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Pour la Multitude constituante

Dans un débat, lorsque deux perspectives s'opposent, il est naturel de prendre parti pour l'une, en résistant à l'autre. Pourtant, on se doit avant tout de rechercher s'il existe une alternative, et de l'explorer le cas échéant.

Ce billet est une contribution au Mouvement pour la Sixième République (M6R), lancé par J.-L. Mélenchon au début de septembre 2014. Alors qu’il n’a pas encore atteint, à ce jour, le cap préfixé des 100 000 signataires, un débat parfois virulent divise depuis quelque temps ce mouvement : les partisans d’une assemblée constituante élue par le vote s’opposent à ceux d’une assemblée constituante élue par le sort.

Nous proposons ici l’esquisse d’une solution qui peut prétendre dépasser cette opposition, tout en satisfaisant aux réquisits des deux "camps", une sorte de Aufhebung hégélien (une fois n’est pas coutume !). Nous pensons qu’elle peut prétendre, par surcroît, susciter l’intérêt des citoyens en général, au-delà des sympathisants du M6R, ce qui permettrait à ce dernier de s’attirer les faveurs d’un plus large électorat en vue des présidentielles de 2017. Mais nous insistons sur le fait qu’il ne s’agit ici que d’une description générale de ce qui n’est ni plus ni moins qu’un point de départ, voué à être débattu, amendé, précisé, approfondi par tous ceux qui y verront un intérêt.

Au-delà de leur opposition, les partisans du tirage au sort et ceux du vote partagent pourtant une revendication commune : ils se font tous les défenseurs d’une assemblée constituante, chargée de rédiger le projet de Constitution. Rien de surprenant, à vrai dire, car comment faire autrement dans un État qui compte près de 45 millions de citoyens ? Les contraintes spatio-temporelles, démographiques, nous obligeraient donc à faire appel à cette institution aux couleurs oligarchiques. Nous estimons cependant que ces contraintes peuvent être relativement dépassées aujourd’hui. En effet, il existe désormais un instrument d’une puissance matérielle révolutionnaire avec lequel il est impératif de compter dans notre quête de démocratie, à savoir l’internet. Une plate-forme internet nationale, incorporant des soubassements locaux, est à même de rendre les citoyens eux-mêmes constituants, eux-mêmes rédacteurs du projet de Constitution. Contre le concept d’assemblée constituante, nous proposons donc celui de Multitude constituante, puissant concept politique qui fait référence à Machiavel et à l’ouvrage de M. Hardt et A. Negri.

La Multitude constituante, en tant que processus constituant systémique par essence démocratique, doit pourtant intégrer en son sein une "assemblée constituante", non seulement pour des raisons physiques, pratiques, organisationnelles, mais aussi pour la simple et bonne que plus de 70 000 personnes ont déjà signé, à ce jour, pour "l’élection d’une assemblée constituante". De la même manière que le terme "élection" a été élargi, en cours de route, à son acception de "par le sort", rien ne nous empêche de construire celui d’assemblée constituante, qui n’a pour l’heure reçu aucune définition. Dans notre perspective, "l’assemblée constituante" ne sera rien d’autre que l’ensemble des administrateurs d’une plate-forme internet nationale sur laquelle tous les citoyens désireux, à partir d’assemblées citoyennes locales, seront les rédacteurs du projet de Constitution. Ils s’y inscriront par le moyen de leur numéro de sécurité sociale. Le contenu de ce projet de Constitution sera élaboré, débattu et visible par tous, donc contrôlé par tous.

La nature, la composition, le rôle, ainsi que les modalités d’action de toutes les instances intervenant dans ce processus, étant prédéfinis par les signataires du M6R, c’est au candidat du M6R de se présenter avec ce programme qu’il devra mettre en place une fois la présidence conquise. Et il aura donc pour mission prioritaire durant son mandat présidentiel – entre autres évidemment – de mener ce processus constituant jusqu’à son terme : l’adoption par référendum d’un projet de Constitution.

Voici donc l’esquisse du programme que nous proposons.

L’assemblée constituante

L’assemblée constituante, autrement dit l’ensemble des administrateurs de la plate-forme nationale, sera composée de catégories professionnelles spécialisées. Pour l’heure, nous proposons trois informaticiens, trois secrétaires, et neuf juristes (ce dernier chiffre est celui correspondant au nombre de membres du Conseil constitutionnel actuel). L’assemblée constituante sera donc composée de quinze membres devant honorer une quasi parité.

Pour candidater à l’un de ces postes, il faudra faire état d’une compétence avérée dans le domaine concerné, spécifiquement en droit constitutionnel pour les juristes, et désigner un suppléant. Quiconque aura déjà été investi d’un quelconque mandat électoral sous la Cinquième République ne pourra être éligible. Aucun membre de cette assemblée ne pourra candidater à un mandat électoral sous la Sixième République pendant une période de dix ans.

Pendant la campagne précédant ces élections, l’État aura la charge de garantir une stricte égalité de financement, de publicité, de temps de parole et de diffusion médiatique entre tous les candidats.

