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Et le régime Macron vacilla

SILENCE

Texte écrit entre l’acte 7 et l’acte 8

1.

Depuis le 17 novembre, la peur a changé de camp. Macron est physiquement restreint dans ses mouvements. À l’approche de chaque samedi, la bourgeoisie serre les fesses. Les classes populaires ont fait irruption sur la scène publique comme elles l’ont toujours fait en France : sans sommation, et au pied de biche. Et depuis, quel spectacle…

2

La vérité de tout régime est dans la crise. Quand souffle la tempête de l’Histoire, qui fait quoi, qui va où ? Quelles digues cèdent, quels murs résistent ? Là se dévoilent les véritables lignes de faille ; là peut-on apercevoir les fondements d’un régime ; là encore apparaît avec une netteté sans équivoque les priorités de chacun, que recouvre d’ordinaire le jeu des (im)postures et la routine des conflits secondaires.

Les moments de crise ne sont pas seulement des rélévateurs, ils sont aussi des accélérateurs. Le temps social se contracte, et des évolutions qui prennent d’ordinaire des années, voire des décennies se produisent en quelques semaines, parfois même en quelques jours. Des mouvements improbables s’opèrent, dont la suggestion avant la crise aurait fait se tordre de rire même l’observateur le plus avisé. Des gens qui hibernaient politiquement se réveillent soudain, la politisation se répand à la vitesse de l’éclair, les mensonges que l’on gobait encore la veille sont rejetés avec véhémence. Frappées de désuétude, un certain nombre de clôtures mentales tombent.

Aujourd’hui s’opère une conscientisation de masse sur l’existence de deux polices : une police physique des corps dans la rue, une police idéologique des consciences dans les médias orthodoxes. Des millions de gens voient désormais chaque jour ce que la critique de gauche n’avait cessé de marteler, plus ou moins dans le désert, depuis des décennies : que le système médiatique fonctionne comme un appareil géant de contrôle social, une matraque idéologique qui s’abat quotidiennement, un instrument de maintien de l’ordre. Dans la conscience populaire se généralise l’idée que « les médias mentent », pour le dire à la truelle, ou qu’une certaine presse d’ordre est au service du pouvoir, pour le dire de façon un peu plus élaborée. Oh, bien sûr, la confiance dans le système médiatique était déjà très basse ; cependant la conscience de l’intensité et de l’étendue du phénomène n’était pas aussi aiguë. Les effets promettent d’être dévastateurs pour la classe dirigeante : comment gouverner si l’appareil de propagande n’est plus opérationnel ?

Cette dichotomie entre ceux qui croient au récit bourgeois, et ceux qui le reconnaissent comme ce qu’il est — une histoire pour grands enfants simplets — va nourrir un double mouvement : d’une part la sécession sociale et mentale des macronistes d’avec la réalité (certains neuneus macronistes semblent ainsi croire sincèrement que chaque samedi, des hordes de fascistes tentent de renverser la République), et d’autre part une sécession populaire d’avec un ordre considéré comme injuste, tyrannique et donc odieux. La rupture entre les macronistes et la réalité sociale se résume aisément en deux images :

Cette double sécession, en bon français un processus de polarisation, va faire que ces deux mondes, qui ne vivent déjà pas (dans) la même réalité, vont de plus en plus se trouver dans une incapacité radicale de se parler et de se comprendre. Les termes même de l’échange n’étant plus possibles (d’autant plus que les macronistes ont oublié les bases de la propagande, et se sont sottement mis à croire à leurs propres mensonges), la rupture se précipite. Donc ça va péter.

3.

Bunkerisé physiquement et idéologiquement, le pouvoir macroniste n’a qu’une obsession : comment poursuivre les réformes ? Tout est subordonné à ce but dans la résolution de la crise des gilets jaunes. Le conflit au sommet de la Macronie entre les « colombes », ceux qui plaidaient pour des concessions, et les « faucons », ceux qui souhaitaient demeurer inflexibles, n’avait pour seul objet que la suite. Les premiers — qui l’ont emporté — pensaient qu’il fallait lâcher du lest pour désamorcer une situation qui, si elle s’envenimait, risquait de détruire la possibilité de continuer les réformes ; les seconds pensaient que céder revenait à capituler par avance sur tout le reste. Derrière la divergence tactique, l’unité stratégique : le bulldozer néolibéral doit reprendre sa marche triomphante, le modèle social issu du compromis de classe de l’après-guerre doit tomber brique par brique.

Dans son allocution du 10 décembre, — qui a spectaculairement échoué à mettre un terme au mouvement — Macron a bien précisé qu’il entendait continuer les réformes : « J’entends que le gouvernement poursuive l’ambition des transformations de notre pays que le peuple a choisie il y a maintenant 18 mois ; nous avons devant nous à conduire une réforme profonde de l’Etat, de l’indemnisation du chômage et des retraites [1]. » — Notons que Macron continue cyniquement de se réclamer d’un mandat qui est aujourd’hui totalement obsolète, — si tant est qu’il ait jamais existé, tant son capital électoral était faible avec un pic à 18% d’inscrits au premier tour de la présidentielle. Le même message a été martelé lors de vœux de combat où l’apesanteur sociale le disputait au cynisme (formuler un vœu de vérité au moment où reviennent sur la table les mensonges de l’affaire Benalla… quel génie).

La puissance politique du macronisme ayant fondu comme neige au soleil, les trois prochains gros chantiers (retraites, assurance chômage, fonction publique) pourraient bien voir le bulldozer caler assez vite. Même le JDD, d’ordinaire plus macroniste que Macron, nous avertit en substance et avec un dépit palpable que son poulain ne vaut plus un kopek [2]. Le pouvoir pourrait cependant tenter un coup de poker avec le quatrième dossier, celui de la révision constitutionnelle : pour se relégitimer, Macron pourrait lancer un référendum démagogique en exploitant l’humeur populaire anti-élus. Réduction du nombre de parlementaires, limitation des mandats, baisse des indemnités, il ne serait pas très compliqué de réunir un paquet de mesures parfaitement accessoires mais approuvées à plus de 80% dans les sondages. Les oppositions dénonceraient l’antiparlementarisme et la fuite en avant présidentialiste, Macron jouerait « le peuple » contre « le vieux monde qui défend ses privilèges ». Sauf que ce scénario passablement convenu comporterait un risque élevé : quelle que soit la question, le peuple ne serait-il pas tenté de répondre « non » pour sanctionner Macron ?

Un dernier indice nous indique la volonté de réformer du pouvoir, et surtout sous quels auspices se profile 2019 : le pouvoir a commandé 1 280 lanceurs de balle [3].

4.

