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Qu’est devenue celle que j’ai connue ? (Réponse à Zoé Valdés)

Dans un langage châtié, vous en appelez (encore ! ) à « une bombe pour la tête de Castro 1, deux bombes pour Castro 2 ». Combien vous en faut-il exactement pour mettre à feu et à sang La Havane « votre amour » et la petite île qui vous a vue naître ? Vous devriez ranger votre arsenal : en France, les appels au meurtre et au terrorisme sont punis par la loi. Mon pays entretient des relations diplomatiques avec Cuba et son Président était dernièrement notre invité.

Cependant, vous avez raison, Madame, je ne vous connais plus.

La direction du Grand Soir a halluciné devant le contenu et la qualité littéraire du message envoyé à la rédaction. Avant publication, il fallait vérifier l’identité de l’auteur de ce monument digne des annales de la littérature. Ce ne pouvait être vous...Vous voyez, encore des doutes... Comme vous aviez transmis votre numéro, je vous ai téléphoné. Après votre leucorrhée, « comunista castrista.... Comunista mentirosa.... pagada por Cuba coopéracion.....etc etc », je n’ai plus aucun doute et finit par douter de vous avoir véritablement connue.

Celle que j’ai connue dans les années 80 à La Havane a été aspirée dans l’un de ces trous noirs dont nul ne revient.

Sur la plage du Comodoro, elle écoutait les deux correspondantes de L’Unita et de L’Humanité lui raconter leurs reportages au Salvador, au Nicaragua, à Cité Carton et Cité Gélatine en Haïti, parmi les gamins des rues de Bogota. Elle nous racontait à son tour les séjours en Floride dans sa famille, son dégoût de ce système, de la drogue toujours présente là bas. Elle en ramenait des tee-shirts pour les amies.

A la maison de l’Huma à Playa, celle de L’Unita dans le Vedado, nos conversations duraient : politique, littérature, et les petites histoires de tous les jours.

Qu’est-elle devenue celle qui avait aimé « Cremada » et la révolte des pierres catalanes ? Qui m’avait confié un recueil de Nouvelles dactylographiées que je m’étais engagée à traduire ?

Qu’est-elle devenue celle qui, très fière d’avoir remporté un concours de scénarios en Espagne, m’invitait à célébrer l’événement au Café de la Paix, (juste avant un rendez-vous avec Dominique Sangla), racontait les privations du début de « la période spéciale » et disait : « S’ils croient qu’ils vont nous mettre à genoux.... »

Qu’est-elle devenue celle qui, invitée avec d’autres poétesses du continent par la Maison de l’Amérique latine, recueillait les applaudissement en se présentant sur le ton du défi : « Soy Cubana ! Vivo en Cuba ! ».

Qu’est-elle devenue celle qui, invitée par toutes les amies (Alessandra, Jeanne, Soledad, Isadora) et les amies des amies (Sylvie, Nicole) était arrivée à la maison de l’avenue Bosquet annonçant ses démarches pour venir vivre à Paris dès l’hiver suivant. Son bébé, elle-même, son mari, auraient besoin de vêtements chauds...On bourrait sa valise du retour de cubes de bouillon « Mi mama dice que resuelve ... ». Cela aide, disait sa maman.

Prenez garde aux contre-sens, Madame et relisez : je ne vous ai pas traitée de ce que vous dites. Quand après les avoir toutes examinées et rejetées faute de substance, on cherchait encore une raison à votre revirement, nous avons imaginé les explications les plus folles et sans doute les plus ridicules. Cela ne nous tuera pas car voyez-vous si nous sommes plusieurs à avoir d’abord refusé l’évidence c’est que nous avions hélas, aimé quelqu’un qui a bel et bien disparu. Riez bien de nous si cela vous chante.

Non, en effet, je ne vous connais pas Madame. J’ai connu autrefois une poétesse lumineuse. En souvenir d’elle, un conseil d’écrivaine à écrivaine : maintenant que mon pays vous a si généreusement faite Chevalière des Arts et Lettres, soignez votre prose et votre style. Et pour cela, relisez Victor Hugo. La dernière phrase que je vous adresse, je la lui emprunte : « Sur le Racine mort, le campistron pullule ».

Maité Pinero

PS : Le temps du « tête-à-tête » est révolu. Quant à la menace contenue dans l’évocation d’éventuelles rencontres à Paris ou à Cuba, vous n’êtes pas sans savoir que j’en ai vu bien d’autres ; Même si ma seule arme est une plume, labellisée L’Humanité, qui n’a jamais été à vendre au plus offrant.

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« (...) on a accusé les communistes de vouloir abolir la patrie, la nationalité. Les ouvriers n’ont pas de patrie. On ne peut leur ravir ce qu’ils n’ont pas. Comme le prolétariat de chaque pays doit en premier lieu conquérir le pouvoir politique, s’ériger en classe dirigeante de la nation, devenir lui-même la nation, il est encore par là national, quoique nullement au sens bourgeois du mot. »

Karl Marx, Friedrich Engels
Manifeste du Parti Communiste (1848)

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