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"Vous êtes complètement détruit" : témoignage sur la torture, extrait du rapport médical de Shaker Aamer à Guantanamo (Dissenter)

Le 7 avril 2014, Shaker Aamer, le dernier résident britannique toujours maintenu à Guantanamo et ses avocats ont déposé une requête d’habeas corpus (PDF) demandant sa libération en raison de problèmes de santé qui ne peuvent être traités à Guantanamo. Le pire de ces problèmes est d’origine post-traumatique (PTSD) suite aux tortures que Shaker a endurées depuis qu’il a été capturé par l’Alliance du Nord puis remis aux Américains la veille de Noël 2001.

Les détails de ses tortures à Bagram, à Kandahar et à Guantanamo sont décrites dans de longs extraits d’un rapport médical psychiatrique rédigé par la Dr Emily Keram le 2 février 2014, une psychiatre qui a examiné un certain nombre de détenus de Guantanamo à la demande de tribunaux étasuniens, de commissions militaires et divers avocats habeas corpus. Le rapport est annexé au dossier de l’habeas corpus.

Ce qui suit est une longue partie de son rapport (cf lien PDF ci-dessus – NDT), où la Dr Keram cite le récit des expériences de Shaker sous la torture après sa capture. D’après mon expérience, c’est l’un des documents les plus remarquables et inquiétants à avoir été sorti de Guantanamo, dans la mesure où Shaker Aamer est un homme sensible, intelligent qui parle anglais. Il nous a laissé un récit de ses tortures qui mérite d’être lu.

Je reproduis des parties du témoignage de Shaker ici avec l’espoir de mobiliser des soutiens pour le libérer de Guantanamo (il a été « déclaré libérable » depuis des années maintenant). J’espère aussi que cette aide mobilisera des soutiens pour libérer et transférer tous les détenus/prisonniers pour une incarcération humaine avec la certitude d’une résolution rapide de leurs cas. Ces détenus qui ne sont coupables de rien devraient être libérés et, à ce point, - lisez ce qui suit et vous comprendrez pleinement - recevoir l’assurance d’un traitement médical aussi longtemps qu’ils en ont besoin.

La requête d’habeas corpus et le rapport médical ont été réunis dans une étude réalisée par Andy Worthington, un spécialiste de longue date de Gauantanamo et ardent défenseur de la fin de la torture et de la détention illimitée. Son article, “Gravely Ill, Shaker Aamer Asks US Judge to Order His Release from Guantánamo,” (« Gravement malade, Shaker Aamer demande à un juge étasunien d’ordonner sa libération de Guantanamo”) est posté sur son site web Close Guantanamo

Verbatim du rapport médical de Shaker Aamer

M. Aamer et moi-même avons examiné ses conditions de détention à l’aéroport de Bagram. Il a signalé de graves mauvais traitements infligés par les gardes, les interrogateurs et le personnel médical travaillant de concert, à savoir l’humiliation, la privation de sommeil, l’exposition au froid, la manipulation de la nourriture et de l’eau, les positions de stress, les menaces de viol contre sa fille et les coups.

« La nudité m’a fait me sentir comme un animal. Je n’étais plus un être humain. Je ne signifiais rien pour eux. J’ai perdu ma dignité, ma fierté d’être un homme. J’ai dû enlever mes sous-vêtements et les leur remettre. Vous perdez votre humanité. Vous êtes un animal. Vous savez que si vous ne vous exécutez pas, ils le feront par la force et ce sera bien pire. J’ai respecté et j’ai cru qu’ils me donneraient une chance équitable parce qu’ils étaient étasuniens. J’étais content d’être avec des Etasuniens à cause de leurs droits humains.

J’ai été soumis à la privation de sommeil pendant 11 jours. Ça m’a rendu fou. Ils m’ont aspergé d’eau froide. Ils m’ont gardé debout pendant 20 heures par jour. Je devais tendre mes mains et mes bras . Si je m’assoupissais, ils tapaient sur le béton avec une hache. La privation de sommeil m’a causé des hallucinations. Ça a commencé avec le bruit. J’ai entendu une ancienne musique de mon enfance. Je me demandais : « Où ont-ils eu ces bandes ? ». J’ai entendu des gens parler. J’ai commencé à chercher qui parlait. Il n’y avait personne là-bas. Personne d’autre ne les entendait. Enfin, j’ai entendu de la musique de mon enfance dont je savais que jamais ils n’auraient pu la trouver. J’en ai parlé au médecin. Il a dit que je devenais fou. Il m’a dit : « Vous devriez parler aux interrogateurs, alors, vous pourrez vous détendre ».

