RSS SyndicationTwitterFacebook
Rechercher
13 

Dilemme syrien (Hurriyet)

Un dilemme est, par sa nature même un choix entre des maux, et c’est ce à quoi font maintenant face les autres pays à propos de l’utilisation de gaz toxiques en Syrie. Toutes les options peuvent être "sur la table", mais aucune d’entre elles n’est bonne.

Personne ne nie que du gaz toxique ait été utilisé dans des parties tenues par les rebelles à Damas le 21 Août, pas même le gouvernement syrien. Médecins Sans Frontières affirme que 3.600 patients présentant des symptômes d’intoxication ont été traités dans trois hôpitaux situés près de Damas après l’attaque, et qu’au moins 355 d’entre eux sont morts. Le total réel pourrait atteindre 1000 morts. Ce sont les morts que cause habituellement la guerre civile syrienne en une semaine intervenus en une seule journée.

Après cela, cependant, nous manquons de faits. Les rebelles affirment que le régime baasiste serait responsable, alors que le gouvernement syrien affirme que les rebelles l’auraient fait eux-mêmes dans l’espoir de déclencher une intervention militaire étrangère. L’envoi d’inspecteurs de l’ONU ne règlera pas cet argument : si du gaz neurotoxique a été effectivement utilisé, il est possible qu’il provienne de stocks gouvernementaux, mais cela ne signifie pas que ce soit le régime qui l’ait employé.

Tout le monde sait que l’armée syrienne possède des stocks de gaz toxiques, mais ce qui se passe en Syrie est une guerre civile. Les rebelles n’ont pas envahi l’un des sites de stockage connus pour détenir des armes chimiques syriennes, mais ils pourraient avoir des partisans secrets à l’intérieur de ces sites qui leur en auraient fourni clandestinement.

Si vous vous posez la vielle question "qui en bénéficie ?", les rebelles, qui sont actuellement en perte de vitesse, ont une forte motivation à obtenir que le régime de Bachar al-Assad soit blâmé pour l’utilisation d’armes illégales. Si cela conduit les États-Unis et d’autres puissances occidentales à imposer une zone d’exclusion aérienne, ou à bombarder des bases militaires du régime, cela favoriserait la cause rebelle. Alors peut-être auraient-ils agi pour fournir les "preuves" nécessaires : certains d’entre eux sont très certainement suffisamment impitoyables pour agir ainsi.

Il est plus facile d’imaginer que le régime aurait utilisé des armes chimiques, il est tout aussi impitoyable, et il en possède réellement. Mais ce ne serait manifestement pas à son avantage de le faire. Les troupes du président Bachar al-Assad sont en train de gagner la guerre sans en employer, et la dernière chose dont ils auraient besoin serait une intervention militaire étrangère. L’utilisation d’armes chimiques pourrait conduire à un tel un résultat, et il serait exceptionnellement stupide de la part du régime de le faire.

D’un autre côté les armées et les régimes ont fait des choses exceptionnellement stupides par le passé, surtout quand ils sont isolés et sous une forte pression. Le consensus qui se dégage parmi les gouvernements occidentaux, en tout cas, c’est que Bachar al-Assad serait responsable. Alors, que faire à ce propos ?

La France a d’ores et déjà appelé à l’usage de la force, et les Etats-Unis et la Grande-Bretagne semble être sur le point de le faire : après un appel téléphonique de 40 minutes samedi dernier, le Président, Barack Obama et le Premier ministre David Cameron ont convenu que "une utilisation considérable d’armes chimiques mériterait une réponse sérieuse". Mais c’est à peu près le moins que l’on puisse dire, dans les circonstances.

Une intervention militaire américaine est peu susceptible de conduire au résultat que la politique étrangère américaine désire vraiment : la préservation de la laïcité existant en Syrie, avec un changement de leadership au sommet. Si Bachar al-Assad était renversé, il entrainerait probablement tout l’édifice avec lui. Si les rebelles gagnaient, ce seraient presque certainement les islamistes radicaux qui prendraient la relève. Donc, si une intervention militaire est pratiquement destinée à finir dans les larmes, alors pourquoi ne pas l’éviter ?

Parce que les armes chimiques sont classées comme des "armes de destruction massive", il existe un traité international interdisant leur utilisation. Si vous laissiez Assad s’en tirer comme cela, stipule l’argument, il aurait brisé un tabou international important sur l’utilisation des armes de destruction massive. Eh bien, pas vraiment.

Les armes biologiques ("la guerre bactériologique") sont des armes terrifiantes de destruction massive, interdites par un traité, et personne ne les a jamais utilisées. Les armes nucléaires peuvent tuer des milliards d’individus, elles n’ont jamais été interdites, mais elles n’ont pas été utilisées en guerre depuis 68 ans maintenant. Le gaz toxique, cependant, n’est pas vraiment une arme de destruction massive du tout.

Le napalm, les explosifs incendiaires et les bombes à sous-munitions sont tout aussi méchants que les gaz toxiques et parfaitement légaux. L’interdiction historique des gaz toxique a un effet dissuasif important, mais certaines infractions antérieures lui ont survécu et empêcher son utilisation ne vaut pas une guerre. Surtout si elle est, du point de vue des intervenants potentiels, une guerre impossible à gagner.

Gwynne Dyer,
Le 27 août 2013.

Source : Syrian Dilemma

»» http://www.hurriyetdailynews.com/sy...
URL de cet article 22120
   
Figures Révolutionnaires de l’Amérique latine
Rémy HERRERA
Cet ouvrage propose au lecteur sept chapitres consacrés à quelques-uns des révolutionnaires les plus importants d’Amérique latine et caribéenne : Simón Bolívar, José Martí, Ernesto Che Guevara, Hugo Chávez, Fidel Castro et Evo Morales. L’Amérique latine et caribéenne offre depuis le début des années 2000 l’image de peuples qui sont parvenus à repasser à l’offensive, dans les conditions historiques très difficiles qui sont celles de ce début de XXIe siècle. C’est cette puissante mobilisation (…)
Agrandir | voir bibliographie

 

Aussi longtemps qu’on ne le prend pas au sérieux, celui qui dit la vérité peut survivre dans une démocratie.

Nicolás Gómez Dávila
philosophe colombien

© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.