fit appel à ses lecteurs. Notre journal venait d’essuyer trois années de pertes financières et, comme beaucoup d’autres, il voyait chaque année sa diffusion se tasser. Autant dire que son existence – ou, ce qui revenait au même, son indépendance – n’était plus assurée.

Huit ans plus tard, cette menace est levée.

Les motifs de satisfaction n’étant pas innombrables en ce moment, il est aussi utile que réconfortant d’analyser celui qui nous concerne directement. D’autant qu’il comporte une dimension plus générale, intellectuelle et politique. Le tirage d’un journal ne démontre assurément pas sa qualité. Mais, chaque fois qu’il exprime un courant d’opinion, une philosophie — pas une « marque », un produit —, son affaiblissement suggère qu’il cesse d’être utile, qu’on n’a plus besoin de lui. Huit ans plus tard, cette menace est levée.

Pour Benoît Brésille, les grandes métropoles affichent de suspects bons sentiments : « De Paris à Londres, de Sydney à Montréal, d’Amsterdam à New York, toutes les métropoles se veulent dynamiques, inclusives, innovantes, durables, créatives, connectées… Ainsi espèrent-elles attirer des « talents », ces jeunes diplômés à fort pouvoir d’achat qui, comme à Seattle, font le bonheur des entreprises et des promoteurs immobiliers. »

Pour Sébastien Bauer, « La crise catalane est née à Madrid : Opposés sur la question de l’indépendance catalane, les dirigeants politiques au pouvoir à Barcelone et à Madrid se ressemblent : ils estiment que leur intransigeance fera oublier les scandales de corruption qui les accablent. Un bouillon de culture propice aux surenchères, y compris répressives. Imaginer une solution au conflit implique au contraire de remonter aux racines de la crise. »

Bernard Friot nous invite à en finir avec les luttes défensives : Les conquêtes sociales de ces deux derniers siècles présentent partout la même limitation : si, en principe, les peuples décident de leur destin politique, il n’est pas question de souveraineté populaire sur l’économie. Remédier à cette hémiplégie n’implique-t-il pas pour les progressistes un changement de perspective : non plus seulement s’opposer aux réformes, mais promouvoir un autre modèle ? »

L’africapitalisme existe, Olivier Piot l’a rencontré : « Avec la croissance économique, des fortunes se sont constituées dans le secteur privé africain, notamment anglophone. Confortant le mythe libéral de la réussite individuelle, les acteurs du « black business » prétendent réduire les abyssales inégalités du continent par la philanthropie. De l’Éthiopie à l’Afrique du Sud, ils associent affaires et charité, prêtant au capitalisme des vertus dont il n’a pas fait la démonstration ailleurs. »

Laura Raim estime que l’émancipation des israéliennes est contrariée : « Malgré des avancées législatives durant les années 1990, les inégalités entre hommes et femmes demeurent importantes en Israël. Le machisme, le militarisme imposé à la société depuis la naissance de l’État, l’obsession de la sécurité ainsi que le poids des contraintes religieuses sont autant de facteurs qui compliquent le combat pour l’émancipation féminine. »

Pour Sophie Boutboul, le viol est de moins en moins un crime en France : « En France, de 60 à 80 % des affaires de viol poursuivies ne sont pas examinées par les cours d’assises, où sont jugés les crimes, mais par les tribunaux correctionnels, comme des délits. Une pratique nécessaire pour lutter contre l’encombrement des assises, selon le ministère de la justice. Mais qui n’est pas sans incidence pour les victimes et pour le traitement de la récidive. »

Pour Claire Lévy-Vroélant, le gouvernement a lancé Une torpille contre l’habitat social : « Des milliers de personnes ont manifesté partout en France, le 14 octobre, pour s’opposer à la réforme des aides personnalisées au logement (APL) prévue par le gouvernement de M. Édouard Philippe. En se focalisant sur le système des APL, le débat occulte le second pilier des politiques d’habitation : les aides à la pierre, qui ont prouvé leur efficacité pour combattre le logement cher. »

Pour Paul Dirckx, en Belgique, le poker menteur est une méthode de gouvernement : « Depuis qu’ils détiennent les principaux leviers du pouvoir, les nationalistes flamands ont mis en sourdine leur projet de scission de la Belgique, peu populaire dans l’opinion. Préférant parler de « confédéralisme », ils ont élaboré une nouvelle stratégie : démanteler l’État de l’intérieur en arguant de la nécessité d’économies budgétaires et semer la zizanie dans le camp francophone. »

