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L’endurance du déchet

Dix personnes meurent accidentellement lors du tournage d’une émission de téléréalité.

« Le barbare c’est d’abord celui qui croit à la barbarie ». Gageons qu’à cette barbarie, les producteurs de « Dropped », ils y croient. Et s’il en est ainsi, nous sommes d’emblée justifiés à vouloir saisir ce qu’avec un tel concept, ils essaient, certainement, mais maladroitement, de penser. Les choses sont simples : il s’agit de lâcher des sportifs — que leur endurance a rendus célèbres, de les lâcher donc dans un milieu hostile où ils auront à affronter l’inconditionnelle question de leur survie : à savoir recharger leur téléphone portable et passer un coup de fil au producteur de ladite émission de téléréalité. Soit dit en passant ce que la stylistique anglophone épingle sous le vocable de « name-dropping » : un lâcher de noms, soit un argument d’autorité qui consiste, on l’aura compris, à invoquer un nom célèbre en lieu et place de la garantie d’un acte ou d’un discours — ce que nous-mêmes avons fait en rappelant en ouverture de ce texte un extrait de Race et Histoire de Lévi-Strauss...

Le point de chute, donc, était pour l’occasion un pays d’une Amérique qui fut pré-colombienne. Cette Amérique jadis perçue par les Européens comme une limite extrême du monde civilisé était toute choisie pour devenir le studio où allait se jouer l’expérience extrême de la limite. Et le sort ironique n’en a pas décidé autrement. La téléréalité (qui, bien entendue, se tient à bonne distance de la réalité) a fait l’expérience un instant du réel de la mort. Elle y a touché à ce réel — par mal heurt, elle l’a rencontré son objet. Car c’est bien la mort qui est l’enjeu de la survie, et non comme on le croirait, à trop vite penser, la vie. En témoignent ceux qui, d’être contraints à survivre, endurent la mort, aux abords de la civilisation, rejetés au long des voies périphériques ou des autoroutes qui bordent capitales et autres mégalopoles. Euphémisons encore : habitats informels, surpeuplement, manque d’hygiène, insécurité, insalubrité, défaut de jouissance, défaut de puissance... De ceux-là qui y vivent dans ces bidonvilles, nous pouvons dire qu’ils en savent quelque chose de l’endurance du déchet.

Point n’est besoin de l’écouter pour entendre déjà l’éloge funèbre qu’on ne manquera pas de faire. Liberté, compétitivité, dépassement de soi, engagement, accomplissement, valeur, exemple et république seront les maîtres mots d’un discours public dont la péroraison rappellera la grandeur d’une France endeuillée, mais par là même unifiée. Il s’y agira avant tout — empruntons à Nicole Loraux — de « politiser la mort », en proposant aux rescapés des modèles de vie, comprenons : des modèles de mort. C’est là un des avantages de la mort, elle autorise les idéalisations. Si nous ne craignions l’infamie du name-dropping, nous lâcherions, pour finir, un troisième et dernier nom, celui de François Châtelet. Et avec lui nous avancerions que « la question que ce texte pose, contre la spéculation, est celle-ci : que signifie tué (ici et maintenant ; comment ? pourquoi ?) ».

Ivan CHAUMEILLE

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PALESTINE
Noam CHOMSKY, Ilan PAPPE
La question palestinienne est représentative de ce qui ne tourne pas rond dans le monde. Le rôle des États occidentaux et l’accord tacite de diverses institutions en font un cas très particulier de la politique actuelle. Les trois dernières offensives militaires d’envergure menées par Israël contre Gaza, entre 2008 et 2014, ont fait des milliers de morts du côté palestinien et donné lieu à de nouvelles expropriations de terres en Cisjordanie. Ces guerres de conquête israélienne ont (…)
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"Au Salvador, les escadrons de la mort ne tuent pas simplement les gens. On les décapite, on place leurs têtes sur des piques et on garnit ainsi le paysage. La police salvadorienne ne tuait pas seulement les hommes, elle coupait leurs parties génitales et les fourrait dans leurs bouches. Non seulement la Garde nationale violait les femmes salvadoriennes, mais elle arrachait leur utérus et leur en recouvrait le visage. Il ne suffisait pas d’assassiner leurs enfants, on les accrochait à des barbelés jusqu’à ce que la chair se sépare des os, et les parents étaient forcés de garder."

Daniel Santiago,prêtre salvadorien
cité dans "What Uncle Sam Really Wants", Noam Chomsky, 1993

Commandos supervisés par Steve Casteel, ancien fonctionnaire de la DEA qui fut ensuite envoyé en Irak pour recommencer le travail.

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