Le 19 mai 2010, l’IDC a eu l’honneur de recevoir le professeur Edouard HUSSON de l’Université d’Amiens, qui est intervenu sur le thème « 1945 : Staline, l’Allemagne et le début de la guerre froide ».
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Edouard Husson a commencé sa conférence en soulignant l’existence de nombreux éléments mythologiques concernant la guerre froide. Il a notamment évoqué le rôle de l’Allemagne de l’Ouest dans la création de ces mythes. Particulièrement importants à cet égard avaient été les travaux de l’historien allemand controversé, Ernst Nolte, dont l’ouvrage principal « La guerre civile européenne, 1917 - 1945 » véhicule la thèse selon laquelle le nazisme serait né grâce à la peur légitime de l’Allemagne devant la barbarie bolchévique. Pour Nolte, en effet, les causes du nazisme ne se trouvent pas dans l’histoire et la culture politique allemandes mais, au contraire, dans le « totalitarisme » qui serait né avec Lénine. Par une sorte de processus dialectique, la révolution bolchévique aurait provoqué la naissance du nazisme en Allemagne. Edouard Husson a souligné combien cette thèse a eu d’échos, en Allemagne mais plus généralement en Occident, et notamment pendant la radicalisation de la guerre froide dans les années 1980. L’écroulement du système soviétique en 1990 semblait lui donner raison, dans la mesure où le mal primordial avait finalement été vaincu pas le camp occidental.
La cause du mal était donc, pour Nolte, le communisme, et plus précisément le communisme russe. Ses thèses ont été reprises, entre autres, par des anciens trotskystes et maoïstes français dont la seule chose qui reste de leur marxisme est une haine pour l’Union soviétique (stalinienne) et pour la Russie. Dans cette optique d’un Est barbare libéré et vaincu par un Occident civilisé, on parle de tout sauf de l’essentiel, à savoir la guerre germano-soviétique. En prônant la thèse du « totalitarisme », on relativise aussi le caractère uniquement maléfique et criminel du régime nazi. Nolte récupère un certain nombre de clichés, notamment celui sur la barbarie asiatique.
Ces idées trouvaient un écho dans une Allemagne fédérale qui admettait évidemment les crimes nazis mais où l’idée était fort répandue selon laquelle la Wehrmacht combattait, en fin de compte, un ennemi plus barbare encore, le bolchévisme. Selon cette vision, la Wehrmacht était une sorte d’OTAN avant la lettre. Le grand historien allemand du nazisme, Andreas Hillgruber, a aussi défendu cette thèse, véhiculant ainsi l’idée que la Wehrmacht avait sauvé l’Europe de Staline.
Cette construction des faits est enraciné dans la construction idéologique de la guerre froide. Elle permettait à l’Allemagne de se présenter comme ayant été deux fois du bon côté, s"étant opposé à Staline en 1941 et ensuite contre ses successeurs, et du communisme soviétique en général, pendant la Guerre Froide.
Or, quelle était la réalité de la guerre germano-soviétique. On n’exagère aucunement en disant qu’elle était la guerre la plus atroce de l’histoire humaine. Les estimations les plus récentes mettent le chiffre à 27 millions de morts, 14 millions de civils, 13 millions de soldats.. On a accusé les Soviétiques d’exagérer leurs pertes humaines mais en réalité Staline avait sous-estimé les chiffres. Sans doute ne voulait-il pas mettre en relief la catastrophe de juin 1941. L’Allemagne nazie est directement responsable de ce nombre des victimes en URSS, qui montre l’écrasant poids militaire que l’Allemagne a déferlé sur l’URSS. Les chiffres montrent aussi que c’est l’Armée rouge, et elle seule, qui a cassé l’armée allemande. Le nazisme n’aurait pas été abattu s’il n’y avait pas eu le sacrifice de plus de 10 millions de soldats soviétiques. La réalité de la Seconde Guerre Mondiale est que la guerre germano-soviétique en constitue la majeure partie, à côté de laquelle la guerre en Occident a joué un rôle mineur.
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