Ils ont confisqué de la nourriture à l’exception des prêts-à-manger surgelés (frozen MRE’s). Ils vous donnent une bouteille d’eau congelée. Vous ne voulez pas boire parce que cela vous donnent envie de faire pipi. Les gardes ne vous emmènent pas faire pipi, alors j’ai fait pipi où j’étais assis. Je n’ai pas eu de selles pendant 25 jours. Mon estomac est devenu comme une pierre. Je n’ai pas vu de médecin, d’abord parce que les interrogateurs étaient contents parce que je leur disais tout ce qu’ils voulaient. [Les interrogateurs contrôlent l’accès au personnel médical] Ensuite, le médecin m’a donné un laxatif. Ils m’ont emmené dans un trou. Les gardes, hommes et femmes, regardaient. Un garde a déchiré ma combinaison et m’a dit de chier. C’était très dur. Je devais pousser fort. Les gardes, femmes et hommes, plaisantaient. Une femme a dit : « Regardez, il va avoir un bébé ». J’ai passé ce qui semblait être des pierres. Les gardes m’ont donné un tissu de l’emballage du prêt-à-manger pour m’essuyer. Il était ensanglanté. Je me suis senti tellement humilié.

Toutes les déclarations que j’ai faites à Bagram ont eu lieu pendant ma privation de sommeil. J’aurais dit n’importe quoi. Je leur ai dit : « Je vous dirai que je suis Ben Laden si vous voulez que je vous dise que je suis Ben Laden ».

M. Aamer a décrit les effets de la maltraitance sur son état mental.

« C’est un processus qui est comme perdre l’esprit. D’abord, vous savez que vous n’avez plus le contrôle de vous-même. Quelqu’un d’autre vous contrôle. Alors vous vous inventez des histoires ou vous vous dites : « Eh bien, il me contrôle physiquement mais pas mentalement ». Ils ne sont pas dans votre tête. Mais ensuite vous réalisez que vous avez tort et qu’ils contrôlent votre esprit.

Ensuite, c’est bienvenue au micro-ondes. C’est facile de casser un œuf de l’extérieur. C’est difficile de faire exploser un œuf de l’intérieur. Ils vous laissent récupérer, alors vous pensez que vous êtes à nouveau fort. Et puis ils vous cassent à nouveau. Et vous pensez que vous êtes à nouveau fort. Et vous ne savez plus ce que vous pensez. Comme le micro-ondes, ils vous font bouillir de l’intérieur vers l’extérieur jusqu’à ce que vous explosiez.

Après le micro-ondes, la coquille d’œuf peut être intacte parce que la chaleur a pénétré à l’intérieur. La coque semble solide. Mais si vous fendez l’œuf, à l’intérieur, vous verrez du charbon.

Alors, j’allais aux interrogatoires en pensant : « comment vais-je pouvoir réduire le niveau de torture ? Que puis-je dire pour lui plaire ? Je vais lui faciliter les choses aujourd’hui, je vais lui faire plaisir. » ...

« Rien que d’en parler, ça me fait peur. J’ai tout gardé à l’intérieur. J’ai peur parce qu’ils nous écoutent maintenant et parce qu’ils apprennent : je leur apprends comment interroger. Et maintenant, ils vont écrire un livre entier sur une nouvelle interrogation avec ce qu’ils ont appris...

« C’est une procédure terrible. L’interrogateur commence à vous parler de petites choses bien connues. Vous acquiescez. Mais il vous conduit vers une falaise. Plus vous le suivez dans son interrogatoire, plus il commence à lancer des appâts, donc petit à petit, ils vous montrent qu’ils s’intéressent à savoir qui vous êtes. Ils le font en disant : « Shaker Aamer, on te connaît ; on sait qui tu es. On sait que tu n’es personne. On sait que tu es un petit poisson qui se frotte à des gros poissons. »

Mon objectif, c’est : « Comment puis-je réduire la torture ? Je veux juste dormir. » Je n’ai jamais eu autant envie de quelque chose. Mon objectif n’a jamais été de sortir d’ici et d’être libéré. Mon but était simplement de réduire la torture. Le problème c’est que tous les petits poissons ne connaissent pas le gros poisson ; mais vous voulez réduire la torture.