Un dicton populaire interdit avec sagesse de tirer sur l’ambulance. Est-il donc même besoin de revenir sur la stupéfiante nullité des bureaucraties syndicales ? Un mois et demi d’action directe populaire, et rien. Pas une journée de grève générale en intersyndicale. Rien. Le néant. Ou plutôt si : quelque chose. Le communiqué de la honte, signé le 6 décembre. La veille, après deux samedi d’insurrection populaire à Paris et ailleurs, alors qu’il n’était pas certain que le gouvernement passât les fêtes, Macron demande « aux forces politiques et syndicales, et au patronat, de lancer un appel clair et explicite au calme [4] ». Capitulation sans conditions des confédérations, qui répondent favorablement à ce qui n’était ni plus ni moins qu’une demande d’union sacrée autour du régime : après avoir déploré leur mise à l’écart, les directions se félicitent que le gouvernement « a enfin ouvert les portes du dialogue [5] » (!). Alors que les lycéens étaient réprimés avec une férocité incroyable, les syndicats condamnent les violences… « dans l’expression des revendications » : côté manifestants donc ! Rien ne dit mieux que ce communiqué la négation totale de la réalité — et de la vie même — au sommet des appareils, où l’on se gargarise de pouvoir enfin « dialoguer » alors même que la base se fait dérouiller dehors.

Que la direction de la CFDT et son christianisme social pleurnichard signent une telle disgrâce n’étonnera personne ; mais qu’allait faire la CGT dans cette galère ? Comme pour laver la honte d’avoir signé une telle horreur, la CGT publiait d’ailleurs simultanément un communiqué au vitriol dans lequel elle dézinguait le gouvernement [6]. Belle illustration des contradictions de la centrale, capable le même jour de dire oui et non, de s’habiller en jaune ou en rouge, de montrer patte blanche ou de faire son boulot. Il faut dire que le communiqué de la honte avait soulevé, en interne, une levée massive de boucliers, tant à la base [7] que dans certaines fédérations [8] : celle de la chimie, par exemple, parlant à raison d’un « coup de poignard dans le dos de ceux qui luttent ».

Seul Solidaires aura eu la bonne attitude, refusant de signer une déclaration « hors-sol [9] » et boycottant la parodie de consultation du lundi 10, le jour de l’intervention présidentielle.

Quoique leurs analyses de départ sur le mouvement des gilets jaunes fussent à côté de la plaque [10], les syndicats de lutte se sont depuis amendés. La CGT a fait mouvement vers les gilets jaunes en appelant à l’action [11]. On notera d’ailleurs la nouvelle astuce sémantique : pour ne pas dire « grève générale », on parle maintenant de « généraliser la grève » [12] [13]. Nuance ! Il faut cependant se demander quelle valeur accorder à ce revirement. Car le 52è congrès de la CGT se profile en mai prochain ; or qui dit congrès dit élections, donc enjeu de pouvoir. Et, comme le note le préposé du Monde aux syndicats, Martinez affronte la concurrence d’un texte alternatif plus radical [14]. Il faut donc donner des gages, ne serait-ce que pour éviter de trop se faire souffler dans les bronches ; le congrès houleux de Force ouvrière a montré ce qui pouvait se passer lorsque la direction était jugée trop complaisante avec le pouvoir. De sorte que l’on attend de voir s’il s’agit de postures — comme le 14 décembre, l’une de ces journées-alibi que l’on organise pour prétendre avoir fait quelque chose, tout en ne faisant rien pour qu’elle soit un succès — ou si des actes concrets, avec travail effectif de mobilisation, suivent les déclarations d’intention.

La fonction publique ayant été négligée par le gouvernement, celle-ci devrait se rappeler à son bon souvenir dans les semaines qui viennent — d’autant plus que l’exécutif a prévu un bel exercice de charcuterie pour sa réforme de l’État. Mais comme à l’automne 2017 ou au printemps 2018, va-t-elle ostensiblement se séparer du reste de la contestation sociale ? Va-t-on encore s’aligner sur la CFDT, qui menaçait de quitter l’intersyndicale en cas de jonction avec les autres conflits ? Le corporatisme est plus que jamais une impasse : par opportunisme, routiers comme policiers ont pu obtenir assez rapidement gain de cause ; mais pour un dossier à milliards comme la fonction publique, le gouvernement ne dégainera pas le chéquier aussi facilement. Si elle entend obtenir gain de cause, la fonction publique n’a pas d’autre choix que de s’insérer dans un mouvement général. Ce qui suppose, horreur — de faire de la politique, plutôt que chacun défende son bout de gras dans son coin selon le rapport de force sectoriel, qui oscille d’ailleurs entre mauvais et exécrable.

Aussi désastreuses soient les politiques confédérales, les syndicats demeurent indispensables. Selon toute vraisemblance, les gilets jaunes ne l’emporteront pas simplement avec des manifestations hebdomadaires, ou des blocages aisément levés les uns après les autres par la police ; la grève est incontournable. Et qui dit grève dit syndicats. Puisque l’on sent bien que les directions resteront frileuses ou hostiles, les jonctions doivent se faire au niveau local, où la dégénerescence bureaucratique est généralement moindre. Au niveau de l’organisation, le plus simple serait de multiplier les comités populaires autogérés sur une base locale, en pratiquant la démocratie directe (pas de chef, pas de porte-parole permanent, mandats impératifs et révocables, correspondance entre la décision et l’action, etc.) dans des assemblées ouvertes à toutes celles et ceux qui souhaitent lutter, dans un strict esprit d’égalité. En la matière, les gilets jaunes de Commercy tracent une voie réjouissante [15].

Les gilets jaunes ne sont pas un mouvement de gauche, ni même un mouvement contre le néolibéralisme en tant que tel ; il ne faut pas, par imprudence ou enthousiasme, aller plus vite que la musique et projeter ses propres conceptualisations sur un processus divers et encore inachevé. Néanmoins, la plupart des revendications sont effectivement compatibles avec la gauche. D’ailleurs, ce sont les troupes de choc des Décodeurs qui le disent : Certificateurs de la Vérité Vraie, ils ont établi que le programme de la France Insoumise était le plus proche des demandes des gilets jaunes [16]. Or comme la Vérité Vraie (ou est-ce l’inverse) ne se discute point, sous peine d’être mis à l’Index avec gommette rouge et tout le tutti quanti, on ne peut que s’incliner.

J’ai été frappé de voir que dans aucune liste des revendications aperçues ici ou là ne figure l’abrogation des lois Travail. Comme Stefano Palombarini le fait remarquer [17], (une partie de) la question salariale semble avoir été passée par pertes et profits dans les revendications, totalement éclipsée par « le pouvoir d’achat ». Or si l’on déplore les conséquences (les bas salaires), la cohérence commande de remonter jusqu’aux causes : l’organisation d’un rapport de forces favorable au patronat. Et c’est à ce niveau que la gauche et les syndicats doivent intervenir : les gilets jaunes ciblent beaucoup trop l’État ou les élus, et pas assez l’entreprise et le (grand) patronat.

