François Ruffin à la cérémonie des César

Lors de l’édition 2017 des César, François Ruffin a remporté celui du meilleur documentaire pour son film Merci Patron, qui raconte les conséquences sur une famille de la délocalisation d’une usine LVMH. Après avoir reçu son trophée, il s’est lancé dans un discours particulièrement musclé. Ruffin arborait un maillot à l’effigie de Bolloré, propriétaire de Canal+ qui retransmettait la cérémonie, maillot que le cadreur s’efforça de montrer le moins possible. La fin du discours de Ruffin où il remerciait les héros de son film, les Klur et Marie-Hélène Bourlard, ex-déléguée CGT, a été couverte par la musique soudain devenue assourdissante (LGS).

"Mon film, il parle d’une usine qui part en Pologne et qui laisse derrière un paquet de misère et un paquet de détresse. Et au moment où je vous parle, c’est une usine d’Amiens, qui s’appelle Whirlpool, qui fabrique des sèche-linges, qui subit la même histoire puisque maintenant ça part là aussi en Pologne. Ça fait maintenant trente ans que ça dure dans l’ameublement, dans le textile, dans la chimie, dans la métallurgie, ainsi de suite. Pourquoi ça dure depuis trente ans ? Parce que ce sont des ouvriers qui sont touchés, et donc on n’en a rien à foutre. Si c’étaient des acteurs qui étaient mis en concurrence de la même manière avec des acteurs roumains, ça poserait problème immédiatement. Si c’étaient des journalistes, quand on touche à l’avance fiscale des journalistes, ça fait des débats, il y’a des tribunes dans les journaux. Mais imaginons que ce soient les députés, qu’on dise que les députés ne sont pas assez compétitifs. Un député français coûte 7610 euros par mois, un député polonais coûte 2000 euros par mois. Mais imaginons qu’on dise : demain, il faut délocaliser l’hémicycle à Varsovie.

Donc dans ce pays, il y’a peut-être des sans-dents, il y’a surtout des dirigeants sans cran. Donc François Hollande, maintenant, il a l’occasion de montrer sur le dernier fil que son adversaire, c’est la finance, qu’il peut faire des réquisitions, qu’il peut interdire les produits Whirlpool sur le territoire français. Qu’il puisse sortir de l’impuissance et se bouger le cul."

COMMENTAIRES  

27/02/2017 08:52 par cunégonde godot

Excellente intervention de M. Ruffin. Ça ressemble fichtrement, en mieux formulé à du "populisme" à la Trump parlant de l’industrie de son pays délocalisée au Mexique. A la différence près que M. Trump est à la tête d’un pays souverain, alors que M. Hollande et tous les candidats à la présidentielle française, eux – suffisamment éligibles, selon les critères médiacratiques, pour qu’on leur permette, à la télé, de débattre entre gens de bonne compagnie –, ne le sont pas et n’ont nullement l’intention de faire retrouver à la France sa souveraineté pleine et entière, condition indispensable à la mise en œuvre de tout autre politique, de gauche comme de droite. L’ "ouvrier" Ruffin ne serait-il pas plus convaincant encore s’il s’attaquait réellement au système esclavagiste qui permet à M. Bolloré et beaucoup d’autres de s’en mettre plein les poches en toute irresponsabilité : l’Union européenne ? Encore un petit effort M. Ruffin !...

27/02/2017 12:44 par daniel

La Picardie, terre de révolution...
Abonnement à FAKIR 4, rue Blanquetaque 80000 AMIENS
www.fakirpresse.info/

27/02/2017 19:41 par Assimbonanga

@cunégonde G, Il est dommage qu’on n’ait pas davantage de recul sur le brexit et le trumpisme. Les élections seront passées chez nous lorsqu’on pourra enfin mesurer les effets miraculeux du brexit et trumpchit !!!
Visiblement le problème c’est qu’avant 1789, on pouvait voir où habitaient les aristocrates et leurs possessions correspondaient à leurs régions. Les serfs pouvaient même se mettre sur la gueule, s’identifiant à leur seigneur et se croyant ennemis les uns des autres. Désormais, les seigneuries sont transnationales. Ce sont de grandes entreprises qui exercent leurs profits sur tous les continents.
Et nous, on en est encore à se croire nationaux.
Travailleurs de tous pays unissez-vous, oui, mais comment ? Une Europe clandestine et parallèle des travailleurs et des classes dominées ?

27/02/2017 21:52 par François

Excellent...
Peu importe le discours et les convictions profonde des uns et des autres sur les véritables essences du mal qui nous entoure, ce qui est ultra jouissif c’est cette baffe dans la gueule que s’est pris Bolloré.
Ca n’a pas du lui arriver souvent à cette grosse merde !
Après Fanny Ardent, ils vont peut être commencer à trier, les médias mainstream, quand ils donnent du temps de parole au milieu du cinema.
Et la claque aux journalistes et aux acteurs en passant... magistrale !

Je savoure

02/03/2017 08:13 par Scalpel

Toujours aussi punchy le Ruffin, intellectuel de terroir, de l’ici et maintenant, de la lutte au quotidien.
Mais, comme Miss Cunégonde et Assibomanga, je déplore qu’il soit toujours en retrait sur la "belle idée" d’origine nazie.
Pourquoi une telle pudeur à refuser de dénoncer ce monstre froid pour ce qu’il est vraiment : un projet technocratique à la solde des transnationales, une menace totalitaire s’inscrivant dans les diaboliques plans de l’Empire du pire.
Mais j’aurai toujours une grande tendresse pour ce dom Quichotte picard, mêlée d’un (gros) brin d’agacement quand même.
La Pologne : quel beau et sympathique pays. Travailleurs détachés en masse dans les usines agroalimentaires allemandes concurrençant frontalement notre production, dans le bâtiment (non délocalisable) en France (et dans bcp d’autres branches), avec cotisations aux conditions du pays d’origine. ECCE, Wirlpool et combien d’autres usines ? Des commandes en... rafale de matos guerriers aussi stupidement coûteux qu’étatsuniens au détriment de la "solidarité européenne" (vaste blague), le tout avec, à hauteur de près d’un cinquième de l’aide record que ce pays perçoit de l’UE, de l’argent français...Vous avez dit France dindon de la Farce ?

02/03/2017 16:13 par Assimbonanga

@Scalpel, sur un plan personnel j’adore François Ruffin. Je suis fan, adepte, raide dingue, c’est mon chouchou. Je dis juste que pour les lave-linge, si on veut être logique pour la planète, c’est qu’il faut arrêter d’en acheter et avoir la patience d’attendre que le linge sèche à l’air ambiant, même si ça fait pas très esthétique d’inch barraq. On est en contradiction, nous tous, sur certains points. L’emploi nous détourne du soucis urgent : arrêter la destruction de l’éco-système.
Et c’est pas un truc qu’on peut régler d’un coup de baguette magique. Nous aurions à repenser tout notre fonctionnement, toutes nos organisations de vie.

04/03/2017 10:21 par Assimbonanga

Pardon : sèche-linge. Merci de rectifier. Concernant les lave-linge, je ne me verrais pas laver tout le linge à la main. Hé oui ! On a ses limites.

(Commentaires désactivés)