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Que savons-nous de ce qui s’est fait en notre nom en Libye ?

À l'initiative souveraine du président de la république française, Nicolas Sarkozy, la Grande Jamahiriya Arabe Libyenne a donc été anéantie sous les bombes en 2011. Observatrice attentive des événements qu'elle commentait quotidiennement sur Internet, Françoise Petitdemange annonce la parution imminente de son ouvrage "La Libye révolutionnaire dans le monde (1969-2011)". Elle répond ici à quelques questions...

Michel J. Cuny : En 1969, lors de la chute du roi Idriss 1er et de la prise de pouvoir par un groupe d’officiers unionistes libres, comment le gouvernement français avait-il réagi ?

Françoise Petitdemange : Georges Pompidou venait d’être élu à la présidence de la république, le 20 juin de cette année 1969, lorsque le 1er septembre, la Révolution a eu lieu en Libye. L’accueil qu’il fit aux jeunes révolutionnaires a été fort heureusement relaté par Guy Georgy qui s’apprêtait à devenir le premier ambassadeur de France dans la Libye révolutionnaire :

« Vous avez appris ce qui s’est passé ; on ne connaît pas encore les auteurs de ce coup d’État, mais il est probable que ce sont des nationalistes à la Nasser. Le monde arabe est en effervescence, la croissance démographique et le pétrole, la misère et la richesse insolente s’y côtoient, la soif de dignité et de justice est la nouvelle antienne du tiers-monde. La moitié de ces peuples ont moins de vingt-cinq ans et l’avenir n’est certainement pas aux rois, aux princes ni aux potentats de tout poil. Vous verrez ces jeunes gens. Vous les écouterez pour savoir ce qu’ils veulent, vous les jugerez avec sympathie, vous leur offrirez notre coopération. Il ne doit pas manquer de domaines où l’intérêt de nos deux pays puisse être complémentaire. »

Michel J. Cuny : Dans quel domaine les intérêts de la Libye révolutionnaire et de la France de Georges Pompidou ont-ils pu, par exemple, se rejoindre ?

Françoise Petitdemange : Dès l’automne, pour défendre la jeune révolution, des pourparlers secrets ont été engagés, entre la France et la Libye, portant sur des avions « Mirage » de la firme Dassault. Très rapidement, les services secrets israéliens (le Mossad) révèlent l’affaire, aussitôt relayés dans les médias français. En février 1970, lors d’un voyage officiel du couple présidentiel français aux États-Unis, des manifestations accompagnent ses déplacements. Le 28, à Chicago, Georges et Claude Pompidou, conviés à un dîner offert par le Chicago Council of Foreign Relations et l’Alliance française, sont accueillis par un millier de manifestants de la diaspora juive : « Pompidou go home ! ». À l’issue du dîner, la foule est encore plus agressive. Le journaliste Vincent Nouzille raconte...

« Les services de sécurité et les gardes du corps sont débordés. Les cris fusent. Des manifestants pressent les Pompidou et leur crachent au visage. »

Michel J. Cuny : La Libye révolutionnaire n’était donc ni une amie d’Israël, ni une amie des États- Unis en général... Pour quelles raisons ?

Françoise Petitdemange : À propos d’Israël, voici comment Muammar Gaddhafi devait répondre, lors d’un entretien accordé en avril 1983 à trois journalistes, Hamid Barrada (Africain), Marc Kravetz (Européen et Juif), Mark Whitaker (États-Unien), qui venaient d’évoquer la persécution des Juifs(ves) :

« Les Juifs, je le répète, ont été persécutés et pourraient l’être encore, c’est possible. Mais il est absolument certain qu’ils n’ont pas été touchés pendant les quatre mille ou cinq mille ans qu’ils ont vécu avec les Arabes. Voilà une vérité qui mérite d’être consignée dans les livres – et méditée. » Alors, où est le problème ? Ici : « Tel est le credo des sionistes, consigné dans leurs écrits et illustré par leur comportement actuel. Périsse le monde entier pourvu qu’ils subsistent eux seuls et réalisent leur croyance fallacieuse, à savoir qu’ils sont le peuple élu. »

