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Yémen - Les États-Unis donnent leur feu vert au génocide

Le génocide au Yémen va commencer demain [voir deuxième article ci-dessous - LGS]. Huit millions de Yéménites sont déjà au bord de la famine. Dix-huit millions de Yéménites sur vingt-six vivent dans le centre montagneux (en vert) qui est sous le contrôle des Houthis et de leurs alliés. Ils sont encerclés par les forces saoudiennes, les forces des Émirats arabes unis et leurs mercenaires. Il y a peu d’agriculture. La seule ligne d’approvisionnement en provenance de l’extérieur sera bientôt coupée. Les gens vont mourir de faim.

Même avant la guerre, le Yémen importait 90% de son alimentation de base. Trois années de bombardements saoudiens/EAU ont détruit les infrastructures et la production locales. La guerre a déjà provoqué une famine massive et une grande épidémie de choléra. La côte yéménite est bloquée par les forces navales saoudiennes et américaines. Les seuls ravitaillements qui arrivent sont les livraisons de l’ONU et les livraisons commerciales par le port de Hodeidah sur la Mer Rouge (Al Hudaydah sur la carte).

Les Émirats arabes unis lancent des mercenaires locaux et des gangs islamistes contre les Houthis et leurs alliés. Au cours des derniers mois, ces forces venues du sud ont remonté le long de la côte jusqu’à Hodeidah. Les combats sont féroces :

De violents combats au Yémen entre les forces pro-gouvernementales et les rebelles chiites ont tué plus de 600 personnes des deux côtés au cours des derniers jours, ont déclaré lundi des responsables de la sécurité.

Demain, lorsque les médias seront occupés avec les photos du sommet Kim-Trump, les forces des Émirats arabes unis lanceront leur attaque contre la ville.

L’ONU, qui supervise la distribution de l’aide qui arrive à Hodeidah, a tenté de jouer les intermédiaires entre les parties :

L’envoyé spécial de l’ONU pour le Yémen, Martin Griffiths, s’est rendu dans la capitale des Émirats arabes unis au cours du week-end pour tenter d’empêcher une attaque. M. Griffiths avait conclu un accord avec les rebelles Houthis qui contrôlent Hodeidah pour permettre à l’ONU de gérer le port conjointement. Mais selon des sources bien informées, il y a peu de chance que les Émirats arabes unis acceptent l’offre ou retardent l’assaut prévu.

Les sources bien informées ne se sont pas trompées. L’ONU est en train d’évacuer son personnel :

Lundi l’ONU évacuait son personnel de la ville portuaire yéménite assiégée d’Al Hudaydah, après que des pays membres de l’ONU ont appris qu’une attaque des forces dirigées par les Émirats arabes unis était imminente, selon deux diplomates.

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Le Comité international de la Croix-Rouge a retiré son personnel de la ville pendant le week-end.

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Les diplomates de la région disent qu’ils croient que seule une pression accrue de Washington pourrait empêcher l’assaut.

Les États-Unis, par l’intermédiaire de leur secrétaire d’État Pompeo, viennent de donner le feu vert aux Émirats arabes unis pour lancer leur attaque :

Les États-Unis suivent de près l’évolution de la situation à Hudaydah, au Yémen. J’ai parlé avec les dirigeants émiratis et exprimé clairement notre désir de répondre à leurs préoccupations en matière de sécurité tout en préservant la libre circulation de l’aide humanitaire et des importations commerciales qui sauvent des vies. Nous attendons de toutes les parties qu’elles honorent leur engagement à travailler avec le Bureau de l’Envoyé spécial du Secrétaire général des Nations Unies pour le Yémen sur cette question, à soutenir un processus politique pour résoudre ce conflit, à assurer l’accès humanitaire au peuple yéménite et à tracer un avenir politique stable pour le Yémen.

Ni les Émirats ni les Saoudiens n’ont intérêt à laisser entrer l’aide humanitaire. Ils sont absolument sans merci. Plus tôt aujourd’hui, ils ont bombardé un centre de traitement du choléra géré par Médecins sans frontières :

MSF Yémen @msf_yemen - 10:29 UTC - 11 juin 2018

« L’attaque de ce matin contre un centre de traitement du choléra @MSF à Abs par la coalition saoudienne et émiratie dénote un manque total de respect pour les installations médicales et les patients. Qu’elle soit intentionnelle ou que ce soit une bévue, c’est totalement inacceptable. »

La semaine dernière, les Saoudiens ont intentionnellement bombardé les installations du Conseil norvégien pour les réfugiés à Sanaa :

Le CNR a fourni à toutes les parties du conflit, y compris à la Coalition dirigée par l’Arabie saoudite, les détails et les coordonnées de nos opérations afin d’assurer la sécurité de notre personnel.

