Cher(e)s ami(e)s, Cher(e)s camarades,
Nous sommes réunis aujourd’hui pour rendre hommage, d’une part aux martyrs soviétiques morts en France entre 1940 et 1945, et d’autre part aux soldats des troupes coloniales morts pour la libération de la France.
Plus largement, venir ici à Haubourdin le 8 mai, chaque année depuis une douzaine d’années, c’est notre façon à nous, Coordination Communiste pour la reconstruction d’un parti communiste révolutionnaire, de célébrer le 8 mai 1945, date de la capitulation finale de l’Allemagne nazie, date de la victoire des peuples contre le nazisme. Et cet hommage, cette année, prend un relief particulier, non seulement parce qu’à l’heure du 70ème anniversaire du « débarquement de Normandie », nous allons entendre chanter les louanges des Etats-Unis d’Amérique…. et nos médias vont oublier le rôle décisif joué par l’URSS dans la victoire ; mais aussi bien sûr par rapport à l’actualité en Ukraine aujourd’hui où le fascisme relève la tête, avec l’appui des Etats-Unis d’Amérique et de l’Union Européenne, interdisant même la commémoration de la Victoire de mai 1945.
A Haubourdin, dans ce cimetière militaire, sont rassemblés plus de 200 tombes de partisans soviétiques morts sur le sol français pour la défaite du nazisme et la libération de la France de l’occupation.
Qui étaient ces citoyens soviétiques ?
Pour l’essentiel, il s’agissait de prisonniers de guerre, militaires mais aussi civils, arrêtés par les Allemands sur le front de l’Est et transférés ici en France pour servir de main d’œuvre et participer à la construction du Mur de l’Atlantique ou à d’autres ouvrages défensifs. Il y avait aussi parmi eux des immigrés russes antifascistes, qui travaillaient notamment dans les mines de notre région et qui, dès mai 1941, participèrent à la grande grève des mineurs, acte massif de la résistance de la classe ouvrière.
Ils participèrent directement à la Résistance intérieure, organisés pour l’essentiel dans deux organismes : d’une part l’Union antifasciste des patriotes russes, centrée sur l’immigration russe en France ; d’autre part le Comité Central des Prisonniers de Guerre Soviétiques.
Il faut rappeler que les premières organisations clandestines des prisonniers de guerre soviétique furent créées au début d’octobre 1942 dans le camp de Beaumont-en-Artois dans le Pas-de-Calais. L’un des héros les plus connus dans notre région, c’est le lieutenant Vassyl Poryk, qui dirigera un groupe de partisans soviétiques FTP dans le Bassin Minier. L’activité pratique de ces résistants soviétiques consistait à organiser des actes de sabotages et de diversion dans les mines et à mener le travail de propagande et d’agitation parmi les prisonniers des camps en diffusant les communiqués et autres informations venant de l’Union Soviétique.
Rappelons qu’à la dernière étape de la libération de la France, jusque 10 000 Soviétiques formaient 55 détachements, sans compter les centaines de soviétiques intégrés dans des détachements soviéto-français ou internationaux. Dans le Nord-Pas-de-Calais, 10 détachements soviétiques ont combattu les occupants.
Ces héros ont contribué à notre libération. Ils ont été l’expression vivante de l’alliance libre des peuples libres qu’a signifiée l’alliance antifasciste contre le nazisme.
Chers amis, Chers camarades,
Rendre hommage à ces partisans soviétiques morts en France, c’est aussi, à travers eux, rendre hommage à l’URSS, qui a perdu 25 millions de ses enfants dans cette grande boucherie de la deuxième guerre mondiale.
En cette année du 70ème anniversaire du débarquement de Normandie, il nous faut rappeler ici quelques vérités montrant l’apport décisif de l’Armée Rouge dans la victoire contre le nazisme.
Au final, sur 783 divisions allemandes ayant participé aux différents fronts de la guerre, 670 ont été détruites par l’Armée Rouge. 75% des avions, des pièces d’artillerie, des blindés allemands ont été détruits par l’Armée Rouge. 80% des victimes allemands l’ont été sur le front germano-soviétique.
