Récemment est paru le Quatrième Rapport sur l’Etat de la Région (2008-2011), avec en sous-titre "Un rapport depuis l’Amérique Centrale et pour l’Amérique Centrale" , élaboré avec la participation active de chercheurs et de centres de recherche de tout l’Isthme, et appuyé par le Gouvernement du Danemark au travers de son Agence pour le Développement International (Danida). Le Rapport entend être un instrument pour réfléchir de manière informée sur le présent et le futur de l’Amérique Centrale ; pour promouvoir des processus effectifs de pétition et de reddition de comptes ; pour identifier des actions possibles pour amplifier les opportunités et accroître les capacités de la population, et procurer les bases techniques pour un dialogue social et politique conduisant à la promotion du développement humain soutenable dans la région.
Une des hypothèses de base du Document est qu’en Amérique Centrale, malgré les mauvais temps, on continuera à enregistrer des progrès, mais aussi de préoccupants reculs qui, en général, viendront augmenter les brèches dans la région et dans les pays. Voyons de manière concise quels ont été les progrès et quels ont été les régressions :
Le Rapport identifie des progrès dans des domaines-clé pour le développement humain soutenable, bien qu’à des rythmes lents et d’une ampleur encore insuffisante. Il signale, par exemple, le bon fonctionnement des marchés internes et du commerce inter-régional qui ont atténué l’impact de la crise internationale ; les flux d’envoi d’argent aux familles qui, s’ils se réduisirent bien durant la crise, contribuèrent à ce que ne produise pas une plus grande réduction dans le revenu national disponible ; l’accroissement de l’investissement social pour protéger les secteurs les plus vulnérables ; l’augmentation de l’espérance de vie à plus de 70 ans dans tout les pays de la zone ; l’impulsion de programmes sociaux soulageant la situation d’indigence, influant de manière immédiate sur les revenus des familles pauvres ; la démocratie électorale avec l’alternance de partis qui reste la règle normale pour l’accès au pouvoir, à l’exception des cas que nous mentionnerons plus loin.
Le Rapport signale, d’autre part, que l’ampleur des retards, les faibles capacités institutionnelles et l’actuelle complexité des problèmes qui se vivent en Amérique Centrale, donnent une valeur très relative aux progrès. Le régime politique a connu de sérieux reculs : les multiples implications du renversement du gouvernement au Honduras, la haute pénétration du crime organisé dans l’Etat guatémaltèque, et la concentration du pouvoir depuis l’Exécutif, au Nicaragua et au Panama, sont des aspects qui rendent vulnérable le système démocratique, selon les auteurs du Document. Ils exposent aussi, que le domaine de la sécurité présente des traits de véritable crise ; la région s’est transformée au cours des trois dernières années comme le territoire le plus violent de l’Amérique latine et, pour des causes distinctes de celle d’un conflit belliqueux, en une des zones les plus dangereuses de la planète. En 2009 et 2010, le taux régional d’homicides par tranche de 100.000 habitants se situait au-dessus de 40. Aussi, comme préoccupation, ils remarquent que comme tendance régionale, les homicides contre les femmes ont augmenté à un taux beaucoup plus fort que pour les hommes, sans que les Etats paraissent attribuer une attention adéquate au problème.
Une autre préoccupation signalée par les auteurs du Rapport, est que l’inefficacité des mesures adoptées pour renverser les climats d’insécurité, a entraîné un autre effet négatif sur les Etats de droit et la coexistence démocratique : la participation quasi-régulière des armées dans les tâches de sécurité intérieure ; ce phénomène s’observe au Guatemala, au Honduras et au Salvador.
En matière économique, il est indiqué que la crise internationale de 2008-2009 entraîne avec elle des reculs qui aggravent les déjà insuffisants niveaux de développement de l’Isthme. Cette année, le taux de croissance de l’Amérique Centrale a été le plus bas comparé avec toute autre sub-région latino-américaine, se situant dans l’ordre de-0,7%. Il y a eu aussi une régression dans le domaine social, en particulier un accroissement de la pauvreté et du chômage. A la fin de la première décade du XXIe siècle, environ 17 millions de personnes dans l’Isthme subsistent dans des conditions de pauvreté extrême ; avec des accès nuls ou précaires aux marchés du travail et de très bas niveaux d’instruction publique. Au Guatemala, au Salvador, au Honduras et au Nicaragua, l’exclusion sociale affecte près de 40% des foyers.
De son côté, le taux de chômage a montré une augmentation généralisée en 2009 et, comme c’est le cas pour la pauvreté, il se situe au-dessus de la moyenne latino-américaine.
En ce qui concerne l’intégration régionale, on constate une tendance à sa paralysie, motivée par une combinaison d’événements. En premier lieu les séquelles laissées par le coup d’Etat au Honduras, mais aussi le conflit territorial entre le Costa Rica et le Nicaragua ainsi que les dénonciations sur des irrégularités dans la nomination de fonctionnaires de haut niveau dans le Système d’Intégration d’Amérique Centrale (SICA).
Finalement, un autre des reculs est lié à la dette écologique de notre région. En général, les pays de la zone apparaissent comme les pires situés au niveau latino-américain dans le degré d’exposition et de vulnérabilité environnemental. Et dans ce contexte, le Honduras et le Nicaragua montrent les conditions de plus grande gravité.
Apparemment, dans la balance des progrès et des reculs, ces derniers pèsent le plus. Néanmoins, l’esprit du Document estime que le contexte négatif doit se constituer en une oppportunité pour la recherche pragmatique de solutions à des problèmes qu’aucun Etat n’a la capacité d’affronter de manière individuelle. Par conséquent, l’action régionale conjointe, maintenant, doit être possible, nécessaire et urgente.
Carlos Ayala Ramirez
directeur de Radio YSUCA
Source : http://alainet.org/active/50063
Traduit de l’espagnol par GJ