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L’abrogation de la loi de 2004 contre le port des signes ostensibles à l’école, loi d’exclusion, devient inéluctable
Jamilla FARAH

Plusieurs associations dans leur mission de lutte contre le racisme et l’islamophobie maintiennent et renforcent leur mobilisation pour l’abrogation de la loi liberticide 2004 contre le port de signes ostensibles dans les établissements scolaires, loi d’exclusion et de stigmatisation d’enfants musulmans.

Plusieurs arguments forts légitiment cette initiative qui ne date pas d’hier mais qui, aujourd’hui, trouve sa pleine pertinence et audibilité après dix années d’existence de la loi. Cette dernière a montré sa foncière iniquité en excluant de nombreuses jeunes filles de l’école républicaine et/ou en empêchant l’expression de leur identité religieuse.

Il est d’abord nécessaire de rappeler d’une part l’histoire de la laïcité constamment invoquée à mauvais escient par certains courants islamophobes pour les nommer franchement, et d’autre part les objectifs de l’école pour dévoiler l’absurdité d’une loi qui rejetterait les enfants de la République dont des jeunes filles sous prétexte qu’elles soient musulmanes.

Les longues guerres de religion depuis le XVIe siècle ont longtemps miné le moral des Européens (donc des Français) qui aspiraient à la paix et au bien-être. Les penseurs des Lumières se sont alors emparés d’un projet de pacification de l’Europe en donnant naissance au droit moderne, le libéralisme dont l’essentialité est le respect de la liberté individuelle à condition de ne pas nuire à celle d’autrui, la liberté trouvant donc sa limite dans le trouble à l’ordre public. Et ici, nous pouvons déjà poser les questions suivantes : en quel sens le port du voile porte atteinte à la liberté d’autrui ? Est-ce que le voile à lui seul, génère un trouble et met en difficulté la paix sociale ? Est-ce que le caractère ostentatoire est coercitif si tant est qu’il faille croire que l’ostentation ne résiderait que par la visibilité d’un signe religieux et en l’occurrence celui du voile ?

Condorcet, philosophe des Lumières et théoricien de l’école publique française, dans son Rapport et projet de décret sur l’organisation générale de l’instruction publique (1792) que Jules Ferry va retenir et reprendre pour son application, promeut les idées d’égalité citoyenne et d’universalité par l’école publique, en plus de la nature des contenus enseignés qui relèvent des sciences et des arts.

« Ainsi, l’instruction doit être universelle, c’est à dire s’étendre à tous les citoyens. Elle doit être répartie avec toute l’égalité que permettent les limites nécessaires de la dépense, la distribution des hommes sur le territoire, et le temps, plus ou moins long, que les enfants peuvent y consacrer. Elle doit, dans ses divers degrés, embrasser le système tout entier des connaissances humaines, et assurer aux hommes, dans tous les âges de la vie, la facilité de conserver leurs connaissances et d’en acquérir de nouvelles ».

L’école publique dans sa vocation première est l’école pour tous, partout. Elle intègre toutes les populations, sans distinction aucune et notamment les classes pauvres pour lesquelles elle a été instituée, une des finalités de la démocratie. Elle instruit les savoirs essentiels indépendants de toute orientation politique ou religieuse, c’est-à-dire contre les pouvoirs, contre l’Église auparavant qui n’était pas égalitaire privilégiant une catégorie en excluant les non-catholiques, les juifs, les noirs les femmes, les minorités pour ainsi dire, que Condorcet s’attachait à vouloir émanciper. Il s’agit donc bien de différencier la neutralité obligatoire de l’enseignement de la liberté d’expression de l’usager. La tolérance des pratiques religieuses d’autrui constitue le préalable historique à la paix sociale, c’est ainsi que l’on entend la liberté individuelle dans le droit libéral. « L’éducation publique, elle, doit se borner à l’instruction » (Condorcet, premier mémoire), ne pas risquer d’être un pouvoir et le transfert vers une nouvelle cléricature. Et là, la loi 2004, en excluant des jeunes filles parce qu’elles exprimeraient leur appartenance religieuse, tombe dans ce travers du pouvoir, un cléricalisme que Condorcet craignait à raison. Ce que l’école républicaine avait reproché à l’Église, elle agit à l’identique avec la loi 2004 en excluant sur d’autres critères anti-universalistes. Françoise Lorcerie, directrice de recherche au CNRS, spécialiste des phénomènes de discrimination fait remarquer en outre, que la loi 2004 « a nimbé le voile d’une aura de défi, de provocation à l’égard de la société, qu’il n’avait pas jusqu’au début des années 2000 » (Le Progrès, 17 mai 2014, Où construire la paix, sinon à l’école ? Elle doit être bienveillante).

Voici une réponse à la première question, s’agissant de savoir si le voile était générateur de troubles sociaux. En réalité, c’est l’application de la loi 2004 qui elle, est coercitive et empêche non seulement cette paix sociale mais ostracise des jeunes filles musulmanes françaises, phénomène qui pourrait inviter naturellement le sentiment de révolte. Par conséquent, on peut affirmer que cette loi liberticide est contre la liberté d’expression donc intrinsèquement antinomique avec son propre principe libéral, et qu’en plus, parce qu’elle ne permet pas à tous les jeunes d’être ensemble sur les mêmes bancs publics avec leurs différences sociales, culturelles, ethniques ou religieuses, elle compromet le bien-vivre ensemble, la cohésion sociale.

La loi 1905 énoncée par Aristide Briand est pourtant très claire dans sa définition, elle autorise à chacun l’expression de sa religion et la pratique du culte. Elle s’inscrit dans la logique des droits fondamentaux de l’homme et du citoyen. On nomme ce principe comme étant « la laïcité », vocable qui n’est pas une seule fois usité dans celui-ci pour observation, ni la déclaration des droits universels de 1789, bien qu’utile à la préservation de la paix sociale dans une société multiculturelle certes, mais dont la dérive de certains intégrismes laïques mettent en danger.

Jamilla FARAH

 
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