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Procès de Bradley Manning : l’accusation énumère l’intérêt d’Al-Qaida pour WikiLeaks (The Guardian)

Photo : Jose Luis Magana/AP

Le gouvernement des Etats-Unis cherche à renforcer son procès contre Bradley Manning, la source de la plus grand fuite des secrets d’Etat dans l’histoire américaine, en présentant au procès du soldat des preuves que Oussama Ben Laden et Al-Qaida ont utilisé le site WikiLeaks et plus largement Internet comme outil de recherche et de propagande.

Alors que le ministère public approche de la fin de son procès, les avocats du gouvernement ont soumis à la cour et sa juge, la colonelle Denis Lind, des témoignages et des déclarations qui ont tenté de souligner la familiarité d’al-Qaida avec le web et plus spécifiquement avec WikiLeaks. Leurs efforts portent sur l’accusation la plus grave contre Manning, celle d’« aide à l’ennemi », dans laquelle l’accusation doit prouver qu’en ayant transmis du matériel classifié à WikiLeaks, le soldat a sciemment fourni des renseignements potentiellement dommageables aux ennemis des Etats-Unis.

Les procureurs ont lu le dossier d’une déclaration déjà discutée devant la cour, qui révèle que le chef d’al-Qaida, Oussama Ben Laden, a personnellement demandé que du matériel de WikiLeaks lui soit transmis. Ben Laden a écrit une lettre à un assistant lui demandant de recueillir des informations et a reçu en retour des dossiers de batailles d’Afghanistan, connus comme les journaux de guerre Afghans, ainsi que certains câbles diplomatiques publiés par WikiLeaks.

La lettre de Ben Laden et la réponse ont été trouvées sur les disques durs récupérés par l’équipe de la Navy Seal qui a fait irruption dans son enceinte à Abbottabad au Pakistan et l’ont tué en mai 2011.

Le matériel de Ben Laden a été versé au dossier sans élaboration par les procureurs mais il est clair que l’intérêt personnel du leader d’al-Qaida pour WikiLeaks sera utilisé comme une élément crucial dans sa tentative de prouver que Manning « a aidé l’ennemi », une atteinte passible de prison militaire à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle. Pour étoffer son accusation, l’accusation a également lu à la cour le témoignage d’un conseiller militaire américain sur le militantisme islamiste qui a dépeint al-Qaida comme une organisation adepte d’internet et des médias.

Youssef Aboul-Enein a affirmé qu’al-Qaida et ses ramifications, comme al-Qaida dans la péninsule arabique, a utilisé systématiquement les médias pour inspirer les individus et collecter des fonds pour ses missions. « Depuis sa création, l’image véhiculée par les médias était importante pour al-Qaida », dit-il, ajoutant que les revendications d’attaques réussies contre les forces américaines remontaient le moral du réseau et établissaient sa crédibilité comme une organisation terroriste efficace.

De même, Internet a été largement utilisé à la fois par les chefs d’al-Qaida et ses membres. « La communication dans le cyberespace constitue le moyen de communication privilégié » lorsqu’al-Qaida n’avait pas de structure organisationnelle centralisée et les chefs étaient constamment en mouvement pour éviter d’être capturés.

Le réseau a utilisé Internet pour des recherches depuis au moins le début des années 2000, en s’appuyant sur des sites favorables à ses objectifs, a déclaré Aboul-Enein. Il tire des informations de tous les sites accessibles au public y compris ceux contenant des informations sur les activités du gouvernement américain, se focalisant sur les informations diplomatiques qui pourraient être utilisées pour nuire aux Etats-Unis et à ses alliés.

Comme troisième élément de preuves relatif à l’usage du web par al-Qaida, particulièrement WikiLeaks, les procureurs se sont référés à une vidéo produite par le porte-parole américain d’al-Qaida, Adam Gadahn. La vidéo, sortie en juin 2011, contenait des images de l’attaque de civils à Bagdad par un hélicoptère Apache diffusée par WikiLeaks sous le titre « Collateral Murder ».

Parlant en anglais, Gadahn a exhorté les partisans d’al-Qaida « à prendre avantage des ressources disponibles sur Internet ».

Le témoignage relatif à la vidéo de Gadahn a été contesté par la défense, même si la vidéo a été diffusée plusieurs mois après que Manning ait été arrêté en Irak où il travaillait comme un analyste du renseignement. Il a admis avoir transféré un stock considérable de documents d’Etat américains, dont les journaux de guerre afghan et irakien, la vidéo sur l’attaque par hélicoptère Apache, les fichiers des détenus de Guantanamo et des centaines de milliers de câbles diplomatiques, mais il plaide non coupable au chef d’accusation d’« aide à l’ennemi ».