Macron n’a pourtant que deux vaches sacrées : les grandes fortunes, dont on ne sait pas bien si elles sont ses complices ou ses commanditaires ; et les entreprises, qui en régime néolibéral ont toujours raison. Il faut donc le contraindre à mettre genou à terre sur ces deux domaines. Pas seulement pour lui infliger une défaite politique complète, mais également pour qu’il perde toute valeur aux yeux de la classe dirigeante : pour la grande bourgeoisie, il est évident qu’un président qui supprime l’ISF puis se voit astreint de le rétablir moins de deux ans plus tard sous la pression populaire ne sert plus à rien. Affiner la lutte des classes fermera également un certain nombre de débouchés encore possibles aujourd’hui : un mouvement populaire attrape-tout sans référent idéologique précis (on voit comment a fini le Mouvement 5 étoiles en Italie…), ou telle ou telle forme de droite ou d’extrême-droite adoptant un discours faussement social pour masquer son programme patronal (comme le fait le FN, mais aussi Dupont-Aignan).

Dans ses thèmes comme dans ses revendications, le mouvement des gilets jaunes s’est tout de même gauchisé depuis ses débuts, où il pouvait encore faire l’objet d’une fascination presque fusionnelle de la part de la droite la plus antisociale. Ainsi du dépit salé d’Eric Brunet, l’une des innombrables bêtes à cornes réactionnaires qui peuplent le paysage médiatique française ; initialement soutien du mouvement, dans lequel il croyait distinguer l’apothéose de ses propres obsessions antifiscales, il doit concéder début décembre : « Je ne comprends plus rien aux gilets jaunes. Cette profonde grogne anti-taxes est devenue au fil des jours un mouvement pour l’augmentation du Smic et des minimas sociaux... J’ai lu avec attention leur plateforme revendicative : elle est plus à gauche que le programme de Mélenchon [18]. » L’évolution de son fil Twitter, des débuts du mouvement jusqu’au présent, est absolument fascinante pour cerner la « pensée » — on comprendra le droit aux guillemets — de la droite bourgeoise.

En dépit de ces coups de barre « à gauche », subsistent des restes de l’esprit initial du mouvement, plus brouillon et transversal. En témoignent ainsi les trois revendications mises en avant par les initiateurs historiques du mouvement [19] :

« (1) Une baisse significative de toutes les taxes et impôts sur les produits de première nécessité.

(2) La modification de la Constitution dans le but d’introduire le Référendum d’Initiative Citoyenne en toute matière.

(3) La mise en œuvre d’une baisse significative de toutes les rentes, salaires, privilèges et retraites courantes et futures des élus et hauts fonctionnaires d’État. »

(1) La demande n’est pas forcément fausse en soi, mais qui va payer ? Les grandes fortunes vont-elles passer à la caisse, ou bien va-t-on régler la note en taillant dans l’État social ? Avec l’actuel gouvernement, poser la question, c’est y répondre. Et pourquoi demander une baisse des taxes plutôt qu’une hausse des salaires (et autres revenus) ?

(2) Je n’ai pas d’objection de principe contre le référendum d’initiative citoyenne, mais mettre autant en avant une revendication qui ne coûte pas un rond au gouvernement est une erreur stratégique. De plus, quitte à aborder le volet de la souveraineté populaire et des institutions, mieux vaut y aller franchement et demander une Assemblée constituante — qui pourrait mettre en place le RIC sans le vider de son contenu, comme le fera probablement l’exécutif.

(3) Enfin, même si un certain nombre d’élus et de hauts fonctionnaires sont effectivement surpayés, et que les anciens présidents n’ont pas besoin d’avoir x bureaux et autres avantages à vie, tout ceci est parfaitement accessoire comparé aux dizaines de milliards d’euros dépensés pour des subventions déguisées aux profits des entreprises, sans compter le coût annuel exorbitant du banditisme fiscal pour le Trésor public. C’est une erreur grossière de ciblage que de mettre en avant quelques dizaines de millions superflus quand le CAC40 a directement branché une pompe aspirante sur la caisse commune avec le CICE !

S’il fallait ne retenir que trois thèmes, je mettrais plutôt en avant la convocation d’une Assemblée constituante, l’augmentation générale des salaires (minima sociaux et retraites suivront) et le rétablissement de l’ISF.

5.

La plus grande catastrophe historique de la gauche française définissait jadis le gaullisme comme « De Gaulle plus la police [20] ». Ne va-t-il pas falloir définir le macronisme de la même manière ? La célérité avec laquelle le gouvernement fut obligé d’éteindre la possibilité même d’un début d’incendie policier en dit long sur le rôle central de la matraque pour le régime. Pour une fois lucide, le troll bourgeois Aphatie jugeait ainsi que « l’État tient à un fil, et ce fil c’est la police [21] ». Ultima ratio regum, écrivait-on jadis sur les canons : [la force est le] dernier argument des rois. Dernier rempart des régimes honnis, la police est le canon de notre temps.

Si la militarisation croissante du maintien de l’ordre nous (dé)montre une chose, c’est bien que les libertés publiques ne sont qu’une concession par beau temps. Toute société de classes est intrinsèquement autoritaire puisque le résultat du jeu est donné d’emblée : en dernière instance, la classe au pouvoir doit l’emporter. Répression mise à part, l’ordre social se maintient habituellement par un savant cocktail de légitimité, de consentement et de résignation. Mais si les perdants n’acceptent plus leur condition de subalterne, si les choses déraillent et que les dés ne donnent plus le bon résultat, quel autre choix que de faire rentrer les masses dans le rang à la matraque ?

« Plus de 1600 opposants arrêtés lors de la manifestation contre le “tsar Poutine”  [22] », dénonce Le Monde, avec imagine-t-on une certaine fierté à défendre les principes du libéralisme politique. Samedi 8 décembre, le régime Macron fera arrêter près de 2 000 personnes [23] : alors que Macron surpasse Poutine dans la répression préventive d’opposants (pour la plupart arrêtés sous des prétextes grossiers), on cherchera en vain trace d’une indignation sous la plume du journal macroniste, qui se contentera d’abriter paresseusement derrière les critiques des avocats. Vérité au-delà du rideau de fer, erreur en deçà : capable de dénoncer l’autoritarisme à l’Est mais rigoureusement à l’ouest lorsque le poutinisme est fait maison, Le Monde est aux abonnés absents lorsqu’il lui faudrait pourtant jouer le rôle de sentinelle démocratique qu’il se pique d’incarner.

