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Voeux et résolutions pour 2014

Nos vœux et nos résolutions pour 2014

2014 ne sera pas l’année du « retour de la croissance », ni celle de « l’inversion des courbes ». Bien au contraire. Le gouvernement actuel, dans les pas des précédents, va continuer de masquer sa soumission aux forces de l’argent en nous abreuvant de discours en décalage total avec la réalité. Il va continuer de produire des illusions en se prévalant des « valeurs républicaines » et va continuer de créer des diversions avec des sujets périphériques nourrissant la division et l’exclusion (expulsion des Roms, stigmatisation des musulmans, etc…).

Nous ne nous basons pas sur des sondages ou des expertises économiques provenant des milieux patronaux, et qui annoncent régulièrement qu’il fera beau demain et que la crise est derrière nous. Depuis le temps qu’elle est derrière nous d’ailleurs, il faut croire qu’on tourne en rond. Nous nous basons sur l’observation de la vie réelle des gens, les salariés et leurs familles, confrontés à une exploitation toujours plus féroce, à une précarisation complète de leur existence au travail et en dehors, au délitement accéléré des conquêtes ouvrières, au flicage social et administratif, à l’inégalité fiscale, aux plans de licenciement, au chômage. Nous nous basons donc sur notre expérience concrète, individuelle et collective, et nous savons sur quelle pente nous glissons. Et plus la situation se détériore, plus le discours dominant fait mine de l’ignorer, plus la fracture s’élargit, entre d’un côté, un petit monde de privilégiés qui continue de s’engraisser, et de l’autre, une majorité toujours plus nombreuse de travailleurs, rejoints dans leur galère par des cohortes entières de couches intermédiaires déclassées. Ça, c’est ce qu’on voit.

Mais nous nous basons aussi sur des analyses du système capitaliste nées avant nous, et qui ont fait leurs preuves : « Dans le système capitaliste, toute crise est une crise de surproduction ». Les moyens de production et d’échanges, comme d’ailleurs les moyens d’informations, sont entre les mains de quelques-uns, dont le seul objectif est de faire du profit. Pour qu’il y ait profit, il faut payer la force de travail (les salaires) au plus bas. Mais pour réaliser le profit, il faut ensuite vendre (à ceux qui peuvent de moins en moins acheter) les biens et marchandises. Cette contradiction est d’abord résolue par le recours au crédit, à petite comme à grande échelle, ce qui, à terme, aggrave encore plus la contradiction. « Comment la bourgeoisie surmonte-t-elle ces crises ? D’un côté, en détruisant par la violence une masse de forces productives ; de l’autre, en conquérant de nouveaux marchés et en exploitant plus à fond les anciens. A quoi cela aboutit-il ? A préparer des crises plus générales et plus formidables et à diminuer les moyens de les prévenir. »
Et donc, en 2014, nous verrons se poursuivre la destruction des forces productives, et ce à seule fin de servir les petits clans d’actionnaires qui règnent sur nous. On continuera de « conquérir de nouveaux marchés », comme on l’a toujours fait : par la guerre, la guerre pour « le droit », la guerre pour « la démocratie », la guerre pour « la civilisation ». Et on continuera d’exploiter plus à fond les anciens marchés, ici, en diminuant les droits des travailleurs et, de fait, leurs salaires (direct et indirect).

Première résolution pour 2014 : nous, travailleurs, ferons systématiquement le lien entre le sort des travailleurs licenciés et celui des travailleurs qui ne le sont pas, et à faire le lien entre les travailleurs d’ici et ceux d’ailleurs, tous liés par les mêmes chaînes. Nous rejetterons avec force la propagande de guerre, qui vise à faire accepter aux travailleurs des pays impérialistes, des guerres lointaines qui ne servent que les intérêts des capitalistes. Et nous exigerons de notre organisation syndicale qu’elle condamne avec force les expéditions néo-coloniales faites en notre nom, en se démarquant nettement de la position (de classe) de notre bourgeoisie nationale.

2014 sera aussi une année électorale. Sans faire de l’anti-électoralisme primaire, nous pouvons d’ores et déjà dire que les deux scrutins à venir seront marqués par une abstention massive, et que leurs résultats auront une influence nulle sur le cours de nos existences. Les municipales feront élire des politiques qui n’ont plus qu’un poids minime dans la prise de décision : les vrais maîtres sont ailleurs, les budgets réduits par l’Etat pour satisfaire les banques, les territoires découpés en fonction de leur utilité marchande par le grand capital, sous couvert d’une Union Européenne qui n’est que l’expression politique de la Finance et des multinationales.