Hodeidah, avec ses 600 000 habitants et ses centaines de milliers de réfugiés, sera difficile à prendre. Aucun ravitaillement ne transitera par le port tant que le combat se poursuivra. Si les forces des Émirats arabes unis prennent le port, elles ne laisseront pas l’aide entrer dans les zones contrôlées par les Houthis. Il y aura une énorme famine, des centaines de milliers sinon des millions de personnes mourront.

Il serait facile pour l’administration de Trump d’arrêter l’attaque des Émirats arabes unis. Les forces spéciales américaines sont sur le terrain au Yémen, travaillant en étroite collaboration avec les forces des Émirats arabes unis. Les avions américains ravitaillent les bombardiers saoudiens et ceux des Émirats arabes unis. Les renseignements américains sont utilisés pour le ciblage. Les États-Unis fournissent les bombes. Sans le ravitaillement en vol des États-Unis, les chasseurs des Émirats arabes unis ne pourraient pas soutenir leurs forces au sol. Ils ne pourraient pas lancer d’attaque.

Dès le début, l’administration Trump est extrêmement proche des dirigeants israéliens, émiratis et saoudiens. Leur objectif commun est de contrer l’Iran. Mais l’Iran est peu impliqué au Yémen :

Il est très exagéré de prétendre que l’Iran a beaucoup d’influence sur les Houthis. Bien que les Houthis reçoivent un certain soutien de la part de l’Iran, il s’agit surtout d’un soutien politique, avec une aide financière et militaire minimale. Cependant, depuis que les Houthis ont pris le contrôle de Sanaa, le groupe est de plus en plus souvent présenté comme étant « soutenu par l’Iran » ou « chiite », ce qui suggère souvent une relation sectaire avec la République islamique. Pourtant, avant les bouleversements de 2011, le terme « chiite » n’était pas utilisé par les Yéménites pour désigner des groupes ou des individus yéménites. Les Houthis ne suivent pas la tradition du chiisme duodécimain prédominante en Iran, mais adhèrent au Zaydisme, qui dans la pratique est plus proche de l’islam sunnite, et n’a manifesté aucune solidarité avec d’autres communautés chiites.

Les Saoudiens considèrent le Zaydisme comme un obstacle à leur influence au Yémen. Ils veulent contrôler le gouvernement yéménite. Les Émirats veulent contrôler le port d’Aden et les installations de stockage et de chargement du pétrole et du gaz du Yémen. L’administration Obama avait soutenu l’attaque saoudienne contre le Yémen pour que les Saoudiens acceptent l’accord nucléaire avec l’Iran. L’administration Trump soutient la guerre saoudo/UAE par ignorance. Elle croit au mythe iranien. Elle veut aussi vendre plus d’armes.

Des millions d’enfants et de civils paieront cette décision étasunienne de leur vie.

Moon of Alabama

Traduction : Dominique Muselet


Le siège pour réduire le Yémen à la famine a commencé

Moon of Alabama

La nuit dernière, la coalition saoudienne a lancé son attaque contre la ville de Hodeidah au Yémen. Hodeidah est le seul port yéménite sur la mer Rouge qui peut accueillir de gros navires. Il est aux mains des Houthis qui, en 2014, ont pris le contrôle de la capitale Sanaa et se sont débarrassés du gouvernement installé par les Saoudiens à Hadi. 90% de la nourriture des 18 millions de personnes vivant dans les zones contrôlées par les Houthis provient de Hodeidah.

Les chaînes d’information par satellite saoudiennes et, plus tard, les médias d’État ont annoncé que la bataille avait commencé, citant des sources militaires. Ils ont également fait état de frappes aériennes de la coalition et de bombardements par des navires de la marine.

