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Surfer sur les plages tunisiennes

La scène se déroule le 4 juin dernier en fin d’après-midi. Des dizaines de policiers, essentiellement en civil, investissent le quartier populaire de Ben Arous, près de Tunis. Contrairement aux apparences, l’homme qui fait courir la police tunisienne n’est pas membre d’Al Qaïda, mais simplement le webmestre du site TUNeZINE (www.tunezine.com) !

Après avoir entièrement bouclé le quartier, les flics font irruption dans les « publinets » (la dénomination locale des cybercafés). Au même moment, un jeune homme, assis devant un écran d’ordinateur, se lève et, dans un calme contrastant avec la tension qui règne, dit : « S.V.P., laissez les autres tranquilles... C’est moi que vous cherchez... » Le jeune homme est rapidement arrêté. Dans la foulée, les policiers, qui ne se sont jamais identifiés, l’emmènent chez lui pour saisir son matériel informatique.
Diplômé en sciences économiques en 1995, Zouhaïr Yahyaoui, comme des milliers de « diplômés chômeurs » dans le monde arabe, n’a pas trouvé de travail relié à son domaine d’études. Il se passionne pour l’informatique et devient rapidement un autodidacte. Rapidement l’Internet et la conception de sites ne sont plus pour lui qu’un jeu d’enfant.

En juin 2001, Zouhaïr, qu’on connaît alors sous le pseudonyme d’Ettounsi (le Tunisien), crée son propre site, composé d’un magazine électronique, de deux forums de discussion et, plus tard, d’une lettre de diffusion quotidienne. Parmi les faits d’armes du site, la publication en exclusivité de la lettre ouverte du juge Mokhtar Yahyaoui, en juillet 2001, dénonçant « l’absence d’indépendance de la justice ».

Extraordinaire engouement
Malgré sa censure en Tunisie, le site, et en particulier ses forums de discussion, connaissent un extraordinaire engouement qui font de TUNeZine un espace regroupant les différentes sensibilités de l’opposition tunisienne.
L’audience grandissante et surtout le ton sarcastique de l’équipe de TUNeZINE, constituée principalement de cinq reporters, n’ont pas plu au régime tunisien. Ce qui fait dire à l’un des cinq reporters, répondant du poétique nom d’emprunt d’Omar Khayam1, que « la dictature tunisienne, comme d’ailleurs toutes les autres dictatures, est par définition dénuée du sens de l’humour ».

Le 4 juin 2002, la police tunisienne a donc fini par mettre la main sur le créateur du site. On a découvert qu’Ettounsi n’est autre que Zouhaïr Yahyaoui, le neveu du « juge rebelle ». Après une première condamnation à 28 mois de prison, Zouhaïr a vu sa peine ramenée à deux ans ferme lors de son procès en appel, le 10 juillet dernier.

Entre-temps, l’histoire du cyberdis-sident a fait le tour du monde. Alors que de nombreux journaux internationaux évoquaient l’affaire Ettounsi, les journaux tunisiens n’y consacraient que quelques lignes et se bornaient à répéter que « l’internaute » (sans jamais le nommer !) était condamné pour diffusion de fausses nouvelles et pour utilisation frauduleuse de moyens de communication.

Internet sous surveillance
Au-delà du cas Ettounsi, il convient de rappeler que le réseau Internet tunisien est étroitement contrôlé depuis son avènement, en décembre 1996. Même si les prix d’abonnement et de connexion ont été régulièrement abaissés, le pouvoir s’est toujours méfié de ce nouvel outil de communication qui a permis aux Tunisiens de se soustraire de la torpeur des médias locaux.

Le journal marocain Demain, dans sa livraison du 22 juin, nous apprend que « les Tunisiens, champions du monde de la débrouillardise » arrivent à accéder à TUNeZINE [et à d’autres sites théoriquement inaccessibles comme ceux de RSF, Amnistie], en s’échangeant des Proxy, adresses de contournement permettant de se connecter à partir d’un serveur international et de déjouer ainsi la censure, ou en se branchant via les serveurs d’anonymat.
Un membre de Reporters sans frontières (RSF) n’hésite pas à comparer le contrôle exercé par le pouvoir tunisien sur l’Internet au contrôle des autorités chinoises : « Dans le rapport que nous diffusons pour le 11 septembre et qui s’intitule Internet en liberté surveillée depuis le 11 septembre 2001, tout comme dans le rapport Les Ennemis d’Internet à paraître en janvier 2003, nous expliquons clairement que la Tunisie est un pays jumeau de la Chine en matière de censure d’Internet. » Il précise que les deux pays ont de la même façon recours aux « firewall pour filtrer, espionner et bloquer les sites jugés subversifs, l’emprisonnement des cyberdissidents ou, simplement, des internautes un peu critiques et la même volonté de contrôler les cybercafés ».

Comme s’il s’agissait de confirmer ces affirmations, les autorités tunisiennes bloquent depuis quelques semaines l’accès aux principaux sites de messagerie électronique (Yahoo, Hotmail...etc). Certains Tunisiens ont trouvé un autre moyen de communiquer avec leurs amis. Soit en utilisant les cartes de voeux électroniques disponibles dans Internet !

Dans un bulletin d’information daté du 3 août, la Ligue tunisienne des droits de l’homme (LTDH) déclare que « depuis trois semaines, le courrier électronique de la LTDH est intercepté, le courrier envoyé à la LTDH est détourné et les messages envoyés par la LTDH ne parviennent pas à l’adresse des destinataires. Le contrôle des publinets [environ 340 dans le pays] par la police s’est intensifié ces derniers mois ». Voilà les internautes tunisiens avertis !

Journaliste tunisien, journal Alternatives (Québec).


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Ibrahim
Cuba, un soir lors d’une conversation inoubliable.

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