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La crise ukrainienne à travers le prisme stratégique américain

Gabriel Galice

La vérité occidentale martelée veut que le président russe Vladimir Poutine entende reconstituer à la fois l’empire russe et l’Union soviétique.
Commis voyageur zélé, le président américain Barack Obama vint à Bruxelles proposer aux Européens de remplacer du gaz russe par du gaz états-unien, à l’heure où se prépare la grande affaire du Partenariat transatlantique sur le commerce et l’investissement entre l’Union européenne et les Etats-Unis d’Amérique (TTIP).

Tout cela n’est ni soudain, ni inattendu pour qui prend la peine de relire les meilleurs stratèges des Etats-Unis. Dès 1997, Zbigniew Brzezinski explique dans son maître livre, « Le grand échiquier – l’Amérique et le reste du monde » (actualisé dans « Le vrai choix » en 2004), pourquoi et comment contrôler l’Eurasie. « L’Eurasie reste l’échiquier sur lequel se déroule la lutte pour la primauté mondiale. » Né Polonais, successivement conseiller des présidents Carter et Obama, Brzezinski annonce que « le but de ce livre est de formuler une politique géostratégique cohérente pour l’Amérique sur le continent eurasien ». Hypothèses et raisonnements sont d’une grande rigueur intellectuelle. L’Eurasie est centrale, l’Amérique doit y être présente pour dominer la planète, l’Europe est la tête de pont de la démocratie en Eurasie, l’OTAN et l’Union européenne doivent, de concert, étendre leur influence en Eurasie, les Etats-Unis doivent jouer simultanément l’Allemagne et la France (carte des zones d’influences respectives de ces deux pays à l’appui), alliées fidèles mais, de façon différente, remuantes et capricieuses. Cela sera laborieux : « Quoi que l’avenir nous réserve, on peut raisonnablement conclure que la primauté américaine sur le continent eurasien sera soumise à de fortes turbulences et même confrontée à des épisodes de violence. »

L’auteur repère cinq « acteurs géostratégiques » : la France, l’Allemagne, la Russie, la Chine et l’Inde, et cinq « pivots géopolitiques » : l’Ukraine, l’Azerbaïdjan, la Corée, la Turquie et l’Iran. Russie et Chine sont les deux limites à l’expansion projetée. « Exclure la Russie (de l’UE ou de l’OTAN) pourrait être lourd de conséquences – cela validerait les plus sombres prédictions russes –, mais la dilution de l’Union européenne ou de l’OTAN aurait des effets fortement déstabilisateurs. » « Le dilemme se résume à un choix entre équilibre tactique et dessein stratégique », estime l’Américain. Le « pivot géopolitique » ukrainien fait l’objet de longs développements : « Au cours de la période 2005–2010, l’Ukraine pourrait à son tour être en situation d’entamer des négociations en vue de rejoindre l’UE et l’OTAN. » Brzezinski suggère d’étendre à l’Ukraine le « triangle de Weimar », constitué en 1991 par la France, l’Allemagne et la Pologne pour en faire « la colonne vertébrale de la sécurité européenne ». « Une question essentielle se pose, poursuit Brzezinski : ce scénario se déroulera-t-il dans un environnement apaisé ou dans un contexte de tension avec la Russie ? »

Nous avons la réponse. Mais le défi lancé aux Russes s’encombre peu de subtilités : « Pour que le choix de l’Europe – et, en conséquence, de l’Amérique – se révèle fructueux, la Russie doit satisfaire à deux exigences : tout d’abord, rompre sans ambiguïté avec son passé impérial ; ensuite, cesser ses tergiversations à propos de l’élargissement des liens politiques et militaires entre l’Europe et l’Amérique. » Bref, un désarmement unilatéral.

Benjamin Barber, ancien conseiller du président Clinton, complète utilement la vision états-unienne, dans une version plus modérée. Adversaire résolu du président George W. Bush et des néo-conservateurs, il oppose, dans son ouvrage « L’Empire de la peur » (2003), les « aigles », schématiques et brutaux, aux « chouettes », subtiles dans leur chasse entre chien et loup. Reste que les chouettes sont aussi des prédateurs. A la « guerre préventive », Barber préfère la « démocratie préventive », sans s’illusionner sur la « démocratie de marché » chère à certains démocrates : « Le désir de favoriser l’expansion de la démocratie forme une composante déterminante de la démocratie préventive comprise comme politique nationale de sécurité, mais on confond souvent ce soutien avec le désir tout aussi intense d’exporter le capitalisme et de cultiver les marchés mondiaux. [...] Dans le secteur international, l’âge des « robber barons » (barons voleurs) – appelons-les les banques prédatrices ou les spéculateurs hors-la-loi – est de retour. »

