RSS SyndicationTwitterFacebook
Rechercher

La scandaleuse incarcération de Salah Hamouri

Nicolas Sarkozy a reçu toutes les familles des détenus emprisonnés à l’étranger, et certaines reçues même plusieurs fois et les a assurées de son soutien indéfectible. Par contre, il n’a jamais recontré Denise Hamouri, la maman de Salah ! Cette différence de traitement entre citoyens français est déplorable et doit nous interpeller afin de dénoncer cette forme de "délit de faciès". Salah coupable uniquement de "délit d’intention" a le sentiment d’être abandonné d’autant que le tribunal militaire israélien d’occupation a décidé de prolonger sa détention bien qu’aucune charge n’ait été retenue contre lui.

Le caporal Gilat Shalit est un soldat franco-israelien ; il a été arrété les armes à la main et emprisonné à Gaza lors d’une "opération militaire de routine" contre des palestiniens. La diplomatie française s’est entièrement mobilisée (sous la pression des sionistes) pour défendre ce "jeune scout français" innocent, "otage du Hamas" parti faire son service militaire en Israel. « Nous ne cesserons de le répéter » a martelé Bernnard Kouchner, « la libération immédiate et inconditionnelle de Gilad est une priorité pour la France ».

Désormais, son portrait flotte sur le fronton de plusieurs édifices publics français. La famille Shalit a bénéficié de tous les égards de la part des médias, de la mairie de Paris, et même de Nicolas Sarkozy qui les a reçus à plusieurs reprises en grande pompe à l’Elysée. Le président de la République a même dépéché le conseiller diplomatique Jean-David Levitte auprès du président syrien Bachar Al Assad pour plaider la cause du caporal.

Les diplomaties étrangères se sont aussi mobilisées en vue de la libération du caporal ; le président égyptien Hosni Moubarak a récemment reproché à Israël d’avoir fait échouer un accord qui allait déboucher sur la libération du soldat israélien Gilad Shalit. Il a indiqué au quotidien Yediot Aharonot que le soldat était sur le point d’être remis lorsqu’Israël a modifié les conditions pour un échange de prisonniers.

Rien de tel pour Salah Hamouri qui est aussi un français, incarcéré depuis mars 2005 en Israël et condamné en avril 2008 par le tribunal militaire d’occupation à sept ans de prison pour son implication supposée dans un improbable complot. Il sollicitait une libération anticipée, car accusé sans preuve matérielle, mais son seul crime était d’avoir des sympathies pour ce malheureux peuple palestinien. Salah, âgé de 24 ans, fils de Denise Guidoux, originaire de Bourg-en-Bresse, et de Hassan Hamouri. Salah est « coupable » d’avoir eu l’intention d’assassiner le rabbin Ovadia Yossef, chef du parti séfarade Shas. Salah a été arrêté le 13 mars 2005 alors qu’il se rendait à Ramallah. Il a été emmené à la prison de Moskobiah à Jérusalem. Il y est resté 3 mois, en isolement et en interrogatoire. Salah Hamouri est néanmoins citoyen d’honneur de la ville de Grigny dont le maire est René Balme. Ce courage du conseil municipal de Grigny (qui a voté cette décision à l’unanimité) lui a attiré des foudres d’une certaine presse.

Les prisonniers palestiniens n’obtiennent jamais de remise de peine, à l’inverse des détenus juifs, même meurtriers. Denise Hamouri a été seulement reçue par Boris Boillon un des conseillers de Sarkozy. Même Stephane Harzelec, le consul-adjoint de Haïfa, n’a pas été autorisé à pénétrer dans la salle d’audience du tribunal militaire et, a du patienter plusieurs heures à l’extérieur.

Une humiliation de plus… pour la diplomatie française. Certes, on peut nous retorquer que l’ambassadeur d’Israel en France, Daniel Sheck a été convoqué au Quai d’Orsay pour lui voir reprocher la politique de colonisation de son pays. Mais la réaction instantanée du CRIF est plutôt inquiétante : "Le CRIF regrette la convocation jeudi 23 juillet au Quai d’Orsay de Daniel Shek, l’ambassadeur d’Israël pour des questions relatives à des constructions dans l’agglomération de Jérusalem." Et pour être plus précis, on met en garde : "Le CRIF espère qu’il ne s’agit que d’un simple malentendu et que les bonnes relations entre la France et Israël se poursuivront dans un esprit de dialogue constructif".

Il semble que le CRIF apparait davantage comme porte-parole d’une puissance étrangère que comme conseil représentatif ayant à l’origine pour vocation de défendre les intérêts des Juifs et assurer leur bien-être en France.

