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Robert Badinter, ou la peine de mort pour le Code du travail

Il est juste de le rappeler, l’avocat socialiste Robert Badinter a joué un rôle majeur dans l’abolition de la peine de mort en France ; il n’en est que plus injuste d’oublier que le premier homme d’Etat à exiger l’abolition fut... Maximilien Robespierre. Prenant de loin le relais de l’Incorruptible assassiné, la Commune de Paris décida en 1871 d’envoyer la guillotine à la casse.

Hélas, dans les deux cas, l’abolition, décidée en son principe, ne put avoir de suite effective et immédiate : en 1793, l’invasion étrangère conjuguée à l’insurrection vendéenne contraignit le Comité de salut public à mettre en pratique dans toute sa rigueur la devise révolutionnaire aujourd’hui bien édulcorée « liberté, égalité, fraternité ou la mort ». Quant aux généreux Communards, assiégés par Bismarck et promis au par Thiers à l’extermination (laquelle fut mise en pratique lors de la « Semaine sanglante »), ils n’eurent d’autre choix que de prendre les armes face aux affameurs et aux massacreurs de Versailles...

Certes, depuis ses envolées parlementaires de 1981, Robert Badinter n’a pas brillé par ses positions progressistes : membre du Conseil constitutionnel, il a entériné sans états d’âme, non seulement la cassation des très rares lois vaguement favorables aux travailleurs votées sous Sarko ou sous Hollande ; il a même scandaleusement validé, comme ses pairs, le principe antinational selon lequel les traités européens priment sur le droit français... Constitution comprise. En conséquence de quoi, le Conseil constitutionnel n’examine plus que les lois d’origine française et il ferme royalement les yeux sur les 80% de textes restants qui ne sont que la « transposition » en droit français des directives supranationales et néolibérales émanant de Bruxelles...

N’empêche, Badinter, et surtout son épouse, la philosophe Elisabeth Badinter, restaient encore, à tort ou à raison, des figures de la « gauche morale », à défaut d’avoir jamais brillé sur le terrain principal, celui du conflit capital/travail. Le moins qu’on puisse dire est d’ailleurs que Badinter n’a jamais brillé en tant que spécialiste du Droit du travail...

C’est pourquoi, alors que Valls prend de front la vraie gauche sur toute une série de sujets (état d’urgence à rallonge, loi intrusive sur le renseignement, casse du Code du travail, de la durée légale du travail, des statuts publics, de la justice prud’homale, du collège, etc.), alors que la « justice » s’acharne sur les ouvriers CGT de Goodyear ou d’Air France, c’est une nouvelle ignominie morale de la part de MM. Hollande/Valls que d’avoir obtenu de Robert Badinter, bientôt âgé de 88 ans, qu’il couvre de son nom encore prestigieux la casse du Code du travail exigée par le MEDEF et parrainée par « Bercy-Macron ».

Ainsi le vieil homme sortira-t-il de la vie politique, non sur son aura de 1981, mais sur une saloperie antisociale ; oubliés Voltaire et Hugo, Badinter finira en une sorte d’Ambroise Croizat à l’envers...

Bravo donc, François Hollande, pour votre nouveau « coup politique » si bien ajusté contre la vraie gauche. Après tout, quand on ose invoquer Jaurès, le Front populaire ou le CNR pour « couvrir » une politique social-impérialiste, social-maastrichtienne et social-liberticide (sociale en paroles, impérialiste, maastrichtienne et liberticide en fait), cela ne coûte pas cher que de compromettre de son vivant un vieil homme qui méritait peut-être de terminer moins salement sa carrière de défenseur des droits

Floreal

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