La délégation syrienne déplore que certains des États membres ayant approuvé la « Responsabilité de protéger », telle qu’elle a été définie au Sommet mondial de 2005 [2][3], l’aient transformée en un nouvel instrument pouvant justifier leur ingérence dans les affaires d’autres pays pour servir leurs intérêts étriqués et égoïstes, ce qui l’a décrédibilisée comme tant d’autres idées innovantes censées servir la morale et l’humanité.
Avec la délégation de mon pays, nous insistons sur les points suivants :
- Premièrement : la responsabilité de protéger les populations contre les crimes internationaux les plus graves, incombe au premier chef à l’État concerné.
- Deuxièmement : son but est de renforcer la souveraineté nationale, non de la saper ; l’idée même de cette « Responsabilité de protéger » n’ayant pas été proposée pour autoriser quiconque, au niveau international, à imposer ses exigences et ses solutions à d’autres états membres afin de modifier leurs régimes de gouvernance par invasion militaire, occupation territoriale, soutien de groupes terroristes armés, qualifiés ici d’« éléments armés non étatiques ».
- Troisièmement : il est inacceptable de politiser la question de la protection des civils de manière arbitraire et d’exploiter leurs souffrances pour légitimer des actions contraires à la Charte et aux résolutions des Nations Unies.
Monsieur le Président,
Si nous revenons sur le mode d’application de cette « Responsabilité de protéger » au cours des dix dernières années, nous ne pouvons qu’en constater la partialité et la politisation scandaleuses, associées à une indulgence systématique à l’égard des crimes abominables commis par les forces d’occupation américano-britanniques en Irak, par les autorités israéliennes contre le peuple des territoires arabes occupés en Palestine et dans le Golan syrien, par les forces d’intervention étrangères en Libye sous le prétexte de la protection des civils, et par le régime saoudien contre les civils yéménites.
Ces pratiques ont mis en évidence son effet contraire quant à la protection escomptée, ainsi que son exploitation comme prétexte de tueries « humanitaires » visant à renverser des gouvernements, à changer des régimes et à transformer des États membres de cette Organisation internationale en États faillis et en centres d’exportation du terrorisme, comme c’est le cas de la Libye d’aujourd’hui.
Concernant la Libye, je salue le fait que, dans son rapport, le Secrétaire général ait reconnu les conséquences de la mauvaise application de cette « Responsabilité de protéger », bien que cette reconnaissance soit tardive.
Ce qui n’est pas le cas pour mon pays, la Syrie, puisque les rapports du Secrétaire général évitent encore aujourd’hui d’aborder le considérable soutien, toujours consenti, au gouvernement légitime syrien par des États membres que vous connaissez tous, en lui expédiant des dizaines de milliers de combattants terroristes étrangers en provenance de plus d’une centaine de pays, pour qu’ils commettent les crimes les plus odieux et les plus horribles contre ses citoyens et travaillent à la destruction de ses institutions et de ses installations publiques. Certes, ce n’est pas là le soutien auquel s’attendaient les chefs d’États et de gouvernements lors du sommet de 2005.
Ce qui n’est pas non plus le cas lorsque les rapports du Secrétaire général continuent à ignorer l’obstruction par certains gouvernements d’une solution politique et pacifique de la crise syrienne, ainsi que leurs efforts pour la prolonger et l’attiser ; ce qui ajoute à la souffrance des Syriens et menace la stabilité de la région et du monde.
Pour terminer, Monsieur le Président,
Voilà que les citoyens de mon pays payent le prix des mauvaises politiques de ladite communauté internationale. Les voilà qui sont devenus les proies des bandes de trafiquants et de la traite des êtres humains. Ils risquent leur vie sur les embarcations de la mort pour fuir la cruauté des organisations terroristes, commandées et soutenues à un niveau international, et pour échapper aux mesures coercitives unilatérales décrétées par certains États membres contre mon pays, les privant des moyens de vivre et de gagner leur vie.
Et voilà que nombre de pays, qui se vantent de leur attachement à la « Responsabilité de protéger » et aux droits humains, leur ferment leurs portes, certains ne prenant même pas la peine de les sauver, les abandonnant à leur triste sort en mer Méditerranée.
Ce qui, une fois de plus, nous pousse à affirmer que les problèmes qui entravent le travail de l’Organisation des Nations Unies ne sont pas dus à des défauts de procédures ou de concepts, mais sont en rapport avec la politisation, le parti pris et les deux poids deux mesures, désormais les marques dominantes de cette organisation.
Merci, Monsieur le Président.
Dr Bachar al-Jaafari
Délégué permanent de la Syrie auprès des Nations unies
08/09/2015
Source : Vidéo Al-Ikhbariya
https://www.youtube.com/watch?v=MnhGsw7ojZk&feature=youtu.be
Transcription et traduction par Mouna Alno-Nakhal