LES CAGOULÉS ONT FRAPPÉ
13 mai 2003
En février dernier, suite à l’évasion de Fresnes, Dominique Perben
autorisait le personnel pénitentiaire à intervenir cagoulé dans toutes les
prisons de France. « Nous avons peur qu’il se passe quelque chose de
terrible », affirmaient fin avril les familles des détenus de la centrale de
Moulins-Yzeure face aux uniformes cagoulés.
Il aura fallu moins de six semaines pour que se produise la première
bavure connue. Le 5 mai dernier, une dizaine de surveillants ont pénétré en
force au quartier d’isolement de la maison d’arrêt de Bois d’Arcy, où se
trouvaient plusieurs prisonniers transférés arbitrairement suite aux
incidents de Clairvaux. A la fouille brutale, ont succédé la mise à nu, les
insultes et les coups. A dix contre un, les uniformes cagoulés se sont
déchaînés contre deux des neuf isolés avant de leur faire traverser une
partie de la détention nus devant les personnels féminins et masculins de
l’établissement. L’un des deux blessés, Laurent Jacqua , a porté plainte,
certificat médical à l’appui.
Il est essentiel que cette plainte aboutisse. Si la justice cautionne
cette première exaction, le port de la cagoule permettra les pires
brutalités sous couvert d’anonymat. Les personnels qui revendiquent, à
visage découvert, plus de considération pour leur métier, pourront revêtir
leur tenue de bourreau pour procéder, à toute heure du jour et de la nuit, à
des règlements de comptes et autres expéditions punitives.
La cagoule symbolise à la fois la violence et la honte. Qu’entendent donc
cacher ces fonctionnaires en tenue de malfaiteurs ? Les familles en sont
aujourd’hui à redouter des morts. Alors même que l’on fait mine de s’alarmer
des tensions croissantes en prison, le ministère de la Justice institue
discrètement des instruments de terreur générateurs des pires violences.
– LES MATONS CAGOULÉS DE PERBEN PASSENT A L’ACTION
Texte de Laurent JACQUA incarcéré au QI de la M.A. de Bois d’Arcy depuis
le 17/04/2003 écrit après la fouille du 5 mai 03 dans ce même quartier
Vous en avez parlé lors de l’émission de 9 mai 03 en relatant ce qui
c’était passé au Q.I. de Bois d’Arcy. Cependant j’y reviens avec quelques
détails et un Certificat Médical pour attester de la véracité de
l’événement. Le port de la cagoule permet toutes les dérives, alors
n’attendons pas une bavure pour en prendre conscience. Ce qui s’est passé
est un pas de plus vers la répression et, il serait bon de s’arrêter un
instant sur ce pas qui vient d’être franchi au mépris de nos droits les plus
élémentaires. Ces opérations d’intimidation vont se multiplier et
l’utilisation de la violence par l’administration pénitentiaire risque de
devenir monnaie courante et légalisée sous des prétextes sécuritaires. La
situation est donc grave...
Donc lundi 5 mai 03 aux alentours de 19h30 nous avons eu droit, au Q.I. de
Bois d’Arcy, à une descente de matons cagoulés munis d’uniformes anti émeute
et casqués pour une fouille surprise. Ils étaient encadrés par des
surveillants chefs et la direction de l’établissement. Un à un nous avons
été sortis, maintenu fermement par deux à trois cagoulés sans compter les
autres qui ouvraient et fermaient le « cortège ».
MOUNIR fut le premier a
prendre des coups et a être conduit à la bibliothèque du Q.I. pour y être
fouillé. Refusant de se baisser et tousser, il a eu droit au tabassage
immédiat et s’est retrouvé emmené à poil jusqu’aux promenades du Q.I. Je fus
le dernier a y passer...
