LES PROLETAIRES ET LES AUTRES OU LE CLIVAGE STATIFICATIONNISTE
Il y a le clivage peuple-classe en riposte à la bourgeoisie, issu de l’écard grandissant entre ces deux mondes. Mais il y a aussi la distinction - à un autre niveau - entre les prolétaires et les autres. Suivant le contexte et les enjeux un de ces clivage sera déterminant. D’autres interviendront puisque nous vivons dans un monde complexe.
Ce clivage prolétaires-non prolétaires opère un clivage de type "classiste" - vision en terme de rapports sociaux - à partir d’une vision qui procède en terme de couches sociales donc stratificationniste. Ce clivage met "à part" d’autres types de dominations de type sexiste, de type autoritaire, raciste, mépris de l’environnement, etc. Ces dominations ne sont pas ignorées. Pour faciliter l’exposé elles sont ici ignorées. Mais il est entendu qu’un projet altermondialiste se doit de les prendre en charge. Le clivage stratificationniste est ici original. Il est conçu pour qu’une réponse politique soit élaborée au plan économique, social, fiscal. Ce clivage n’est pas le seul à considérer surtout au plan "classiste". Il y a le clivage bourgeoisie contre peuple-classe, capital-travail et d’autres rapports sociaux dont celui portant sur le logement.
L’Europe de l’Union compte presque 500 millions d’habitants qui produisent un PIB de 12500 milliards d’euros en 2008 soit une richesse économique supérieure à celle des USA. Le gros problème est que cette richesse est très inégalitairement répartie d’une part horizontalement entre les pays membres mais aussi d’autre part verticalement au sein de chaque pays membre. Cette Europe n’est pas vraiment notre Europe car c’est surtout une Europe du fric, une Europe qui met d’un côté un réseau des différentes bourgeoisies nationales possédantes et de l’autre des peuples-classe - le peuple résiduel une fois enlevé la bourgeoisie nationale - qui subissent la crise économique et sociale. Les cadres subissent le chômage et les déclassement sociaux. Ils tombent parfois dans le prolétariat à l’instar de ces petits patrons qui ont licenciés leur deux ou trois employés avant de devenir auto-entrepreneur à faible revenus. Les employés, ouvriers et cadres moyens subissent la prolétarisation.
i - LE NOUS PROLETAIRE : POUR UN BOUCLIER SOCIAL POUR LES MOINS DE 3000 euros par mois dans les principaux pays de l’Union.
Qu’est ce que la prolétarisation ? C’est simple c’est lorsqu’en fin de mois, le compte bancaire tombe à zéro voire passe en déficit. On peut dire qu’est prolétaire un travailleur qui arrive à dégager qu’une faible épargne dans le mois, chaque mois. Concrétement, il est difficile de donner un montant. Mais ce n’est pas impossible.
Disposer de 4000 euros par mois en vivant dans un beau quartier de Paris avec une famille nombreuse peut déboucher sur un compte bancaire proche de zéro en fin de mois. C’est un cas rare que l’on ne saurait généraliser. Il convient de s’en souvenir néanmoins. Plus sérieusement, il apparait qu’il n’est pas rare qu’un travailleur salarié ou indépendant avec enfants sans compagnon se retrouvent avec une épargne modeste de 100 à 200 euros alors qu’elles perçoivent de 2800 à 3200 euros par mois. Evidemment, de nombreuses situations font qu’il est possible de vivre sans se serrer la ceinture avec 2300 ou 2500 euros par mois.
Mais l’élaboration d’un bloc social ne saurait se forger sur une base misérabiliste. Ce qui ne signifie pas prendre une position particulière sur la décroissance ou non en matière de consommation de biens non écologiques. C’est pourquoi ce plafond des prolétaires peut dans des pays comme la France en 2010 être fixé à 3000 euros.
On comprend avec ces quelques lignes que les sous-prolétaires qui disposent du SMIC et en-dessous font parti du bloc social à défendre. Il faut donner à Pierre le lumpenprolo sans déhabiller Paul le prolétaire mieux loti plus près des 3000 euros par mois.
II - EUX : DISTINGUER PARTENAIRES ET ENNEMIS
Avec les partenaires des arrangements sont possibles, avec les ennemis c’est une logique gagnant-perdant qui est à l’oeuvre. Ennemis ne signifie pas faire n’importe quoi mais assurément l’action libératrice oblige à des actes offensifs.
– Les partenaires au sein des travailleurs aisés. On en trouve.
Ceux qui gagnent entre 3000 et 5000 euros sont des travailleurs aisés mais rien n’est acquis pour eux malgré leur niveau élevé de qualification et de compétence. Dans cette perspective on peut les nommer couche moyenne. Ce positionnement est bien différent de celui qui place les couches moyennes dès 2000 euros jusqu’à 7000 euros, plancher du revenu des 12 catégories de dirigeants. Pour les travailleurs aisés entre 3000 et 5000 euros par mois, un déclassement social peut toujours surgir. Ils ont en général de quoi rebondir positivement.
– Les ennemis de classe. Pas tous.
Mais c’est surtout au-dessus de 5000 euros par mois que les choses changent. Au-dessus de 5000 euros commence la tranche des individus qui pèsent leur revenus à l’année. Ils possèdent outre leur revenu mensuel un gros patrimoine composé de biens immobiliers (résidence principales et secondaires) et de portefeuilles financiers qui assurent un très grand confort de vie.
Il se trouve aussi que c’est parmi eux que l’on trouve les grands casseurs de code du travail et de statut du fonctionnaire. Pour le dire plus sérieusement ils fournissent largement les troupes de la couche d’appui du capital (CAC). Ce sont souvent des ennemis de classe. Ils vivent sur le territoire national mais ils sont d’un autre monde, un monde de prédateurs. Ils parlent la même langue que nous mais c’est pour mieux assurer notre domination.
Quand ce n’est pas le cas alors on se trouve dans une configuration qui met le peuple-classe face à la bourgoisie. Le peuple-classe rassemble plus largement que le prolétariat. La bourgeoisie contient une part active - les propriétaires du capital - et une part passive : les riches rentiers et grands possédants.
Christian Delarue