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Modestement, à la mémoire de Louis Althusser.

À propos d’un aspect de l’École

J’ai retrouvé jadis un copain qui fit l’École normale d’instituteurs, mais il n’est plus là pour me lire.

Il me raconta qu’en notre temps les élèves, méritants et issus de milieux modestes, recevaient une éducation élémentaire de savoir-vivre dans la "bonne société" : savoir par exemple tenir correctement son couteau et sa fourchette à table, s’essuyer avec la serviette avant de porter son verre à la bouche, qui ne doit pas être pleine quand on veut parler...

Cela pouvait sembler nécessaire à l’ École de la République compte tenu du rôle social souvent essentiel de l’instituteur, encore à une époque qui n’est pas si reculée.

Ce qui ne l’empêchait pas, lorsque je le retrouvai, de n’avoir confiance qu’en son couteau de poche qu’il dépliait après avoir écarté celui du restaurant, ou de pousser avec son pain dans son assiette qu’il nettoyait à la fin avec soin.

Même chose, mais à un degré évidemment supérieur, à l’École polytechnique où les élèves étaient initiés à bon nombre de pratiques et au code bonne conduite pour les milieux dans lesquels ils seraient amenés à évoluer. Très utile aux Élèves, j’en connais intimement au moins un, qui ne sortaient pas du sérail.

J’ai personnellement écouté un professeur de philosophie, bien jeune alors, dont la femme tenait la librairie progressiste de la ville et qui correspondait exactement au type évoqué par L. Althusser (dont il était un pair), lui qui était de ceux

"qui, dans des conditions épouvantables, tentent de retourner contre l’idéologie, contre le système et contre les pratiques dans lesquels ils sont pris, les quelques armes qu’ils peuvent trouver dans l’histoire et le savoir qu’ils « enseignent ». Ce sont des espèces de héros. Mais ils sont rares, ..." http://www.legrandsoir.info/ideologie-et-appareils-ideologiques-d-etat-notes-pour-une-recherche-iii.html

Conditions épouvantables certes, puisqu’aux jours où la prégnance idéologique du milieu et de la société n’était pas moindre que de nos jours, s’ajoutaient les risques d’attentat et de plasticage par l’OAS. Dont les héritiers d’aujourd’hui s’affirment d’ailleurs champions en démocratie et poursuivent en Justice ceux qui les dénomment fascistes.

Bref, il annonçait la couleur dès son premier cours, en s’affirmant, lui, "marxiste", non par provocation à l’égard de sa classe (préparatoire) qui comptait quelques activistes avoués, de tendance "Jeune Nation", voire carrément familiers de l’OAS, ni par souci de propagande, mais comme simple rappel du fait qu’un enseignant est nécessairement, qu’il le veuille ou non, qu’il le sache ou non, qu’un enseignant est, lui aussi, nécessairement "orienté".

Je précise d’ailleurs au passage pour certains que, si les conditions sont favorables à la discussion, un fasciste patenté n’est pas nécessairement quelqu’un qui n’a ni culture ni cervelle ; et que ce professeur ne les prenait pas pour tels, même s’il était parfois particulièrement cinglant dans ses répliques.

Je me souviens d’une de ses prises de parole à la Mutualité dans un meeting à un moment très chaud qui précéda l’accès de l’Algérie à l’indépendance, et de mon enthousiasme d’élève un tantinet chauvin pour cet éducateur hors du cadre scolaire.

Il lui fut d’ailleurs proposé par son parti d’intégrer le Comité central du PCF, mais il préféra en rester à l’échelon fédéral car il tenait à la qualité de son d’enseignement.

Pour l’anecdote, j’appris ensuite qu’il "démissionna" un an après moi, mais avant l’élection du fantoche F. Mitterrand dont nous vivons un avatar.

C’est à lui, ainsi qu’à un modeste instituteur militant passionné de physique, qui s’était mis aux études supérieures pour elle, que je veux rendre hommage maintenant, au fil du clavier.

Le nom du premier n’est pas un secret : Michel Verret, ancien élève de l’E.N.S. dont certains ouvrages sont, en particulier, publiés à L’Harmattan.

Mauris Dwaabala

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