Arrivé à la bibliothèque pour y être fouillé, je me
suis déshabillé sans résistance. Une fois nu, on m’a demandé de me
retourner. J’ai été alors plaqué au mur et l’un des matons m’a palpé l’entre
jambe en touchant mes parties. Considérant cette pratique comme une atteinte
à ma dignité, à mon intimité, je me suis retourné en protestant sur la façon
dont cette fouille se passait. Ils m’ont alors demandé sur un ton agressif
de m’accroupir et de tousser. Ce que bien sur j’ai refusé. Le surveillant
chef a alors fait un signe à ses matons cagoulés qui se sont jetés sur moi
alors que je ne manifestais aucune agressivité. Ils m’ont plaqué au sol,
m’ont mis des coups au visage et sur le corps. Etant complètement nu rien ne
me protégeait. Ils ont tenté par la force de m’écarter les jambes et me
demandaient de tousser, voyant que je ne cédais pas, l’un deux m’a porté un
coup dans les parties. Mais je n’ai pas lâché l’affaire, ils ont fini par me
menotter violemment en me blessant aux avants bras puis j’ai été conduit « manu militari » nu à travers la détention sous le regard du personnel
féminin et masculin présent.
J’ai rejoint à mon tour MOUNIR et les autres,
ce n’est qu’en promenade que j’ai pu me rhabiller. Vers 21h je réintégrais
ma cellule avec quelques blessures et un oeil enflé.
Nous sommes deux à avoir morflé sur ce qui ressemble à de la torture pure
et simple. Avant pour un refus de « baissez, toussez » on prenait 8 jours de
mitard, chose qui n’était déjà pas normale, aujourd’hui les temps ont
changés, on a droit au lynchage que seule la lâcheté des cagoules permet. En
effet ces messieurs peuvent se lâcher sans crainte... Mais jusqu’où cela
ira-t-il ?
La situation est donc grave et le temps des bavures se rapprochent
dangereusement.
Mardi 6 mai 03 j’ai fait constater mes blessures par le médecin du Q.I. Ce certificat parle de lui-même.
Voilà , on vient de goûter au nouvelles méthodes instaurées par PERBEN, il
semble que la répression au sein des prisons française n’a plus de frein.
MOUNIR a été transféré on ne sait où. S’il écoute qu’il donne des
nouvelles
A bientôt
Laurent
PRISON.EU.ORG : Le portail d’information sur les prisons
Source : indymedia Nice
– UNE BANDE DE PILLARDS EN PRISON
13 mai 2003
Ils sont plusieurs centaines, en bande organisée, dangereux récidivistes.
Ils se lèvent vers trois heures du matin et se rassemblent par bus entier
pour fondre sur leurs victimes sans défenses dès sept heures du matin. Ils
les séquestrent, les déshabillent et se livrent une journée entière à la
mise à sac de leur pauvres biens. On appelle çà une « fouille générale ».
Ces voyous ont un uniforme, la loi de leur côté et un alibi qui couvre
toutes les ignominies des pouvoirs actuels : l’idole « sécurité ». C’est
une
horreur ; les actes de vandalisme commis dans nos cellules sont
indescriptibles en détail (denrées alimentaires éventrées et répandues,
appareils électriques détériorés, courrier jeté en vrac avec les
vêtements
dans la saleté, petits aménagements d’humanisation des lieux détruits,
confiscation débile (poivre vendu en « cantine », par exemple). C’est
dans
cette situation qu’on aimerait voir un journaliste faire son travail et
pas
dans les visites guidées ou dans les déclarations hypocrites des matons.
Et souvent la seule image télé de l’événement c’est la tronche d’un
délégué
des surveillants aussi avenante et au discours aussi transparent que le
portail généralement choisi pour faire l’arrière plan. Des faits, et la
parole aux détenus, bordel ! Au lieu d’images vérités de nos cellules
dévastées, il se trouvera toujours un guignol sur un plateau de télé pour
parler de l’ « humanisation des prisons » ou de la « prévention du suicide
en prison » Ils font tout pour qu’on y désespère et qu’on y crève dans
leurs
prisons !
