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Lettre à la France (par des étudiants de Sciences Po)

Le monde est en constante évolution. Notre peuple, vivant autrefois dans la violence et l’isolement, a muté jusqu’à devenir une civilisation consciente et solidaire. Cette transformation s’est effectuée par spasmes brusques et contractions spectaculaires. Cependant, à mesure qu’approche une telle avancée, des forces profondément enracinées surgissent, tentant d’étouffer le mouvement. Ces forces sont attractives, car elles rassurent : rester dans le monde ancien et familier, préférer la stagnation voire le retour en arrière semble plus raisonnable. Ces forces sont puissantes, car majoritaires, elles nous confinent dans une bulle de monotonie, de rituels inconscients, et c’est alors que l’humanité se sclérose, se meurt dans sa vieille peau sans avoir tenté la moindre éclosion.

Ces forces, nous devons les combattre. D’abord, il s’agit de les cerner, en élargissant son champ de vision dans le temps et l’espace. Comment a-t-on mis dans les esprits que travailler plus pour gagner davantage pouvait être un progrès, quand la tendance historique admet une réduction du temps de travail, ceci pour atteindre l’objectif premier, depuis longtemps oublié : le bonheur commun ? Comment peut-on brandir les valeurs d’égalité et de liberté, quand les autorités s’efforcent d’interdire nos rassemblements et en finissent avec l’égalité du temps de parole lors des élections ? Le dictat de la pensée est total : nul n’a aujourd’hui le droit de remettre en cause les termes vides de sens que sont démocratie, république, sécurité, que l’on nous brandit au nez à chaque occasion. Le système occidental, capitaliste, démocratique, est aussi arrogant, inégalitaire, impérialiste.

Comment le pouvoir en place peut-il fustiger les casseurs, quand bien même c’est lui, et non notre mouvement, qui les a créés ? Ces casseurs, ce sont des jeunes que les gouvernements successifs ont brisés, et les voilà seuls, armés de leur désespoir, de leur ennui et de leur haine, prêts à lutter contre les 150 000 fantassins déshumanisés (police, CRS, BAC...) envoyés par l’Etat pour assurer sa propre survie. Ces hommes ne sont pas nos ennemis. Ils ont des femmes, des amis, des frères, parfois des enfants qui se joignent chaque jour et par milliers à notre avancée : le jour venu, ils ne pourront les frapper. Ces débordements, dont on entend parler chaque jour, sont du fait des politiques, ils sont la preuve de leur échec, et le signe de leur fin proche.

Car voilà le peuple de France, peuple révolutionnaire, prêt à reprendre sa juste place. Les réformes seront lourdes mais fermes, ambitieuses mais efficaces, elles demanderont du courage, car nous nous retrouverons dans une position avant-gardiste que la France n’a plus l’habitude d’occuper. Mais nous nous retrousserons les manches, fiers et solidaires. C’est dans la difficulté que l’on obtient les plus belles victoires, c’est dans la souffrance que l’on écrit l’histoire.

Un Conseil Populaire sera érigé, dont les membres, tirés au sort, auront un droit de veto et de proposition envers l’Assemblée. Le Président doit être élu pour un mandat non reconductible de sept ans. La démocratie numérique, l’essor de propositions et de votes en ligne, doit être encouragé. Enfin, les politiciens en fonction ne pourront plus intervenir dans les médias : ils seront jugés sur leurs résultats plutôt que sur leurs paroles, se concentrant sur leur travail, et laisseront aux experts le soin de commenter leurs décisions et d’éduquer la population. Ces mesures permettront une déprofessionnalisation de la politique, et une épuration de la démocratie, depuis longtemps trahie par les hypocrites et les opportunistes.

Enfin, la société devra réaffirmer son souhait de diriger ses citoyens vers le bonheur commun. La semaine de quatre jours permettrait une réduction évidente du chômage, une augmentation de la consommation et des loisirs, et surtout une meilleure qualité de vie. Des mesures écologiques drastiques seront enfin mises en place. Des excuses seront faites aux banlieues, créées pour soutenir la France industrielle d’une main d’œuvre bon marché puis laissées à l’abandon, excuses accompagnées de réelles mesures d’assainissement et de développement économique.

Ils nous pensent faibles et apathiques, recroquevillés toute la journée devant nos écrans d’ordinateur, incapable de lever le poing. Rappelons-leur la puissance du peuple souverain et indomptable, laissons-nous rêver et tenter l’impossible. Regardons-nous dans la rue comme des frères, les larmes aux yeux devant la beauté de cette aventure. Car ensemble, tout est possible. La seule difficulté, l’unique, c’est d’y croire. Alors croyons-y, bordel !

Ils nous disaient : Soyez esclaves !
Nous avons dit : Soyons soldats !

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« A toute époque, les idées de la classe dominante sont les idées dominantes : autrement dit, la classe qui est la puissance matérielle dominante de la société est en même temps la puissance spirituelle dominante. La classe qui dispose des moyens de la production matérielle dispose en même temps, de ce fait, des moyens de la production intellectuelle, si bien qu’en général, elle exerce son pouvoir sur les idées de ceux à qui ces moyens font défaut. Les pensées dominantes ne sont rien d’autre que l’expression en idées des conditions matérielles dominantes, ce sont ces conditions conçues comme idées, donc l’expression des rapports sociaux qui font justement d’une seule classe la classe dominante, donc les idées de sa suprématie. »

Karl Marx

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