C’est caché sous nos yeux : pourquoi nous ne pouvons pas voir le système nous détruire (Counterpunch)

Je dis rarement aux lecteurs ce qu’ils doivent croire. J’essaie plutôt de les avertir qu’il serait sage de ne pas croire, du moins lorsqu’il n’y a pas de véritable preuve, ce que ceux qui sont au pouvoir nous demandent de croire.

Nous avons tous des adages bien connus à propos du pouvoir : « le savoir, c’est la pouvoir », et « le pouvoir tend à corrompre alors que le pouvoir absolu tend à corrompre absolument. » Ces maximes nous touchent car elle parlent avec vérité de notre expérience du monde. Les gens qui ont le pouvoir – même un pouvoir très limité, détiennent une autorisation d’autrui – ont tendance à en abuser, parfois de façon subtile et inconsciente et parfois ouvertement et délibérément.

Si nous sommes raisonnablement conscients de nous-mêmes, nous pouvons ressentir en notre for intérieur, cette tendance à exploiter à notre avantage un quelconque pouvoir dont nous jouissons, que ce soit dans nos relations avec un conjoint, nos enfants, un ami, un employé, ou juste par l’usage courant de notre position pour obtenir de l’avancement.

En général, ce n’est fait ni avec malveillance ni consciemment. Par définition, le plus difficile à admettre sont nos propres angles morts psychologiques, émotionnels et mentaux, et le plus important, du moins pour ceux nés avec des privilèges de classe, de sexe et de race, est de réaliser que ce sont la des formes de pouvoir également.

Cependant, ce sont des formes mineures de pouvoir comparées au pouvoir exercé collectivement par les structures dominantes de nos sociétés : le secteur financier, les entreprises, les médias, la classe politique, et les services de sécurité.

Mais curieusement, la plupart d’entre nous, sommes bien plus enclins à accepter l’influence corruptrice du pouvoir relativement faible d’individus que le pourrissement d’institutions et structures largement plus puissantes. Nous blâmons l’instituteur ou le politicien, parce qu’ils abusent de leur pouvoir, mais nous sommes réticents à faire de même avec les systèmes éducatifs ou politiques dans lesquels ils doivent intervenir.

De même, nous sommes plus heureux d’identifier le pouvoir personnel excessif d’un Rupert Murdoch plutôt que l’immense pouvoir de l’empire corporatif derrière lui et dont dépend son succès et sa richesse personnels.

Et au delà, nous luttons par dessus tout pour détecter le cadre structurel et idéologique sous-jacent et permettant la cohésion de ces discrets exemples de pouvoir.

Contrôler le récit

Il est relativement facile de comprendre que votre supérieur hiérarchique abuse de son pouvoir, car il en a si peu. Son pouvoir est visible puisqu’il ne concerne que vous et le petit groupe de personnes autour de vous.

C’est un peu plus difficile, mais pas trop compliqué, d’identifier la politique abusive de votre compagnie, les bas salaires, les compressions touchant les heures supplémentaires, les attaques contre les représentants syndicaux.

Il est plus difficile de voir le pouvoir corrupteur des grandes institutions, en dehors parfois, de la corruption de hauts responsables au sein de ces institutions, comme Robert Maxwell ou Richard Nixon

Mais il est pratiquement impossible d’apprécier la nature corrompue de l’ensemble du système. La raison se trouve dans ces aphorismes : le pouvoir absolu dépend du contrôle absolu de la connaissance, qui nécessite à son tour une corruption absolue. Autrement, nous n’aurions pas à affronter un pouvoir important ; cela pourrait être évident, si nous nous arrêtions pour y réfléchir.

Le vrai pouvoir dans nos sociétés découle de ce qui est fatalement difficile à voir – les structures, l’idéologie et les discours – au lieu des individus. N’importe quel Murdoch ou quel Trump peut tomber, bien qu’en tant que fidèles acolytes du système de pouvoir, ils le sont rarement, devraient-ils menacer le maintien nécessaire du pouvoir par ces institutions interconnectées, par ces structures ?

L’actuelle élite néolibérale qui dirige effectivement la planète a atteint le pouvoir absolu, de plus près que n’importe quelle élite dans l’histoire humaine. Et parce qu’elle possède un pouvoir presque absolu, elle contrôle presque totalement les discours officiels sur nos sociétés et nos « ennemis », ceux qui font obstacle à sa domination mondiale.

