L’un des sujets abordés durant le Forum social mondial à Caracas en janvier
dernier était le droit à la communication. Dans ce domaine le contexte
vénézuélien constitue, au niveau mondial, un véritable laboratoire pour l’analyse
des processus de communication massive. Après avoir tiré les leçons du coup
d’Etat du 11 avril 2002, le gouvernement bolivarien essaie peu à peu de
garantir son indépendance technologique.
La Gauche, 13 avril 2006.
« La connaissance est le premier pouvoir du peuple », affirmait un jour le
président vénézuélien Hugo Chavez. Mais qui dit connaissance dit avant tout
communication. Et le pouvoir de cette dernière n’est effectivement plus à
démontrer. Une des premières initiatives du gouvernement putschiste qui s’était
emparé de Miraflores (le palais présidentiel à Caracas) le 11 avril 2002 [1] , avait été de couper les émissions de Canal 8 (l’unique chaîne publique
qui existait alors au Venezuela) et de fermer certaines radios et
télévisions communautaires.
Le rôle des médias alternatifs et communautaires [2] dans la lutte pour l’émancipation
sociale a été particulièrement souligné lors du Forum. Pour cela, il est
nécessaire que ces médias sortent de la marginalité et de l’amateurisme. Ils
doivent tendre vers une professionnalisation, non pas dans le sens où tous
les journalistes qui y participent doivent être rémunérés mais bien dans l’idée
d’améliorer la qualité de ces médias. Selon Osvaldo León, directeur de l’Agence
latino-américaine d’Information (ALAI) [3], « Les médias alternatifs doivent
être capables de répondre à la violence de la concentration du pouvoir
médiatique. Si le FSM a su répondre au Forum économique mondial de Davos,
les médias alternatifs doivent eux aussi répondre aux médias commerciaux. »
Indépendance technologique
La Révolution bolivarienne ne peut s’émanciper sans une certaine
indépendance technologique vis-à -vis des grandes puissances occidentales et
des multinationales. C’est dans cette optique que le gouvernement
vénézuélien, aidé par les « missions » [4]et les communautés, essaie de
faciliter l’accès aux nouvelles technologies. Parmi les multiples
initiatives mises en oeuvre, on peut notamment citer les InfoCentro. Il s’agit
d’une sorte de cybercafés publics comptant en général une dizaine d’ordinateurs,
avec accès gratuit [5]. Selon Adalnel Pantoja, coordinateur des InfoCentro
dans l’Etat de Lara, il en existe actuellement 350 dans le pays mais l’objectif
est d’en créer 350 de plus cette année : « Le but de ces centres est de
favoriser l’inclusion sociale, de faciliter l’accès de la population à la
technologie et à l’information. Cela aide également à développer le
potentiel des communautés en favorisant la création de coopératives, de
petites entreprises, de collectifs, etc. »
Actuellement, de nombreux InfoCentro continuent de fonctionner sous Windows
mais le but à terme est d’abandonner complètement ce système d’exploitation
pour ne plus utiliser que des logiciels libres. « Les gens sont
culturellement habitués à Windows, alors que Linux n’est pas plus difficile
à utiliser. Nous nous donnons deux ans de transition pour passer
définitivement à Linux. Un logiciel accessible gratuitement et permettant
aux utilisateurs de participer à son amélioration en y apportant leurs
modifications personnelles, c’est ça la véritable démocratie
technologique », affirme-t-il [6].
Satellite bolivarien
Afin de garantir à la population un accès aux TIC (Technologies de l’information
et de la communication) à des prix abordables, le gouvernement bolivarien,
appuyé par la technologie chinoise, a lancé récemment une chaîne de
production d’ordinateurs (y compris portables) dans l’Etat de Falcon. La VIT
(Venezolana de Industrias Tecnológicas) produira 80 000 unités dans sa
première année, à un prix 30% en deçà de ceux pratiqués sur le marché [7] .
A l’heure actuelle, le Venezuela travaille également à la construction d’un
satellite avec l’aide des Chinois. « Le satellite Simon Bolivar devrait être
opérationnel en 2008. Il sera mis au point par une équipe sino-vénézuélienne
et nous permettra d’assurer notre indépendance technologique », affirme
Monsieur Pantoja. Ce satellite permettra d’amener la technologie dans les
coins les plus reculés du pays avec l’aide des missions sociales mais il
garantira également le transfert sécurisé d’informations pour le
gouvernement [8] .
Sébastien Brulez
– Source : La Gauche (www.sap-pos.org), mensuel du Parti ouvrier socialiste,
Bruxelles, mars 2006.
– Diffusion : RISAL
http://risal.collectifs.net/article.php3?id_article=1619
Venezuela, voisinage dangereux, par Noam Chomsky.
Menace séparatiste au Venezuela : Zulia, un autre pari de Washington, par Juana Carrasco Martin.
Le Venezuela dans la ligne de mire de Washington, par Salim Lamrani.