Le plan de bataille initial semblait impliquer un mouvement en pince. Quelque 2 000 soldats d’une base navale émiratie située dans la nation africaine de l’Érythrée ont traversé la mer Rouge et ont débarqué à l’ouest de la ville avec l’intention de s’emparer du port de Hodeida, ont indiqué des responsables de la sécurité yéménite.

Les forces émiraties et leurs troupes yéménites sont remontées du sud jusqu’à l’aéroport de Hodeida, tandis que d’autres troupes tentaient de couper les lignes d’approvisionnement des Houthis vers l’est, ont indiqué ces responsables.

Le port est maintenant classé zone de conflit militaire actif. Des combats prolongés pourraient détruire l’infrastructure portuaire. Même si les forces de la coalition saoudienne le prennent et le rouvrent, elles continueront à bloquer les approvisionnements alimentaires vers les hauts plateaux du centre du Yémen. Ils veulent affamer les Houthis pour les soumettre.

Description : http://www.moonofalabama.org/images6/yemenmap20180613.jpg

L’attaque par le sud est forte de 3 000 à 5 000 soldats commandés par Tariq Sale, le cousin de l’ancien président yéménite Ali Abdullah Saleh récemment assassiné. Ils ont été équipés de camions et de nouvelles armes par les Émirats arabes unis. D’autres forces arrivent d’Aden et Taiz. Elles sont soutenues par l’artillerie, les chars et les bombardements aériens saoudiens. Les forces de la coalition saoudienne sont commandées par d’anciens officiers de l’Australie, des États-Unis et du Royaume-Uni qui ont été embauchés par les Émirats arabes unis.

Les rédacteurs du New York Times font semblant de ne pas comprendre le vrai problème de cette attaque :

Une coalition dirigée par les Émirats arabes unis et l’Arabie saoudite est sur le point d’attaquer le port de la mer Rouge d’Al Hudaydah, où habitent 600 000 Yéménites et où arrive l’aide humanitaire dont vivent la plupart des habitants du pays.

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Selon les experts, 250 000 personnes pourraient être tuées ou déplacées dans l’offensive.

Le NYT soutient l’attaque saoudienne. Il veut que les Houthis soient éliminés. Il est aligné sur le lobby sioniste :

Cependant, l’inaction à Hodeida entraîne des coûts élevés. (....) Si le port est libéré, sa capacité pourrait être rapidement augmentée, surtout si la libération est rapide et sans trop de dégâts. Les habitants des zones contrôlées par le gouvernement sont mieux lotis que les habitants des zones contrôlées par les Houthis, précisément parce qu’ils sont connectés à des ports opérationnels et parce que certains d’entre eux touchent de l’argent du gouvernement. Il serait donc avantageux pour les habitants de Hodeida d’être libérés.

Le problème n’est pas que 250 000 personnes pourraient être déplacées ou même tuées à cause des combats. Le problème n’est pas que les habitants de Hodeidah manquaient de nourriture. Jusqu’à aujourd’hui, ils la recevaient grâce au port.

Le problème est que les Saoudiens prévoient d’assiéger le territoire tenu par les Houthis et leurs alliés jusqu’à ce qu’ils meurent tous de faim.

Environ dix-huit millions de personnes vivent dans ces territoires. Huit millions d’entre elles sont déjà au bord de la famine. Les Saoudiens veulent prendre Hodeidah pour bloquer l’accès des habitants de Sanaa à la nourriture. S’ils réussissent, ou si les infrastructures portuaires sont endommagées par les combats, ces huit millions de personnes mourront probablement et dix autres millions pourraient rapidement les suivre dans la tombe.

Les médias saoudiens n’ont même pas honte d’exposer le but de l’opération. La libération de Hodeidah est un must pour couper la ligne de ravitaillement des Houthis a titré Arab News. Et Asharq Al-Awsat a affirmé que cette opération était nécessaire pour « resserrer le siège » jusqu’à ce que les Houthis « se rendent sans conditions », « tombent les armes » et « quittent Sanaa ».