La teneur de l’accord d’association entre l’Ukraine et l’UE illustre largement la volonté prédatrice de s’emparer des richesses de l’Ukraine, moyennant quelques corruptions des nouvelles élites, au nom de « la concurrence libre et non faussée », de la « mobilité des travailleurs », de la « récupération ou du rapatriement des capitaux investis, de même qu’aux profits qui en découlent. » Le volet militaire n’est pas oublié : « Promouvoir une convergence graduelle en matière de politique étrangère et de défense. »

Serait-ce l’empire euro-américain ?

Gabriel Galice
Président du GIPRI* (Genève).

* GIPRI : L’« Institut international de recherches pour la paix à Genève » (en anglais « Geneva International Peace Research Institute », GIPRI) est une organisation non gouvernementale basée à Genève.

COMMENTAIRES  

02/05/2014 22:29 par Aldamir

Les nombreuses bases américaines installées depuis près d’une décennie en Afrique de l’Ouest ne figurent pas dans le décompte.

03/05/2014 10:31 par Archer Gabrielle

Non à l’U.E de Bruxelles américaine, l’ennemi c’est pas la Russie, le vrai ennemi des peuples c’est les yankees & Cie

03/05/2014 18:06 par Lionel

L’heure n’est sans doute plus aux conjectures sur les stratégies ( très déchirées malgré les non-dits et autres implicites ) US/UE en interne et les tactiques conséquentes des BRICS !
Une guerre civile aux conséquences imprévisibles sinon par le nombre de victimes et les retombées internationales a concrètement commencé depuis 48h, les milices paramilitaires néonazies ainsi que les forces spéciales étrangères sont impliquées ( Ukraine, Allemagne, Grande-Bretagne, Israël, Étasunis ).
Ce conflit semble d’après des analystes à haut risque de nucléarisation par les armements non-stratégiques à la disposition de tous les chefaillons des différentes parties ( contrairement aux armements stratégiques dont l’utilisation dépend de groupes de dirigeants ).
Rappelons à toutes fins utiles que l’Ukraine est un pays très nucléarisé ne serait-ce que par le nombre de réacteurs nucléaires ( 16 en service ) dont au moins trois sont en décrépitude et alimentés par du combustible étasunien non conforme aux normes de ce type de réacteur, les risques sont donc extrêmement élevés qu’un pouvoir néonazi putschiste puisse faire du chantage au monde entier ou plus simplement qu’il serait facile, comme l’ont démontré à de nombreuses reprises les militants anti-nuke, qu’un commando prenne possession d’un site...
Je vous laisse développer votre scénario, peut-être pire que le mien !
Hitler aurait disposé d’un tel pouvoir, il serait peut-être Maître du monde.
C’est ce risque dont nos dirigeants ne peuvent pas ne pas avoir en conscience que nous sommes en train de courir.
Et nous discutons de la couleur du prochain cheval...
Plusieurs personnes ont tenté d’alerter ici même avec des avis très pertinents, mais il semble que sur LGS comme ailleurs nous ne soyons pas disposés à croire ce que nous savons.
Si les lecteurs du GS n’ont aucun avis à donner sur une situation infiniment plus risquée qu’à l’époque de la "crise des missiles de Cuba", où tout dérapage peut mettre le feu à l’Europe entière ( pour le coup, jusqu’à l’Oural... ), c’est à désespérer de tout !
Tentons d’appliquer la politique de la démocratie Communale où chacun est invité à donner un avis, aussi humble soit-il, juste histoire de nous prouver que nous avons compris comment ça marche.

03/05/2014 19:21 par Lionel

Entendu à l’instant sur RFI : reportage à Genève où le CICR lance une expo intitulée "Humaniser la guerre ?" ( Ça ne s’invente pas... ), où un délégué déclare sur un ton très badin "qu’on ne peut pas éviter les guerres mais on peut éviter les souffrances !".
Il s’agit d’un implicite majeur, il est admis dans l’esprit commun que les guerres sont inévitables.
D’où sans doute la sidération et l’hébétude dont font preuve toutes les gauches à propos de l’Ukraine !?...

03/05/2014 23:26 par domi

Il est très difficile de se rendre compte d’une réalité dont on fait partie.

