Lettre ouverte d’un contribuable désenchanté à Monsieur le Président de la République et son Ministre des Finances et tous ceux qui sont "indignés" par le départ de Gerard Depardieu

Messieurs, Mesdames,

Il y a 30 ans je trouvais normal et sain de payer des impôts et d’être solidaire de la nation et notamment des Français pauvres (de plus en plus nombreux à cause de la politique libérale que vous menez sur le modèle étasunien dont l’échec est pourtant patent).

Ce que je me suis mis à trouver de plus en plus anormal à mesure que le pays s’appauvrissait, ce sont les injustices fiscales, notamment les niches que les élus se sont votées sur mesure (pour ne citer que les deux plus scandaleuses à mes yeux, la niche Coppé (l’exonération de l’impôt sur les plus-values d’entreprises), et l’exonération des oeuvres d’art de l’ISF), le train de vie luxueux d’élus en surnombre, ministres et autres représentants du peuple aux indemnités généreuses dégrevées d’impôts, et aux mille avantages en nature, élus qui de plus sont devenus progressivement inutiles à mesure qu’augmentait le pouvoir de l’Europe (dont les commissions non-élues et les députés mènent aussi grand train aux frais du contribuable), les grands travaux inutiles, toquades d’élus mégalomanes, l’exonération des multinationales de leur devoirs fiscaux grâce aux paradis fiscaux et autres dérogations scandaleuses, les milliards donnés aux banques spéculatives (qui sont le véritable pouvoir aujourd’hui) et aux entreprises qui délocalisent, la vente bradée de nos entreprises publiques, biens de la nation, à des privés (trop souvent amis des décideurs politiques) qui s’empressent d’augmenter les tarifs, de ne plus entretenir les installations (voir la dégradation du métro et de la SNCF) et de délocaliser tout ce qu’il est possible de délocaliser pour faire toujours plus de profit à nos dépens, le creusement scandaleux des inégalités, et j’en passe...

Le corollaire de la dérive libérale - et de tous les abus et privilèges (sans parler de la corruption galopante), dignes de l’ancien régime qui en sont la conséquence directe - c’est le report de la charge fiscale sur les classes moyennes qui engendre leur étiolement et leur désespoir, la paupérisation de 99% de la France, la baisse des salaires au profit du capital et l’augmentation exponentielle des chômeurs, des SDF, des suicides, pendant que le gouvernement s’occupe avec des "réformes sociétales" seul domaine de souveraineté qu’il lui reste avec l’art et la manière d’augmenter des impôts et de détruire les services publics.

En conséquence de quoi je ne jette pas l’anathème sur ceux qui s’exilent fiscalement car je les comprends. Il est insupportable de payer des impôts qui vont directement dans la poche des banquiers à cause de la loi inique que Pompidou a fait passer (et que vous gardez religieusement à la demande des banquiers) et qui interdit à la Banque de France de prêter sans intérêts à l’état (mais pas aux banques privées) et qui force l’état à s’endetter auprès des banques privées à des taux usuraires ce qui fait que le montant de la dette actuelle est égal au total des intérêts versés aux banques privées depuis cette loi. Comme les banques privées absorbent tout l’argent de nos impôts, évidemment il n’y en a plus pour les services publics, les fonctionnaires (il faudrait plus de fonctionnaires aux impôts pour combattre la fraude fiscale, la vraie : les milliers de milliards qui sont dans les paradis fiscaux), notre système de santé, ni rien. Il est insupportable de remplir ses devoirs de citoyen et en échange d’être le témoin impuissant de la déstabilisation de notre pays par une dette fabriquée de toutes pièces, par le dumping social et économique et par des guerres néo-coloniales coûteuses et meurtrières (Afghanistan, Libye, Syrie), le témoin impuissant de l’affaiblissement de l’état français au profit d’une Europe anti-démocratique et ultralibérale, le témoin impuissant de l’appauvrissement de la France et des Français, le témoin impuissant des abus, privilèges et malversations d’une petite oligarchie financière, médiatique et politique apatride souvent mafieuse et presque toujours intouchable, et j’en passe...

En vous plaignant de la désertion des contribuables qui entretiennent votre luxueux train de vie vous vous accusez vous-mêmes, je le crains, car cette Europe monstrueuse et prédatrice qui permet l’exil fiscal, etc.. et provoque l’appauvrissement de notre société, c’est vous qui l’avez voulue et faîte, n’est-ce pas, et contre la volonté de notre peuple.

Hélas, je sais que je prêche dans l’oreille de sourds car nous ne vivons plus dans une démocratie mais dans une ploutocratie et bientôt dans la dictature éclairée que vous nous préparez, et ceci explique sans doute cela.

Profitez bien de vos privilèges, car cela ne durera peut-être pas. Jésus l’a dit, les premiers seront les derniers et c’est le seul espoir qu’il nous reste...