Donc, leur intérêt est de faire en sorte que vous leur fassiez confiance. Vous commencez à leur dire la vérité ; vous construisez la vérité en racontant l’histoire dans l’ordre chronologique. Vous construisez l’édifice étage par étage. Jusqu’à ce que je fus séparé de ma femme et parti [sic] me cacher dans les montagnes et attendu un guide pour traverser les montagnes. Les interrogateurs m’ont demandé le nom des montagnes, le nom du guide. Je ne savais pas. Et c’est là que les interrogateurs sont devenus dingues.

Les interrogateurs ont balancé des chaises. Ils m’ont placé dans un disque gris avec mes jambes écartées. Ils ont frappé les chaises. Et vous essayez juste d’éviter les coups. Ils m’ont secoué. Ils m’ont jeté au sol. Ils m’ont cogné la tête contre le mur.

Je leur disais la vérité. Leur intérêt était que je leur fasse confiance. Ca m’a fait espérer une diminution de la torture. Mais quand je ne pouvais pas leur dire ce qu’ils voulaient [sic] entendre, ils me faisaient tenir debout pendant des heures, ils me criaient dessus, ils me cognaient. Vous ne pensez même plus comment vous protéger et ne pas les attaquer pour ne pas prendre une balle dans la tête. Ils font ça jusqu’à ce que vous trembliez, jusqu’à ce qu’ils vous cassent, jusqu’à ce que votre esprit soit complètement vide. Vous vous sentez irréel. Comme dans un rêve.

Et maintenant, voici le pire. Ils vous traitent avec gentillesse. Ca vous détruit complètement. Votre pensée est paralysée. Vos sentiments sont paralysés. Et l’interrogateur dit : « J’essaye de t’aider. » Vous ne savez pas quoi aimer ou quoi haïr parce que tout ça arrive en même temps. Vous ne savez plus rien. Vous ne pouvez plus faire la part entre le bien et le mal, la gentillesse et la méchanceté. Vous perdez le sens de la signification de la bonté.

Vous vous demandez : « Veulent-ils vraiment me faire du mal ou cherchent-ils à m’aider ? » Vous ne savez plus. Ils vous cognent la tête contre le mur et ensuite ils vous donnent un repas chaud. Un interrogateur a décrit ce qu’il ferait à ma fille de cinq ans dans des détails qui m’ont détruit. Il a dit « Ils vont la baiser. Elle criera « "Papa ! Papa !" ». Vous êtes complètement déstructuré. Vous êtes complètement détruit.

C’est arrivé de nombreuses fois. Vous apprenez qu’ils ne veulent pas réellement entendre la vérité. La vérité ne mène qu’à un seul et même résultat : plus de torture. Alors vous commencez à suivre leur histoire ; ils vous posent des questions, ils vous donnent des descriptions et vous acquiescez. Quelle était la couleur de la voiture ? Le conducteur ressemblait à ça ? Le conducteur était-il d’Al-Qaida ? J’ai répondu : « Comment le saurais-je ? ». Ils ont dit : « Eh bien, un chauffeur de taxi n’irait pas vers ce bâtiment, n’est-ce pas, donc il doit être d’Al-Qaida. Le chauffeur de taxi t’emmènerait à l’auberge arabe, donc le chauffeur de taxi est d’Al-Qaïda et l"auberge arabe est d’Al-Qaïda ».

Les interrogateurs vous donnent les détails mais ils ne veulent pas que vous soyez d’accord. Ils disent que vous avez vu un mec gros ? Un mec avec un turban ? Ce mec ? Ce mec-là ? Ces mecs sont d’al-Qaïda. Et alors vous sentez que vous êtes d’Al-Qaïda. Alors les interrogateurs vous disent qu’al-Qaïda vous a recruté sans que vous le sachiez ; ils étaient derrière le financement de votre voyage.

Ensuite, ils vous demandent de signer une déclaration. Quand je dis non, tout recommence. A la fin, j’ai proposé à mon interrogateur de signer que je suis d’al-Qaïda, tout ce que l’interrogateur voulait que je signe, si l’interrogateur serait d’accord de ne plus m’interroger et de ne plus me torturer. Et l’interrogateur a dit : « Je ne peux pas te dire qu’on ne va plus t’interroger ».

Peu importe ce que vous pouviez dire, ils en voulaient toujours plus. Ils continuaient donc à me torturer, et peu importe ce que je disais. Le niveau de torture variait. Parfois ils me laissaient m’assoir pour un bref instant, puis ça repartait encore pire.

