Monsieur,
La première page du Monde (édition du 17-18 novembre) propose un article dont le titre est « Embuscade meurtrière en Israël ». Le contenu de l’article précise que l’embuscade a eu lieu « à Hébron, en Cisjordanie ». Hébron ne se situant pas en Israël mais dans les territoires occupés par Israël, le choix d’un tel intitulé peut donner lieu à deux interprétations pouvant éventuellement se combiner :
- la rédaction du journal considère qu’Hébron se trouve en Israël et approuve ainsi les revendications expansionnistes israéliennes. Dans ce cas, la déontologie voudrait qu’une telle prise de position soit explicitement assumée face aux lecteurs et non pas qu’elle soit distillée à travers un gros titre de la première page ;
- la rédaction du journal a une fâcheuse tendance à commettre des négligences importantes sur des aspects essentiels du conflit israélo-palestinien, ces négligences consistant à employer un terme mensonger au profit des occupants israéliens et au détriment des occupés palestiniens. En effet, la négligence de votre édition du 17-18 novembre fait suite à la négligence de l’édition du 20 septembre selon laquelle la période au cours de laquelle « plus de 65 Palestiniens ont été tués » aurait constitué une « accalmie ». Ces négligences très surprenantes de la part de professionnels se produisent alors même que, dans ses propos rapportés dans un dossier consacré au traitement médiatique du conflit israélo-palestinien (Médias, juin-juillet, pp. 62-63), Edwy Plenel, directeur de la rédaction au Monde, affirme imposer les principes suivants sur ce sujet : « multiplier par un coefficient dix la vigilance normale que l’on doit avoir dans le traitement d’une guerre » et « faire très attention aux effets de sens ».
Dans votre article « Lettres amères » (Le Monde, 29-30 septembre), vous indiquez que « beaucoup de lecteurs […] ne cessent de dénoncer le ’’parti pris propalestinien’’ » attribué au Monde. Les attaques de lecteurs partisans de l’expansionnisme israélien ne constituent ni un argument ni une excuse. En choisissant le titre « Embuscade meurtrière en Israël » pour désigner un événement ne s’étant pas produit en Israël, la rédaction du Monde à adopté un comportement anti-palestinien (approbation de l’expansionnisme israélien ou bien négligence des droits des Palestiniens) et n’a pas respecté les lecteurs (conditionnement du lecteur par l’intermédiaire d’un titre issu d’une prise de position fondamentale non explicitée ou bien emploi par négligence d’un terme mensonger). C’est pourquoi j’invite la rédaction à modifier ce comportement.
Je vous prie d’agréer, Monsieur, l’expression de mes sentiments distingués.
Yves Lemarié, Nantes
Cet article est publié dans le tout récent site presse-palestine.org : Titre original : Courrier postal envoyé le 21 novembre 2002 à M. Robert Solé, médiateur, journal Le Monde
Article incriminé par palestine.org
LEMONDE.FR | 16.11.02 | 09h40
"¢ MIS A JOUR LE 16.11.02 | 11h09
Embuscade meurtrière à Hébron
Des Palestiniens ont ouvert le feu sur des colons juifs qui rentraient chez eux après des prières à la veille du sabbat, vendredi 15 novembre à Hébron (Cisjordanie), faisant au moins douze morts et quinze blessés. Les colons ont été la cible de tirs intenses à l’arme automatique alors qu’ils empruntaient une ruelle étroite. L’attaque, qui a été revendiquée par le Djihad islamique, est la plus grave perpétrée contre des Israéliens à Hébron depuis le début de l’intifada palestinienne en septembre 2000. Le ministre israélien de la sécurité intérieure Uzi Landau a proposé samedi de démanteler et désarmer l’Autorité palestinienne.
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Proche-Orient
Douze Israéliens ont été tués et quinze blessés dans deux embuscades tendues à quelques minutes d’intervalle par des Palestiniens à des fidèles juifs et des soldats vendredi soir à Hébron en Cisjordanie, alors que l’un des assaillants a été abattu.
