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De Defensa

Plus de 350 000 anglais ont dit non à la guerre contre l’Irak : L’onction de la rue

30 septembre 2002 - A partir d’un certain volume, « a demo speaks volume », comme disait un participant à la manifestation antiguerre de Londres, le 29 septembre. Les organisateurs attendaient au mieux 100.000 personnes, il y en eut sans doute autour de 250.000 (entre les 150.000, estimation de la police, et les 350.000 puis 400.000, estimation des organisateurs), - et peut-être plus encore. C’est un succès époustouflant et très significatif, - selon the Independent du 29 septembre : « Biggest protest in a generation ». La mesure réelle de sa signification, de la profondeur de la préoccupation et de l’opposition du peuple britannique qu’elle a exprimée, c’est que cette manifestation a pu aisément se comparer à celle de la semaine précédente, qui touchait le fond de l’âme britannique avec le débat sur la chasse au renards.

Désormais, on en a confirmation : la crise irakienne est devenue une crise britannique fondamentale ; bien plus encore, dans une sorte de version politicienne du "on a fait sortir le diable de sa bouteille", la crise concerne de façon évidente les relations entre les USA et le royaume-Uni. Ce tacticien de presque-génie qu’est Tony Blair a peut-être commis une faute stratégique énorme (par ailleurs, on sait qu’en bon politicien britannique il n’a pas de stratégie, ce qui facilité les erreurs stratégiques) : il a imposé dans le débat national les special relationships entre USA et UK. Ce débat est appelé à dépasser la crise irakienne elle-même, qui n’en est que le prétexte ; il aura lieu, que la guerre avec les Britanniques aux côtés des Américains ait lieu ou pas (et même, plus sûrement si la guerre a lieu puisque son effet assuré sera d’attiser le désordre et de mettre encore plus en évidence le caractère profondément déstructurant et déstabilisant de la politique US).

C’est un événement fondamental pour le Royaume-Uni puisque c’est un événement qui obligera à une vision révisionniste sur un demi-siècle de politique britannique, depuis la Charte de l’Atlantique de 1941, entre Churchill et Roosevelt. L’immense ironie de l’événement est que cet événement central a lieu sous la poussée d’un événement annexe qui est la crise irakienne, chose informe absolument fabriquée par la paranoïa du système en décomposition à Washington et que Blair, aveuglé par son presque-génie tactique, s’est vu dans l’obligation de suivre pour mieux la contrôler, - selon l’illusion britannique, entretenue, elle, depuis la fin du XIXe siècle, que le Royaume-Uni peut manipuler et contrôler la puissance US pour sauvegarder sa propre grandeur.

(En fait, cette tactique britannique remonte précisément à 1877, lorsque sir Cecil Rhodes fonda une association semi-secrète (connue simplement comme « the Secret Society of Cecil Rhodses ») pour défendre l’Empire britannique qu’il jugeait en déclin et menacé. L’un des buts de cette association était « la reconquête de l’Amérique », pour manipuler sa puissance au profit de l’Empire. Cette tactique de sauvegarde de l’Empire put enfin être appliquée officiellement par Churchill à partir de 1941 avec sa politique d’appui systématique à l’hégémonie US, aux dépens de la puissance britannique elle-même. Cette tactique prouva aussitôt sa complète fausseté puisque l’Empire commença, pratiquement dès ses premiers développements (dès 1945), à se désagréger, essentiellement sous les coups puissants de la politique de globalisation déstructurante des USA, déjà en action. La tactique avait quasi instantanément facilité le principal événement qu’elle était censée empêcher.)

Une autre ironie de l’événement de samedi (la manifestation gigantesque de Londres) est qu’un événement qui va accélérer décisivement la prise de conscience de la crise des relations USA-UK s’est fait notamment selon un mode multiculturel très marqué (beaucoup de Britanniques d’origine musulmane, soit arabes, soit du sous-continent indien, etc, présents dans la manifestation). Cette accession du Royaume-Uni à la multiculturalité, qui donne une assise si forte à l’opposition à la crise irakienne, est le fruit direct de l’"américanisation" de UK, le multiculturalisme étant l’un des axes de l’offensive constante de déstructuration de la globalisation lancée et manipulée par les USA. On a découvert samedi que, lorsqu’on est Palestinien ou d’origine palestinienne, il est plus intéressant et plus efficace de manifester à Londres qu’à Gaza. C’est la vertu de la démocratie.

Dernier écho de la manif’ pour en fixer l’ampleur, de Euan Ferguson, de The Observer :

"Scotland Yard a dit à 2pm qu’il y avait peut être 40000 manifestants. J’étais à mi-chemin de Picaddilly à ce moment, en tête de la manifestation, appelant une ami en arrière (...) et elle n’avait pas encore commencé à avancer. La coalition stop the war a annonvé que les manifestants étaient plus de 350 000. La police réticente est passée de "4 personnes avec des bandeaux et un petit chien" à 150 000 personnes. la vêrité est que le nombre de manifestants fut trés supérieurs aux chiffres cités dans les deux cas, compte tenu du nombre de londonien qui entraient dans la manifestation et la quittaient avant d’aller vers les magasins et les pub. C’était une trés, trés importante manifestation, particulièrement énervée et trés mélangée."

« Scotland Yard said at 2pm that perhaps 40,000 demonstrators had turned up. I was halfway along Piccadilly at the time, at the head of the march, phoning a friend at the back, in a crush at the Embankment, and she hadn’t even started moving. The Stop the War coalition last night claimed the total was more than 350,000 ; the police reluctantly moved up from ’four men with beards and a small dog’ to 150,000, and the truth was, if anything, even higher than either, given the number of Londoners slipping in and out of the stream before sliding off to shops and pubs. It was a big, big, important march, and quite angry, and quite mixed. »

Cet article est repris du site de P. Grasset, Dedefensa.org : l’onction de la rue


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