L’avocat yéménite Haykal Bafana souligne que les Saoudiens ont utilisé la même stratégie en 1934, lors d’un conflit frontalier avec l’Imamat du Yémen. A l’époque, les Saoudiens ont occupé Hodeidah et affamé la population de Sanaa, où siégeait l’Imamat, jusqu’à ce que le Yémen se rende. Ils veulent recommencer :

L’idée est d’enclaver les Houthis dans la capitale Sanaaa, déjà bloquée par les airs. En 1934, la pénurie alimentaire à Sanaa a mis fin à la guerre. Le plan est le même aujourd’hui : Affamer les habitants des zones contrôlées par les Houthis jusqu’à ce qu’ils se rendent. Ergo : Hodeidah mettra fin à la guerre du Yémen.

Qu’il y ait ou pas une famine au Yémen dépend entièrement de ce que les Houthis décideront - se battre et mourir de faim, ou se rendre et manger. Les Houthis menacent de fermer TOUS les transports maritimes de la mer Rouge ? Cela n’aura qu’un seul résultat : TOUTES les puissances mondiales leur feront la guerre, & Le Yémen, et beaucoup, beaucoup, beaucoup, beaucoup de Yéménites mourront.

Personne - ni l’Arabie saoudite, ni les Émirats arabes unis, ni les États-Unis, ni le Royaume-Uni, ni même les Nations unies - n’a rien proposé pour empêcher la fermeture du port de Hodeidah. Mais c’est le Yémen qui est sans foi ni loi, d’après certains.

Même si on déteste tous les Houthis, affamer les civils yéménites est un crime de guerre. Il est illégal d’avoir comme stratégie de guerre de faire mourir les Yéménites de faim.

Cette stratégie saoudienne a amené les Nations Unies à alerter le monde sur le fait que 18 millions de personnes qui dépendent des transferts de nourriture via Hodeidah pourraient mourir de faim. Le Comité international de la Croix-Rouge prévient que l’attaque de Hodeida va aggraver la situation humanitaire déjà catastrophique. Le Famine Early Warning System (FEWS), qui est une organisation du gouvernement américain, sonne l’alarme :

Si les importations commerciales descendent en dessous des niveaux nécessaires et que les batailles coupent les populations des zones de chalandise et de l’aide humanitaire pendant trop longtemps, les conséquences en termes de sécurité alimentaire s’apparenteront à une famine.

Dans les combats d’aujourd’hui, les forces soutenues par les Émirats arabes unis ont prétendu avoir atteint la périphérie sud de l’aéroport de Hodeidah. Elles vont probablement essayer d’avancer vers l’est pour isoler la ville et l’assiéger. La zone est assez plate et difficile à défendre contre une force de soutien aérien et contre de l’artillerie lourde. Il y a peu d’espoir que les Houthis puissent la tenir.

Mais les Houthis vont continuer à se battre. S’ils abandonnent Hodeidah, ils auront perdu la guerre. Aujourd’hui, ils ont prétendu avoir tiré un autre missile balistique sur l’Arabie saoudite. Ils ont également dit avoir attaqué avec succès un vaisseau de la marine des Émirats arabes unis avec une force de débarquement. Les Saoudiens ont dit qu’ils avaient intercepté le missile. L’attaque du vaisseau n’a pas été confirmée.

Les Saoudiens et les Émirats ont le soutien actif de la Grande-Bretagne et des États-Unis. Il est encore possible d’empêcher l’attaque sur Hodeidah, le siège de tout le territoire contrôlé par les Houthis et la famine. La Grande-Bretagne et les États-Unis, les Saoudiens et les Émirats sont sur le point de commettre un crime de guerre encore bien pire que ne l’a été la guerre contre l’Irak.

L’attaque doit cesser et le blocus doit être levé. Si cela n’est pas fait tout de suite, il y aura une immense famine au Yémen.

Moon of Alabama

Traduction : Dominique Muselet

http://www.moonofalabama.org/2018/06/the-starvation-siege-on-yemen-has-begun.html

»» http://www.moonofalabama.org/2018/0...
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La télécratie contre la démocratie, de Bernard Stiegler.
Bernard GENSANE
Bernard Stiegler est un penseur original (voir son parcours personnel atypique). Ses opinions politiques personnelles sont parfois un peu déroutantes, comme lorsqu’il montre sa sympathie pour Christian Blanc, un personnage qui, quels qu’aient été ses ralliements successifs, s’est toujours fort bien accommodé du système dénoncé par lui. J’ajoute qu’il y a un grand absent dans ce livre : le capitalisme financier. Cet ouvrage a pour but de montrer comment et pourquoi la relation politique (…)
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