Pendant les 25 premiers jours à Bagram, c’était des tortures sévères constantes. Pendant la dernière semaine, ils m’ont laissé tranquille avec d’autres détenus dans une pièce avec un appareil de chauffage. Nous avons tous des engelures. Les interrogateurs ont seulement demandé ce que nous savions sur certaines personnes mais ils ne poussaient pas l’interrogatoire pour obtenir des informations précises. Je n’ai vu le soleil que deux fois lorsque j’étais à Bagram. Et ensuite, il y a eu « The Big Goodbye Party », quand on quitte Kandahar. J’ai été battu, enchaîné et cagoulé. Les gardes riaient et m’insultaient. J’ai été attaché à d’autres détenus. Puis l’avion n’est pas venu. Le lendemain, ils nous ont donné une autre « Goodbye Party ». Nous n’étions pas autorisés à utiliser les toilettes. L’avion est arrivé. J’étais terrifié, pensant « Si ça [Goodbye Party - NDT] se passe en ce moment, qu’est-ce qui va suivre ? Peut-être qu’ils se préparent à me tirer dessus ? Peut-être qu’il va arriver quelque chose de pire que ça ».

M. Aamer a enduré de graves sévices à Kandahar avec des conséquences identiques sur son état physique et mental.

« J’ai été expédié à Kandahar. Dans l’avion, c’était glacial. Quelqu’un a enlevé mes chaussettes. Et puis vint la « Welcome Party ». Ils ont dit aux soldats qu’ils pouvaient faire tout ce qu’ils voulaient avec les détenus. Nous avons atterri. Ils nous ont d’abord mis face à terre sur le béton froid. Nous grelottions. Ils m’ont frappé à coups de crosse, à coups de pied et m’ont piétiné le dos. Il y avait un détenu de 17 ans. Ils lui ont enfoncé une arme dans le rectum. Il criait : « Je ne suis pas une femme ! Je ne suis pas une femme ! » J’ai hurlé aux gardes d’arrêter en anglais. Ensuite, parce que je parlais anglais, les soldats ont dit : « C’est un traître. Il parle parfaitement anglais. » Ils m’ont battu encore plus fort. Une femme soldat noire les a arrêtés en disant : « Vous vous êtes fait plaisir ».

Vers 6 heures du matin, après 20 minutes de répit, ils m’ont placé dans une cage avec une couverture. Ils m’ont mis face à terre et m’ont détaché. Puis ils ont déguerpi. Ils m’ont donné du pain. Vers 07h30 ou 08h00, ils ont hurlé pour que je me lève. Ils m’ont mis la tête sur le sol, m’ont enfilé une cagoule et m’ont enchaîné et m’ont emmené à la tente des interrogateurs. Je suis resté éveillé pendant dix jours.

La torture à Kandahar était plus physique qu’à Bagram. Ils m’ont secoué, m’ont jeté au sol, m’ont fait lever mes bras, ont frappé mes mains. Il n’y avait pas de couverture, juste la possibilité de se coucher à même le sol. Il y avait une belle couverture épaisse posée sur le sol mais si j’essayais de m’en saisir, ils se mettaient à me taper dessus.

Deux enquêteurs nommés John et Tony et un gars nommé Sallie ou Sal se relayaient tous les trois à six heures, ou tous les deux à trois heures. Il y avait aussi des Egyptiens. Ils étaient presque tout le temps avec moi. Au moins, à Bagram, j’avais un endroit à moi ; j’étais dans une cage et les gardes étaient dehors. C’était pour moi une consolation. Mais à Kandahar, il n’y avait rien entre moi et les gardes. Ils étaient dans la tente. Si je fermais les yeux, le garde me disait de les ouvrir.

Les interrogatoires à Kandahar avaient les mêmes procédés qu’à Bagram en termes de cruauté et de gentillesse des interrogateurs. Le pire, c’était Sal. Il était si gentil. Il m’a fait m’assoir à l’extérieur de la tente avec les gardes et chauffait ma nourriture. Les gardes me regardaient fixement. Je me suis senti humilié. Sal m’a parlé comme si j’étais un être humain. Puis Sal me disait qu’il allait violer ma fille de cinq ans ; qu’il allait faire ça et ça à ma fille sexuellement ; comment ma fille crierait et crierait. J’ai pensé à attaquer Sal et à le tuer. Mais je n’allais rien faire d’agressif. La force est l’arme des lâches.

