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L’eau, c’est la vie ! "Même la pluie" : le film

Un film où tout le monde se reconnaîtra, parfois dans le comportement de l’un, parfois dans la réplique de l’autre.
C’est tout sauf manichéen, tous les personnages sont tantôt égoïstes, tantôt bons, tantôt lâches, tantôt intrépides, tantôt résignés, tantôt enthousiastes.

Même la pluie

« Changer le monde commence par changer soi-même » (citation de l’affiche du film)

Sebastian, jeune réalisateur passionné et son producteur arrivent dans le décor somptueux des montagnes boliviennes pour entamer le tournage d’un film. Les budgets de production sont serrés et Costa, le producteur, se félicite de pouvoir employer des comédiens et des figurants locaux à moindre coût. Mais bientôt le tournage est interrompu par la révolte menée par l’un des principaux figurants contre le pouvoir en place qui souhaite privatiser l’accès à l’eau courante. Costa et Sebastian se trouvent malgré eux emportés dans cette lutte pour la survie d’un peuple démuni. Ils devront choisir entre soutenir la cause de la population et la poursuite de leur propre entreprise sur laquelle ils ont tout misé. Ce combat pour la justice va bouleverser leur existence.

La superposition des sujets traités et celle des personnages est sublimement réfléchie et amenée :

Trois sujets sont traités dans le film, et s’entremêlent et s’imbriquent à merveille :

 le tournage du film par la troupe, venue au départ pour trouver des figurants à bas prix, mais qui va se laisser séduire par la simplicité de vie et la franchise des indigènes boliviens. Puis les peurs, les doutes du groupe de « privilégiés », pris dans la réalité de l’engrenage d’une insurrection du peuple.

 le sujet historique du tournage : Christophe Colomb, cruel colonisateur, bonimenteur, inquisiteur, qui ne cherche que l’enrichissement, via la ressource naturelle qu’est l’or ; les prêtres, messagers de Dieu, qui ne souhaitent que l’évangélisation des autochtones. Chacun servant d’alibi à l’autre pour justifier les exécutions et mutilations répréssives.
Parmi eux, les deux prêtres Montasinos et Las Casas qui tenteront de lutter contre ces massacres répressifs injustifiés.

 la réalité de la Bolivie en 2000 et cette révolte de l’eau : les indiens Quechua, la journée figurants sur le tournage, et le soir militants pour la défense de leurs droits à l’eau, jusqu’à la lutte avec la police et l’armée, afin d’éviter la privatisation de l’eau au profit de sociétés américaines et anglaises.

« l’eau c’est la vie » (citation du film)

Les mentalités des personnages sont troublantes et appellent à la réflexion :

 Sebastian et Costa qui tour à tour sont humanistes ou égoïstes, altruistes ou spéculateurs … jamais les deux au même moment, et toujours un pour pardonner l’autre ou le redresser…

 L’acteur célèbre qui joue Christophe Colomb, grand inquisiteur intransigeant, et les deux acteurs qui jouent le rôle des prêtres qui ont pris cause pour les indigènes … Le célèbre et mégalomane « Christophe Colomb » s’avère être un humaniste rebelle, farouche défenseur des opprimés, courageux contestataire, alcoolique par dépit de sa vie familiale râlée. Les deux acteurs jouant les prêtres engagés « Montasinos et Las Casas » se révélant au fil du tournage lâches et peureux.

 Et surtout le grand, très grand, rôle clé de Daniel l’indigène choisi pour jouer le chef des rebelles (Hatuey) face à Colomb, et qui s’avère être un vrai rebelle au quotidien pour la préservation du droit à l’eau pour les indiens Quechua.

« Il y a plus important que ton film » (citation du film)

Un film où tout le monde se reconnaîtra, parfois dans le comportement de l’un, parfois dans la réplique de l’autre.

C’est tout sauf manichéen, tous les personnages sont tantôt égoïstes, tantôt bons, tantôt lâches, tantôt intrépides, tantôt résignés, tantôt enthousiastes.

Un film fort, très fort ; touchant, très touchant ; émouvant, très émouvant. Les acteurs sont sublimes, le scénario habilement amené. C’est superbien filmé, passant des magnifiques paysages boliviens aux gros plans sur les expressions des visages de tout un chacun. Le sujet de fond est fortement intéressant et digne, l’engagement y est clair et affiché sans ostentation superflue … Pour moi, un pur chef d’oeuvre !

« la vérité a beaucoup d’ennemis, le mensonge a beaucoup d’amis » (citation du film)

En lire plus : Même la pluie de Icà­ar Bollaà­n

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Viktor Dedaj

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