L’affaire Skripal

Il suffit de regarder l’histoire des deux hommes, capturés par les caméras de vidéosurveillance, qui ont récemment été accusés par notre classe politique et médiatique d’avoir utilisé un agent chimique pour tenter d’assassiner Sergei Skripal et sa fille Yulia, en mars.

Je ne prétends pas savoir si Alexander Petrov et Ruslan Boshirov travaillent pour les services de sécurité russes, ou s’ils ont été envoyés en mission à Salisbury par Vladimir Poutine pour tuer les Skripal.

Toutefois, ce qui est clair, c’est que les services de renseignement britanniques ont alimenté par auto-perfusion les médias institutionnels, depuis le début. Et les médias n’ont à aucun moment voulu vérifier une quelconque partie de l’histoire ni même posé la moindre question. Ils furent totalement passifs, ce qui signifie que nous, leurs lecteurs, nous avons été complètement passifs.

Il est évident qu’il y a des questions à poser à propos de ce récit si l’on se détourne des dociles médias institutionnels et qu’on cherche les points de vue d’un esprit indépendant, un ancien initié comme Craig Murray.

L’ancien ambassadeur britannique, Murray pose des questions qui peuvent s’avérer pertinentes ou non. A ce stade, où nous ne pouvons compter que sur ce que les services de renseignement nous fournissent de façon sélective, ce type de doutes devrait mener les enquêtes de tout journaliste sérieux couvrant l’histoire. Mais comme c’est souvent le cas, ces questions ne sont pas posées pas plus qu’elles ne donnent lieu à des enquêtes, mais quiconque comme Murray pense de manière critique – qui suppose que les puissants chercheront à défendre leurs intérêts et éviter de rendre des comptes – est immédiatement révoqué en tant que complotiste ou comme étant dans la poche de Poutine.

Ce genre de critique n’est pas sérieux. Les nombreuses questions soulevées – par exemple pourquoi y a-t-il autant de vide dans les enregistrements de vidéosurveillance des mouvements des Skripal et des deux assassins présumés – pourraient être résolues si cela pouvait susciter de l’intérêt. L’évasion et les prélèvements suggèrent simplement que le pouvoir n’a pas besoin de rendre des comptes, qu’il reste dissimulé, que l’histoire est plus importante que la vérité.

Et c’est une bonne raison pour passer de la remise en question du récit vers la défiance.

Comme des ondes sur un lac

Les journalistes ont généralement une relation passive avec le pouvoir, en contradiction totale avec leur image de chiens de garde tenaces. Mais c’est l’idéologie qui oriente ces récits qui est plus fondamentale que le contrôle du récit. L’idéologie garantit que le système de pouvoir est invisible non seulement pour nous, qu’il abuse et exploite, mais aussi pour ceux qui en profitent.

C’est précisément parce que le pouvoir réside dans les structures et l’idéologie, plutôt que dans les individus, qu’il est si difficile à voir. Et les structures de pouvoir elles-mêmes sont rendues encore plus difficiles à identifier car les récits créés sur nos sociétés sont conçus pour dissimuler ces structures et cette idéologie – là où réside le véritable pouvoir – en se concentrant plutôt sur les individus.

C’est pour cette raison que les journaux et les émissions de télévision regorgent d’histoires de personnalités : célébrités, familles royales, criminels, politiciens. Ils sont rendus visibles afin que nous ne puissions pas détecter les structures idéologiques internes que nous vivons, qui sont supposées rester invisibles.

Les nouvelles et le divertissement sont les ondes qui se propagent à la surface du lac, non le lac lui-même. Mais ces ondes ne pourraient pas exister sans le lac qui les forme et les façonne.

Collés à l’écran

Cela peut ressembler à une hyperbole. Éloignons-nous de notre système idéologique spécifique – le néolibéralisme – et considérons les systèmes idéologiques antérieurs dans l’espoir qu’ils offrent quelque perspective. Pour le moment, nous ressemblons à une personne qui se tiendrait contre un écran IMAX, si près que nous ne pouvons pas voir qu’il y a un écran, ni même concevoir qu’il y a une image complète. Tout ce que nous voyons, ce sont des couleurs et des pixels en mouvement. Peut-être, Pourrions-nous deviner brièvement une bouche, la roue d’un véhicule, une arme à feu.