Les membres de l’assemblée constituante seront élus au suffrage universel direct et investis de mandats impératifs, à durée indéterminée mais révocables à tout moment sur initiative citoyenne (pétition donnant lieu à un référendum révocatoire si un quota prédéterminé de signatures est atteint).

L’assemblée constituante sera libre de s’organiser. Néanmoins, elle sera tenue, dès sa prise de fonction, de nommer parmi ses membres un coordinateur, puis, dans un délai d’un mois, de rendre publique sa charte détaillant son mode d’organisation. Elle aura en charge la gestion de la plate-forme nationale, mais ne pourra en aucun cas toucher au contenu du projet de Constitution. L’essentiel de sa mission consistera à apporter conseils et recommandations quant aux enjeux et aux formulations des propositions d’articles constitutionnels émises par les assemblées locales. Les informaticiens auront la charge de la maintenance du système informatique, les secrétaires celle des publications sur la plate-forme, et les juristes celle du contenu des réponses apportées aux propositions d’articles. Pendant l’exercice de leur mandat, leurs publications ou non-publications seront contrôlées par tous.

Il reviendra également à cette assemblée la charge, au terme de la rédaction du projet de Constitution, de mettre ce dernier sous la forme conventionnelle et définitive qui sera soumise au référendum.

Les assemblées citoyennes locales

L’élection nationale des membres de l’assemblée constituante sera l’occasion pour chaque citoyen d’élire simultanément, à l’échelle locale, un secrétaire général pour l’assemblée locale dont il relève. De même que pour les membres de l’assemblée constituante, quiconque aura déjà été investi d’un quelconque mandat électoral sous la Cinquième République ne pourra être éligible au poste de secrétaire général d’une assemblée locale. Ce dernier ne pourra non plus candidater à un mandat électoral sous la Sixième République pendant une période de dix ans. Il sera également investi d’un mandat impératif, à durée indéterminée mais révocable à tout moment sur initiative citoyenne. Le secrétaire général d’une assemblée locale sera responsable de la gestion d’une plate-forme locale, "parcelle numérique" de la plate-forme nationale, chargé de coordonner les groupes de travail au sein de cette assemblée et de faire le lien entre l’assemblée constituante et l’assemblée locale. Il ne pourra rien exprimer au nom de l’assemblée locale sans la production d’une décision de celle-ci par un vote majoritaire.

Une assemblée locale s’organisera librement en groupes de travail. Ces derniers seront autonomes et libres (entre amis, entre membres d’une association, d’un collectif, d’un parti politique, dans les bars, dans des locaux mis à disposition par la commune, etc.). Chaque assemblée locale disposera donc d’une plate-forme sur laquelle les groupes de travail proposeront, pourront débattre, chacun votera, une décision de l’assemblée locale se constituera. Cette plate-forme locale sera le lieu commun de ces groupes : elle permettra de rendre visible toute information concernant l’assemblée locale et l’assemblée constituante, et offrira un moyen d’expression à ceux qui ne pourraient pas contribuer physiquement à un groupe de travail.

1 assemblée locale représentera 1 voix pour proposer des articles constitutionnels sur la plate-forme nationale. Cette mesure évite d’avoir à faire aux potentielles (mais évidemment improbables !) 45 millions de forces de proposition.

Une assemblée locale ne pourra excéder 15 000 membres. Ce chiffre repose sur les calculs et l’expérience de Podemos dans l’activité de ses cercles. Aussi, il y aura très précisément 3 000 assemblées locales, répartis sur tout le territoire national en fonction de la densité démographique. Du point de vue de la plate-forme nationale, c’est comme si au maximum 3 000 personnes s’exprimaient, ce qui, humainement, rendra parfaitement gérable et lisible l’outil. D’autant plus qu’il n’est pas certain que toutes les assemblées locales proposeront. A titre indicatif, il y aura donc 116 assemblées locales rien qu’à Paris (41 à Marseille, 23 à Lyon, etc.). Il sera rendu obligatoire un minimum de cinq assemblées locales par département. Ce chiffre se base sur le nombre de citoyens de la Lozère, département le moins peuplé.

Chaque citoyen relèvera de l’assemblée locale recouvrant son lieu de résidence. Il sera libre de choisir un groupe de travail, ou de participer directement sur la plate-forme locale. Les citoyens établis hors de France seront inscrits sur la plate-forme locale correspondant à leur dernier lieu de résidence sur le territoire français. Afin de ne pas léser la minorité n’ayant pas accès à internet, l’État aura la charge de mettre les plates-formes nationale et locale (le site internet) à disposition de tous, dans les lieux publics (mairie, bibliothèques, La Poste, etc.). Par ailleurs, chaque citoyen aura la possibilité de donner procuration à un concitoyen relevant de la même assemblée locale.