Avec tout le respect dû à vos fonctions désormais largement honorifiques et tout à fait hors de prix dans notre France appauvrie par 40 ans de pillage néolibéral apatride et d’évasion fiscale,

Un contribuable français désenchanté
Dominique Muselet

COMMENTAIRES  

22/12/2012 09:12 par babelouest

Je pense que rien n’a été oublié.... mais, horreur ! ils s’en fichent complètement, et ceux qui leur tiennent tête finissent en prison ou à l’hôpital. Même les "forces de l’ordre" commencent à murmurer.

Allez-y, Messieurs les bankigarques, servez-vous, les entrailles de notre pays sont encore pantelantes, pendant que celles de plus touchés encore sont frappées par la rigidité finale. Après, il ne vous suffira plus qu’à vous vautouriser mutuellement. " ’Béciles ! "

22/12/2012 09:27 par Dwaabala

Belle argumentation, digne, mesurée et juste.
De laquelle se déduit facilement que le contribuable moyen vit dans le monde virtuel de l’égalité et de la fraternité entre les citoyens contribuables, et de la liberté pour le capital et ceux qui le servent dans un autre monde.

22/12/2012 10:27 par Anonyme

Excellent : tout est dit et fort bien.

Une remarque, toutefois : ceux qui partent à grand fracas, ou qui sont partis sans tapage, ne sont pas les défenseurs du petit contribuable grugé, mais bel et bien des adeptes forcenés du capitalisme sauvage qui refusent le partage et qui veulent toujours plus d’exonérations afin de conserver tout l’argent qu’ils ont accumulé grâce aux faveurs successives des gouvernements en place, et sans rapport avec un quelconque talent.

C’est là toute l’hypocrisie du gouvernement actuel qui fait mine de s’indigner d’une politique qu’ils mettent en place inexorablement pour favoriser encore les riches en se servant dans les caisses publiques, désormais alimentées par les petits contribuables pour le bénéfice d’une oligarchie.
Ils sont méprisables.

Et tout ce tapage est sans doute une manoeuvre sournoise qui leur permettra de renoncer à prélever des impôts aux plus riches, comme annoncé dans les campagnes électorales mensongères.

22/12/2012 12:22 par xav

absolument d’accord avec vous Dominique,

Merci pour ce billet

22/12/2012 15:05 par caame julia

Oh, Oh ! mais pas question de laisser tomber et, de plus, je me fiche "qu’ils s’en fichent".
Il va falloir rendre des comptes et chiffrés en lieu et place de balbutiements.
Les peuples heureux n’ont pas d’histoire dit-on et bien plutôt que de laisser progresser
la fange malodorante on va refaire de l’Histoire.
Car ainsi qu’un proche aimait à le pontifier (lui qui n’avait jamais été à une connerie près)
’lorsque je me suis aperçu qu’il fallait d’abord respecter celles et ceux qui te sont proches
(milieu familial pour lui) j’ai compris que c’était à partir de là que se faisaient les politiques’.

22/12/2012 15:16 par Safiya

Cher Dominique Muselet

Ce que vous dites est juste. Personnellement, avec une retraite en deçà du smic brut, contribuer aux impôts locaux (je ne suis pas imposable sur celui sur le revenu) m’est, aujourd’hui, pénible tant la chose me semble injuste. Résultat, j’ai cessé de faire le tri des déchets, j’ai trop l’impression d’être non seulement rackettée mais qu’ en sus en m’exploite à trier gratuitement.

J’ajoute ceci à "La loi inique (...) qui interdit à la Banque de France de prêter sans intérêts à l’Etat (mais pas aux banques privées)(...)", une loi inique et scélérate dans le sens que l’Etat perd de sa souveraineté et devient tributaire des banques privées qui prospèrent à notre détriment en parfaits parasites.

Que fait-on des prédateurs ? Donc pour l’assainissement, une seule solution : la dissolution !

22/12/2012 16:45 par Tony Meuter

Excellent article.

Pour compléter, je dois vous faire part de cette phrase de M. Draghi, nouveau président de la BCE, au Financial Times le 14-12 :
"... Les pays avec un endettement et des déficits élevés devraient comprendre qu’ils ont perdu leur souveraineté sur leurs politiques économiques depuis longtemps dans un monde globalisé... ".

Ce qu’il appelle "monde globalisé" est le résultat des attaques financières du capital mondial sur les ressources et l’industrie, ce qui prive les pays de leurs leviers économiques.

Le partage étant fait, il poursuit en disant :
" Travailler ensemble dans une union orientée vers la stabilité signifie en fait regagner de la souveraineté ".

Quelle hypocrisie.

23/12/2012 03:38 par ADSkippy

Il est temps de radicaliser la lutte politico-sociale et la résistance contre ces "bâtards de voltaire"(JR Saul). Ces nouveaux aristocrates des grandes finances, ces bourgeois technocrates, bureaucrates, ploutocrates, doivent tous rendre des comptes au peuple, bientôt. L’Histoire ne s’arrêt pas. Face a leurs violence économique contre le peuple, il faut une violence réciproque, contre ses parasites, et très vite, car les dégâts socio-économiques seront irréparables.

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