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La liberté de la femme touareg

La condition de la femme chez les musulmans est sujet quotidien à débat ; les touaregs qui ont récemment revendiqué leurs droits au nord-Mali, ont été sujet à débats aussi (désinformation des medias aidant) …

L’amalgame a été vite fait, avec des conclusions trop hâtives, du genre : « les rebelles touaregs veulent imposer la charia », « le port du voile va être instauré pour les femmes », etc, etc …

Depuis, il est vrai que les pauvres touaregs, ont été « renvoyés sous leurs tentes » par les islamistes qui ont récupéré illégitimement leurs acquis géographiques.

Laissant à l’écart le problème politique ou religieux, que j’ai déjà analysé (pour ceux que ça intéresse, ici : Mali, révolte touareg : et si l’on parlait vrai ), je souhaite dans cet écrit, vous conter la condition de la femme au sein des peuples touaregs ; j’espère que ces lignes vous interpelleront ...

Le statut de la femme chez les hommes bleus

Bien que la plupart des Touaregs soient de confession musulmane, ils ont préservé certaines de leurs coutumes, dont la monogamie. La femme touarègue jouit d’un statut privilégié dans la mesure où elle bénéficie d’une autonomie et d’une écoute au sein de la société. La tente lui appartient et, en cas de malentendu entre les époux, l’homme sera chassé par la maîtresse des lieux.

Chez les touaregs la charpente de la société est structurée autour de la femme. Elle est la matrice de cette culture. C’est de la lignée maternelle que se transmettent les pouvoirs qui sont ceux d’une aristocratie guerrière.

Dans l’institution maritale, elle joue le rôle central depuis le mariage, jusqu’à l’éducation des enfants en passant par la gestion du foyer. La femme touarègue a non seulement droit à la propriété, mais tout ce qui matérialise la cellule familiale lui appartient en commençant par la tente et son contenu. En cas de séparation, l’homme n’a droit qu’à son apparat au sens strict du terme. C’est lui qui part du foyer et le laisse intact pour être livré à l’incertitude.

« Sans exagérer, l’homme touareg est perçu ici comme simple géniteur et pourvoyeur des moyens matériels de subsistance. Il affronte les dangers de par sa constitution physique et son penchant naturel et les acquis de sa féroce lutte contre la nature sont confiés à l’intelligence subtile de la femme pour les gérer et les préserver de la déperdition ».

La femme touarègue est aussi le support sur lequel repose toute la vie économique et l’avenir de la communauté. Elle propose les alternatives, gère et encadre le campement à l’absence de l’homme et participe à toutes les décisions en sa présence.

Les atouts culturels de la femme touarègue

L’avis de la femme a toujours été sollicité et pris en compte dans les grandes décisions qui ont donné un sens et un contenu à la vie de cette société.

Bien longtemps avant la conférence de Beijing, la femme touarègue a eu accès à la propriété, à la liberté d’être, d’expression, de choisir son partenaire et d’être à l’abri des sévices corporels. Pour préserver ce fondement culturel de cette société, un code de conduite dénommé « Asshak » a été institué et imposé aux hommes. Dans cette démarche éthique morale, l’homme doit gérer son avantage physique afin de ne pas en abuser sur la femme et les faibles de la société. Cette règle garantit la totalité des droits de la femme et fait d’elle le facteur anoblissant l’homme. L’homme qui déroge à cette règle n’est plus noble et est déchu de ses droits. Il est banni. Ce sont les femmes qui prononcent cette exclusion. Quel est l’homme touareg qui risquerait de ne plus être chanté par ces belles voix à son retour lors des séances musicales d’imzad, que fera-t-il pour maintenir leur grâce, même s’il lui faut se surpasser ?

Aujourd’hui encore, le plus grand sacrilège dans la société touarègue est de porter la main sur une femme et les insultes à son égard sont fortement réprouvées. Aucune atteinte à son intégrité physique, morale et spirituelle n’est tolérable.

(Pour cela et pour une question de pudeur, et certainement plus par respect de la femme, la question de la virginité de la jeune mariée au moment de la consommation du mariage est couverte par un silence explicitement approuvé).

Le jugement de la femme est redouté. Elle est régulatrice du comportement dans la société. Pour ce faire, l’homme a intérêt à apparaître à ses yeux courageux, généreux et infaillible. A cet effet d’ailleurs, devant une situation difficile quelconque, que ce soit sur le champ de bataille ou dans la vie de tous les jours, le jeune touareg ne pensera jamais aux conséquences de son comportement sur sa propre personne, mais plutôt ce que diront les jeunes filles au campement.