C’est l’Armée Rouge qui a brisé l’armée nazie et qui a fourni l’effort principal pour la libération de l’Europe.
Bien sûr le débarquement de Normandie a joué son rôle – il s’agissait de ce « second front » tant attendu par les Soviétiques pour les soulager un peu de l’effort principal qu’ils supportaient depuis 1941. Mais rappelons qu’encore en juillet 44, après donc le débarquement, l’Allemagne avait mobilisé 60 divisions à l’Ouest en France et en Italie, mais devait encore maintenir 235 divisions contre l’Armée Rouge.
En juin 45, le New York Herald Tribune devait reconnaître : « l’Armée Rouge a été de fait l’armée qui a libéré l’Europe et la moitié de notre planète en ce sens que sans elle, et sans les immenses sacrifices consentis par le peuple russe, la libération du joug cruel du nazisme aurait été tout simplement impossible ».
Nous ne devons pas oublier cette histoire, nous ne pouvons pas l’oublier.
Chers amis, chers camarades,
Nous ne pouvons oublier non plus la réalité de ce qu’a enduré l’Union Soviétique sur son sol, et la réalité des crimes fascistes. Et nous sommes ainsi d’autant plus choqués de voir la réhabilitation ouverte du fascisme en Ukraine aujourd’hui, qui interdit la commémoration du 8 mai (9 mai) et chassent les députés communistes du Parlement, et les crimes organisés par ces bandes, avec le soutien ou le silence complice des Etats-Unis d’Amérique, de l’Union Européenne et de l’essentiel des forces politiques de la droite et de la gauche social-démocrate. Nous pensons en particulier aux victimes du massacre commis dans la Maison des Syndicats à Odessa le vendredi 2 mai dernier, qui a fait un nombre de victimes difficilement chiffrable (et ce d’autant plus que le Procureur en charge de l’enquête est membre de Svoboda le parti fasciste) mais les camarades sur place estiment à près de 300 le nombre de victimes dont plus de 40 morts. Pour eux, je vous demande 1 minute de silence.
Chers amis, chers camarades,
Je veux vous parler de l’Ukraine et des camarades qui poursuivent aujourd’hui le combat antifasciste de leurs aînés.
Svoboda, le parti fasciste ukrainien, dont le congrès en 2004 avait comme invité d’honneur J.M. Le Pen, est un parti qui réclame ouvertement l’adhésion à l’OTAN, qui réclamait l’abolition du statut de république autonome de la Crimée, un parti qui réclame la réintroduction de la mention ethnique et religieuse des citoyens dans les documents d’identité, l’octroi de la nationalité aux seuls « ethniquement ukrainiens », la restriction de l’accès aux universités des étudiants étrangers, l’intégration dans l’UE au nom de « l’Europe des nations ». Un programme raciste et fasciste qui est d’ailleurs labellisé « désoviétisation ».
Svoboda par la bouche de Levtchenko précise en visant les citoyens ukrainiens russophones : « nous défendons les valeurs de la famille, l’Europe des nations, contre le multiculturalisme, que je considère comme une politique visant à fondre entre elles différentes cultures, ce qui n’est pas possible…Il n’est pas logique de faire cohabiter dans une même ville des cultures différentes. Cela ne peut pas marcher » (Monde Diplomatique, mars 2014). Svoboda est bien un parti fasciste, dont le nom historique est d’ailleurs « Parti National Socialiste d’Ukraine », parti qui se réclame héritier de « l’Organisation des nationalistes ukrainiens » (OUN) des années 1930 dont une fraction créa la division Waffen SS « Galicie » commémorée tous les 28 avril. Récemment, ils organisaient une manifestation de 25.000 néonazis à la gloire du chef de guerre fasciste Stepan Bandera. Mais les médias européistes ne qualifient ce parti que de « nationalistes » et non de néonazis ! Ce travestissement a été rendu possible grâce au Parlement européen qui en 2009 condamnait « les 2 totalitarismes » (fascisme et socialisme), condamnation saluée par Svoboda comme une « victoire sur le communisme ». De plus Svoboda est la prolongation idéologique radicalisée de l’ancien président Ioutchenko. En effet, celui-ci initia la réhabilitation des ex-nazis ukrainiens. Notamment, il signa un décret en 2007 de réhabilitation officielle de Bandera.