Bienheureusement, ce virage a fait grincer des dents ; une des associations fondatrices, l’UJRE, a préféré prendre ses distances et claquer la porte du CRIF : "Voilà déjà quelque temps que nous nous inquiétons d’un positionnement politique du Crif en rupture avec ses valeurs fondatrices. Lors de l’Assemblée générale de l’automne dernier, nous avons indiqué que, s’il était essentiel de maintenir des relations constructives avec le pouvoir politique… Nous voulons croire que le Crif saura abandonner son positionnement partisan et la proclamation d’anathèmes relevant d’autres temps pour retrouver son rôle et sa représentativité dans la société française ; pour défendre les intérêts moraux des Juifs de France et contribuer, à partir des valeurs qui le fondent, au processus de paix au Proche Orient".

Richard Prasquier est libre de choisir son camp ; il préfère s’aligner sur la politique du tout sécuritaire du gouvernement Netanyahu-Lieberman (dont on ne fait plus mystère de ses objectifs de vouloir "transférer" la population non juive hors d’Israel) . Il s’attaque à Shlomo Sand qui pour lui est "un historien sans qualification", ce dernier n’étant pas assez dans les rangs. Pourtant bien d’autres historiens israéliens qualifiés (Benny Morris, Ilan Pappé, Avi Shlaïm, Tom Segev…) avaient dénoncé le nettoyage ethnique en règle subi par les Palestiniens.

Il critique aussi certains médias français dont il estime que "Les positions se sont durcies depuis la mise en place du nouveau gouvernement israélien qu’il est de bon ton de critiquer, sans même écouter ses arguments et ses propositions."

Je ne vois pas quel argument ou justification on pourra invoquer par exemple lorsque ce gouvernement décide de s’attaquer au sacré : la mémoire du peuple palestinien. En effet, une loi est en cours d’examen à la Knesset, le Parlement israélien, soutenu par le premier ministre, et propose d’exclure le mot Nakba des manuels scolaires arabes destinés aux Palestiniens d’Israël. Ironie de l’histoire, ce même mot arabe est utilisé pour désigner la Shoah…..

Pourtant on nous répète sans cesse que le gouvernement français s’active pour défendre ses ressortissants à l’étranger, là où ils se trouvent et "quoi qu’ils aient fait"

En effet :

- pour Clotilde Reiss, la jeune Française emprisonnée en Iran, Bernard Kouchner , ministre des Affaires étrangères, nous assure qu’elle "est en bonne santé" bien que "préoccupée" par son sort, après la visite jeudi matin de l’ambassadeur de France à Téhéran. "Notre ambassadeur à Téhéran a visité une Française innocente en prison, à la prison d’Evin. Elle est en bonne santé, elle est évidemment préoccupée, mais elle tient le coup, elle est solide", a-t-il expliqué sur France Info.

- pour Florence Cassez, depuis l’Aquila en Italie où il participe au sommet réunissant les pays industrialisés du G8 et les pays émergents du G5, Nicolas Sarkozy a réclamé à nouveau jeudi au cours d’une conference de presse que la Française Florence Cassez, emprisonnée au Mexique, "effectue sa peine de prison en France". Le chef de l’Etat a indiqué avoir discuté de cette affaire jeudi avec le président du Mexique.

- Souvenons nous de la campagne effrénée pour la libéralisation de la franco-colombienne Ingrid Betancourt, "otage" des FARC.

 Même les kidnappeurs d’enfants tchadiens de l’Arche de Zoé ont eu droit à tous les honneurs de la part des médias et des politiques français. On se souvient de cette affaire pour laquelle Nicolas Sarkozy s’était démené à grand renfort médiatique et avait finalement obtenu l’extradition des membres de l’association française. "J’irai les chercher quoi qu’ils aient fait" avait-t-il dit.

On pourrait légitimement se demander si certains ne seraient pas considérés plus français et plus égaux que d’autres.

Abd Raouf Chouikha

Ecrire à Salah Hamouri en prison : Doar Nah Guilboa. 10900 Beit Shean. Israël.

URL de cet article 8946
   
Même Thème
Claude Lanzmann. Le Lièvre de Patagonie. Paris : Gallimard, 2009.
Bernard GENSANE
Il n’est pas facile de rendre compte d’un livre considérable, écrit par une personnalité culturelle considérable, auteur d’un film, non seulement considérable, mais unique. Remarquablement bien écrit (les 550 pages ont été dictées face à un écran d’ordinateur), cet ouvrage nous livre les mémoires d’un homme de poids, de fortes convictions qui, malgré son grand âge, ne parvient que très rarement à prendre le recul nécessaire à la hiérarchisation de ses actes, à la mise en perspective de sa (…)
Agrandir | voir bibliographie

 

« Nous préférons croire au mythe selon lequel la société humaine, après des milliers d’années d’évolution, a finalement créé un système économique idéal, plutôt que de reconnaître qu’il s’agit simplement d’une idée fausse érigée en parole d’évangile. »

« Les Confessions d’un assassin financier », John Perkins, éd. Editions Alterre, 2005, p. 247

© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.