A l’ encontre novembre 2004
- Extraits
La dégradation accentuée de la conjoncture économique internationale et française combinée avec l’arrivée à maturité de processus (tels que « l’élargissement à l’Est ») lancés depuis longtemps, donnent aujourd’hui à la montée du chômage un caractère mécanique. Celui-ci devient une composante de la situation politique et oblige chacun à définir où il se situe. L’annonce à grands renforts de publicité de la signature par la CGT de l’accord sur la formation professionnelle, accompagnée d’informations fournies par les intéressés eux-mêmes sur les « relations privilégiées » entre Bernard Thibaut et le ministre des Affaires sociales du gouvernement Raffarin, François Fillon a donc valeur de symbole.
La situation politique est donc bloquée. Cependant, il n’est rien moins que certain que les salariés et les exploités acceptent de se résigner à ne plus connaître que des gouvernements de l’UMP et de l’UDF. Le jour peut donc venir où une fraction significative des travailleurs français prenne conscience que s’ils veulent un « autre gouvernement », il faudra qu’ils en créent les conditions eux-mêmes.L’hypothèse qui vient d’être formulée se fonde sur le mouvement du printemps et de l’été 2003. La simultanéité des attaques — décentralisation, politique scolaire, loi sur les retraites, annonce de mesures similaires pour l’assurance maladie à la rentrée, atteinte grave au statut des intermittents — a provoqué dans un secteur des salariés la prise de conscience d’être à un tournant de civilisation. Ce sentiment a été une dimension essentielle des grèves et des manifestations dont le mouvement des intermittents a ensuite confirmé l’existence. Il nourrit chez celles et chez ceux qui combattent, la volonté de tenter de surmonter tout ce qui peut diviser face au capital et l’Etat patron. On a noté une tendance plus forte encore qu’en 1995 dans les cortèges venus des banlieues et des quartiers pour les manifestants de se mêler indépendamment des appartenances syndicales ou de défiler derrière les mêmes banderoles. Les enseignants sont allés dans les assemblées des cheminots, des traminots ou des agents de la RATP et inversement. Celles et ceux qui ont été les organisateurs spontanés des grèves de mai-juin ont assisté nombreux en juillet aux assemblées des intermittents. A 150 000 ou 200 000, tous se sont retrouvés au Larzac.