Ce parti fasciste ukrainien, qui a été le fer de lance des contre-révolutionnaires séparatistes de la place Maïdan à Kiev, a tout comme le parti nazi hitlérien, ses sections d’assaut (SA) regroupées dans Praviy Sektor (Secteur droit), dont le principal dirigeant Tarasenko se définit comme « nationaliste défendant les valeurs de l’Europe blanche et chrétienne contre la perte de la nation et la ‘déreligionalisation’ » parce que le multiculturalisme est « responsable de la disparition des crucifix et de l’arrivée des filles en burqa dans nos écoles » (Monde Diplomatique, mars 2014). Tout comme leur mentor Bandera allié de Hitler dans sa guerre contre l’URSS, le pouvoir élu ukrainien était qualifié de « mafia judéo-moscovite ».
Voilà en réalité ce que sont les amis des « démocrates » Obama, Merkel, Cameron, Hollande, Peres, Ashton, etc... Les multiples visites de Mc Cain, ex-candidat à la présidentielle des USA, de J. Kerry chef du département des affaires étrangères US et d’officiels allemands aux manifestants fascistes ukrainiens qui occupaient Kiev en sont les preuves éclatantes. Ce sont ces gens-là qui sont aujourd’hui au pouvoir, après le coup d’état de février.
Profitant que l’Ukraine avait besoin d’une aide de 20 milliards d’euros, l’UE avec l’aval US, a voulu la contraindre à un accord prédateur digne des diktats libéraux et austéritaires imposés à la Grèce, à l’Irlande, au Portugal, à l’Espagne, à l’Italie et à Chypre. Suite à l’exécution par les gouvernements successifs des recettes libérales imposées par le FMI, la Banque mondiale et l’UE entre 1991 et 2012, la production d’électricité en Ukraine indépendante a chuté de 35 %, celle de la sidérurgie de plus de moitié. En 2012, la production de tracteurs ne représentait qu’environ 5% de ce qu’elle était en 1990, dans un pays où un tiers de la population vit en milieu rural et détient 20% des sols de terre noire de la planète. L’Ukraine comptait 16 grandes usines de machines-outils qui produisaient 37 000 unités en 1990, seuls trois d’entre elles tentent, aujourd’hui, de fonctionner tant bien que mal, produisant à peine 40 machines par an. Les privatisations ont touché plus de 50 000 entreprises et 45% d’entre elles sont depuis fermées. Comme le dit l’économiste ukrainienne Natalia Vitrenko : « L’Ukraine était auparavant l’un des premiers pays en matière de PIB par habitant, nous étions 11% au-dessus du PIB mondial moyen par tête. Mais notre PIB a chuté d’un tiers et dès 2012 il n’était plus que de deux tiers de ce qu’il était en 1989. Nous sommes aujourd’hui 40% en dessous du PIB mondial moyen par tête, en dessous de la Namibie… Ce que l’Ukraine a gagné au cours de ces années, c’est de la dette extérieure. Nous avons maintenant une dette extérieure qui équivaut au double de nos réserves monétaires en or. Notre dette extérieure brute s’approche des 80 % du PIB. La pire des choses est que cet effondrement a appauvri la population. Le salaire minimum en Ukraine est de 118 euros par mois ; la retraite minimum est de 86 euros par mois ».
Le gouvernement élu ukrainien de Viktor Ianoukovitch, qui recherchait jusque-là l’équilibre entre l’UE et la Russie, a adopté en novembre 2013 une position en refusant l’accord avec la l’Union Européenne et en acceptant la proposition russe d’aide immédiate de 15 milliards et de baisse d’un tiers du prix du pétrole et du gaz. Ce fut le signal de la guerre pour son renversement et qui a abouti au coup d’état de février et à l’arrivée au pouvoir de la clique pro-américaine et pro-européiste avec 1/3 des membres qui sont des fascistes. L’UE et les USA mènent donc, par pions fascistes interposés, une lutte pour la « liberté » de piller, de mettre un peuple aux ordres dans le seul but de faire des profits et d’encercler la Russie qui contrarie objectivement leur rapacité impérialiste.