Avant le néolibéralisme, il y avait d’autres système de domination. Il y avait par exemple, le système féodal où l’aristocratie s’appropriait exclusivement une ressource commune, la terre. Ce système a exploité les masses en les forçant à travailler péniblement la terre pour une bouchée de pain, afin de produire la richesse pour entretenir les châteaux, le clergé, les manoirs, les collections d’art et les armées. Durant de nombreux siècles, le pouvoir de cette petite élite est resté largement incontesté.

Mais ensuite, une classe d’entrepreneurs a émergé, défiant l’aristocratie terrienne avec de nouveaux moyens de production industrielle. Ils ont construit des usines et ont profité des économies d’échelle qui ont légèrement élargi le cercle des privilèges, en créant une classe moyenne. Cette élite et la classe moyenne qui profitaient des miettes tombées de la table du maître, vivaient de l’exploitation des enfants des « maisons de travail » et de la main-d’œuvre des nouveaux pauvres des zones urbaines dans les bidonvilles.

Ces époques étaient systématiquement corrompues, permettant aux élites de ces temps d’étendre et de pérenniser leur pouvoir. Chaque élite produisait des justifications pour calmer les masses exploitées, pour leur faire croire par un lavage du cerveau, que le système était inscrit dans l’ordre naturel des choses ou même qu’il existait pour leur bien. L’aristocratie s’appuyait sur la monarchie de droit divin, la classe capitaliste sur la main invisible du libre marché et les revendications fallacieuses d’égalité des chances.

Dans cent ans, si notre espèce continue d’exister, notre système ne sera pas moins corrompu – si ce n’est pire – que ses prédécesseurs.

Le néolibéralisme, le dernier stade du capitalisme, le système ploutocratique des entreprises – quel que soit le nom que vous souhaitez lui donner – a permis à une petite élite d’accumuler plus de richesses et de gagner plus de pouvoir, qu’aucun monarque féodal n’aurait pu en rêver. Et en raison de la portée mondiale de cette élite, sa corruption est plus endémique, plus totale, plus destructrice que ce que l’humanité ait jamais connu.

Une élite politique étrangère peut détruire le monde à plusieurs reprises avec des armes nucléaires. Une élite institutionnelle mondiale remplit les océans des déchets de notre consommation, et détruit les forêts, les poumons de notre planète pour des plantations d’huile de palme afin de satisfaire notre désir insatiable de biscuits et de gâteaux. Et nos médias ainsi que nos services de renseignement fabriquent conjointement un récit sur des pères fouettards et des méchants à la James Bond – à la fois dans les films hollywoodiens et dans nos journaux télévisés – pour nous rendre craintifs et malléables.

Présupposée fatalité

Nous abusons pour la plupart de notre petit pouvoir sans réfléchir, avec un hypocrite sens de la morale. Nous nous disons que nous avons donné aux enfants une « bonne fessée » parce qu’ils ont été vilains, plutôt que parce que nous avons établi, assez tôt avec eux, une relation de pouvoir qui génère de la confusion, puisque nous leur avons enseigné que l’usage de la force et de la contrainte allait de pair avec l’approbation parentale.

Ceux qui ont plus de pouvoir, depuis les larbins dans les médias aux dirigeants des grandes entreprises, ne sont pas différents. Ils sont tout aussi incapables de remettre en question l’idéologie et le récit – comment notre système néolibéral est-il incontournable et « juste » - que nous tous. Mais ils jouent un rôle essentiel dans le maintien et la perpétuation de ce système.

David Cromwell et David Edwards de Media Lens ont proposé deux analogies – dans le contexte des médias – qui aident à expliquer comment il est possible pour des individus et des groupes d’aider et de mettre en œuvre des systèmes de pouvoir sans avoir la moindre intention de le faire, et sans être conscients qu’ils contribuent à quelque chose de dangereux. Bref, sans être conscients qu’ils conspirent au sein du système.