Ces élections pourraient avoir une utilité si elles pouvaient traduire la colère populaire dans les urnes mais, il est affligeant de constater que les partis de gauche censés nous représenter, continuent de nourrir des illusions et de s’affaiblir, en se démarquant du peuple pour aller occuper quelques sièges sur les genoux du PS, qui n’a de socialiste que le nom, et qui est massivement (et à juste titre), rejeté par les travailleurs. Ceci traduit sans doute une certaine crédulité (« on essaie de peser de l’intérieur »), mais aussi beaucoup d’opportunisme, et même, vis-à-vis des militants honnêtes, un défaitisme notoire (« les gens ne sont pas prêts, on n’est pas assez nombreux, … »).

Les européennes sont, elles, une supercherie démocratique, quand on connaît les origines atlantistes de la construction européenne, ses objectifs (un grand marché où les plus forts exploitent les plus faibles et où les travailleurs sont mis en concurrence), ses moyens et son fonctionnement anti-démocratique. Que des organisations politiques ou syndicales peu ou prou « de classe », puissent continuer de servir la vieille soupe refroidie de « l’Europe sociale », voilà un nouvel exemple d’aveuglement coupable, qui remet à des calendes grecques improbables, le vrai changement auquel nous aspirons et qui est une nécessité urgente pour nous tous.

Deuxième résolution pour 2014 : nous, travailleurs, prenons l’engagement d’assumer nos responsabilités, en combattant, avec nos armes, sur le terrain, dans l’entreprise, dans nos quartiers, tout autour de nous, la résignation ambiante ; à développer les luttes, à construire des syndicats forts et déterminés, pour commencer la mobilisation à la base ; à mettre en lien toutes les structures syndicales de classe, à organiser un front, qui devra obliger la direction réformiste de notre CGT à nous entendre, à sortir de la C.E.S. et du « syndicalisme rassemblé » (la CFDtisation de la CGT), ou à se démettre. 2014 devra être le début de notre offensive, conscients que dans d’autres pays elle a déjà démarré, et cette offensive devra marquer le paysage politique et obliger les partis politiques de gauche (donc à gauche du PS), à faire un choix : le peuple, ou la bourgeoisie.

2014 sera, comme 2013, une année politiquement paradoxale : le réformisme (politique ou syndical), continuera d’occuper le terrain médiatique et institutionnel, la pseudo-gauche entretenant avec de pseudo-syndicats l’illusion du « dialogue social », lequel débouchera sur de nouvelles pseudo-avancées, qui seront de nouveaux coups de poignards dans le dos des travailleurs, comme l’A.N.I., accord scélérat conclu par le PS, le MEDEF et la CFDT, les premiers se félicitant d’avoir réussi où Sarkozy lui-même a échoué, les seconds se frottant les mains, et les derniers ramassant quelques miettes pour leurs dirigeants et laissant leurs militants sur le terrain défendre l’indéfendable. Pourquoi est-ce paradoxal ? Parce que le réformisme (ménager la chèvre du travail et le chou du profit) peut faire illusion en période de croissance, mais en période de crise et de récession, la situation est de fait pré-révolutionnaire. La lutte des classes s’aiguise, et la classe dominante elle, se prépare au combat, prête à revenir sur toutes les conquêtes ouvrières, prête à saigner le peuple au propre comme au figuré, prête à toutes les guerres, à l’intérieur, comme à l’extérieur, prête même à cacher ses intérêts derrière quelque homme fort ou pouvoir autoritaire, comme l’Histoire l’a déjà montré. Maintenir alors l’illusion du « dialogue », de la possibilité d’aménager le capitalisme, d’en adoucir les conséquences, c’est au mieux se tromper, au pire, tromper les autres. Le choix de la lutte des classes, pour nous travailleurs, n’est pas même un choix idéologique, c’est un choix qui nous est imposé par la réalité, c’est le seul choix pertinent. Il l’a toujours été, mais il l’est aujourd’hui plus manifestement qu’avant. Il est donc surprenant de voir que des dirigeants syndicaux et politiques issus de nos rangs et de notre histoire, continuer à persister dans l’impasse du réformisme.

Cette posture réformiste est utile, oui très utile, au camp d’en face. Qui ne redoute qu’une seule chose : c’est que la colère diffuse et inexprimée qui traverse toutes les couches de la société (en dehors de la grande bourgeoisie), prenne forme et se traduise en soulèvement général. L’idée d’un grand mouvement d’ensemble (nécessairement marqué par des contradictions, des mots d’ordres et des revendications flous, voire contraires, des moyens d’actions divers, etc…), l’idée de ce grand mouvement, qui s’éloigne des consciences réformistes enfermées dans des certitudes confortables, est une idée obsessionnelle pour les pouvoirs en place. Aussi, ils font tout pour empêcher ce mouvement, et cela passe par la division de la classe ouvrière, par la mise en avant de faux antagonismes au sein même de la population laborieuse.

