Paul Celan (1920-1970) est un poète et traducteur roumain de langue allemande. Il était né Paul Pessach Antschel au sein d’une famille juive allemande à Cernauti en Roumanie. Il fut naturalisé français en 1955. Son nom d’écrivain est l’anagramme de son patronyme Ancel (en roumain). Il est peut être le plus grand poète de langue allemande de l’après-guerre. Son œuvre est totalement novatrice.
Après un voyage en Israël, Paul Celan est mort à Paris, probablement après s’être jeté du pont Mirabeau.
La continuation, autrement, du crime contre l’humanité.
COURONNÉ DEHORS,
craché dehors dans la nuit.
Sous quelles
étoiles ! Seul
l’argent du coeur-marteau battu à gris. Et
la Chevelure de Bérénice, ici aussi, – j’ai tressé
,
Je tresse, je détresse,
Je tresse.
Gouffre de bleu, en toi
je repousse l’or. Avec lui aussi,celui
dissipé chez les catins et les filles,
je viens et je viens.
Vers toi,
aimée.
Aussi avec blasphème et prière. Aussi avec
chacune, au-dessus de moi,
des massues vrombissantes : elles aussi
fondues en un, elles aussi
phallique nouée vers toi,
Gerbe-et-Parole.
Avec des noms, imbibés
de tout exil.
Avec noms et semences,
avec des noms, plongés
dans tous
les calices qui débordent
de ton sang royal, homme, – dans tous
les calices de la grande
rose du ghetto, depuis laquelle
tu nous regardes, immortel
de tant de mots sur les chemins des matins mortes.
(Et nous chantions la Varsovienne.
Du jonc aux lèvres, Pétrarque.
Aux oreilles de la toundra.)
Et monte une terre, la nôtre,
celle-ci.
Et nous n’envoyons
aucun des nôtres en bas,
vers toi,
Babel.
(traduction de Martine Broda)
Le poème en allemand