Le bilan de la répression est délirant, effarant, vertigineux, comme l’attestent les chiffres d’une « “justice” » d’abattage [24] ou un mur de la honte hélas provisoire [25]. Que fait la police ? Ça crève les yeux. Littéralement. Têtes visées au LBD 40, tabassages collectifs contre des cibles isolées et parfois à terre, mains arrachées par les grenades : pour la collection automne-hiver, la police française aura décidément donné le meilleur d’elle-même.

Initialement un vœu pieux d’anarchiste, le slogan « tout le monde déteste la police » va finir par s’imposer comme une vérité éclatante. On ne compte plus le nombre de gilets jaunes qui, pourtant bien disposés au départ, ont maintenant la rage contre la police. Il est vrai qu’une institution qui tire à la tête de gosses de 16 ans et de grands-mères ne mérite pas une once de respect. Filmée avec une arrogance stupéfiante par un policier si fier de son coup qu’il s’est senti autorisé à mettre en ligne la vidéo (violant au passage une demi-douzaine de lois), la mise en scène lugubre des lycéens arrêtés à Mantes-la-Jolie, qui spontanément fait davantage Chili 1973 que France 2018, démontre le sentiment d’impunité et de toute-puissance de certaines petites brutes sadiques sous l’uniforme. Et, comme par hasard, ce sont des lycéens d’un quartier populaire qui eurent droit à ce traitement.

Dans tous ces comportements, il y a bien plus qu’une simple obéissance aux ordres : il y a une culture de l’humiliation, et même une jouissance de la violence. Ce que confirme d’ailleurs une vidéo édifiante sur le comportement des militiens de la BAC [26], c’est qu’ils aiment cela. Qui peut penser un seul instant que l’on fraternisera avec cette engeance ?

Certains policiers ont sans doute des cas de conscience. Mais cela fait une belle jambe aux manifestants mutilés d’une part, et d’autre part il reste à prouver qu’ils sont représentatifs. Les syndicats majoritaires n’ont pas réclamé la désescalade et l’apaisement mais l’armée et l’état d’urgence. Tous les syndicats qui ont critiqué la répression gouvernementale sont ultra-minoritaires. En dernière analyse, la police n’est pas là pour « protéger la population » mais maintenir l’ordre ; lorsqu’un conflit surgit entre ces deux objectifs, le choix est vite fait : on tire sur la foule.

Comment appelle-t-on un régime où l’on tire des balles de caoutchouc à 300 km/h dans la gueule des gens qui manifestent ? Certes pas une dictature, où ce serait à balles réelles, mais clairement pas une démocratie, où l’on s’efforcerait de désamorcer les tensions et de pratiquer la désescalade. Il y a, bien sûr, une quasi-impossibilité de tirer à balles réelles sur une foule désarmée pour un régime ouest-européen à prétention démocratique : ce serait la révélation brute que le pouvoir est en guerre contre sa population, et ne tolère la vie qu’en tant qu’elle rime avec passivité et obéissance. La violence d’État doit donc s’exercer autrement pour dissuader les gens de manifester. Le LBD est cette réponse toute trouvée : modulation à volonté de la réponse (on peut tirer pour blesser légèrement ou gravement), pouvoir précieux de l’initiative grâce à la distance, arbitraire d’une violence qui rôde au loin et, telle la foudre, peut s’abattre n’importe où. À ce sujet, on pourra utilement lire L’arme à l’œil, écrit par Pierre Douillard-Lefevre, éborgné à 16 ans par un tir de LBD [27]. En bref : « Dissuader sans tuer, mutiler sans prendre le risque mortel d’un soulèvement définitivement incontrôlable, telle est l’option choisie [28]. »

Reste à savoir jusqu’à quand l’État gagnera à la roulette chaque samedi. Car mathématiquement, à chaque tir de LBD, la probabilité d’un tir mortel augmente ; surtout lorsque l’on vise délibérément la tête. Comment réagira un mouvement aux accents insurrectionnels si un gilet jaune tombe en direct ?

Aujourd’hui, toute voix qui ne dénonce pas ces violences policières doit être considérée comme faisant partie du problème. On peut même parler d’une complicité passive s’agissant d’organes qui prétendent être des contre-pouvoirs démocratiques. Dans une relation de pouvoir déséquilibrée, comme celle entre un État répressif et une population désarmée, la neutralité ne peut que favoriser l’oppresseur. Ne pas parler quand on sait, c’est cautionner.

Dans les revendications des gilets jaunes, de la gauche et des syndicats doivent figurer les points suivants : condamnation des violences policières (qui sont volontaires, ordonnées et couvertes) ; amnistie pour les manifestants ; désarmement immédiat de la police (LBD, grenades de désencerclement) ; abrogation des lois sécuritaires liberticides, en particulier la loi « antiterroriste » qui nous place de facto en état d’urgence permanent.

6.

La vérité du régime Macron était contenue tant dans sa naissance que dans ses premiers actes. Sa naissance : un énarque de l’Inspection des Finances, parti pantoufler dans la banque d’affaires puis revenu déréguler au sein de l’exécutif, est bombardé à l’Élysée suite à une blitzkrieg soutenue par des milliardaires et financée par de riches donateurs [29]. Ses premiers actes : un permis de licenciement géant pour disciplinariser le salariat (les ordonnances) ; bourgeoisie mon amour, des cadeaux en veux-tu en voilà (fin de l’ISF, PFU) ; une loi-perlimpinpin « pour la confiance dans la vie politique » qui épargne le haut lieu de la corruption sous la Vè (l’Élysée), et qui se fracassera un an plus tard sur le récif de l’affaire Benalla ; et surtout l’état d’urgence dans la loi ordinaire. Bref, un durcissement du régime pour un service exclusif de classe. Tôt ou tard, l’accident historique était inévitable.

Le soulèvement populaire des gilets jaunes est le premier mouvement d’ampleur nationale ayant forcé le gouvernement à reculer depuis 2006. Si l’on ajoute les victoires régionales obtenues en Outre-mer (Antilles 2009, Guyane 2017, Mayotte 2018), on voit la quantité colossale d’énergie sociale et populaire qu’il faut désormais déployer pour obtenir de modestes concessions de la classe dirigeante.

Au vu de la propagande post-acte VII (« des agitateurs qui veulent l’insurrection ») et de vœux présidentiels (« foule haineuse ») adressés non pas au peuple, mais à la bourgeoisie, le régime Macron a clairement choisi la voie de la radicalisation et de la fuite en avant autoritaire. Pleurant les conséquences dont ils chérissent les causes, les bourgeois vont réclamer avec de plus en plus d’insistance le retour à l’ordre et la fin de cette période d’instabilité. Un certain Eugène Varlin, mort durant la terrible Semaine sanglante, leur avait répondu par avance : « Tant qu’un homme pourra mourir de faim à la porte d’un palais où tout regorge, il n’y aura rien de stable dans les institutions humaines ».