Primo :

Lorsqu’un banc de poissons change instantanément de direction, il nous semble que le mouvement est synchronisé par une main invisible. Les journalistes – tous formés et sélectionnés pour l’obéissance par les médias, cherchant tous à maximiser les profits au sein de la société capitaliste d’État – ont tendance à réagir aux événements de la même manière.

Secundo :

Placez un cadre carré en bois, sur une surface plane et versez-y des roulements à billes, des billes ou d’autres objets ronds. Certaines des boules peuvent rebondir, mais beaucoup vont former une couche dans la structure en bois ; d’autres trouveront alors une place au sommet de cette première couche. De cette manière, le flux de roulements à billes construit constamment de nouvelles couches qui produisent inévitablement une forme pyramidale. Cette expérience est utilisée pour démontrer à quel point des structures cristallines quasi-parfaites, telles que des flocons de neige, émergent dans la nature sans une conception délibérée.

Le système, qu’il s’agisse du féodalisme, du capitalisme ou du néolibéralisme, émerge des conditions de la vie réelle, de ceux qui recherchent le pouvoir de la façon la plus impitoyable. À une époque où la ressource principale était la terre, une classe a émergé légitimant son droit exclusif au contrôle de cette terre et de la main-d’œuvre nécessaire pour la rendre productive. Lorsque les procédés industriels se sont développés, une classe a émergé pour exiger des droits de propriété sur ces procédés et sur le travail nécessaire pour les rendre productifs

Notre place dans la pyramide

Dans ces conditions, nous devons puiser dans quelque chose comme le principe de l’évolution selon Darwin, de la « survie du plus fort ». Le petit nombre d’individus plus avides de pouvoir, ayant le moins d’empathie, grimpera jusqu’au sommet de la pyramide et se trouvera le mieux placé pour exploiter les personnes en dessous. Il justifiera cette exploitation par un droit divin, ou par l’évidence de capacités intrinsèquement supérieures, ou par la preuve de l’efficacité du marché.

En dessous d’eux, comme les couches des roulements à billes, se trouveront ceux qui peuvent les aider à maintenir et étendre leur pouvoir : ceux qui possèdent les compétences, l’éducation et la socialisation pour augmenter les profits et vendre les marques.

Tout cela devrait être évident, voire non controversé. Cela correspond à ce que nous expérimentons de petit pouvoir dans nos vies. Est-ce qu’un pouvoir plus grand fonctionne différemment ? Après tout, si ceux qui se trouvent au sommet de la pyramide n’étaient pas avides de pouvoir ou même des psychopathes dans leur recherche du pouvoir, s’ils étaient bienveillants et humains, s’ils étaient soucieux avant tout du bien-être de leur force de travail et de la planète, ils seraient des travailleurs sociaux et des militants pour la protection de l’environnement, non pas des PDG des empires médiatiques et des fabricants d’armes.

Cependant, fondez votre pensée politique sur ce que devraient être les truismes, articulez une vision du monde qui ne fait pas confiance à ceux qui détiennent le plus de pouvoir, car ils sont les plus capables – et déterminés – de l’utiliser à mauvais escient, et vous serez ridiculisé. Vous serez étiqueté en tant que théoricien du complot, chassé comme une victime d’illusions. Vous serez accusé d’être un fou à entonnoir, d’être de mauvaise foi, d’être anti-américain, d’être un guerrier social, un paranoïaque, un anti-israélien ou un antisémite, un pro-Poutine, un pro-Assad, un marxiste.

Rien de tout cela ne devrait nous surprendre non plus. Parce que le pouvoir – pas seulement les personnes dans le système, mais le système lui-même – utilisera tous les outils dont il a besoin pour se protéger. Il est plus facile de se moquer des critiques et de déstabiliser, en particulier lorsqu’on contrôle les médias, les politiciens et le système éducatif, que de fournir un contre-argument.

En fait, il est essentiel d’empêcher tout argument ou véritable débat. Parce que lorsque nous réfléchissons aux arguments, les pesons, utilisons nos capacités critiques, il existe un réel danger que les écailles nous tombent des yeux. Il existe une menace réelle que nous reculions de l’écran et que nous découvrions toute l’image.