En ce qui concerne les États-Unis, les membres du Comité central des Officiers Unionistes Libres, devenu le Conseil du Commandement de la Révolution avaient été intraitables. Les troupes états-uniennes, comme trois mois auparavant les troupes britanniques, avaient dû évacuer les bases militaires, le 30 juin 1970 au plus tard, mettant ainsi fin à la colonisation. Ce démantèlement avait été l’une des raisons majeures, pour les jeunes militaires et civils, de faire la révolution.

Michel J. Cuny : Comment définir la Jamahiriya Arabe Libyenne ?

Françoise Petitdemange : Le terme Jamahiriya, qui est un néologisme créé par Muammar Gaddhafi, veut dire “État des masses”. Les éléments fondamentaux de cette structure sont les Congrès Populaires de Base (CPB) qui ont un pouvoir décisionnel.

« Sont membres de droit des CPB tous les citoyens libyens ayant 16 ans révolus ainsi que tous les ressortissants des pays arabes s’ils le désirent. »

Les CPB (Congrès Populaires de Base) ont compétence pour...

«  1 – Promulguer les lois dans les différents domaines... 2 – Établir le plan de développement [économique et social] et le budget de l’État. 3 – Ratifier les traités et accords [signés] entre la JALPS [Jamahiriya Arabe Libyenne Populaire Socialiste] et les autres pays. 4 – Définir la politique [générale] dans tous les domaines. 5 Déterminer les relations de la JALPS avec les autres pays. 6 – Fixer la position politique de la JALPS à l’égard des mouvements politiques dans le monde. 7 – Statuer en ce qui concerne la guerre et la paix. 8 – Former les Comités populaires et évaluer leur action, (leur demander des comptes). »

Les Comités Populaires de Base, quant à eux, ont la charge de mettre en application les décisions des Congrès Populaires de Base.
À l’échelle du pays, les Secrétaires délégués par les Congrès Populaires de Base, les Comités Populaires de Base, ainsi que par les Unions, Syndicats et Ligues professionnel(le)s, les Secrétaires du Comité Populaire Général, le Secrétariat Général du Congrès Général du Peuple se réunissent une ou deux fois par an, lors du Congrès Général du Peuple (CGP).

Michel J. Cuny : Cette démocratie directe, pleinement assumée sur le plan politique, se retrouvait- elle jusque dans la dimension économique ?

Françoise Petitdemange : Dès après la Révolution, Muammar Gaddhafi lit un « Communiqué » à la radio libyenne. Parlant de la nouvelle Libye...

« Elle ira de l’avant sur le chemin de la liberté, de l’union et de la justice sociale, garantissant à tous ses fils le droit à l’égalité et ouvrant grand devant eux les portes d’un travail honnête, d’où seront bannies l’injustice et l’exploitation, où personne ne sera ni maître ni serviteur, où tous seront des frères libres, au sein d’une société qui verra régner, par la grâce de Dieu, la prospérité et l’égalité. »

Dans l’État des masses, tout ce qui est fondamental pour l’être humain était assuré . Au moment du mariage, par exemple, chaque couple libyen recevait un logement gratuit (un appartement ou une maison) dont la superficie pouvait aller jusqu’à 160 m2. Pour les habitant(e)s, l’eau, l’électricité, le chauffage, à usage domestique, étaient gratuit(e)s. Le prix d’un litre de carburant était de 0,08 euro, etc...

Voilà tout ce que la France de Nicolas Sarkozy et du sioniste avéré Bernard-Henri Lévy a décidé de détruire.

"La Libye révolutionnaire dans le monde (1969-2011)", Éditions Paroles Vives, 542 pages, 29 € (port compris) Contact avec Françoise Petitdemange : fpetitdemange.mjcuny@orange.fr

»» http://www.cunypetitdemange.sitew.com
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