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Des enjeux mondiaux

Tropiques de plus en plus tristes

Au Pérou et en Équateur, trafic de drogue, industrie du bois et du pétrole menacent les tribus amazoniennes dans leur existence.

Au Sud-Est du Pérou, un groupe d’aborigènes de la jungle amazonienne, poussé par la nécessité, vient de rompre volontairement son isolement pour reprendre contact avec le monde extérieur. Plus d’une centaine d’indiens de la tribu des mashco-piro sont apparus sur la rive opposée de la communauté de Monte Salvado, dans un territoire reculé de l’État de Madre de Dios, durant trois jours, à la fin du mois de juin dernier. La rencontre tendue entre les deux groupes a été filmée par un garde forestier. On peut y voir des membres de la tribu, des deux sexes et de tous âges, et parmi ceux-ci des hommes arborant des lances ainsi que des arcs et des flèches.

Il semblerait que les mashco-piro soient venus demander des bananes, des cordes et des machettes au indiens yine qui vivent dans cette zone. « Les images montrent que les menaces ont été nombreuses », comme l’explique Klaus Quicque, président de la Fedération des indiens du Río Madre de Dios (FENAMAD). “Les habitants de Monte Salvado ont eu peur pour leur vie en voyant les mashco-piro traverser la moitié du fleuve pour s’approcher d’eux ». La tension est retombée et au bout de quelques jours la tribu a fini par quitter les lieux.

Qu’est-ce qui a poussé ces indiens à faire irruption en ces lieux ? Pour l’heure, les autorités en sont réduites à des hypothèses, mais il pourrait s’agir à l’origine de l’exploitation illégale d’arbres dans leur territoire ou du passage de narcotrafiquants qui le traversent fréquemment et perturbent ainsi leur mode de vie.

Pourtant les lois péruviennes interdisent le contact avec certaines tribus afin de les prémunir d’un choc épidémiologique qui pourrait leur être fatal. Mais il faut savoir par ailleurs que cette zone fait l’objet de travaux d’exploration de gisements pétrolifères et gaziers et que la logique économique pourrait avoir raison de la préservation de l’intégrité tant physique que culturelle de groupes tenus jusque-là à l’écart des bienfaits de notre civilisation matérielle.

En Équateur la raison économique vient aussi de l’emporter sur la préservation de l’identité aborigène ; le président Rafael Correa vient en effet d’autoriser l’extraction de pétrole dans le parc national Yasuní, réserve mondiale de la biosphère.

En 2007, il s’était engagé à ne pas y toucher, en échange d’une aide financière internationale destinée à lutter contre le réchauffement climatique. Mais l’aide attendue n’est pas arrivée. « La raison principale de l’échec de ce projet, avance Correa pour expliquer ce revirement, est que le monde repose sur une vaste hypocrisie ». Rafael Correa a aussi expliqué que l’exploitation de ce pétrole devrait rapporter près de 18 milliards de dollars destinés “à combattre la misère notamment en Amazonie”.

Les réserves de pétrole du bloc Ishpingo, Tambococha et Tiputini (ITT) du parc Yasuni sont estimées à 846 millions de barils soit 20% des réserves totales de l’Équateur. Le socialisme, même néo-bolivarien, doit donc lui aussi résoudre ses propres contradictions : idéologiquement tenu de faire cas de ses minorités ethniques d’origine, il est aussi politiquement comptable du développement économique de sa base électorale. Dans le contexte d’une économie mondiale largement fondée sur l’énergie fossile, la manne pétrolière dont bénéficie l’Équateur est pour les aborigènes d’Amazonie une malédiction à laquelle ils ne peuvent échapper.

En transposant à nos contrées, qu’adviendrait-il de nos indigènes, minorités paysannes de la Creuse, par exemple, en cas de découverte sur leur territoire de pétrole ou d’un de ses substituts, le gaz de schiste, par exemple ? Il est clair que les enjeux dépassent ceux d’une solidarité écologique limitée à la seule préservation du poumon amazonien.

Lucas NAVARRO le 21/08/2013

»» http://www.metamag.fr/metamag-1472-Tropiques-de-plus-en-plus-tristes.html
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