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Sur quelques chants guerriers

J’ai publié en juin sur mon blog une courte note sur les paroles de “ La Marseillaise ” et sur le contresens commis, selon moi, à propos de « Qu’un sang impur abreuve nos sillons ».

Assurément, “ La Marseillaise ” est un chant guerrier qui n’y va pas avec le dos de la cuiller, mais il contient quelques paroles apaisées (cinquième couplet) :

Français, en guerriers magnanimes


Portez ou retenez vos coups !


Épargnez ces tristes victimes


À regret s’armant contre nous

Allons voir du côté du “ God save the King/Queen ”. Il ne s’agit pas à proprement parler d’un hymne national puisque la nation britannique n’existe pas, mais d’un hymne au souverain (« Que Dieu protège le roi »). Le peuple, en armes ou pas, en est totalement absent. C’est un chant de guerre à la gloire du pouvoir monarchique.

On ne connaît pas vraiment l’origine de ce chant. L’expression « Dieu sauve le Roi » est inspiré du psaume XIX de David (« Domine, salvum fac Regem et exaudi nos in die qua invocaverimus te » : Seigneur, sauvez le Roi et exaucez-nous lorsque nous vous invoquons). Ce qui est attesté, en revanche, c’est qu’il fut traduit en allemand en 1790, donc en pleine période révolutionnaire, et qu’il fut chanté comme un hymne à la gloire de l’Ancien Régime, du roi de Prusse, de l’empereur d’Allemagne et de celui d’Autriche-Hongrie (« Gott, schütze unser Kaiser ! »). Les écoliers de ces contrées le reprirent jusqu’en 1918. Ce qui renforça les liens entre ces pays et le Royaume-Uni.

Le premier vers est totalement religieux : « God save our gracious Queen ». Dieu est appelé à protéger, à sauver une reine pleine de grâce, miséricordieuse. Ce souverain, le chant le veut « victorieux, heureux, glorieux », capable de vivre « longtemps au-dessus de nous ». Le dieu de l’hymne est spontanément belliqueux :

Ô Seigneur, notre Dieu, lève-toi,

Disperse ses ennemis

Et fais-les tomber ;

Confonds leurs visées politiques,

Déjoue leurs ruses de fripons,

En Toi, nous mettons notre espoir ;

Que Dieu nous protège tous !

(O Lord, our God, arise,

Scatter her enemies,


And make them fall !

Confound their politics,

Frustrate their knavish tricks,

On Thee our hopes we fix,

God save us all !)

Il est également quelque peu impérialiste :

Pas seulement sur cette terre,

Mais que d’une rive à l’autre,

Soit connue la miséricorde de Dieu !


(Not in this land alone,

But be God’s mercies known,

From shore to shore !)

Dans une optique d’amour, cela va sans dire :

Dieu, fais voir aux nations

Que les hommes devraient être frères,

Et ne former qu’une seule famille

De par le monde.

(Lord, make the nations see,

That men should brothers be,

And form one family,

The wide world over.)

Il y avait dans ce texte une référence de circonstance au maréchal Wade, ajoutée en 1745 :

Seigneur, accorde au Maréchal Wade

De pouvoir, de par Ton aide puissante,

Apporter la victoire.

Puisse-t-il faire taire les voix de la sédition

Et, comme un torrent déferlant,

Écraser les rebelles écossais.


(Lord, grant that Marshall Wade

May, by Thy mighty aid,

Victory bring.

May he sedition hush,

And like a torrent rush,

Rebellious Scots to crush.)

Véritable héros, commandant en chef des forces armées, Wade fut enterré à l’abbaye de Westminster. Les vers qui lui furent consacrés disparurent lorsque le “ God Save the Queen ” devint l’hymne officiel.

Dans le genre guerrier, l’hymne des États-Unis est également musclé. C’est un hymne à la bannière étoilée (« star-spangled banner »), que Jimmy Hendrix se réappropria admirablement lors du festival de Woodstock en 1969 en évoquant, par sa seule guitare, le fracas des bombes étasuniennes au Vietnam.

Comme “ La Marseillaise ”, cet hymne nous parle également de sang impur :

Et où est cette meute qui jurait en se vantant

Que les ravages de la guerre et le chaos des combats

Ne nous laisseraient ni patrie ni terre !

Leur sang a lavé la souillure de leurs pas abjects.

Aucun refuge n’a pu sauver les larbins et les esclaves

Des affres de la fuite et des ténèbres de la tombe

Et la bannière étoilée triomphale flotte

Sur la terre des hommes libres et sur la patrie des hommes braves.

(And where is that band who so vauntingly swore

That the havoc of war and the battle’s confusion,

A home and a country should leave us no more !

Their blood has washed out their foul footsteps’ pollution.

No refuge could save the hireling and slave

From the terror of flight and the gloom of the grave

And the star-spangled banner in triumph doth wave

O’er the land of the free and the home of the brave.)

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