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Qui a peur de la flotille ?

Samedi 18 juin, sur le Vieux Port de Marseille (E.R.)

(Regards.fr) La flotille pour Gaza devrait appareiller depuis la Grèce dans les jours à venir. Au moins un bateau français en sera, probablement deux, ont annoncé les organisateurs samedi 18 juin à Marseille. Alors que ce départ se précise, les amis d’Israël multiplient les communiqués et les interventions dénonçant notamment le caractère "politique" de l’initiative. En contrepoint, de nombreuses personnalités se sont engagées au soutien de la Flotille. La semaine qui débute va être longue...

« Nous serons à Gaza à la fin du mois de juin ». Samedi 18 juin, au cours d’une conférence de presse tenue à Marseille, Claude Léostic, de l’Association France-Palestine Solidarité (AFPS) n’a pas laissé place au doute. Tandis qu’elle s’exprimait, des images du bateau acheté « grâce au soutien de milliers de citoyens » défilaient en boucle sur un écran. Actuellement à quai dans un port grec, il devrait être accompagné d’un second navire français, de taille plus modeste.

Au total, une douzaine de bateaux composeront cette Flotille II : venus d’Amérique, d’Asie mais surtout de pays "du Nord au Sud" du continent europén. Grande absente, la Turquie. Un an après la grave crise diplomatique entre Israël et la Turquie (alliés régionaux) suite à la mort de neufs militants turcs tués par l’armée israélienne lors de l’assaut du 31 mai sur la Flotille, Tel Aviv a pris les devants. Et, au lendemain de la victoire électorale de la formation de Recep Tayip Erdogan, exercé des pressions sur Ankara appuyées, selon Le Monde du 17 juin, par celles de Barack Obama. Le président américain « aurait lui-même appelé le premier ministre turc (...) pour lui enjoindre de calmer un jeu diplomatique régional qui risque de nouveau de s’enflammer en cas d’arraisonnement de la flotille pour Gaza » .

Côté français, les deux bateaux ne pourront embarquer qu’une cinquantaine de personnes. Olivier Besancenot (NPA), le député Jean-Paul Lecoq (PCF), les députés européennes Marie-Christine Vergiat (FdG) et Nicole Kiil-Nielsen (Europe écologie) ainsi que « des personnalités du PS et du PG » y représenteront les organisations de la gauche politique française. Côté syndicat, Jean-François Courbe de la CGT, Annick Coupé de Solidaire et Raymond Fabrègues de la Confédération Paysanne. Julien Bayou (Génération Précaire), et les navigateurs Jo Le Guen et Eugène Riguidel en seront également. A leur côté, des représentants de l’AFPS, de la Campagne civile internationale pour la protection du peuple palestinien (CIPPP), de la CIMADE, du MRAP, de l’Union juive française pour la paix (UJFP), du Collectif des musulmans de France (CMF), de la coalition contre Agrexco et de divers autres collectifs.

A tous ceux-là , dont beaucoup étaient présents lors de la Conférence de presse puis au coeur du rassemblement qui s’est tenu toute l’après-midi sur le Vieux Port, le militant israélien Michel Warshawski a tenu à annoncer « deux bonnes nouvelles » : « Un : ça panique dur à Tel Aviv, il y a des réunions d’urgence, civiles et militaires, parce que les autorités commencent à comprendre que cette flotille va arriver. Deux : nous - le mouvement de solidarité israélien et palestinien -, serons aux portes de Gaza et aux portes d’Ashdod. Parce que nous savons que la flotille arrivera à bon port - ou tout à côté - et nous serons là pour vous accueillir ».
Argumentaire double-lame

L’accueil, le gouvernement israélien, a de son côté donné quelques indications sur celui qu’il entend réserver à cette Flotille. Comme le relate le même article du Monde, l’état-major de l’armée israélienne considère que « ces bateaux agissent contre [la loi internationale] et contre la souveraineté d’Israël  » et cherchent « à forcer le blocus pour délégitimer Israël ». Et ce d’autant qu’ils sont remplis d’« extrémistes d’IHH [ l’organisation dont étaient issus de nombreux militants turcs sur la Flotille 2010, ndlr] [qui] vont probablement utiliser la violence ».

Cet argumentaire à double-lame (la Flotille est l’outil d’une "délégitimisation politique" d’Israël et elle est un repère de dangereux barbus) est d’une efficacité qui n’est plus à démontrer auprès de la société israélienne, où le "syndrome de Massada" reste assez largement partagé. Il a en outre le mérite d’offrir à tous les amis de Tel Aviv un discours de propagande tout-prêt et bien rôdé. Dans les jours précédant et suivant le rassemblement marseillais, chacun d’entre eux en a usé. Dans un communiqué diffusé à la presse le 20 juin, le Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) y va ainsi de ses "10 remarques sur le bateau pour Gaza" dans lequel on apprend notamment que « les participants "humanitaires" à ce bateau sont les "idiots utiles" d’une opération menée en sous-main par l’IHH, filiale turque des Frères Musulmans, responsable du bain de sang survenu l’an dernier sur le Mavi Marmara ». Plus c’est gros, plus ça passe. Moins d’une semaine auparavant, le même CRIF proposait "20 questions sur la flotille de Gaza", brodant à l’infini sur les mêmes contre-vérités .