La rédaction du projet de Constitution

Toutes les propositions d’articles émises par les assemblées locales, par l’intermédiaire de leur secrétaire général, devront être accessibles sur la plate-forme nationale. Celle-ci organisera les propositions par thèmes généraux, et au sein de chaque thème par disposition précise. Toutes les éventuelles formulations d’article portant sur une disposition précise se trouveront donc réunies sous une même rubrique. Il reviendra à l’assemblée constituante de trouver un point d’entente entre les diverses formulations d’un article portant sur une même disposition. Ces tractations pourront avoir lieu entre l’assemblée constituante et une seule assemblée locale émettrice d’une proposition, ou entre l’assemblée constituante et toutes les assemblées locales émettrices de diverses formulations. En toute transparence, ces échanges seront visibles et accessibles par tous sur la plate-forme nationale, en accompagnement de chaque proposition.

Suite aux discussions entre l’assemblée constituante et l’assemblée locale émettrice d’une proposition, si un accord est trouvé, la proposition d’article sera soumise au vote général, uniquement sur autorisation explicite de l’assemblée locale. En cas de désaccord, toutes les formulations seront soumises simultanément au vote général, sous forme de choix multiples à partir desquels une seule formulation sera adoptée, ou non. Le délai d’une votation sera fixé à quinze jours, permettant au plus grand nombre de voter : il est fort probable qu’à certaines périodes, plusieurs propositions se trouveront en votation simultanément. Cette fois, contrairement à l’émission de propositions d’article ou de réponse à formuler dans le dialogue avec l’assemblée constituante, chaque citoyen sera amené à voter individuellement : il s’agit donc, comme dans les assemblées locales, de respecter le principe démocratique "1 citoyen = 1 voix". Des critères de validation de l’adoption d’une proposition d’article devront être définis a priori. Là encore, le droit de donner procuration sera respecté.

Le processus constituant se poursuivra ainsi jusqu’à silence complet de part et d’autre. Il est clair qu’il privilégie la lenteur et le débat dignes de sociétés démocratiques, ce qui exclut le risque de surcharge pour les administrateurs de l’assemblée constituante (puisque toute expression des assemblées locales devra avoir fait elle-même l’objet d’une construction démocratique) et garantit une légitimité absolue. Après une période de silence de deux mois, le projet de Constitution sera soumis au référendum traditionnel. L’ensemble du processus sera placé en permanence sous contrôle des citoyens, notamment des journalistes, et toute irrégularité pourra faire l’objet d’une saisie du tribunal administratif.

Les enjeux

Comparée à celle d’une simple assemblée constituante traditionnelle, qu’elle soit élue ou tirée au sort, il nous semble qu’on peut voir dans cette proposition de Multitude constituante plusieurs avantages fondamentaux :

 Elle est plus démocratique. Le pouvoir de rédiger étant crucial, celui-ci n’est pas laissé à une poignée d’individus, mais conféré à tous. Les rapports de forces idéologiques trouveront plusieurs lieux où s’exprimer : au sein des groupes de travail, des assemblées locales, entre les assemblées locales et l’assemblée constituante ;
 Elle est plus mobilisatrice. Au lieu de délaisser cette charge à quelques-uns en attendant le référendum, les débats rédactionnels animeront tout le pays : beaucoup s’impliqueront, nous espérons, pour produire un projet de Constitution de gauche ;
 Elle répond plus facilement au risque de corruption. Il est en effet impossible de corrompre des millions d’individus ;
 Elle diminue le risque "d’oublis". Plus il y a de têtes pensantes, plus le projet de Constitution sera complet ;
 Elle a plus de chances de succès. Le projet de Constitution étant rédigé par tous, il est fort probable qu’il sera adopté au référendum ;
 Elle est plus fédératrice. Non seulement elle peut unifier les signataires du M6R, mais en plus susciter l’intérêt des gens extérieurs. A notre avis, si ce processus constituant est choisi, nous augmentons considérablement nos chances de gagner les prochaines élections présidentielles.

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Le débat scientifique sur la réalité du changement climatique a ses imposteurs. Mais, en matière d’environnement, les plus grandes impostures se situent dans le champ politique. Lorsque l’écologie émerge dans le débat public au début des années 1970, les grandes puissances économiques comprennent qu’un danger se profile. Alors que la mondialisation du capitalisme se met en place grâce à la stratégie du libre échange, l’écologie politique pourrait remettre en cause le productivisme, (…)
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« Nous pouvons faire sauter un navire américain et en rejeter la faute sur les Cubains. La publication des listes des victimes dans les journaux américains accroîtrait encore l’indignation. Nous pouvons aussi détourner des avions. Dans des endroits bien choisis où l’impact serait énorme, nous pourrions poser des charges de plastic. Nous pourrions également repeindre des B26 ou C46 de nos forces aériennes aux couleurs cubaines et nous en servir pour abattre un avion de la République dominicaine. Nous pourrions faire en sorte qu’un prétendu appareil de combat cubain abatte un avion de ligne américain. Les passagers pourraient être un groupe de jeunes étudiants ou de vacanciers. »

Général Lyman LEMNITZER (1899 – 1988)
Chef d’état-major des armées (1960-62) et Supreme Allied Commander de l’Otan (1963-1969)

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