Damien Lefauconnier voit en Metsamor, un Tchernobyl en puissance : « Les catastrophes de Tchernobyl en 1986 puis de Fukushima en 2011 ont brisé l’élan de l’énergie atomique en faisant apparaître ses dangers au grand public. Mais, si la sortie du nucléaire s’avère incertaine pour les États riches, elle apparaît encore plus délicate dans les pays en difficulté. Même quand, comme en Arménie, des réacteurs se trouvent dans une zone sismique… »

En Inde, les domestiques se révoltent (Julien Brygo) : « Elles travaillent pour les milliardaires mais aussi pour les couches moyennes naissantes. Issues des campagnes pauvres, privées de droits réels, les domestiques sont de plus en plus nombreuses en Inde. Rares sont les révoltes. Pourtant, un soir de juillet, elles ont osé affronter leurs employeurs… Depuis, certains suggèrent de passer par des sociétés de services, plus sûres. »

Le mariage pour tous débarque en Asie (Eva Aing et Alice Hérait ) : « Île de facto indépendante depuis 1949, simple « province de la Chine » selon les autorités de Pékin, Taïwan devrait – une première en Asie – légaliser l’union des couples de même sexe d’ici 2019. Mais, à l’instar de la France de 2012, la population est fortement divisée sur le sujet. La société reste attachée à des traditions culturelles confucéennes telles que la piété filiale et la stabilité de la famille. »

Au Mexique, la presse demeure au service d’une tyrannie invisible (Benjamin Fernandez) : « Historiquement cantonnés au rôle d’exécutants de la propagande gouvernementale, les grands groupes médiatiques mexicains se sont peu à peu mis à faire ou à défaire les puissants. Porté au pouvoir en 2012 par les télévisions privées, le président Enrique Peña Nieto s’était engagé à limiter les monopoles des géants de la communication. Une promesse restée lettre morte. »

Pour Hicham Alaoui, L’espérance est toujours vivante d’une unité arabe : « Sans chercher à faire revivre le projet panarabe, les États du Machrek et du Maghreb peuvent surmonter leurs divisions politiques en pariant sur plus de coopération économique et sociale. Un tel rapprochement, qui dépend d’une plus grande démocratisation des régimes en place, contribuerait à renforcer le dynamisme d’une région encore en proie à d’importants problèmes de développement. »

Pour Olivier Barbarant, l’édition propose de la guimauve pour la jeunesse : « Éduquer, instruire, divertir : il y a toujours eu des livres à destination de la jeunesse qui ont, selon les valeurs propres à leurs destinataires, choisi entre ces objectifs. Aujourd’hui, tout un pan de cette littérature entreprend de diffuser un conformisme tiède, incitant à l’acquiescement aux normes tout en cherchant à intégrer le précieux marché des programmes scolaires. »

Peut-on tout dire, demande David Cole : « Le règne de M. Donald Trump ne doit-il pas nous inciter à réécrire le premier amendement de la Constitution américaine, qui garantit une totale liberté d’expression ? Les démonstrations de force des groupes racistes ou néonazis aux États-Unis ne doivent-elles pas nous conduire à limiter la liberté d’expression lorsque celle-ci sert d’alibi à des mots d’ordre de haine, à des actes de violence et à la remise en cause du principe d’égalité ? Après la tragique éruption de violence survenue lors d’un attroupement de suprémacistes blancs à Charlottesville, en Virginie, le 12 août dernier, ces questions sont revenues brutalement à l’ordre du jour. Beaucoup se sont étonnés que l’Union américaine pour les libertés civiles (ACLU), dont je suis le directeur juridique, ait soutenu l’organisateur de ce rassemblement, M. Jason Kessler, quand il a contesté la décision de la mairie de Charlottesville de lui retirer son autorisation de manifester. Quelle mouche nous avait donc piqués ? Les autorités proposaient de déplacer le rassemblement à un kilomètre et demi du lieu initialement prévu – l’Emancipation Park, aux pieds de la statue du général sudiste Robert E. Lee, menacée de déboulonnage et que M. Kessler et ses partisans entendaient protéger –, mais sans préciser en quoi le maintien de l’ordre public serait mieux assuré là-bas plutôt qu’ici. Comme le font depuis près d’un siècle les antennes locales de l’ACLU pour des milliers de défilés, le bureau de Virginie a fourni à M. Kessler une aide juridique afin qu’il obtienne l’autorisation de manifester. Les violences sanglantes qui s’en sont ensuivies justifient-elles qu’on restreigne le périmètre de la liberté d’expression ? »

Bernard GENSANE

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