Troisième résolution pour 2014 : nous, travailleurs, ne nous laisserons plus diviser. La situation est telle que le sursaut doit venir du plus grand nombre, pour contrecarrer les stratégies de division et diversion nous visant. Nous nous solidariserons dans les faits des travailleurs sans-papiers, des jeunes stigmatisés issus de l’immigration post-coloniale, des Roms pourchassés partout où ils sont. Nous ne nous laisserons plus prendre aux discours de « l’invasion étrangère », des « profiteurs du système », « de la menace islamique », etc… Nous ne laisserons pas la laïcité, qui permet toutes les expressions et les croyances, être dévoyée pour servir d’arme contre une catégorie de population. Nous combattrons le racisme, qu’il soit ouvert ou « républicain », nous combattrons le FN résolument, mais sans nous laisser entraîner dans le chantage de ceux qui, objectivement, le nourrissent. Nous serons aux côtés des privés d’emploi dans leurs luttes à venir, sur les piquets de grève ouvriers comme auprès des travailleurs des services publics, pour construire TOUS ENSEMBLE l’alternative concrète qui sera le résultat concret de l’unité de notre classe. Cela passera par un soutien effectif à chaque lutte, aussi petite soit-elle, et un soutien permanent à celles et ceux qui, dans les entreprises, se battent courageusement contre le capital. Ce travail, nous le commençons, il nous faut le poursuivre, avec des idées claires et de l’enthousiasme, à la base, dans la classe ouvrière telle qu’elle est, avec ses propres contradictions, mais qui porte davantage de vie et de force que n’importe quel aréopage raisonnable se penchant sur nos problèmes…

Pour que cette résolution devienne effective, il est nécessaire que nos camarades, nos collègues de travail, nos voisins et amis, se déterminent exclusivement par rapport à ce qu’ils vivent, et non par rapport au reflet qu’ils ont de ce qu’ils vivent. Certes, « les idées dominantes sont toujours les idées de la classe dominante » et, avec le développement des moyens de communication, nous sommes assaillis d’une propagande permanente, capable de nous faire croire « que ça ira mieux si on fait des efforts », capable de nous faire croire que « la France se porte au secours de la population centrafricaine, syrienne, libyenne, malienne, etc… contre les dictateurs », capable surtout d’instiller dans les consciences que rien n’est possible, que tout est écrit, et que nous n’avons rien à faire d’autre que subir. C’est ce poison-là qu’il faut extirper, en mettant en avant des revendications simples et claires, qui correspondent au vécu des gens : est-il normal d’aller quêter le travail au Pôle Emploi et subir en plus leur flicage ? Est-il normal de travailler comme un chien, sous la pression, pour un salaire de misère ? Est-il juste qu’il y ait moins de profs pour nos gosses ? Est-il juste qu’il faille toujours payer plus pour notre santé ? Est-ce légitime qu’un groupe qui fait des profits licencie ? Tout ceci en sachant que la France est un pays riche, de plus en plus riche ? A quoi servent les politiques, ou plutôt, qui servent-ils ? Est-ce qu’on peut faire quelque chose ? Quoi ? Et avec quelle organisation ?

Cette dernière question pose la nécessité d’une organisation de classe. Nous ne sommes pas sur le terrain politique, mais nous pensons que notre organisation syndicale, à la base, reste un cadre de lutte valable, et qu’il ne tient qu’à nous que ce cadre s’élargisse, pour constituer sur le territoire, des pôles de résistance organisant et coordonnant les luttes, des lieux d’éducation populaire et de formation, des lieux de solidarité réelle. Ce retour aux sources de notre syndicalisme sera un premier pas important. La CGT, c’est nous, et il faut le faire savoir, et il faut la faire vivre.

Aussi, avec les idées claires et l’enthousiasme, notre Union locale adresse à tous les travailleurs qui luttent et à leurs familles, une bonne année 2014, c’est-à-dire une année de résistance et de construction d’un rapport de forces différent…

C’est nous qui allons inverser les courbes !

Texte élaboré, discuté, et voté à l’unanimité, par la Commission Exécutive élargie
Le 9 janvier 2014

soumis à la signature des structures de base CGT (envoi par mail à l’adresse ci-dessous)

UNION LOCALE DE TOURCOING ET ENVIRONS
43 RUE DE LILLE 59200 TOURCOING
03 20 24 48 34 / ulcgt-tourcoing@live.fr

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Contre-discours de mai de François Cusset
Bernard GENSANE
François Cusset. Contre-discours de mai. Ce qu’embaumeurs et fossoyeurs de 68 ne disent pas à ses héritiers. Actes Sud, 2008. Bizarrement, on a très peu célébré le cinquantenaire de Mai 58, la chute de la Quatrième République, le coup d’État feutré de De Gaulle, l’instauration d’une nouvelle République, donc d’un nouveau partage institutionnel du pouvoir, avec un renforcement du rôle de l’État, de sa prééminence, tout ce que les " gaullistes " libéraux d’aujourd’hui vomissent. (…)
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