Le Préfet de Seine-Saint-Denis exclut les femmes voilées de la cérémonie
de remise des décrets de naturalisation
Bobigny, le 21 décembre 2004
Convoquée ce matin du 21 décembre par la Préfecture de la
Seine-Saint-Denis à la cérémonie de remise de mon décret de
naturalisation, j’ai été témoin de l’exclusion de quatre femmes portant
un foulard et d’une cinquième porteuse d’un bandana. Trois d’entre elles
(Mmes Ramdani, Cheikhi et El Marakchi) venaient retirer leur décret de
naturalisation, les deux autres venaient accompagner un proche pour
cette cérémonie.
A l’entrée du salon d’honneur de la Préfecture, les fonctionnaires ont
demandé à ces femmes de retirer leur couvre-chef. Devant leur
étonnement, les agents de la Préfecture ont invoqué des instructions de
leur hiérarchie. Le sous-préfet, appelé pour justifier cette demande,
l’a expliquée par des instructions formelles du Préfet de
Seine-Saint-Denis pour qu’aucune femme voilée ne soit admise à assister
à la cérémonie officielle de remise des décrets de naturalisation. Il a
déclaré que ces instructions ne découlaient pas d’un texte législatif ou
réglementaire mais se fondaient sur des principes républicains : pour
une cérémonie aussi symbolique de l’intégration dans la communauté
nationale française, où la Marseillaise est jouée, tout signe ostensible
d’appartenance communautaire doit être banni. Depuis huit mois que ces
instructions sont selon lui appliquées à Bobigny, elles n’auraient
jamais provoqué d’incident. Appelé en renfort, le Directeur de Cabinet
du Préfet (qui a refusé de donner son nom) confirmait les instructions,
les attribuant à la volonté du Préfet, « maître dans la Maison de la
République ».
Les cinq femmes ont donc attendu à la porte du Salon d’honneur, en
compagnie d’une dizaine de policiers appelés en renfort. La cérémonie
terminée, les autres personnes naturalisées sont parties, et les
fonctionnaires ont remis leur décret de naturalisation aux trois
personnes convoquées.
Les trois femmes ainsi exclues de cette cérémonie sont prêtes à
témoigner de l’humiliation qu’elles ont subies.