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Libye : et dire que j’ai failli douter de cette histoire d’intervention humanitaire.

Envoyer des pyromanes pour éteindre une incendie, brûler la forêt pour sauver les arbres, bombarder la population pour épargner des civils, lancer des campagnes de terreur au nom du combat contre le terrorisme, promouvoir la démocratie en soutenant des dictateurs, des monarchies, des terroristes et autres voyous en tous genres... la logique des dirigeants occidentaux est imparable.

Pendant ce temps, l’Organisation des médias de masse bombarde les consciences jusqu’à obtenir leur reddition. Et c’est ainsi que vous vous réveillez un jour avec le sentiment que vous avez toujours été favorable aux privatisations. Avec la croyance que les Taliban ont toujours été nos ennemis. Que cette Europe-ci est la seule qui vaille. Que vous comprenez bien qu’on ne pourra pas verser votre retraite. Que vous êtes né(e) avec la certitude qu’il n’y a pas d’alternative au capitalisme. Et que l’OTAN est une sorte de SAMU international.

Aujourd’hui, 21 août, la dernière : «  les rebelles sont entrés dans Tripoli ». Après des semaines de «  les rebelles libyens avancent... », «  les rebelles contrôlent la ville de... », les «  rebelles annoncent... ». C’est drôle comment l’acteur principal de ces évènements, l’OTAN, arrive à se faire discret dans les dépêches.

A voir le mal que ces rebelles ont eu pour avancer dans un pays plutôt plat, plutôt dépeuplé, où leurs maîtres avaient et ont la maîtrise totale du ciel - des conditions idéales pour une telle campagne - et où (suprême avantage) le peuple serait «  acquis à leur cause », il est évident et clair que les «  rebelles libyens » n’ont jamais représenté grand chose, allant jusqu’à s’entre-tuer et éliminer leur propre commandant en chef (et ceci dans des conditions pourtant «  idéales »).

Cela dit, à moins d’un coup de théâtre, ils «  gagneront », tôt ou tard, c’est certain. Et comment pourrait-il en être autrement ? Lorsque le bâton rond de la propagande n’entre pas dans le trou carré de la réalité, l’OTAN se charge d’arrondir les angles.

Parions qu’il ne manquera pas alors quelques sombres abrutis pour déferler devant nos écrans en gueulant «  on a gagné ! ». Et dire qu’il y a encore quelques mois ils ne savaient même pas épeler le nom du pays (Lybie ? Libye ?). Mais la vérité est que l’histoire a d’ores et déjà prouvé qu’ils ont eu tort, qu’ils avaient tort, qu’ils ont tort, et ce sur toute la ligne, et l’issue du «  combat » n’y changera rien.

Tripoli résistera-t-elle ? Combien de temps ? Des heures, des jours ? Et soudain, les paris sont ouverts et nous voilà projetés au PMU local. Ils parleront sans doute de «  partisans de Kadhafi » (un certain nombre) et jamais « des Libyens opposés à l’intervention militaire impérialiste » (probablement plus nombreux). Ils nous montreront quelques images de foules en liesse. Utiliseront-ils des images tournées jadis à Bagdad ? Trouveront-ils enfin les 6000 Libyens assassinés « par le régime » ou changeront-ils de sujet, comme pour les armes de destruction massive ?

Donc, «  on va gagner ». La question qui me nargue est de savoir qui est le «  on » et qu’est-ce qui aura été «  gagné ». C’est fou comme on esquive systématiquement cette question intéressante. Je sais que ce «  on » n’est pas moi, pas plus que vous (quelle que soit votre opinion sur cette opération de l’OTAN). Je sais aussi que ce n’est pas l’immense majorité de la population libyenne qui avait certainement une autre idée de printemps arabe.

Ce matin (21 août), la presse nous explique qu’une brigade rebelle d’élite piaffe d’impatience aux portes de Tripoli. Elle nous explique sans sourciller que certains des 600 hommes ont la «  double nationalité américaine et libyenne »... que leur chef parle «  avec un fort accent irlandais », un «  tireur d’élite » qui a «  passé la majeure partie de sa vie à Dublin », qui est «  en contact permanent avec les forces de l’OTAN ». Et je me suis dis «  tiens, pas de Libyen pour diriger la brigade d’élite de la rébellion ? ». Et aussi «  si ce ne sont pas des mercenaires, ça y ressemble furieusement. » Mais l’idée n’a pas traîné dans mon esprit car la place était déjà occupée par cette autre idée récemment martelée par les médias : c’est Kadhafi qui emploie des mercenaires («  noirs et drogués »).

Oui, nous avons désormais le signalement de la tête de «  on » qui a gagné : un Libyen pur jus, comme on n’en fait plus dans les tribus. Il porte des Ray Ban, mâche du chewing-gum, parle avec un fort accent irlandais et son passeport libyen est probablement tout beau, tout neuf et doit encore sentir l’encre fraîche. Et j’ai le sentiment confus que si je lui demandais « et Bagdad, c’était comment ? », il répondrait «  no comment ».

Alors, après des mois de bombardements en tous genres, autant me rendre... à l’évidence. Et dire que j’ai failli douter de cette histoire d’intervention humanitaire.

Viktor Dedaj
"Tu devrais goûter à la démocratie, ça fait l’effet d’une bombe"

PS : dernière minute, dans la catégorie "ils osent tout", un porte-parole de l’OTAN déclare que la mission de l’OTAN est de protéger la population civile et pas de prendre partie pour l’un des deux camps. Orwell, t’es un amateur.

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Que ce soit bien clair : nous avons commis des erreurs, évidemment. Et nous en commettrons d’autres. Mais je peux te dire une chose : jamais nous n’abandonnerons le combat pour un monde meilleur, jamais nous ne baisserons la garde devant l’Empire, jamais nous ne sacrifierons le peuple au profit d’une minorité. Tout ce que nous avons fait, nous l’avons fait non seulement pour nous, mais aussi pour l’Amérique latine, l’Afrique, l’Asie, les générations futures. Nous avons fait tout ce que nous avons pu, et parfois plus, sans rien demander en échange. Rien. Jamais. Alors tu peux dire à tes amis "de gauche" en Europe que leurs critiques ne nous concernent pas, ne nous touchent pas, ne nous impressionnent pas. Nous, nous avons fait une révolution. C’est quoi leur légitimité à ces gens-là, tu peux me le dire ? Qu’ils fassent une révolution chez eux pour commencer. Oh, pas forcément une grande, tout le monde n’a pas les mêmes capacités. Disons une petite, juste assez pour pouvoir prétendre qu’ils savent de quoi ils parlent. Et là, lorsque l’ennemi se déchaînera, lorsque le toit leur tombera sur la tête, ils viendront me voir. Je les attendrai avec une bouteille de rhum.

Ibrahim
Cuba, un soir lors d’une conversation inoubliable.

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