Quand on voit l’aveuglement dont la majorité de la population fait preuve, on ne peut que se dire qu’on doit soi aussi avoir des œillères ici ou là. C’est pourquoi des sites comme LGS, RT, The Saker, Dedefensa, Les-crises sont essentiels pour nous permettre de prendre un peu de distance et nous voir nous-mêmes à travers les yeux des autres.

N’est-il pas effarant qu’après la Yougoslavie, la Libye, la Syrie, le Mali, la centrafrique et j’en oublie sûrement, la majorité des français continue de croire que l’UE c’est la paix ?
Qu’après avoir entendu Nuland elle-même dire que les USA avaient dépensé 50 milliards de dollars pour déstabiliser l’Ukraine, la majorité des Français s’entête à croire que c’est Poutine qui déstabilise l’Ukraine ?
Que sachant que les USA et l’UE ont violé systématiquement toutes les promesses faites à la Russie de ne pas amener l’OTAN à ses frontières, la majorité des français continue de penser que c’est la Russie qui a des visées impérialistes et qu’elle menace l’UE et les USA ?
Qu’ayant tous les jours la preuve quotidienne du contraire les gens continuent plus ou moins à se croire en démocratie ?

La réalité c’est qu’on ne veut pas se voir tel qu’on est (il est vrai que ce n’est pas beau) et le déni est si violent qu’on fait même de la projection en accusant la Russie (qui elle est actuellement plutôt pacifique, respectueuse des lois, responsable, sans langue de bois et démocratique - liberté d’expression, terre d’asile des lanceurs l’alerte-) d’être ce que nous sommes devenus : une entité UE-US autoritaire, impérialiste, prédatrice, sanguinaire, irresponsable et hypocrite aux ficelles cousues de fil blanc.

La situation s’est renversée depuis l’Union Soviétique. Le pays de la liberté et du droit c’est désormais la Russie. Et nous sommes devenus un empire UE-US voyou à l’exemple d’Israël, notre Golem et notre modèle, un danger pour l’humanité.

Le moment est arrivé où l’arrogance, l’aveuglement et l’avidité prédatrice de l’empire UE-US se heurte, en Ukraine, à une puissance capable de résister à sa marche destructrice. Poutine ne souhaitait sûrement pas l’affrontement mais je ne pense pas qu’il pourra y échapper encore longtemps car les fous bellicistes US-UE ne cessent de l’agresser et il ne peut plus reculer. S’il hésite encore c’est qu’il répugne à mettre en danger les Ukrainiens de l’est majoritairement pro-russes qui seront les premières victimes d’une guerre entre la Russie et l’UKraine-UE-US,

En fait de boucliers humains, c’est l’UE-US qui se sert des Ukrainiens russophones comme boucliers humains pour agresser Poutine.