Pour le dernier témoignage, l’accusation a cité le magazine Inspire, publié par al-Qaida dans la péninsule arabique. Le magazine a dressé pour les lecteurs une liste d’activités qui pourraient aider les moudjahidins, y compris des informations utiles pour le jihad. « Tout dans WikiLeaks est bon à archiver », dit l’article.

Le magazine Inspire a été publié en janvier 2011 – encore une fois, plusieurs mois après que Manning ait été arrêté. Sa pertinence dans le dossier de l’accusation, pour qui le soldat a consciemment aidé l’ennemi, n’est pas claire étant donné qu’il a été publié après l’événement, même si cette disparité dans la chronologie n’a pas été relevée par la défense.

Traduction par Romane

http://www.guardian.co.uk/world/2013/jul/01/bradley-manning-wikileaks-al-qaida

Manning : l’accusation dépose ses conclusions et abandonne un chef d’accusation.

Mardi, le gouvernement a conclu son plaidoyer contre Bradley Manning en abandonnant son accusation controversée que les informations transmises à WikiLeaks ont aidé un ennemi « classifié ».

Les procureurs avaient accusé Manning d’« aide à l’ennemi », en particulier, al-Qaida, al-Qaida dans la péninsule arabique et un « ennemi classifié ».

Alors que les juristes étaient perplexes devant le terme employé, un porte-parole militaire a finalement expliqué que le concept faisait référence aux « moyens et méthodes de collecte que le gouvernement a employés » pour déterminer que son « ennemi reçoit certaines informations classifiées compromises ».

Alors que le gouvernement a déposé ses conclusions mardi, le major Ashden Fein a cependant annoncé l’intention d’abandonner la charge d’ennemi classifié.

« Les Etats-Unis n’ont pas présenté ni n’ont l’intention de présenter, puisque le gouvernement a déposé ses conclusions, la preuve qui avait été soumise lors de la requête aux fins de précision de l’acte d’accusation relative à un ennemi classifié », a dit le procureur en chef.

Fein a fait le commentaire peu après une séance à huis-clos d’environ deux-trois heures avec le dernier témoin du gouvernement : Daniel Lewis, un agent du contre-renseignement et du contre-espionnage de la Defense Intelligence Agency [services de renseignement de l’Armée - NdR].

Les avocats de Manning ont tenté lundi de disqualifier Lewis comme un expert en matière de contre-renseignement offensif et d’informations classifiées transmises à des agences de renseignement étranger.

Lewis a apparemment défendu ses compétences lors de l’audience à huis-clos mardi après que la Colonelle Denise Lind ait semblé encline à laisser l’agent parler uniquement de son expérience dans tous les aspects du contre-espionnage.

La juge militaire a affirmé que Lewis devait mieux démontrer son expertise à valoriser des données classifiées – un obstacle important puisque le gouvernement doit prouver que les fuites ont eu un coût économique pour faire condamner sur plusieurs chefs d’accusation. Ce coût pourrait aussi impacter la condamnation de Manning.

Lind a déclaré que Lewis devait d’abord satisfaire aux normes édictées dans un annexe classifié avant de pouvoir se prononcer sur la valeur des données.

Le témoignage a duré une majeure partie de l’après-midi, à huis-clos. Il s’est terminé par une courte séance publique au cours de laquelle Fein a annoncé que Lewis s’était confié et avait témoigné sur tous les sujets.

Après la déposition des conclusions par le gouvernement, les procédures sont suspendues pour le week-end du 4 juillet et reprendront lundi.

On s’attend à ce que les avocats de Manning tentent de rejeter les accusations avant de présenter leur plaidoirie.

Un seul verdict de culpabilité déclenchera le début d’une procédure de condamnation, dans laquelle les deux parties présenteront des témoins et des preuves sur les éventuels dommages que les fuites auraient pu causer à la sécurité des Etats-Unis. L’avocat principal de Manning, David Coombs, a déclaré qu’il présentera des documents d’organismes gouvernementaux montrant que les divulgations de Manning n’ont eu qu’un impact minime.

Plusieurs mois avant son procès, le soldat âgé de 25 ans a reconnu avoir téléchargé plus de 700 000 fichiers, y compris les câbles diplomatiques, les rapports d’incidents des guerres en Irak et en Afghanistan, les profils des détenus de Guantanamo et une vidéo d’une attaque aérienne à Baghdad que WikiLeaks a intitulée « Collateral Murder ».

Manning a dit qu’il avait envoyé les fichiers non sollicités pour susciter des débats aux niveaux national et international sur la façon dont les Etats-Unis mènent leur guerre et leur diplomatie. Ses soutiens le saluent comme un lanceur d’alerte qui a exposé les crimes et la corruption que Washington aurait préféré garder secrets.

ADAM KLASFELD 

Traduction : Romane

Source : https://www.courthousenews.com/2013/07/02/59044.htm

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