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Fillon, le vieux routier au service du patronat

Ce n’est pas pour des raisons personnelles que notre Fillon national souhaite abolir l’ISF. Son château – que nos médias déjà serviles dénomment « grande maison », à la rigueur « manoir » – étant sa résidence principale, il n’entre pas en compte pour l’ISF. Mais c’est « pour l’emploi » que Fillon veut diminuer le pouvoir d’achat des trois-quarts de la population d’au moins 10%, défonctionnariser la Fonction publique et casser la protection sociale mise en œuvre après la Deuxième Guerre mondiale par le député communiste Ambroise Croizat (et non par le haut fonctionnaire Laroque, comme se plaisent à le faire croire les médias mentionnés ci-dessus).

Cela fait désormais 35 ans que Fillon (dont la seule action subversive aura été de jeter une ampoule lacrymogène dans son collège) a entamé, discrètement mais obstinément, une carrière antisociale. Comme ministre de l’Enseignement supérieur au début des années 90, il avait tenté de donner aux universités leur autonomie pleine et entière (en d’autres termes, les privatiser), ce qu’avait refusé le Conseil constitutionnel. Il réussit son coup comme ministre de la Poste en organisant la fin de son monopole, en transformant cette administration en entreprise publique, mutation achevée par le solférinien Lionel Jospin. En 2002, il est nommé ministre des Affaires sociales du gouvernement Raffarin (Nicole Notat, patronne de la CFDT l’avait chaudement recommandé à ce poste auprès de l’éminence du Poitou). Dans cette fonction, il va « réformer » les retraites (avec la complicité de la CFDT) et « assouplir » la loi sur les 35 heures en modifiant le calcul des heures supplémentaires au détriment des travailleurs.

On ne s’étonnera pas que Fillon soit un admirateur de Thatcher et de Schröder, deux grands démolisseurs des systèmes sociaux de leurs pays. Il approuva toutes les mesures réactionnaires prises dans les années 90, comme les ordonnances Balladur : augmentation de 150 à 160 trimestres pour avoir droit à une pension à taux plein, calcul de la retraite sur les 25 et non plus 10 meilleures années, décrochage des revalorisations à partir de l’indice des prix à la consommation au lieu des salaires.

Il veut aujourd’hui « sauver la sécurité sociale » alors que celle-ci n’est pas du tout en péril. Il veut revenir au système d’avant la Deuxième Guerre mondiale quand dominaient les assurances privées, quand – donc – seuls les riches pouvaient se soigner correctement, quand le Conseil National de la Résistance n’avait pas encore pensé la solidarité entre assurés sociaux et un système de retraite par répartition.

Rappelons que l’universalité de la sécurité sociale, voulue par Ambroise Croizat, ne fut jamais appliquée à cause de l’hostilité des hobereaux, des gros agriculteurs, des commerçants et des artisans qui, pour ces derniers, se plaindraient trente ans plus tard de ne toucher que des retraites de misère.

Il est parfaitement logique que, dans le discours de Fillon, l’attaque contre la sécurité sociale occupe la première place : ce qui fait la spécificité progressiste de la société française tourne autour de la sécu, de la solidarité en synchronie et en diachronie. Le système de sécu nationale deviendrait un « panier » dont seraient même exclus les soins dentaires ou l’hypertension, maladies de « confort ».

La sécurité social de Croizat est un bloc que Fillon et ses acolytes veulent pulvériser pour déboucher sur un système minimal à plusieurs vitesses. Déjà, sous les Solfériniens, 35% au moins de malades renoncent aujourd’hui à des soins professionnels. Il faut dire que depuis le temps que les malades de condition modeste sont « responsabilisés » … beaucoup moins que les entreprises pharmaceutiques, il est vrai ! L’objectif ultime de la droite fillonesque est de libérer les entreprises des contributions sociales en remplaçant les contributions patronales par une « TVA sociale » pour la majorité de la population pendant que les riches bénéficieront des meilleures assurances privées.

Il n’est pas certain que la majorité des travailleurs, obligés de s’escrimer jusqu’à 70 ans pour toucher une retraite à taux plein, arrivera en bonne santé à cet âge dès lors canonique.

Avec Fillon, nous serons désormais dans un système totalement inégalitaire que même des libéraux de droite pur sucre du style Madelin dénoncent dans un des organes préférés de la bourgeoisie française : « C’est du Robin des bois à l’envers : prendre de l’argent aux pauvres pour le donner aux riches ! ».

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