UN NOUVEAU « PRISME A L’ANALYSE » ?
Elles s’activent et elles s’agitent comme si le sol se dérobait sous leurs pas ces féministes dilettantes outragées. Madame Hillary Clinton, leur maître à penser, ayant décrété que le « Printemps arabe » avait pour objectif de « remettre en marche le cours de l’histoire vers la justice, la démocratie, la modernité et la laïcité », elles ne savent plus à quel saint se vouer, mais surtout, elles s’excitent, les amazones occidentales, depuis ce qu’elles décrivent pudiquement comme : « les événements récents en Tunisie et en Libye qui apportent un autre prisme à l’analyse » (1) !
Le pilonnage des populations civiles par plus de 14 000 sorties meurtrières d’avions de combat de l’OTAN, le massacre de milliers de femmes, d’hommes, d’enfants et de vieillards dans leur sommeil ou dans leur fuite des villes libyennes assiégées et bombardées apportent quel « autre prisme d’analyse », dites nous mesdames, sur la laïcité, le voile, la justice et la démocratie bourgeoise ?
A entendre ces élucubrations ubuesques, on croirait rêver, comme dans un cauchemar d’une nuit d’automne - loin du « Printemps arabe » justement - qui ressemble de moins en moins à un jardin de jasmins et de plus en plus à un cimetière de coquelicots sanglants.
Les événements évoqués par ces conférencières outrancières ont trait au massacre de populations civiles libyennes (plus de 50 000 victimes, 17 fois plus qu’au WTC) et à l’exécution sommaire - extra-judiciaire - du chef d’État libyen Mouammar Kadhafi par des mercenaires commandités par l’OTAN (une facture de 478 milliards de dollars sera refilée au CNT) ; ainsi qu’au vote de la population tunisienne qui vient de porter au pouvoir un parti islamiste, un parti qui n’a surtout pas participé au soulèvement populaire spontané et pseudo « apolitique », serait selon elles la résultante de la remise en marche de l’histoire arabe (2) ! Tiens donc, l’histoire arabe s’était immobilisée ? Quelle fadaise ridicule !
LES ISLAMISTES ACCRÉDITÉS - NON RÉSISTANTS
Le quotidien le Monde qui nous avait précédemment gratifié de ses écrits hystériques à propos des « islamo-fascistes » et sur le danger de reconnaître la résistance du Hamas comme gouvernement légitimement et démocratiquement élu en Palestine occupée (2006), ou encore, de reconnaître la résistance du Hezbollah dont les candidats ont également été élus démocratiquement au Liban (2009) ; Le journal Le Monde, disions-nous, y va lui aussi de son mièvre laïus et s’interroge hébété : « Et si, en Tunisie la démocratie passait par l’Islam ? » !
Il y aurait donc de bons islamistes - nous savons déjà qu’une fraction des Talibans négocie avec les troupes d’invasion en Afghanistan et que pour cela ils sont devenus de bons Talibans - et il y aurait de mauvais islamistes (résistant à l’OTAN) selon le quotidien Le Monde, suivant en cela les directives de Washington et de Paris.
Le quotidien va plus loin et décrète tout bonnement que « la Tunisie, a été également le premier à affronter l’épreuve des urnes. Avec succès si on en juge la participation que les premières élections vraiment libres du monde arabe (…). » (3). La participation populaire fut de moins de 49 % à l’élection tunisienne bidon. De plus, impasse sur les élections palestiniennes démocratiques de 2006 et silence sur les élections libanaises démocratiques de 2009, parce que Hamas et Hezbollah ne sont pas des islamistes accrédités par Washington car ceux-la résistent, alors que ceux de Tunisie, et bientôt ceux d’Égypte, de Libye et de Syrie ne résistent pas à l’OTAN ; ils collaborent, voilà ce qui leur vaut la palme d’or de l’intégrité non « intégriste ».
Pendant ce temps, jeudi, à Sidi Bouzid (Tunisie), d’où serait partie le 17 décembre 2010 la « résurrection » de la civilisation arabe (!) le peuple en colère, plutôt que de perdre son temps à voter, mais toujours au chômage et amère, ne pouvant digérer les coupons de votes qu’on leur offrait à consommer, a été réprimée dans le sang, par le fer et par le feu (4). Voilà la véritable réponse du peuple tunisien à l’encontre de la frauduleuse mystique démocratique. La même répression a aussi cours en ce moment en Égypte sous la junte militaire « démocratique » moubarakienne, sans Moubarak, ce tyran planqué, mis à la retraite dans sa datcha de Charm el-Cheikh « par la direction de la plus grande révolution » !?