05/05/2014 00:01 par Anne Wolff

En ce moment je saute d’Ukraine au Venezuela… deux pays qui subissent avec un léger décalage dans le temps des processus de déstabilisation qui sont fondés sur les mêmes schémas des applications de méthodes de Gene Sharp.
La grande différence réside dans la réaction des populations et des gouvernements à la tentative de déstabilisation. Il n’est pas inutile de rappeler qu’alors que la population du Venezuela a une division assez équilibrée entre chavisme et opposition, une enquête menée par une ONG dans tous les pays de la région avait montré que le Venezuela battait des records de confiance en la démocratie de la part des citoyens, puisqu’elle y dépassait les 80%. Ce qui fait qu’il n’y a pas eu le soulèvement populaire nécessaire pour une Révolution de Couleur en règle. Au contraire, l’aspect fascisant et terroriste de la méthode qui n’était dissimulé par aucune foule en colère est apparu à nu alors que la réaction plus que mesurée du gouvernement et son appel au dialogue avec l’opposition, ainsi que l’immense travail accomplit conjointement par des tas de gens parmi le peuple, des analystes d’autres pays et le gouvernement pour mettre en lumière ce qui se passait a isolé les putschistes. Et réunit selon les derniers chiffres que j’ai 85,6% (agence non chaviste) de la population autour de l’action du gouvernement. Travailler à une culture de paix et de dialogue, écouter ce que l’opposition avait à dire, chercher des solutions, aider des maires d’opposition – qui malgré les menaces sont venus s’asseoir au table de dialogue à réaliser des projets dans leur commune…. Etc… bien sûr ce n’est pas parfait et il subsiste d’autant plus de problèmes que la marche Venezuela se fait à contre courant du néo libéralisme et de la globalisation. En ce qui concerne le Venezuela je lis l’espagnol, donc j’avais accès à une immense documentation en direct.
En ce qui concerne l’Ukraine, c’est plus difficile d’accéder à des témoignages directs. J’en ai tout de même trouvé quelques-uns, qui montrent qu’il y a réellement eu un soulèvement populaire à Maidan, de même qu’il y a eu un grand mouvement de grève dans les mines de l’Est l’année précédente. Bref, il règne un grand mécontentement légitime dans la population qui au départ était dirigé vers les abus de l’oligarchie au pouvoir à l’Est comme à l’Ouest. Même s’il ne faisait pas lutte commune, ils luttaient contre les mêmes. En ce même sens beaucoup de nationalistes ne sont pas de fascistes, et beaucoup de russophones n’étaient pas, à ce stade des séparatistes. Comme un peu partout dans le monde, ils avaient cette colère légitime de ceux qui se voient dépossédés de leur pays et du pouvoir de décision politique et plongés dans la misère par cette dépossession… la globalisation néo libérale qui nous est commune. Avant l’intervention des nazis, un très petit groupe, pour donner un ordre de grandeur, un témoignage disait lors de leur intervention : 70 000 manifestants, entre 1000 et 1500 miliciens nazis et un peu plus de 100 professionnels. Les manifestants avaient été bien plus nombreux à d’autres moments et le mouvement s’essoufflait.
Où je voulais en venir, c’est qu’alors que la logique voudrait que le peuple s’unisse contre un ennemi commun, ce que jusqu’ici le Venezuela a réussi a faire en promouvant la paix et le dialogue, quand il n’y a pas d’unité, de noyau d’un mouvement, il suffit d’un petit groupe pour retourner la situation et dresser une partie de la population contre l’autre.
Dans le texte d’Oleg Yasinsky il y a ce message qu’il a reçu de son ami de Kiev et qui se termine par

« Je me hais moi et les autres compagnons de gauche, d’avoir perdu tant de temps et d’énergie à des discussions et disputes internes à la place de construire une véritable alternative politique, alors qu’au cours des derniers mois, nous ne pouvions déjà plus avoir aucune influence sur rien »

Et cela fait écho à d’autres témoignages… ce sentiment qu’à un moment il y avait une chance à saisir mais que personne n’était prêt à la faire et qu’après c’était trop tard. Je ne peux rien faire directement pour le peuple d’Ukraine, mais je pense que cela pourrait nous arriver de nous retrouver dans une telle situation. Parfois je discute avec des gens que j’aime bien avec qui je partage beaucoup de choses et dont les modes de vie ne sont par en contradiction avec le mien, et la conversation glisse sur des sujets politiques et nous ne sommes pas du tout d’accord… dans ces moments là, je pense à tous ces pays où les gens vivaient en bonne entente malgré leur différence ethnique, religieuse, politique et où comme en Ukraine des puissances extérieurs ont provoqué des tensions, et des guerres civiles, qui leur permettent d’accaparer le pays pendant que les gens s’entre-tuent. Et je sais que poussés par d’autres, manipulés nous pourrions nous retrouver dans des camps ennemi avec la haine comme à Odessa…dont ce texte est le témoignage qui me parle le plus, alors qu’en réalité nous pouvons nous entendre pour travailler ensemble à des objectifs communs de bonne vie ; peler des patates pour faire un bon repas, désherber un jardin, se donner un coup de main pour un travail quelconque…
Je ne voudrais pas que nous arrive ce qui et arrivé à l’ami d’Oleg, qui a la fin hais tout le monde y compris lui-même. Alors bien sûr nous n’avons pas comme au Venezuela un gouvernement autour duquel nous organiser, mais je vois bien que les mouvements populaires là-bas n’attendent pas que le gouvernement prennent les choses en main pour s’organiser, ni ne se prive de faire des critiques constructives a son action, ni n’hésite à lui proposer les solutions que les réflexions communes ont inventées… quand Chávez a été élu, il y avait déjà vingt ans de ce genre de travail d’organisation populaire… pas comme le préconisent les gauchistes européens d’éducation des masses par une avant-garde, mais de rencontre, d’écoute, d’échange, d’élaboration de projets, d’actions communes entre des personnes sur un pied d’égalité…
Il y a une phrase d’I Stengers qui synthétise bien cette démarche :
[...] une lutte pour que nulle position ne puisse définir comme légitime la mise sous silence d’autres, qui sont censés ne pas compter 
Je n’ai ni solution, ni recette, mais je suis intimement convaincue que si nous n’en trouvons pas collectivement, nous risquons nous aussi un jour de haïr la terre entière à commencer par nous même et certains de nos voisins….

