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Egypte : de la révolution à la dictature militaire

Edmund Burke, théoricien britannique critique de la Révolution Française de 1789, prédisait jadis à qui voulait l’entendre que cet évènement allait déboucher sur une prise de pouvoir de l’Armée. Une prédiction qui prit tout son sens lorsque suite à la dictature de la Terreur, le général Bonaparte profita de l’instabilité qui caractérisait la période postrévolutionnaire pour s’emparer du pouvoir et succéder à la tyrannie oligarchique des révolutionnaires. Et Burke passait alors d’un conservateur réactionnaire à un prophète dont les prédictions étaient enfin prises au sérieux. Le même scenario, à quelques milliers de morts près, se reproduit aujourd’hui même au pays des Pharaons.

L’Egypte, que l’on pensait acquise aux Frères musulmans dont l’accession au pouvoir, comme je l’expliquais dans mon précédent article « Comment les islamistes ont profité des révolutions arabes pour s’installer au pouvoir », a été financée par le désormais bras droit des Etats-Unis dans le monde arabe, à savoir le Qatar, a subi ces derniers jours un revirement de situation, ou plus précisément une reprise de contrôle de la part des militaires au pouvoir depuis l’éviction de Moubarak en février 2011. Et ceci à deux jours des résultats officiels du deuxième tour des élections présidentielles opposant le Frère musulman Mohamed Morsi au dernier premier ministre de l’ère Moubarak, Ahmed Chafiq.

Ainsi, le Conseil Suprême des Forces Armées (CFSA) a d’abord invalidé jeudi dernier la loi d’ « isolement politique », votée en avril, interdisant « à tout président de la République, vice-président, Premier ministre, président du Parti national démocrate (PND, parti de Hosni Moubarak) maintenant dissous, secrétaire général ou membre de son bureau politique » d’exercer des droits civiques pendant 10 ans. Cette loi interdisait donc à Ahmed Chafiq, ex-premier ministre de Moubarak, d’exercer la fonction de chef de l’Etat s’il venait à être élu.

Les militaires au pouvoir ont ensuite dissout l’Assemblée samedi sur la base d’une décision de justice invalidant le mode de scrutin des législatives tenues de novembre à janvier derniers. Une façon donc pour l’Armée de remettre à plat la domination islamiste à l’Assemblée acquise par les Frères musulmans et les salafistes, et de récupérer le pouvoir législatif à son compte au moins jusqu’à l’élection d’une nouvelle Assemblée prévue pour la fin de l’année.

Ainsi, bien que ces décisions aient clairement pour but d’enrayer la machine islamiste en vue des élections, il est désormais clair que quel que soit le futur chef de l’Etat, toute décision prise par Morsi ou Chafiq devra être approuvée par les militaires, qui s’emparent donc de la démocratie et ce jusqu’à ce qu’une nouvelle assemblée soit élue.

Un coup d’Etat militaire en somme, qui a de suite entrainé la « profonde inquiétude » des Etats-Unis qui ont demandé à la junte militaire au pouvoir le transfert comme promis de « l’intégralité du pouvoir à un gouvernement civil démocratiquement élu ».

La lutte fait donc rage entre des militaires qui ont décidé de reprendre le pouvoir à leur compte et les Etats-Unis qui tablaient depuis des mois sur l’accession au pouvoir des Frères musulmans, après leur succès aux élections législatives. Et le perdant, comme souvent, n’est autre que le peuple égyptien, qui misait tous ses espoirs sur une révolution qui aura fait des milliers de morts. Morts pour rien diront certains…

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Depuis 1974 en France, à l’époque du serpent monétaire européen, l’État - et c’est pareil dans les autres pays européens - s’est interdit à lui-même d’emprunter auprès de sa banque centrale et il s’est donc lui-même privé de la création monétaire. Donc, l’État (c’est-à -dire nous tous !) s’oblige à emprunter auprès d’acteurs privés, à qui il doit donc payer des intérêts, et cela rend évidemment tout beaucoup plus cher.

On ne l’a dit pas clairement : on a dit qu’il y avait désormais interdiction d’emprunter à la Banque centrale, ce qui n’est pas honnête, pas clair, et ne permet pas aux gens de comprendre. Si l’article 104, disait « Les États ne peuvent plus créer la monnaie, maintenant ils doivent l’emprunter auprès des acteurs privés en leur payant un intérêt ruineux qui rend tous les investissements publics hors de prix mais qui fait aussi le grand bonheur des riches rentiers », il y aurait eu une révolution.

Ce hold-up scandaleux coûte à la France environ 80 milliards par an et nous ruine année après année. Ce sujet devrait être au coeur de tout. Au lieu de cela, personne n’en parle.

Etienne Chouard

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