Peut-on voir l’image complète de l’empoisonnement des Skripal à Salisbury ; ou l’élection étasunienne qui a conduit à déclarer Trump président ; ou la révolution en Ukraine ; ou les causes et le parcours des combats en Syrie et avant en Libye et en Irak ; ou la campagne pour discréditer Jeremy Corbyn en tant que chef du parti travailliste ; ou les véritables enjeux de la crise bancaire il y a dix ans ?

Le profit au lieu de l’éthique

Tout comme l’élite féodale n’était pas mue par l’éthique mais par la recherche du pouvoir et de la richesse, par le contrôle de la terre ; tout comme les premiers capitalistes n’étaient pas motivés par l’éthique mais par la recherche du pouvoir et de la richesse grâce au contrôle de la mécanisation ; ainsi, le néolibéralisme n’est pas dicté par l’éthique mais par la recherche du pouvoir et de la richesse par le contrôle de la planète.

La seule vérité que nous pouvons connaître est que l’élite occidentale au pouvoir est déterminée à achever la tâche de rendre son pouvoir pleinement mondial, en le transformant de quasi-absolu à absolu. Elle ne se soucie pas de vous ou de vos petits-enfants. C’est un système de calcul froid, ce n’est ni un ami ni un voisin. Il vit pour la satisfaction immédiate de l’accumulation de richesses, et non pour le destin de la planète, demain.

Et à cause de cela, il est structurellement tenu de miner ou de discréditer quiconque, tout groupe, tout État qui s’opposerait à la réalisation de sa domination absolue.

Si ce n’est pas cette idée que nous conservons à l’avant-plan de nos préoccupations lorsque nous écoutons un homme politique, lisons un journal, regardons un film ou une émission de télévision, absorbons une publicité ou nous nous livrons aux médias sociaux, alors nous marcherons tels des somnambules vers un avenir, que les plus puissants, les plus impitoyables, les moins empathiques ont conçu pour nous.

Reculez et regardez l’écran en entier. Et décidez si c’est vraiment cet avenir que vous souhaitez à vos petits-enfants.

Jonathan Cook

Jonathan Cook a remporté le prix spécial Martha Gellhorn pour le journalisme. Ses derniers livres sont “Israel and the Clash of Civilisations : Iraq, Iran and the Plan to Remake the Middle East” (Pluto Press) and “Disappearing Palestine : Israel’s Experiments in Human Despair” (Zed Books). son website est @ http://www.jonathan-cook.net

Traduit par vagabond pour LGS

 https://www.counterpunch.org/2018/09/24/hiding-in-plain-sight-why-we-cannot-see-the-system-destroying-us/

COMMENTAIRES  

29/09/2018 14:51 par vagabond

A mon humble avis JC perd son temps en tentant d’interpeller ceux qu’ils croient aveugles car la réalité est trop gigantesque pour qu’ils puissent la voir.
Pour moi, beaucoup la voient parfaitement mais préfèrent profiter des miettes encore suffisantes avec l’espoir et l’ambition de se rapprocher des couches les moins éloignées de la pyramide.
Quand les peuples auront perdu jusqu’à ce dernier espoir, ils réagiront alors mais ce sera trop tard car la nature en décidera autrement.

29/09/2018 16:54 par Assimbonanga

Le profit prime sur l’éthique. Un cas.

Face au risque d’épuisement de la nappe souterraine de Vittel (Vosges) à cause, principalement d’une surexploitation de la ressource par Nestlé Waters, l’association Vosges Nature Environnement (soutenue par d’autres ONG locales) a envoyé un courrier au ministre François de Rugy, afin que ce dernier retire d’ici 2021, les autorisations de prélèvements et de consommation d’eau accordées à l’entreprise. « Cette demande est motivée à la suite du refus tacite du préfet des Vosges que nous avons sollicité dans ce sens le 4 juillet 2018 et qui ne nous a pas apporté de réponse », explique l’association dans son courrier.
Pour justifier sa demande, l’association met en avant plusieurs points :
- Les autorisations accordées à Nestlé, à hauteur de 1 million de m3/an, constituent une « erreur manifeste d’appréciation » puisque le déficit de la nappe, connu depuis le milieu des années 1970, était d’environ 1,2 million de m3 à cette époque.
- Les prélèvements actuels de Nestlé Waters, même réduits à 750.000 m3, correspondent peu ou prou au déficit actuel de la nappe.
- Les collectivités qui s’approvisionnent aussi dans cette nappe ont un droit d’usage prioritaire reconnu par la loi sur l’eau de 2006.
Pour l’association, « le retour à l’équilibre de la nappe revêt aujourd’hui un caractère d’urgence, aggravé dans le contexte de dérèglement climatique, et il nous semble être de la responsabilité de l’État de mettre un terme aux autorisations de prélèvements pour embouteillage. »
Source : Reporterre.