Ca a duré 10 jours. C’était constamment des interrogatoires et de la torture. Je leur ai dit exactement la même vérité que j’avais dite aux interrogateurs à Bagram, l’avantage c’est qu’ils avaient plus de vraies informations sur moi. J’ai dit aussi aux interrogateurs des choses qui n’étaient pas vraies pour diminuer l’intensité de la torture que j’endurais.

Pendant ces dix jours, je ne suis allé aux toilettes qu’une fois. J’ai été privé de sommeil. L’ICRC (Croix Rouge Internationale) est venue me voir à Bagram une fois. Puis ils sont venus me voir à Kandahar. Ils m’ont emmené dans une cage avec d’autres détenus. Le juge de l’ICRC m’a vu là-bas, un juge suisse. Il m’a donné une carte avec son numéro.

Après 10 jours, ils ont envoyé le gars égyptien qui m’a dit que j’allais à Guantanamo. Ils m’ont mis dans une cage pendant quatre jours et m’ont laissé à peu près tranquille. Un agent britannique est venu me voir, un jeune officier avec un béret rouge. Je ne voulais pas lui parler parce qu’il m’a dit qu’il ne pourrait rien faire pour m’aider. Les Etasuniens ne m’ont posé des questions que pendant ces quatre derniers jours à Kandahar comme lors des derniers jours à Bagram. Ils ne m’ont pas mis la pression pour mentir sur quoi que ce soit.

Après quatre jours, ils m’ont infligé la « Goodbye Party » à Kandahar et une « Welcome Party » bien pire à Guantanamo.

Les mauvais traitements et ses conséquences physiques et mentales ont continué à Guantanamo.

« Les interrogatoires à Guantanamo avaient des revirements. Il y a un « programme de fidélisation » où ils vous déplacent toutes les deux heures. Les gardes crient dans le même bloc. Ils coupent l’eau. Ils vaporisent du Pine Sol (désinfectant) dans mes vêtements.

C’est le même processus psychologique ; je ne peux pas distinguer la cruauté de la gentillesse. J’ai tout dit aux interrogateurs pour réduire l’intensité de la torture. Une autre chose à Guantanamo qui n’existait pas à Bagram, c’était les cercles dans les cercles. Les gardes sont liés aux médecins, liés aux personnes qui fournissent des draps, liés à l’administration comme les sous-officiers, liés à la marine ou à l’armée, liés à la CIA, liés au FBI, liés aux Républicains et aux Démocrates. Tous ces gens veulent m’étrangler au centre de tous ces cercles. Vous leur dites ce qu’ils veulent entendre pour atténuer la violence de la torture.

Par exemple, un interne est venu me voir. J’ai demandé une couverture parce que j’ai de l’arthrite et l’air froid conditionné aggrave les douleurs. Le médecin a affirmé que l’arthrite est dans mon dossier et a convenu qu’il faisait froid. Le docteur a dit : « Je vais demander la permission au Joint Detention Group (JDG – Groupe Mixte de Détention) pour une couverture pour vous ». Et le médecin assure qu’il est indépendant.

Le pire à propos de la torture, c’est que vous ne savez pas comment penser, quoi faire, comment vous sentir. Vous savez que vous avez tous vos esprits mais vous ne savez pas comment réagir, ce qui est horrible parce que vous vous sentez vulnérable. C’est terrible. Nous pensions que les gens ici : la CIA, les interrogateurs, utilisent le « djinn » [Esprit]. Le mauvais djinn. Certaines des choses qui se sont produites, vous ne pouvez pas les expliquer. Certaines personnes pensent que c’était les drogues ou quelque chose d’autre mais 95 % d’entre nous pensent que nous avons été possédés par le djinn ».

Traduction : Romane

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BOUQUIN, Stephen
Stephen Bouquin (coordination) Louis-Marie Barnier, José Calderón, Pascal Depoorter, Isabelle Farcy, Djordje Kuzmanovic, Emmanuelle Lada, Thomas Rothé, Mélanie Roussel, Bruno Scacciatelli, Paul Stewart Rares sont les romans, même de science-fiction, fondés sur l’invraisemblance. Il en est de même avec les enquêtes en sciences sociales. Il existe néanmoins des vraisemblances négligées. Les résistances au travail en font partie. Le management contemporain a beau exalter l’individualisme, (…)
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"Je ne sais pas."

Secrétaire d’Etat des Etats-Unis Colin Powell.
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