Silence


COMMENTAIRES  

08/01/2019 06:43 par benzekri

Ce silence des syndicats est inquiétant et interroge sur la vraie nature du syndicalisme en France...
J’espère un réveil urgent de leur part... Les gilets jaunes vont poursuivre le combat avec ou sans eux...

Une mouche inculte… ou le suicide de Macron !

Il y a un certain temps lors d’une dédicace
Une mouche inculte piqua Lefebvre
Et que pensez-vous qu’il arriva
C’est Lefebvre qui se cultiva.
Zadig n’est pas Voltaire
Et Voltaire n’est pas Zadig
Mais Voltaire et Zadig ne font qu’un.
Et grâce à « Zadig et Voltaire »
Lefebvre, l’homme culte de l’UMP, qui était un moins que rien
Découvre le « Zadig de Voltaire » et devient quelqu’un.

Et tout récemment la même mouche attirée par une odeur puante
se pose et pique le petit p Macron qui a été fait, par les maîtres des lieux, chef de bande
Bande ou troupeau de moutons -amateurs- qui bêlent d’une seule voix Mâââ au lieu bêêê
Et grâce à sa pensée complexe, le piqué devient philosophe au point d’affirmer que : « dans une gare on croise des gens qui réussissent et des gens qui ne sont rien »
Son excès d’orgueil le pousse plus loin encore au point d’oser le défi qui a fini par lui « coûter la vie » !
Lorsqu’il a lancé le : « Qu’ils viennent me chercher » devant un parterre de lèche-bottes véreux, son aveuglement et sa surdité lui ont fait oublier -un détail de taille-, la réaction des « GUEUX »
Les « Gueux » -qu’il traitait « de rien, de fainéants... et de gaulois réfractaires »- sont venus en force, dignes et déterminés, chercher et trainer par terre, le médiocre Jupiter.
Témoin de ce suicide politique et de cette déchéance pathétique...
La mouche, vexée de s’être une nouvelle fois fait avoir par un moulin à vent fait président,
prend son courage à six pattes et se jeta à la mer
A la mer pour se rincer de la crasse de cette nouvelle « race ».

NB : Lefebvre était porte-parole de l’UMP et a occupé le Ministère de l’injure et de l’inculture dans le second gouvernement Fillon.
Quant à Macron, les maîtres des lieux et autres lobbies tentent vainement de le ressusciter...
Cependant, ni la répression, ni la propagande - sans précèdent des anciens et nouveaux chiens de garde-, ni les menaces et intimidations ne peuvent venir à bout de la détermination des « GUEUX » qui ont pris l’engagement de tenir bon, de rester debout et déterminés jusqu’à obtenir entière satisfaction...
Le Premier sinistre Philippe, tout en s’avouant incapable d’empêcher l’acte 9, nous rejoue la tragi-comédie de la fermeté et de la surenchère sécuritaire...Que vaut une porte défoncée devant ce lourd bilan répressif ?
Ce sont les ordonnateurs du crime qui ose parler et demander la fin des violences !
Mais qui est responsable des 12 morts et combien d’autres entre la vie et la mort ?
Qui est responsable des blessés, plus de 4500 personnes dont certaines sont mutilées à vie ?
Qui prive les gens du droit de vivre dignement, de leurs droits élémentaires et de leurs libertés ?
Qui embastille et/ou humilie les manifestants sans épargner les enfants obligés à se mettre à genoux ? Qui...
Qui arrête préventivement pour empêcher les gens de manifester pacifiquement ?
Qui protège un État voyou conduit par des êtres méprisants, provocateurs qui alimentent la violence ?
Quant aux policiers -qui affichent leur désaccord avec cette politique répressive -qui obéissent encore à un Etat devenu fou, qui fait de la France la risée du monde..., quand allez-vous enfin désobéir et réagir ?
Faites-le pour vos proches... Regardez bien vos enfants dans les yeux... vous verrez dans leur regard innocent que leur inquiétude est légitime ; ils ne souhaitent vous voir ni victime ni responsable d’un drame !
Ami(e)s gilets jaunes, en restant déterminés, unis, mobilisés et pacifiques, vous finirez par convaincre.
HB

08/01/2019 07:36 par François de Marseille

Le sondage de la popularité de macron par proximité politique donne 5 % de satisfaction chez les insoumis. Deja on rigole, mais en plus c’est en baisse de 7%. Qu’il y ait eu 1 ou 2 hurluberlus moyennement satisfait, pourquoi pas, mais 12 % des insoumis satisfaits de macron, ça me fait hurler de rire.

08/01/2019 10:17 par Paolo

Merci,
vous avez mis dans cet article tout ce que je ressens de cette révolte des gilets jaunes.
Education populaire accéléré d’une population jusque là passive et dépolitisé même si il reste du boulot...
Encore le retour de mots pour désigné une société de classe.
Et le rapport aux forces de l’ordre des oligarques ....
Oui, en tous points, oui vous avez tapé dans le mille.

08/01/2019 10:28 par robess73

silence !nous aimerions bien savoir qu elle plume acérée se cache deriere ce pseudo !

08/01/2019 10:37 par Assimbonanga

Le boxeur Dettinger, c’est le héros populaire par excellence. Il nous ramène aux vieux films avec Jean Gabin ou Serge Reggiani, où le gars est poursuivi par un destin fatal qui le fait toujours retomber dans le ruisseau.

Personne en France ne plaint Carlos Ghosn, mais tous les petits, les humbles ou les romantiques peuvent se projeter dans Dettinger. Dettinger avec ses difficultés d’élocution, son faible niveau d’instruction mais une conduite jusqu’alors irréprochable. Un père de famille, boxeur au grand cœur, au cœur sensible, sentimental qui manifeste avec fidélité, samedi après samedi, aux côtés de sa compagne.

Le montant de la cagnotte de Dettinger vient d’être masqué par l’organisateur. Sa progression spectaculaire choque le bourgeois.

Dettinger aura besoin de cet argent pour son avocat, ses frais de justice, l’amende et parce qu’il va perdre son travail. On peut se douter qu’il écopera de prison ferme et probablement de quelque indignité civique si bien que son emploi d’agent territorial lui sera interdit. Le brave gars vaillant qui s’était hissé à la force de ses poings à une légitimité sociale va redégringoler dans la marginalité de ses origines gitanes.