29/09/2018 16:56 par Sébastien

@ Vagabond

La réalité est certes immense à appréhender, mais la lâcheté humaine également.
Cependant, un pêcheur a-t-il besoin de connaître les dimensions de l’océan et le nombre de poissons qui y barbotent pour savoir pêcher ?
Pour se "libérer", un individu n’a besoin que de quelques clés de compréhension, de chefs (sans e, sans oeufs...) qui l’inspirent et lui donnent l’espoir d’un avenir meilleur. Chefs issus de son clan, de sa condition, ça va de soi. Ce qui fait que malgré tous les a priori débités dans cette analyse, certains systèmes de "domination" (pourquoi y voir FORCÉMENT un principe négatif ?) ont perduré aussi longtemps.
On peut avoir de l’autorité sans être autoritaire, être juste si on crée les conditions -stables- pour que cela se produise.
L’exemple de la fessée est à ce titre consternant et gravissime en terme de vision du monde, mélangeant une autorité parentale naturelle et légitime avec celle de grands patrons exploiteurs. Un enfant sait pertinemment faire la différence entre la raison pour laquelle il reçoit une punition et le fait d’être battu. Encore heureux !
La "coolitude" et la soi-disant non-violence est justement prônée par les pires entreprises et toutes les institutions mondialistes. Aaaah, la "grande" famille de l’entreprise...Drôle d’analogie et de convergence n’est-ce pas ? Drôle de perversion que d’arriver à obtenir de ses esclaves (ou enfants) de travailler 12 heures par jour, de se droguer pour tenir le choc (mais personne n’a prôné cela, n’est-ce pââââs ?), d’en perdre le sommeil, sans que personne ne bronche.
L’erreur majeure du texte, est de rejeter sans nuance et par réaction toute forme de pouvoir en le confondant avec ce qui est justement dénoncé. Car nos élites jouent exactement cette partition de rejet et de confusion pour effacer le leur et se présenter en "libérateurs" du pouvoir structurant et légitime d’antan. C’est bien expliqué pourtant dans ces lignes : un pouvoir chasse l’autre, mais pour de mauvaises raisons, et jamais dans le sens des exploités.
On a bien découvert récemment que ce ne sont pas des esclaves qui ont construit les pyramides d’Egypte, mais au contraire des gens qui étaient mieux traités que les autres. Pourquoi a-t-on alors prétendu cela jusqu’à présent sinon pour faire croire à la légitimité du pouvoir moderne sur ses prédécesseurs si "archaïques" ?
Pourtant il suffit de pousser la réflexion pour se douter qu’un esclave est incapable de construire quoi que se soit dans les conditions décrites. Casser des cailloux ou ramasser du coton représente un travail pénible mais qui ne demande aucune qualification. Construire des monuments gigantesques et d’une architecture hyper-complexe est autre chose. Et si les esclaves meurt, qui les remplacera ?
Aujourd’hui, la vie humaine vaut encore moins qu’il y a 5000 ans parce que la croissance de la population est quasi-exponentielle et qu’on peut d’ors et déjà élever des hordes d’être humains ravalés au rang de bêtes de somme artificiellement. Le meilleur des mondes est un cauchemar éveillé à vous faire passé le Moyen-Age pour le paradis perdu.

29/09/2018 20:20 par vagabond

@Sébastien
Je pense plutôt que l’individu a besoin de comprendre en cherchant la vérité. Pourquoi faire un chef ? Pourquoi instaurer une hiérarchie qui relègue les individus au rang inférieur d’exécutants ? Parce que les chefs que nous avons à notre époque n’ont rien à voir avec les chefs spirituels des anciennes époques. Ce ne sont pas les chefs des tribus amérindiennes ou africaines accessibles, intègres, ayant le sens de l’honneur qui ne voulaient faillir à leur devoir.