05/05/2014 04:08 par Lionel

Merci Anne !
Citer I. Stengers me fait penser à un livre de Starhawk ( Parcours d’une altermondialiste ) qu’elle a traduit où il est dit "... et il faut que nous gagnions cette bataille, car je crains que nous n’ayons pas les moyens d’en mener une autre !"

05/05/2014 18:05 par Sebastien Perron

Money talk comme on dit. Si le gaz américain est moins cher que le gaz russe, j’ai aucun problème à changer de fournisseur.

05/05/2014 18:26 par Lionel

@ Sébastien, sauf que le gaz étasunien n’existe que sur le papier...
Toutes les prétentions dans ce domaine sont basées sur l’exploitation des gaz de schistes d’une part dont les réserves ont été volontairement falsifiées, d’autre part parce que ces gaz de schistes ne sont rentables que les premières semaines d’extraction et qu’il va bientôt falloir passer à la caisse pour les dégâts environnementaux ( sous-sol compris ) !
Ensuite bien sûr, libre à chacun de donner sa caution en allant au supermarché plutôt que chez le petit producteur, comme en ne se sentant pas de responsabilité dans la marche du monde...
Votre argument des yeux fermés sur le moins cher est assez choquant.

05/05/2014 19:23 par Sebastien Perron

@Lionel

Pour l’argument environnemental on repassera parce que l’exploitation des gaz en Sibérie est effectuée de façon encore plus sauvage que celle des gaz de schistes aux États-Unis. On voit bien que ce texte est teinté d’idéologie extrême gauche et anti-américanisme primaire basé sur une méconnaissance des motivations américaines dans le dossier de la crise ukrainienne.

05/05/2014 20:54 par legrandsoir

anti-américanisme primaire basé sur une méconnaissance des motivations américaines dans le dossier de la crise ukrainienne.

anti-américanisme primaire : c’est un terme employé par les pro-américains bêlants.

07/05/2014 01:10 par Leo Lerouge

@ Sebastien Perron

Ah !ah !ah ! : "Antiaméricanisme primaire" : en effet, ce terme a été inventé par les propagandistes pro-américains pour faire taire toute critique contre les US.
Vous pouvez toujours croire aux paillettes d’Hollywood, à la "liberté" dont jouissent les citoyens, au prestige des US à l’étranger.
Vous pouvez toujours penser que ce sont les "Américains" qui ont libéré la France pendant la Seconde Guerre Mondiale tout seuls avec leurs petits bras musclés.
Vous pouvez toujours vous imaginer que les Etats-Unis se sont arrogé le titre de gendarmes du monde par foi humaniste et démocratique.
Mais, gardez vos illusions pour vous. Ca ne marche pas par ici.

Ainsi, en ce qui concerne l’extraction des gaz de schistes aux US, il est évident que vous n’avez rien lu d’instructif sur le sujet.
Par exemple, le 26 décembre 2013, Obama ratifiait le projet de loi, adopté à l’unanimité par le sénat US et par 415 voix contre une (et quelques abstentions) à la Chambre des Représentants, qui accélérait les procédures pour les permis d’exploitation sur les terrains privés dans la formation de Bakken.
(lien. Désolé, il va falloir lire en anglais parce que les articles n’abondent pas en fr. ce qui doit vous laisser croire que le phénomène n’existe pas).
C’est à Bakken, situé majoritairement au Dakota du Nord, que 31 puits ont été mis en place en 2005, 74 en 2006, 163 en 2007, 433 en 2008, 468 en 2009, 728 en 2010 et 900 en 2011.
Quelques jours plus tard, le 30 décembre, un train appartenant à Warren Buffet (oui, celui-là : le milliardaire qui s’était étonné que sa secrétaire paie plus d’impôts que lui) transportant du pétrole extrait à Bakken, explosait à Casselton, Dakota du N. Heureusement, cela s’est passé en dehors de la ville, mais les habitants avaient dû être évacués à cause des émanations de fumée hautement toxiques.