Macron, c’est l’esprit d’Adolf Thiers réactualisé à l’époque. De nos jours on ne fusille plus, mais on peut flinguer des vies. Tous les gueux qui ont eu l’outrecuidance de s’élever contre la guerre éclair du réformateur Macron garderont les séquelles de cet épisode historique. Beaucoup sont marqués dans leur chair par des tirs militaires. Beaucoup sont passés par le poste de police lors de rafles arbitraires. Désormais, on va même faire diligence pour apposer aux participants une marque au fer rouge, un fichage informatisé qui les suivra jusqu’au tombeau sur leur CURICULUM VITAE et provoquera une discrimination à l’embauche pour de nombreux emplois.

On peut espérer que Dettinger ne tombera pas dans l’oubli et qu’à sa libération il recevra le soutien populaire et pourra réintégrer une vie décente. (N’en déplaise à ce beauf de Yves Calvi !)

08/01/2019 11:24 par Sidonie

En complément cet excellent article d’Acrimed : Lieux de pouvoir : la carte du Monde diplomatique qui n’a pas plu à l’élite journalistique
https://www.acrimed.org/Lieux-de-pouvoir-la-carte-du-Monde-diplomatique

08/01/2019 11:30 par Ellilou

Merci Assimbonanga, vos mots auraient pu être exactement les miens :-) (et c’est souvent le cas...)
Que la lutte soit belle !

08/01/2019 11:33 par Ellilou

Je suis abasourdie par ces sondages de popularité dans lesquels depuis des mois l’incapable toxique de l’Élysée chute inexorablement tout en restant solidement à 24%....c’est extraordinaire les mathématiques de nos jours en macronie ;-)

08/01/2019 12:08 par szwed

Un SILENCE net, clair et tonitruant !
Merci pour cet article, concis, lumineux et référencé , une pierre précieuse à verser au trésor des Gilets Jaunes. Un SILENCE comme cela on en demande tous les jours pour couvrir le vacarme des médias de l’ordre milliardaire et politicien et de ses grenades de désencerclement.

08/01/2019 12:26 par Buffaud

Analyse très pertinente. Il faut également réclamer la dissolution urgente de toutes les unités qui agissent en civil et masqués, donc non identifiables, auxquelles se joignent des barbouzes genre Benalla : il ne s’agit même plus de police mais de milice.
Et pour célébrer Dettinger, réécoutons Brassens :
A pied, à cheval, en voiture
Les gendarmes mal inspirés
Vinrent pour tenter l’aventure
D’interrompre l’échauffourée
Or, sous tous les cieux sans vergogne
C’est un usage bien établi
Dès qu’il s’agit de rosser les cognes
Tout le monde se réconcilie

08/01/2019 13:43 par Albert-Nord

Je n’aime pas les anglicismes, mais je dirais à propos des Gilets jaunes : "Work in progress" (On reprend conscience de nous-même et ça demande un peu de temps).
Quand je lis Martinez "nous sommes parfois trop idéologiques" je sens le parpaing de la la Confédération Européenne des Syndicats bruxelloise aux pieds de la CGT.
Trop idéologique ? Quelle idéologie ? Celle de Marx ou celle de Bruxelles ?
Syndicats jaunes contre gilets jaunes ?
Le temps est venu pour que toutes les cartes soient rabattues.
Nous allons adorer 2019 !

08/01/2019 14:21 par Geb.

@ Assibonanga...

"Adolf Thiers" ??,

J’ignore si c’est volontaire ou par inadvertance mais ça colle bien comme définition.

En tout cas il faudra bien plus qu’un ersatz du Père Thiers ou la Coalition étrangère pour arrêter l’hémorragie des Gilets. La France et l’Europe c’est autre chose que la Butte Montmartre...

Le début concret d’un monde qui s’écroule. Personne ne le regrettera, même si nous devions finir sous les décombres.

08/01/2019 14:53 par BEYER Michel

@Benzekri,
pieds et poings liés dans la CES, la Confédération CGT conservera cette attitude.
Ce qui n’est pas le cas de nombreux syndicats de base.....heureusement !!!

08/01/2019 17:27 par Sidonie

... "Dans le même temps, la pétition lancée par les Foulards rouges (un groupe anti-Gilets jaunes) appelant la Fédération Française de Boxe à « retirer à Christophe Dettinger son titre de champion et [à] l’expulser de l’institution » n’a pas rencontré le succès escompté. Lancée il y a deux jours, elle récoltait moins de 600 signatures le 8 janvier au matin".
https://francais.rt.com/france/57664-gilets-jaunes-leetchi-cloture-cagnotte-ex-boxeur-christophe-dettinger

08/01/2019 18:14 par J.J.

Silence Il y a, bien sûr, une quasi-impossibilité de tirer à balles réelles sur une foule désarmée pour un régime ouest-européen à prétention démocratique : ce serait la révélation brute que le pouvoir est en guerre contre sa population,

Mais il n’y a pas impossibilité de tirer à profusion des projectiles contenant des gaz lacrymogènes sur les manifestants (enfin, pas n’importe lesquels).
Or l’usage de toute arme chimique est interdite par une convention internationale (CIAC) SAUF dans le cadre du maintien de l’ordre.

Conclusion : des citoyens qui manifestent seront traités avec des moyens prohibés par une législation internationale. Ils représentent donc un danger plus grave qu’un ennemi (si possible héréditaire) étranger armé.

08/01/2019 18:39 par sergio

*SILENCE écrit : « … Les moments de crise ne sont pas seulement des *rélévateurs, ils sont aussi des accélérateurs. Le temps social se contracte, et des évolutions qui prennent d’ordinaire des années, voire des décennies se produisent en quelques semaines, parfois même en quelques jours. Des mouvements improbables s’opèrent, dont la suggestion avant la crise aurait fait se tordre de rire même l’observateur le plus avisé. Des gens qui hibernaient politiquement se réveillent soudain, la politisation se répand à la vitesse de l’éclair, les mensonges que l’on gobait encore la veille sont rejetés avec véhémence. Frappées de désuétude, un certain nombre de clôtures mentales tombent. … »

Sauf que comme "accélérateurs "… il y a d’abord eu Chirac (escroc à 82%), puis il y a eu Sarkozy (qui a gouverné la France aussi bien, sinon mieux qu’un chef de clan. Sa devise (en bon mafioso qu’il était) se résumerait à : « Moi et mon clan d’abord ! » Qui a beaucoup de sang sur les mains… sang indélébile, bien sûr !, mais à ce jour, il court toujours, et conseillerait même Macron, et ce, malgré les crimes qu’on lui impute…, ensuite il y a eu Hollande, le menteur des menteurs (dit : Pépère pervers, qui a fait bombarder la Syrie (et a fait tuer des civiles : des femmes, des enfants, etc.) pour se venger des attentats commis en France, en false flag bien entendu !, et pour terminer (j’espère qu’il en sera ainsi !) Macron, totalement déconnectez de tout, et en même temps, de lui-même… c’est tout dire ! Le stakhanoviste du capitalisme financier (parce qu’il y croit dur comme fer à SON système à l’agonie), un peu psychopathe sur les bords, près à toutes les vilenies quand il s’agit de sauver (d’abord lui-même évidement) un système et un pouvoir en pleine décomposition.