ÉLECTIONS AVEC LES DOLLARS DU QATAR !
Quelle flagornerie petite bourgeoise, quel mépris pour les peuples arabes, cette grande civilisation millénaire qui n’attendait surtout pas le string, la pornographie juvénile, les génocides, les bombes à fragmentation, les munitions à l’uranium appauvri et les bombes au phosphore blanc pour s’émanciper et se « moderniser » !
Voila que les forbans de l’impérialisme américain, français et canadien - les chantres de la pseudo démocratie, le choeur des pleureuses de la « libératrice » Hillary, sont pris au piège de leur cynisme. Les féministes des pays riches dansent sur les cadavres des femmes arabes enfin « libérées » de leur voile, - elles qui n’avaient rien demandé aux féministes ni aux « démocrates » des salons de Paris, de Montréal ou de Washington - voilà , disions-nous, que les femmes tunisiennes (moins de la moitié d’entre elles du moins) ont voté majoritairement - et c’est leur droit - pour un parti islamiste maintenant chargé d’assurer la continuité de Ben Ali sans Ben Ali, mais pour le bénéfice de la classe capitaliste que servait Ben Ali.
Que pouvait-on attendre de mieux quand un soulèvement populaire est, non pas « apolitique » mais extrêmement politisé, en direction de la social-démocratie opportuniste et réformiste et de l’électoralisme petit-bourgeois qui laisse espérer que l’on peut renverser un système social décadent à coup de coupons de votation. Le parti qui possède le plus de ressources financières et qui contrôle les moyens de propagande est assuré de l’emporter, nous l’avions écrit il y a dix mois.
« Voilà qu’entre en scène une nouvelle fraction d’intellectuels arabes, des occidentalisés mieux avisés. Maintenant que le premier groupe de compromis s’est cassé le nez, eux s’avancent et proposent une tactique différente ; ils souhaitent détourner le mouvement ; d’une lutte sur le front économique, idéologique et politique, ces intellectuels arabes suggèrent de faire une lutte pour la « démocratie ». La « démocratie » qui nourrit comme aux États-Unis, mais pas les gagne-petits, elle nourrit la petite-bourgeoise (…) c’est le prix qu’elle fixe pour gagner son pari et engranger son profit, la petite-bourgeoise, le pari de diriger le conflit en Tunisie vers la « démocratie » du désespoir, de la faim et du mépris. » (5).
Les millions de dollars du Qatar et de l’Arabie Saoudite auront tout simplement fait la différence dans l’élection tunisienne comme ils le feront plus tard en Égypte post Moubarak, dans la Libye post Kadhafi et éventuellement en Syrie laïque post Bachar el-Assad (6).
LA SOLUTION ARABE
Démocratisme bourgeois pour les riches, laïcité hypocrite, pseudo justice et modernité capitaliste, voilà l’art d’avancer en arrière aux pays du Maghreb et du Makresh sous domination impérialiste. Et maintenant, à Montréal, elles pleurent en choeur, nos soeurs en peur, devant ce qu’elles appellent un « détournement démocratique » (7). Quelle outrecuidance arrogante ces féministes occidentales ! Il n’y a là aucun détournement de la démocratie bourgeoise, le résultat de l’élection en Tunisie est le fruit de la démocratie bourgeoise manipulée par les riches tunisiens et leurs suppôts occidentaux, soutenus en sous main par les capitaux de l’intégriste Arabie Saoudite Wahhabite qu’aucune de ces donneuses de leçons n’osent dénoncer ouvertement, devinez pourquoi (8).
Pourtant, la solution arabe et africaine aux maux de ces peuples est si simple et si évidente : que les puissances occidentales se retirent d’Afrique et qu’elles laissent l’Afrique aux Africains et les pays arabes et berbères aux arabes et aux berbères. Ils ne pourront jamais faire pire que l’Occident. Voilà la vraie solution pour ce continent et pour le Moyen-Orient. Mais il faudra les chasser ces puissances occupantes. De grâce, ne les aidez surtout pas, ils vivent assez de calamités sans subir Obama, Sarkozy, Cameron, Harper et Berlusconi, ils ont assez souffert sous les bottes de ces criminels de guerre (9).
Robert Bibeau