Et cette nouvelle loi est, en fait, un amendement à la loi "Energy Policy Act" de 2005 signée par Bush, qui exempte déjà l’industrie des gaz de schistes de se conformer aux lois sur l’eau potable et à d’autres lois. Cette loi décrète également que les produits chimiques contenus dans le "fluide” utilisé pour la fracturation sont un secret de fabrication, ce qui veut dire que l’industrie n’est pas tenue de révéler la composition des mélanges chimiques injectés dans les sols.

Cet article, daté du 11 fev. 2014, "le capitalisme suicidaire empoisonne les ressources en eau de la terre", cite l’histoire d’un couple qui avait acheté une petite exploitation agricole à Fayette County, Pennsylvanie, dont ils détenaient les droits d’exploitation de minéraux, mais pas ceux du gaz ni du pétrole.
En sept ans, 5 puits et un pipeline ont été creusés sur leur propre terrain.
Les conséquences ont été dramatiques : pollution des sols et de l’air, destruction d’arbres fruitiers et de 10 ha de terrain, brulés par les extracteurs de gaz. D’autre part, ils sont constamment sous la menace d’un incendie à cause des fuites de gaz et des écoulements de fluides à 60m de leur maison.

Mais ce n’est pas un cas isolé. De nouveaux rapports sont publiés tous les mois pour dénoncer les dégâts causés à la santé publique par l’exploitation du gaz de schiste.

Ainsi, une équipe de chercheurs de l’Université du Missouri révélait que plus de 700 produits chimiques différents étaient utilisés pour l’exploitation du gaz de schiste. Cette étude porte sur plus d’une dizaine de produits responsables de la contamination des sources d’eau potable dans le Colorado, où sont exploités plus de 10.000 puits.
Bien d’autres chiffres sont cités dans l’article – à lire en entier pour se faire une idée de l’étendue du désastre.

A noter que, à part la pollution de l’eau et de l’air, à part les risques d’incendies et d’explosion, les extractions provoquent des secousses sismiques.
Sans compter les pertes inestimables, comme la perte de leurs terrains agricoles, que subissent ceux qui sont touchés.

Qui bénéficie de cette exploitation sauvage et suicidaire ? Les groupes industriels.
Qui en pâtit ? Les citoyens ordinaires, qui ne sont pas entendus et qui ne sont même pas représentés au Congrès par leurs élus corrompus.
Dans tous les états concernés, les élus républicains ont reçu des dons de la part de l’industrie de l’exploitation des gaz de schiste.
Ainsi, le gouverneur Tom Corbett (R) a reçu de l’industrie 1 813 205 dollars, le président du sénat Joseph Scarnati (R) 359.145 dollars. Etc. et ils sont très nombreux à avoir touché de l’argent.

En Pennsylvanie, les habitants ont remis une pétition signée par 100.000 personnes au gouverneur Corbett demandant l’arrêt des extractions dans cet état.
L’an dernier, 650.000 personnes ont envoyé des messages à l’administration Obama demandant l’interdiction de l’exploitation sur les terrains des collectivités locales.
Résultat ? Le cadeau de l’amendement à la loi précédente autorisant l’industrie à exploiter les terrains privés.

Quant aux militants qui luttent contre l’exploitation des gaz de schistes, ils sont sévèrement punis, parfois même de peines de prison.
Voici un exemple ici.

C’est ce genre de "modèle" de démocratie que vous préconisez ?

Et de quel côté des "Américains" êtes-vous ?
Du côté des prédateurs ou de celui de la majorité de la population, constituée de (très/) pauvres ou de classes moyennes et ouvrières en grande difficulté, qui subit les lois iniques anticonstitutionnelles que se vote une oligarchie toujours plus insatiable ?
Vous voyez que ce n’est pas aussi simpliste que ce que vous le dites.
Et qui est le "primaire", alors ?

NB : Comparer ce qui est comparable
Sibérie : superficie 13,1 millions de km², 39 millions d’habitants
Dakota du N : superficie de 183 273 km2, 672 591 habitants
Pennsylvanie : superficie 119 283 km2 ; 12 281 054 habitants ; et depuis le début 2011, 71 000 forages d’exploitation de gaz de schiste actifs.
Et toute cette destruction pourquoi ?

Il suffit de vouloir se renseigner et on trouve l’information sur Internet.
Ainsi, ce que dit l’article ci-dessus est parfaitement vérifiable.
On trouve, par ex., cette analyse sur le livre de Brzezinski, "le Grand Echiquier" et : ici un article très complet sur les interventions de l’armée US dans le monde dans un journal d’anciens combattants.

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