Les autorités israéliennes ont dénoncé ce "massacre" affirmant qu’elles fermaient désormais la porte à toute négociation avec les Palestiniens. "Ce massacre, le jour du Shabbat, est le deuxième en une semaine touchant des civils innocents, assassinés dans leur lit ou sur le chemin de la prière. Aucun processus politique ne peut se poursuivre quand de telles atrocités continuent d’être commises par des terroristes palestiniens", a indiqué à le porte-parole du ministère des Affaires étrangères Gilad Millo.
Le groupe radical palestinien Jihad islamique a revendiqué l’attaque qui a tué vendredi soir 12 militaires et colons israéliens à Hébron, en Cisjordanie, dans un communiqué. "Les Brigades al-Qods, branche militaire du Jihad islamique en Palestine, annoncent leur responsabilité dans l’opération héroïque qui a visé vendredi soir les troupeaux de colons et les soldats de l’occupation près de la colonie de Kyriat 4 et Hébron", précise le communiqué.
Selon des sources policières, un nombre indéterminé d’assaillants ont ouvert le feu à partir du quartier d’Abou Sneineh sur un groupe de fidèles qui revenaient à pied du Caveau du Patriarches, lieu saint vénéré par les juifs et les musulmans, en direction de leur colonie de Kiryat Arba. Des soldats, postés à proximité de Kiryat Arba, ont accouru pour leur venir en aide et sont tombés à leur tour dans une embuscade, les assaillants tirant à l’arme automatique et lançant des grenades dans leur direction, a-t-on ajouté.
Les fidèles revenaient du Caveau des Patriarches où ils avaient récité les prières du Shabbat, le repos hebdomadaire juif. Leur colonie surplombe la ville de Hébron. Douze Israéliens, dont au moins trois colons, ont été tués et quinze blessés sur la route surnommée "la route des Prières", selon les sources médicales.
Selon une porte-parole de l’armée, "des dizaines de personnes ont été blessées, dont des soldats et des civils". Mais la télévision publique israélienne a affirmé que des civils, des soldats et des garde-frontières figuraient parmi les personnes tuées.
Selon la radio publique israélienne, il a fallu plus de 40 minutes aux ambulanciers et services de secours pour arriver sur les lieux de l’attaque, en raison des échanges de tirs nourris entre les assaillants et les soldats. Plusieurs des blessés, pour la plupart transportés dans des hôpitaux de Jérusalem, sont grièvement atteints, selon les médias israéliens.
Ces nouveaux décès portent à 2.682 le nombre de personnes tuées depuis le début de l’Intifada, fin septembre 2000, dont 1.974 côté palestinien et 659 côté israélien.
Le 25 octobre, l’armée s’était retirée de la plus grande partie de Hébron, réoccupée en juin après une vague d’attentats en Israël, mais avait gardé des positions sur les collines d’Abou Sneineh et de Harat al-Sheikh. Ces collines surplombent le réduit juif abritant 600 colons. Des coups de feu ont été tirés dans le passé à partir de ces collines en direction des habitations juives. L’armée avait en se retirant menacé d’une "riposte sévère" en cas d’attaques palestiniennes.
Le ministre israélien de la Sécurité intérieure Uzi Landau a proposé samedi 16 novembre de démanteler et désarmer l’Autorité palestinienne, à la suite de l’attentat. "Ces meurtriers veulent contraindre les Juifs à quitter Hébron. Je pense donc qu’il faut justement renforcer la présence juive sur place, et détruire les maisons de la casbah (vieille ville) qui servent depuis des années de position de tirs aux Palestiniens", a-t-il ajouté. "Nous devons détruire tout le secteur oriental de la casbah, qui est de toute façon devenu un terrain vague". Enfin, le ministre a suggéré d’installer en permanence des forces israéliennes sur la colline d’Abou Sneineh, un secteur autonome palestinien, qui surplombe le réduit où vivent retranchés quelque 500 juifs entourés de 120.000 Palestiniens.
Les colons de Hébron avaient dénoncé le précédent retrait le qualifiant "d’acte d’abandon criminel" et fait porté par avance la responsabilité du "sang juif qui serait versé" sur le Premier ministre Ariel Sharon. Aux termes d’un accord avec l’Autorité palestinienne, Israël a évacué 80% de Hébron en 1997, mais contrôle toujours le réduit où sous la protection de l’armée, sont retranchés les colons entourés de 120.000 Palestiniens dans un climat de grande hostilité.
Avec AFP