Chers amis, chers camarades,
Il faut rappeler que la collaboration avec les nazis des nationalistes ukrainiens, dont se réclament aujourd’hui Svoboda et les autres groupes fascistes ukrainiens, s’est déroulée des années trente jusqu’à la guerre totale pour « l’espace vital » des nazis contre l’URSS de 1941 à 1945. L’ouest du pays était alors administrée par la Pologne fasciste depuis 1920, après avoir été intégrée à l’Empire austro-hongrois jusqu’en 1918. Les membres de l’OUN (l’organisation des nationalistes ukrainiens) étaient formés par les Sections d’Assaut (SA) du parti Nazi de Htiler. En 1938, sont créés, par l’Abwehr, le service de renseignement de la Wehrmacht, des centres d’entraînement, en vue de la création d’une cinquième colonne en Pologne et en Union soviétique dans lesquels sont formés des groupes fascistes ukrainiens.
En 1940, avec l’aide de l’Abwehr, l’OUN organise des groupes de sabotage et d’intoxication pour manipuler les populations ukrainiennes. En 1941, l’OUN et son dirigeant, Stepan Bandera, participent à l’agression du Reich contre l’URSS. En uniforme de l’Armée rouge, ils commettent nombre d’assassinats ciblés contre les officiers du NKVD, cherchent à désorganiser la circulation et à dynamiter des objectifs stratégiques. En juin – juillet et août 1941 avant même l’arrivée des Allemands en Ukraine, en supplétifs des Einsatzgruppen, les fascistes de l’OUN massacrent les Juifs. Des milliers de fascistes de l’OUN serviront comme gardiens dans les camps d’Auschwitz, Treblinka et Belzec. L’OUN participe activement à l’exécution de prisonniers de guerre soviétiques et des communistes.
Stepan Bandera, leur chef, va reprendre du service en 1943 après Stalingrad. Il forme en mars 1943 la division SS « Galicie ». Elle comptera 26 000 hommes ! Les SS ukrainiens appuyèrent en 1944 la garde fasciste slovaque contre les partisans. A la fin de la guerre, l’OUN, dans laquelle seront reversés les effectifs rescapés de la SS « Galicie » continuèrent de semer la terreur, jusque dans les années cinquante à l’ouest du territoire de l’Ukraine soviétique. Bandera fut ensuite recruté par les Services secrets britanniques avant d’intégrer en 1956 les services de renseignements de RFA, la BND, alors dirigée par le général Reinhardt Gehlen, ancien chef des services de renseignement militaire nazi pour le front oriental pendant la Deuxième Guerre mondiale.
L’occident recycla ainsi les nazis et les fascistes des différents pays européens pour les mettre au service de son projet de restauration du capitalisme en URSS qui surviendra dans les années 1989 et 1990.
Nous sommes donc aujourd’hui loin du « plus jamais ça » déclamé bruyamment lors du procès de Nuremberg jugeant les auteurs fascistes de plus de 50 millions de morts entre 1939 et 1945 dont plus de 25 millions de Soviétiques. Ce que l’histoire officielle a caché, c’est qu’après Stalingrad en 1943, le chef de fil de l’occident capitaliste, les USA, a recruté les réseaux nazis et fascistes en débandade pour les mettre au service de la contre–révolution bourgeoise qui, finalement, triompha temporairement dans les années 90 avec la défaite de l’URSS. Et à la faveur de la crise du capitalisme, on assiste au relèvement des partis fascistes partout en Europe. Le combat de nos aînés n’est donc pas fini.
Cher(e)s ami(e)s, Cher(e)s camarades,
Pour continuer le combat contre le fascisme, la guerre et le capitalisme, nous ne pouvons pas être amnésiques. Nous devons nous inspirer du courage de ceux qui nous ont précédés. Nous sommes des nains assis sur des épaules de géants.
Nous nous inclinons aujourd’hui devant l’héroïsme de ces partisans soviétiques, morts loin de leur patrie socialiste pour la libération de l’humanité du joug nazi. Honneur aux combattants soviétiques ! Honneur aux martyrs !