En vérité ce qui est nécessaire pour comprendre l’événement ce serait une
évaluation des effondrements et dérapages psychologiques induits par ce
raid de barbares. Combien d’esprits fragiles ou usés par ce système
mortifère ont commencé à « basculer » en retrouvant leur cellules
saccagées
après une énième et humiliante fouille à corps ? Combien on laché prise
devant la photo ou le courrier d’un être cher volée ou piétinée, ou
devant
la destruction d’un objet fabriqué au cours de centaines d’heures
pacifiques
d’ingéniosité et de patience. Ils ferment leur gueule de collabo,
là -dessus, les « psychologues pénitentiaires ». Cette évaluation des
dégâts
humains catastrophiques aurait pourtant plus de valeur que les bilans et
statistiques imbéciles exprimés en grammes de shit ou en puces
électroniques. Et si on veut de l’objectif, du matériel du mesurable c’est
par centaines que se chiffrent les objets personnels victimes de la razzia
bleu-marine. Alors qu’à l’évidence avant de clore l’opération, ce ne sont
pas les prisonniers qu’il faut fouiller.
La cerise sur le gâteau c’est que ce gâchis ne donne aucune prise d’ « armes de destruction massive » ; ils ne trouvent rien, nulle part. On
pourrait penser qu’il est normal que les gardiens ne trouvent pas les
téléphones portable puisque ce sont eux qui les vendent, parmi bien d’autres choses. Mais l’explication du fiasco des forces du désordre est
ailleurs, puisque ceux qui cherchent ne sont pas ceux qui vendent. Ils
viennent d’ailleurs et c’est un milieu où on adore se tirer dans les
pattes, par ennui autant que par médiocrité d’esprit.
Ils ne trouvent rien ? Evidemment non puisque toute la population pénale
est prévenue de cette ridicule « fouille surprise » ; pour certains
plusieurs jours à l’avance Par qui ? Par les surveillants et en
particulier
leurs représentants syndicaux peu désireux d’affaiblir leur position
revendicative par une moisson leur valant des accusations de laxisme ou
pire. Et c’est ainsi que le coup de pub de super-Perben sombre dans le
grotesque, Mais faute d’avoir quelque chose à trouver, on se défoule en
dévastant les lieux et c’est toujours le détenu qui fait les frais des
magouille entre ces « si braves et honnêtes gens ».
Est-ce qu’au moins cet étalage de muscles et de terrorisme apporte un
regain d’autorité aux aux surveillants ? . Même pas ; non qu’il y ait
révolte le jour même : malgré les rapports officiels, il n’y a
généralement
pas assez de fous parmi les prisonniers pour affronter un ennemi armé et
dix
fois supérieurs en nombre lors des mouvements. Mais le lendemain quand on
se
retrouve face à face, d’homme à homme, les insultes pleuvent et la
consigne est évidemment de ne pas jeter de l’huile sur le feu en répondant
par des brimades. Alors les gardiens encaissent et s’écrasent et leur
autorité part en poussière.
Alors cette fouille est peut-être une crise d’autorité hystérique, mais
de
l’autorité réelle et respectée sûrement pas. Pour être respecté il faut
être
respectable. Les prisonniers savent faire la distinction entre une
oppression subie et le respect de l’autorité, entre l’arbitraire le plus
crétin et brutal et des règles sociales auxquelles ils tiennent autant que
n’importe qui.
Alors pourquoi cette coûteuse démonstration de violence officielle ? Pour
obéir à un ministre-voyou qui veut pousser les détenus à la révolte en
régressant d’un siècle, uniquement parce qu’il a des conceptions
politiques archaïques et un énorme complexe face à son collègue Sarko qui
fait mieux que lui la « guerre aux voyous ». Faut-il que les détenus
subissent toute cette violence imbécile pour la vanité de ce bouffon ?
La vengeance viendra plus tard. Elle explosera en chacune des personnes
détenues à la brimade de trop. Et alors les hypocrites diront : « On ne
comprend pas cette violence sans raison ». Sans raison vraiment ? Vous
pouvez mettre un paquet d’ « S » à raison
– D’après un groupe de détenus quelque part au pays des droits de l’Homme.
Source : samizdat.net