Alors, "accélérateurs ?", non, pas trop…, car il a fallut mettre le paquet, pour qu’enfin la colère gronde et enfle ! Beaucoup d’humiliations, d’insultes, de mépris, de mensonges et de bassesses, d’arnaques et de magouilles (notamment électorales) pour en arriver là. Maintenant que nous en sommes presque au dénouement (et ce n’est pas Macron et sa bande (des lâches qui ne s’attaquent qu’aux faibles, dont Castaner, Ferrand, Philippe, Darmanin et consorts, mais pas que…) qui vont l’emporter, ah non ! Les Italiens et bien d’autres peuples européens ont pris faits et causes pour le mouvement des Gilets jaunes, sans doute parce qu’ils sentent que les carottes sont cuites pour Macron et sa bande) on en est à savoir comment ils vont pouvoir s’esbigner en douce et sans rendre de compte à la justice (pas celle manipulée par le pouvoir en place (malgré la soi-disant séparation des pouvoirs ! Quelle farce !), mais LA justice rendue par (et pour) le peuple français. L’heure des comptes a bientôt sonnée !, et c’est bien ainsi…
PS : *révélateurs sans doute ?

08/01/2019 20:01 par Serge F.

Merci pour cet excellent article !

Voici, en écho, cette déclaration importante de Jean-Luc Mélenchon :

https://www.youtube.com/watch?v=00JKfNG6w5A

08/01/2019 20:23 par sergio

SILENCE écrit : « … Aussi désastreuses soient les politiques confédérales, les syndicats demeurent indispensables. Selon toute vraisemblance, les gilets jaunes ne l’emporteront pas simplement avec des manifestations hebdomadaires, ou des blocages aisément levés les uns après les autres par la police ; la grève est incontournable. Et qui dit grève dit syndicats. Puisque l’on sent bien que les directions resteront frileuses ou hostiles, les jonctions doivent se faire au niveau local, où la dégénerescence bureaucratique est généralement moindre. Au niveau de l’organisation, le plus simple serait de multiplier les comités populaires autogérés sur une base locale, en pratiquant la démocratie directe (pas de chef, pas de porte-parole permanent, mandats impératifs et révocables, correspondance entre la décision et l’action, etc.) dans des assemblées ouvertes à toutes celles et ceux qui souhaitent lutter, dans un strict esprit d’égalité. En la matière, les gilets jaunes de Commercy tracent une voie réjouissante… »

Comment pouvez imaginer un seul instant que les Gilets jaunes ne l’emporteront pas simplement avec des manifestations hebdomadaires… etc., etc., etc. ?
D’abord sur les ronds points et autres lieux publiques, il ne s’agit absolument pas d’occupations hebdomadaires, mais d’occupations permanentes, et les forces « du désordre national », débloquent un rond point par ci par là, ce qui ne l’empêche pas de se réformer aussi sec à quelques centaines de mètres plus loin (quand ce n’est pas au même emplacement…) quelques temps plus tard.
Les Gilets jaunes de Commercy dans leur second appel, préconisent une forme d’organisation à des lieues de celles usitées et imposées (pluriel, bien que celles-ci soient si semblables les unes des autres, et unanimement auxiliaires du pouvoir) par le pouvoir et leurs complices : partis institutionnels (ou ceux qui souhaitent si ardemment le devenir, (qui ne remettront évidemment pas le « système pyramidale », UN chef, décidant de tout pour tout le monde, etc.) et qui préconisent même la « révolution par les urnes »... absurde !) et centrales syndicales en tête !
Les Gilets jaunes ne vous ont pas attendu pour penser ni même réfléchir (incroyable, non ?) en ce qui concerne la pérennité de leur mouvement ainsi que les organisations… (multiples puisqu’il s’agit d’un mouvement protéiforme).
Ils ont le temps long pour eux, au contraire de leurs ennemis déclarés (voir à ce sujet, les nombreux appels (de moins en moins voilés) « à la guerre civile » de certains membres du gouvernement Macron… tellement ils sont pressé par le temps, et qu’ils ont de comptes à rendre (et très rapidement) à leurs mentors). Macron espère (et espérera longtemps encore) qu’avec son soi-disant « grand débat national », il pourra « reprendre la main », tout en déclarant (en même temps) que cela ne changera en rien le calendrier des ses réformes ! Tout est dit… ou presque.

08/01/2019 21:39 par irae

Intéressant le +4 points de confiance du ps pour ceux qui s’obstinent à les classer à gauche.

08/01/2019 23:31 par mandrin

Le boxeur Dettinger est l’image même des comités spontané légitime de défense du peuple qui vont surgir de plus en plus et comme il l’annonce lui même le combat continu suite au prochain round...une police violente contrainte a la fuite a pris la force d’un symbole de résistance et cela à main nue...et au delà du gendarme boxé juste un peu sonné sous son casque "on est loin des mains arraché et autre mutilation" c’est macron et son monde de pilleurs qui on été percuté par les poings du boxeur et sa fait mal car ils sont dans les cordes !

09/01/2019 08:19 par Bernard Gensane

Quand je lis tous ces commentaires, dont la qualité et la lucidité me comblent de joie, je ne regrette vraiment pas d’avoir consacré, depuis une dizaine d’années, une à trois heures par jour à mettre en forme – sans en changer un mot, naturellement – des textes qui prouvent que la vraie gauche est belle et féconde.

Merci aux contributeurs, merci aux lecteurs.

09/01/2019 11:09 par Serge F.

Voici un article au vitriol écrit par Michel Onfray. A lire absolument. Son titre : "La République attaquée par un transpalette".

https://michelonfray.com/interventions-hebdomadaires/la-republique-attaquee-par-un-transpalette-

Cet autre article est aussi intéressant à lire :

https://michelonfray.com/interventions-hebdomadaires/butez-les-jusque-dans-les-chiottes-

Je ne suis pas un fan de Michel Onfray, mais j’apprécie quand il utilise sa plume acérée pour défendre une noble cause.

09/01/2019 11:23 par Jean-Yves LEBLANC

Moi aussi je viens saluer cet article qui énonce toute une série de vérités, dont certaines bien amères, que le mouvement des Gilets Jaunes met à nu. Je note aussi avec plaisir le soutien unanime que lui manifestent les commentaires alors que, il y a peu de temps, beaucoup des lecteurs du GS se seraient insurgés contre les critiques de la gauche politique et surtout syndicale qu’il contient.