Député UMP et président du groupe d’amitié France-Israël, Claude Goasguen s’est lui livré sur son blog à une condamnation sans appel de la Flotille tout en appelant à rejoindre la manifestation pro-israélienne qui s’est tenue dimanche 19 à proximité des locaux du Centre international de Culture populaire (CICP) à Paris où siègent de nombreuses organisations pro-palestiniennes. Ces dernières années, le CICP a été la cible, à plusieurs reprises, d’agressions de la Ligue de défense juive (LDJ), une organisation d’extrême-droite. Enfin, dans un communiqué du 14 juin, la LICRA avait apporté la nécessaire touche "lutte contre l’antisémitisme" à ce déchaînement anti-flotille : « Ces initiatives sont contraires à la loi et à la paix publique. Elles contribuent à l’augmentation des actes antisémites en France ».

Tonalité plus soft du côté des responsables internationaux où le discours oscille entre l’"inquiétude" très réticente de Ban Ki Moon et la franche désapprobation de l’Union européenne ; En mai dernier, Kristalina Georgieva, commissaire européenne responsable de la Coopération internationale, de l’aide humanitaire et de la gestion des crises faisait part de « son opposition la plus totale au projet de la flottille... qui, malgré l’affirmation de ceux qui l’organisent, n’est pas humanitaire mais politique ».

Soutiens politiques et gros bras

Une dimension politique qui, contrairement à ce que prétendent les détracteurs de la Flotille est pleinement assumée par les organisations et les personnalités engagées. « Oui c’est politique que la société civile se mobilise et en remontre à Israël, c’est politique de demander à ces pays qui se font les chantres des Droits de l’homme et à l’Union européenne de dénoncer la politique israélienne et d’assurer la sécurité des bateaux ! Et je ne vois pas en quoi cela pose problème », a résumé Julien Bayou lors de la Conférence de presse.

En France, 411 élus et responsables politiques, justement, dont 97 élus et responsables nationaux, ont affirmé leur soutien à la campagne "un bateau français pour Gaza". Et 172 personnalités ont signé l’appel en soutien au bateau français pour Gaza. Tandis que les universitaires Bertrand Badie, Didier Billion, Sonia Dayan-Herbrun, Vincent Geisser, Nacira Guénif, Alain Joxe, Rachid Benzine et Julien Salingue ont eux, co-signé le 16 juin une tribune soutenant la Flotille.

Qui a peur de la Flotille ? Israël et ses représentants dans le monde, qui savent que ce type d’initiative de la société civile travaille des opinions acceptant de plus en plus de mal la suffisance coloniale anachronique de cet Etat. Il n’y a qu’à voir l’énergie que tous dépensent pour contester la campagne Boycott Désinvestissement Sanction (BDS). Et les puissants de ce monde, renvoyés à leur complaisance - voire à leur lâcheté - politique par quelques dizaines de milliers de citoyens et quelques centaines de personnes prêtes à s’engager physiquement pour exiger le respect du Droit international.

Flotille pacifiste contre armée israélienne ? Chacun sait déjà qui l’emportera quand la confrontation aura lieu, fin juin, quelque part dans les eaux méditerranéennes. Mais la solidarité aura gagné du terrain. Et en attendant, les rapports de force peuvent aussi se mesurer à des actions symboliques. Samedi à Marseille, les quelques militants sionistes violents qui se sont risqués à des provocations au bas de la Canebière se sont fait corriger par des militants en marge du rassemblement au cours d’une altercation saignante mais vite contrôlée par le SO et la police. Et puisqu’on parle gros bras, il faut ici signaler les militants irlandais de la campagne Irish ship to Gaza, qui se sont adjoints le concours de quelques "héros" insulaires. Des rugbymen du quinze national qui, face caméra, font part de leur soutien à la Flotille...

Emmanuel Riondé
http://www.regards.fr/resistances/qui-a-peur-de-la-flotille

En savoir plus...

Quand les renseignements israéliens veulent ficher les internationalistes

Les quelques 300 militants embarqués à bord des navires de la Flotille sont-ils déjà tous dûment fichés et répertoriés par les services israéliens ? Selon un article de Barak Ravid paru dans le quotidien israélien Haaretz du 21 mars dernier, « le renseignement militaire réunit des informations sur les organisations de gauche à l’étranger, que l’armée soupçonne de vouloir mettre en cause la légitimité d’Israël ».

Selon le journal, cette initiative qui aurait notamment vu le jour en prévision de l’arrivée de la Flotille II, provoque des clivages au sein du ministère des affaires étrangères, dirigé par le leader d’extrême-droite Avigdor Lieberman. Quelques uns auraient même demandé : comment définir le mot "délégitimisation" ? Est-ce que critiquer la colonisation constitue un acte de délégitimisation ? Excellentes questions...

E.R.

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