La domination est par essence négative. Elle sous-tend la soumission et la suprématie.
On peut avoir une autorité à condition d’en être digne et que ceux qui ont donné cette permission puissent la retirer. Est-ce que vous pouvez retirer l’autorité à un président honteux ? A un manager abusant de son petit pouvoir ?

On peut éduquer un enfant sans avoir recours à la violence ou à l’humiliation d’une fessée. La punition n’a pas besoin d’être corporelle. Il parle peut-être du conditionnement des enfants qui les poussent à l’obéissance par la peur. Un modèle qui se reproduit en entreprise où les individus sont infantilisés par leurs managers. Habitué à obéir dès l’enfance, l’adulte continuera de le faire dans des milieux infantilisant et scolaires.

Je ne pense pas que l’auteur appelle à remplacer le pouvoir par un autre. Ce qu’il dit de la pyramide est assez vrai. Certains iront s’installer au sommet convaincus de leur supériorité, de leur « jupitérisme ».

Pour les archéologues qui étudiaient les pyramides, le modèle qu’ils connaissaient était celui de la domination justement, du colonialisme sous toutes ses formes, rien d’étonnant à ce qu’ils aient pensé que la construction a été l’œuvre des esclaves au contraire de la conception.

La vie n’a plus de valeur, On affame les enfants, on tue et on tue, humains, bêtes humaines, animaux... dans le meilleur des mondes oui.

30/09/2018 10:48 par Autrement

mélangeant une autorité parentale naturelle et légitime avec celle de grands patrons exploiteurs

Sébastien a raison de dénoncer le procédé ridicule et dangereux de comparer le rapport parents/enfants avec la volonté de puissance des exploiteurs, et de recourir à la psychologie individuelle pour expliquer les phénomènes de pouvoir.
C’est d’autant plus incohérent avec le reste de l’article, que l’auteur insiste à juste titre sur la psychologisation et la personnalisation de la vie politique comme facteur d’aveuglement et - justement - d’infantilisation.

D’où les éléments de langage trompeurs qui parasitent l’espace public, comme par exemple les notions de "punition" ou de "sanctions", que certains États auraient le droit d’exercer contre d’autres, et qui sont en vérité, non le signe d’une sollicitude paternelle ou d’une sauvegarde éducative des principes (des "valeurs" !!!), mais de purs actes d’agression, militaires ou économiques, qui piétinent le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.

Vu l’universel théâtre émotionnel, façon faits-divers ou petites phrases, qu’offre la société du spectacle, les spectateurs (et même souvent ceux qui sont ou se croient acteurs) ont tendance à ne regarder sur la scène publique que les défauts et qualités de telle ou telle personnalité, ses traits de caractère, son comportement public ou privé, et non ce qu’il représente comme projet de société et comme force politique. J’entends encore cette brave dame, interviewée avant l’élection présidentielle, dire du candidat Macron sur le ton de l’évidence : "il est jeune, il est dynamique, que demander de plus ?"

Non, la société ne se réduit pas à une collection d’individus, elle est faite de rapports sociaux qui, sous l’angle du pouvoir, sont des rapports de force : statut de la propriété des grands moyens de production et d’échanges (comme dit si justement le marxisme), lui-même régi par des institutions nationales comme la constitution, ou internationales, comme le FMI, l’OMC etc., qui sont investies par les puissants et sont en fait l’expression de la raison du plus fort ( "tu la troubles reprit cette bête cruelle"), en l’occurrence celle du fameux 1% ; à quoi il faut ajouter les grands moyens d’information, la domination idéologique qui s’installe dans les consciences et leur impose un mode de fonctionnement formaté d’avance, y compris par la volonté de mettre au pas les enseignants.

L’article montre pourtant bien qu’en réalité, ce sont les structures cachées qui régissent la vie quotidienne des populations. Et que c’est de leur prise en compte et de leur compréhension, sans cesse approfondie et actualisée, que dépend notre pouvoir d’émancipation.

07/10/2018 13:36 par vagabond

C’est justement d’infantilisation qu’il s’agit.
Quand on voit certains managers reproduire les comportements scolaires ou parentaux on se rend compte que l’éducation est à l’origine de la subordination. C’est également le cas avec les médias qui choisissent pour nous le "récit", la mode, la marque...

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