Avant de rejoindre son mari, l’épouse touarègue a toujours disposé d’une tente, de meubles et d’animaux de traite selon les capacités de ses parents. Elle rejoint son mari avec un capital qu’il doit préserver, voire fructifier en accord avec celle-ci. Il convient de préciser que dans le mariage, c’est le régime de la séparation des biens qui prévaut. Aucun mari ne peut disposer des biens matériels inaliénables nommés ébawel de son épouse sans son consentement. La femme touarègue choisit son mari, ou alors la famille le choisit avec son accord. Sa préférence est prépondérante même si elle doit obéir elle aussi à des critères qui préservent la dignité et l’honneur de la famille, de la tribu ou de la fédération. Sa dot est toujours équivalente à celle qui a été donnée à sa mère et quelques soit le nombre de mariages, elle a droit à la même dot. Contrairement aux autres femmes nigériennes, sa dot ne se déprécie jamais. Dépositaire de la culture et de la tradition, la femme touarègue a en charge entre autres, de transmettre la langue et l’écriture touarègue « Tifinagh » aux générations montantes. Ainsi, la femme touarègue s’occupe de l’éducation des enfants, de la jeune fille en particulier, des travaux domestiques et de la surveillance des animaux.

Bien que musulmane depuis longtemps, la femme touarègue méprise royalement la polygamie. Elle met à profit le statut que lui confère la société pour imposer la monogamie. Pour elle, si l’Islam tolère jusqu’à quatre (4) épouses, il ne contraint par contre aucun mari à être polygame

D’autre part, la femme touarègue est si adulée que la poésie lui est essentiellement dédiée. Elle y est décrétée comme un être chérissable, mystérieux, énigmatique à conquérir. Elle est autant appréciée pour ses qualités spirituelles, pour son intelligence et sa vivacité d’esprit que pour sa grâce féminine. Consciente de son importance et du mythe qui l’entoure, elle a su exploiter en sa faveur les réalités socioculturelles et historiques de son milieu. Elle est par ce fait, en position de force pour exiger et obtenir ce qu’elle veut. Cela est d’autant plus facile, car elle dispose d’une certaine autonomie sur le plan économique que lui confère le droit à la propriété.

Extraits de « Le statut privilégié de la femme touarègue et son évolution actuelle. Survie d’un matriarcat » de Faiza SEDDIK ARKAM http://www.assa-ka.org/articles.php?lng=fr&pg=21

La position d’un (regrété) célèbre touareg

Si beaucoup d’écrits savant s’intéressent à la femme touareg, cela tient, je pense à la liberté d’expression et de moeurs dont elle jouit. Contrairement à l’homme, elle ne voile pas son visage. (…)

A mon avis, si les hommes se sont voilés, ce fut d’abord, pour se protéger contre soleil et vent pendant les caravanes et les rezzous. Après, le taguelmoust est devenu le symbole de leur dignité. Si en revanche, la femme touarègue reste découverte, c’est qu’elle n’a peut-être pas envie de cacher sa beauté. Qui lui en voudrait ? Pas les hommes en tout cas. Eux, ils préfèrent voir, contempler. Et les ambitions de quelques marabouts intégristes n’y feront rien. Celui qui, pour des raisons religieuses, voudrait imposer le port du voile à nos femmes devra s’attendre à la rebellion de toute la communauté touarègue, les deux sexes confondus.

Car honnêtement, je ne pense pas que la femme touarègue nécessite la prétendue protection des préceptes d’un islam radical. Elle ne risque pas de devenir un « objet sexuel ». Aucun homme n’oserait porter la main sur elle ni même manquer de respect à son égard.

La touarègue sait défendre ses intérêts. Elle a toujours refusé la polygamie, et elle a obtenu gain de cause. Elle est libre parce qu’elle a les moyens d’assurer son indépendance. En cas de divorce, c’est elle qui garde l tente et dispose de son propre troupeau.(…).

Je m’égare. Voulant parler de la vie au campement, j’ai fini par chanter la gloire des femmes touerègues. Mais c’est important : la Targuia n’est pas une femme soumise. Elle est gracieuse, et elle est forte aussi. Selon notre légende, le seul suzerain jamais accepté par tous les touareg fut la reine Tin Hanan (Antinea) dans le Hoggar. Cela dit beaucoup de choses…

(extrait de "Touareg, la tragédie" de Mano dayak) : http://www.amazon.fr/Touareg-trag%C3%A9die-Mano-Dayak/dp/2709611546

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