J’ai cependant un désaccord lorsque l’auteur critique la revendication des Gilets Jaunes de baisse des taxes sur les produits de première nécessité. L’auteur est contre car il pense qu’on va "régler la note en taillant dans l’État social".
La sécu, les assédic, les caisses de retraite sont (étaient) financées par la cotisation sociale. La part patronale de cette cotisation représentant un salaire différé s’ajoutant au salaire direct. Cette notion de salaire indirect "socialisé" est fondamentale. Il est en effet versé directement au système social (pas à l’Etat) sans que la sale patte de l’Etat bourgeois puisse le voler.

Les "réformes" successives de cet Etat bourgeois ont donc pour but de supprimer la cotisation sociale patronale (le salaire indirect appelé "charge" par la propagande) et de le remplacer par des taxes. Ainsi, le travailleur perd son salaire indirect (donc paie le social sur son salaire direct). Le patron réalise son rêve de baisse des salaires. L’Etat perçoit ces taxes et fait ce qu’il en veut : il vole l’argent au profit des copains et des banques et justement "taille dans l’Etat social" pour, au final, le privatiser.

Conclusion : défendre les taxes au prétexte qu’elles financent l’Etat social est, à mon avis, une hérésie de même que revendiquer une hausse des salaires pour éponger une hausse des taxes. Ajoutons que le fonctionnement de l’Etat doit être assuré par l’impôt sur le revenu progressif et non par les taxes qui, à l’inverse, frappent les plus pauvres. Je soutiens donc la revendication anti-taxes des Gilets Jaunes.
Je ne peux m’empêcher de penser que cette hérésie est un sous-produit de l’engagement unanime de la gauche en faveur des taxes carbone et autres éco-taxes. L’infiltration de la gauche par les dogmes écolos et décroissantistes est une catastrophe pour la défense des travailleurs. C’est, je crois, une de ces autres amères vérités qu’il faudra un jour ou l’autre accepter de regarder en face.

09/01/2019 11:32 par Albert Leglois

Déjà dans les différents sondages un courant de pensée n’apparait pas à travers le PCF
Ce texte n’est pas signé,mais on peut supposer qui en est à l’origine.
Sur l’attitude de la CGT, si c’est vrai qu’il y a eu une évolution du mouvement des gilets jaune, (pour y avoir été dès le début où les idées fascistes avaient pignon sur rue, et où les syndicats, et les partis étaient bannis),il y a eu une évolution positive plus à gauche par la suite sur les revendications mais en rejetant toujours la présence des syndicats et des partis.Et dans ce texte les ya ka faut kon ne manquent pas, c’est facile quand on engage pas sa responsabilité.Concernant la grève générale depuis quarante ans que je suis syndicaliste j’entends des camarades en faire appel comme si il suffisait de le dire pour qu’elle se produise .Même en 68 elle n’a pas eu lieu beaucoup d’entreprises été en « « arrêt » » par manque d’approvisionnement.Quand on connait par la pratique syndicale la réalité du salariat ,on ne peut faire une telle analyse.Les appels à la grève ne manquent pas mais le nombre de grévistes parle de lui même.

09/01/2019 12:41 par Assimbonanga

@Jean-Yves LEBLANC : exact, super.
Mais voilà-t-il pas que le dernier petit paragraphe... Tu m’as comprise ! Tu ne peux t’empêcher de penser que Lutte contre ton mauvais génie ! Pas d’essentialisation ni amalgame. Juste des faits avérés, un par un.

09/01/2019 15:16 par Toff de Aix

Le pouvoir macronien ne lâchera rien : pire, c’est la fuite en avant qui est désormais actée, avec en préparation une loi liberticide de plus, permettant d’accéder aux rêves les plus fous de la police, des reactionnaires et de la bourgeoisie réunis de devenir réalité : le fichage généralisé de la population et l’arrestation préventive.

Camarades, l’heure est extrêmement grave, en ce sens que l’année qui vient verra une polarisation qui ne se résoudra que par le rapport de force ultime : il va falloir choisir son camp... Je ne doute pas un seul instant que nous glissons vers une forme de dictature, insidieuse car non directe, mais néanmoins totalement réelle. Ou sont les garde-fous qui permettent a chacun d’espérer ne pas finir sous le talon de fer du patronat et des fascistes ? Ils sont en train de disparaître les uns après les autres : la justice de classe, les instructions de "sévérité"du ministère au parquet, les déclarations martiales des ministres, les commandes d’armements, la polarisation médiatique hallucinante, tout permet d’affirmer que nous y sommes déjà, et que demain, meme un site comme celui-ci, affichant de simples opinions dissidentes, sera dans le viseur. Camarades, préparez-vous. Vraiment.

28/01/2019 17:36 par Albert-Nord

CGT : Pour que les choses soient dites - Jean-Pierre Page. Editions Delga (2018)
https://www.youtube.com/watch?v=q2BmwsQsWI4
Verbatim à 52.30mn

- Aymeric Monville :"Mais c’est vrai que c’est lié aussi, j’ai l’impression, à une stratégie générale (de la CGT) ou l’on a vu aussi des directives comme quoi il faudrait éliminer des partisans du FREXIT des manifestations ?!
Jean-Pierre Page : "Oui, bien sûr ! Absolument, absolument, absolument !
C’est à dire pour rentrer plus dans le détail (…) il faut savoir que maintenant depuis quelques années, a été mis en place un groupe de travail dans la CGT qui s’occupe de TRAQUER, je ne peux pas utiliser une autre expression que ça, de TRAQUER les militants de la CGT qui auraient selon eux des sympathies pour les thèses : sortie de Union Européenne, de l’euro et qui sont évidement amalgamés avec les thèses de l’extrême droite.
C’est absolument inacceptable.
Cette chasse aux sorcières est absolument inacceptable, mais il faut dire qu’elle est organisée.
Quand je veux dire qu’elle est organisée, c’est avec des moyens matériels et humains. Il y a un groupe de travail, il y a des publications. D’ailleurs, la note qui fait référence à Annie Lacroix-Riz et aussi à Jean Bricmont(…) Cette note s’appelle numéro 17 !
Donc, je suppose qu’il y en a eu beaucoup d’autres avant ! "

Dans cet entretien, il est fait référence à la C.E.S et à l’indépendance syndicale ; à la souveraineté ; à l’affaire CGT contre Annie Lacrois-Riz la « brune-rouge » fiche numéro 17 ; au fichage et aux misères du syndicalisme d’aujourd’hui.

@ Bernard Gensane
Merci à vous aussi pour votre travail.


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