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Un homme de caractère, ou l’affaire Cénodin (extrait)

39.- Cléante est un grand ami de Cliton. En gage de l’indéfectible amitié qu’il lui porte il accède au moindre de ses désirs et ferme les yeux sur ce qui, pour chacun, serait des défauts :

Cliton de sa canne, dans la rue, roue de coups les gens qui lui cèdent le trottoir ; afin de bien marquer qu’on ne lui manque pas impunément de politesse. S’il entre dans un commerce, c’est pour se servir sans payer ; et repart non sans avoir préalablement gratifié le boutiquier de quelques horions. Il aime à se rendre dans la nature pour vidanger son automobile et, quand il rentre chez lui, fait tourner sa machine à imprimer de fausse monnaie. Il a récemment introduit la brouille entre Cléante et ceux qui le pensaient de leurs amis en lui demandant, pour l’un qui rentrait simplement chez les siens, d’en empêcher le passage sur ses terres : sous prétexte qu’il aurait pu être accompagné de Cénodin ; l’homme qui lui apprit que Cliton avait introduit, pour le mieux contrôler, de ses gens dans sa propre demeure. Au demeurant, Cliton est très croyant : il ne jure que sur la Bible et invoque Dieu à chaque détour de phrase. Peut-être parce qu’il a une idée fixe : il croit maladivement que chacun lui en veut. Il y a, sans mentir, certain idiot du village plein d’agressivité qui est entouré d’amis encore plus stupides et qui béent d’admiration devant leur modèle. Cléante, quoiqu’il plastronne dans sa vie domestique, le craint, le ménage, lui obéit ; bref, il l’aime.

Le modeste auteur de ce qu’il voudrait bien être un pastiche, à peine l’avait-il achevé, qu’il tomba sur ce passage :

41.- Dans la société, c’est la raison qui plie la première. Les plus sages sont souvent menés par le plus fou et le plus bizarre : l’on étudie son faible, son humeur, ses caprices, l’on s’y accommode ; l’on évite de le heurter, tout le monde lui cède ; la moindre sérénité qui paraît sur son visage lui attire des éloges : on lui tient compte de n’être pas toujours insupportable. Il est craint, ménagé, obéi, quelquefois aimé. [De la société et de la conversation. Les Caractères. La Bruyère]

Mauris Dwaabala

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La Désobéissance éthique, par Élisabeth Weissman
Bernard GENSANE
Le livre d’Élisabeth Weissman fait partie de ces ouvrages dont on redoute de poursuivre la lecture : chaque page annonce une horreur, une bonne raison de désespérer, même si, de ci delà , l’auteur nous concède une ou deux flammèches d’espoir. Un livre de plus qui nous explique magistralement, avec rigueur et humanité, pourquoi et comment la classe dominante française met à mort l’État, les valeurs républicaines, la citoyenneté, la solidarité, la société au sens classique du terme. (…)
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En transformant les violences de l’extrême droite vénézuélienne en "révolte populaire", en rhabillant en "combattants de la liberté" des jeunes issus des classes aisées et nostalgiques de l’apartheid des années 90, c’est d’abord contre les citoyens européens que l’uniformisation médiatique a sévi : la majorité des auditeurs, lecteurs et téléspectateurs ont accepté sans le savoir une agression visant à annuler le choix des électeurs et à renverser un gouvernement démocratiquement élu. Sans démocratisation en profondeur de la propriété des médias occidentaux, la prophétie orwellienne devient timide. L’Amérique Latine est assez forte et solidaire pour empêcher un coup d’État comme celui qui mit fin à l’Unité Populaire de Salvador Allende mais la coupure croissante de la population occidentale avec le monde risque un jour de se retourner contre elle-même.

Thierry Deronne, mars 2014

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