Finalement, je ne pensais pas être aussi juste quand je disais que l’anti-impérialisme réductionniste pouvait conduire à ce genre de considération : mieux vaut les fascistes aux États-Unis. Voilà qui est désormais exemplifié. Pour la petite histoire, les Américains étaient très réticents à envahir l’Italie et ne l’ont fait que sous la pression des Britanniques et l’insistance toute particulière de... Staline qui voulait un autre front en Europe...
Lorsqu’en pleines négociations civiles entre les associations de gauche affiliées à l’environnement DHKP-C (syndicats, corporations, médecins, avocats...) et le gouvernement AKP, « le parti » ne trouve rien de mieux à faire que d’envoyer un gars se faire sauter près des institutions gouvernementales en compromettant tout, ça, pour Bahar, c’est la révolution, c’est la guerre légitime d’une organisation qui résiste à un régime fasciste.
Et des bourdes comme ça, il y en a eu un paquet dans le cadre de la lutte contre l’isolement carcéral. De même, une centaine de gus dans la montagne du Dersim en treillis, des jeunes gens qui se sacrifient par la faim... pour rien, ces morts aussi stupides qu’inutiles, pour Bahar, c’est toujours la révolution, la résistance productrice de « sacrifices » et de « martyrs », une réalité quotidienne directement expérimentable.
Mais lorsque le régime fasciste d’Assad torture à la chaîne depuis des années, tire sur la foule lors des premières manifestations pacifistes, et maintenant tue, massacre, bombarde au vu et au su de tous. Là , des initiatives de paix sont subitement possibles. Il n’est plus question de résistance. Ceux qui ont alors pris les armes, sans être des islamistes pour autant, sont des « terroristes ». Et savoir mieux que quiconque l’usage politique qu’il y a autour de ce terme et l’utiliser ensuite pour discréditer des opposants à un régime, ce n’est pas le fruit d’un malencontreux usage des mots, mais c’est vraiment tomber bien bas.
Il faudrait arrêter de prendre les gens pour des cons cinq minutes. Assad n’a plus de légitimité aux yeux d’une frange considérable de la population syrienne. Et même, s’il n’en avait plus du tout que pour 30% du fait des nombreux crimes contre l’humanité déjà commis sur des Sunnites, aujourd’hui, et sur les Kurdes, hier, pour n’importe quel leader politique au monde, ce serait déjà trop et il devrait s’éclipser.
Par conséquent, oui, les Syriens ont le droit d’en vouloir à un imposteur qui succède à son usurpateur de père et oui il est certainement promis au même avenir que des Ben Ali ou autre Moubarak. Et les gesticulations nationalistes d’un Bahar qui persiste à voir dans les victimes de fidèles patriotes potentiels prompts à lutter contre le porteur de toutes ses frustrations, le bras ubiquitaire des États-Unis, ne serviront, je crois, pas à grand chose.