Il n’y a pas un seul, mais deux faits scandaleux commis par Adrien Quatennens. Etrangement, à part quelques mots glissés dans un coin de journal, vous aurez remarqué l’exemplaire silence observé sur la seconde affaire. Le député du Nord a giflé sa femme ! Qui peut l’ignorer. Entre les hypocrites – convertis de circonstance à la « cause des femmes », qui n’utilisent la baffe, non pour le délit qu’elle représente, mais comme arme politique pour dézinguer La France Insoumise, et ceux dont l’indignation est sincère, Quatennens est déjà à Fukushima dans un tsunami.
Pourtant la seconde infamie commise par l’homme aux cheveux rouges, mérite, tout autant que la première, de passer au crible de la gravité. En juillet le « coordinateur » de LFI signe une « Proposition de résolution » qui doit être soumise aux votes de la représentation nationale. Regrets, remords, lâcheté ? Quelques semaines plus tard il s’en vient subrepticement, comme un monte en l’air, demander au Bureau de l’Assemblée de retirer son nom de la résolution. La gomme n’efface pas sans laisser la trace de la honte. Le texte, dans un premier temps approuvé par Quatennens, a pour objectif de proposer l’adoption une résolution condamnant Israël « pour sa conduite d’apartheid » envers les Palestiniens. Ainsi, un jour Adrien trouve que la politique israélienne est insoutenable, un autre, en déduit qu’il n’y a pas de quoi en faire un plat. Fusse une flamiche.
Je résume. L’héritier désigné de Jean-Luc Mélenchon, un Jaurès du septentrion qui jouerait du rock, militant qui affiche ne pas transiger avec l’injustice, abandonne la Palestine en rase campagne (électorale). Alors que depuis cinquante ans le soutien accordé à cette dernière indique la profondeur d’un engagement à gauche : anti-colonialisme, respect du droit international et des décisions de l’ONU. Ce marqueur, Quatennens le piétine en silence. Incapable de dire ce qu’il n’a pas la courage d’avouer. Il est donc acquis qu’aux yeux de Quatennens les drames quotidiens de Gaza et Ramallah, sont sans importance. Pour le compte de ce muet osons une explication : signer cette résolution n’était pas positif pour sa carrière de politicien. Pour l’anecdote notons que sa commère, Mathilde Panot qui est quand même présidente du groupe LFI à la Chambre, a fait comme son « coordinateur », elle a signé puis demandé la gomme. Plus facile de se faire photographier au cours d’une protestation contre le voile à Téhéran, que de demander des actes, c’est-à-dire un vote sur la Palestine, à Assemblée Nationale. Le courage n’est pas en vente sur « Le Bon Coin ».
C’est Jean-Paul Lecoq, député communiste de Seine Maritime que l’on trouve à l’origine de ce chaos qui doit faire honte aux Insoumis. Tout observateur attentif de la vie politique sait que Lecoq est un militant qui a mal à la planète. Qui se lève chaque matin avec dans un agenda, des voyages et réunions à propos des Sahraouis, des Rohingyas, des Comoriens, des Palestiniens, les Kurdes et autres misérables du monde. Il est ainsi, Lecoq, in-tranquille tant des peuples sont opprimés ailleurs. Et c’est lui qui a rédigé la Proposition de de résolution sur « l’apartheid israélien ».
« Nous étions en mai en pleine législatives. Les sanctions tombaient comme la grêle sur la Russie. Je me suis dis. Bon. La machine à punir tourne à fond, mais pourquoi se bloque-t-elle quand il s’agit de stopper d’autres comportements criminels tordant le cou au droit et à trop de peuples privés d’état. Quelques idiots dirons que je suis un nostalgique de l’URSS, un suppôt de Poutine ce qui est faux et qu’ils sont incapables d’étayer.
A propos de rétorsion, parlons d’Israël. Je ne remets pas son existence en cause, je défie quiconque de trouver une trace d’antisémitisme en moi, mais pourquoi l’état hébreu n’est-il jamais sanctionné ? D’où mon idée de faire plus qu’agiter des pancartes et pétitions. J’ai voulu que les députés français marquent, dans leur engagement parlementaire, la désapprobation de la politique d’apartheid d’Israël. L’objectif est simple. Quatennens et Panot ont signé un texte long et complet, documenté et équilibré. Puis ils ont rayé leurs noms sans même me téléphoner... ».
Cette définition, celle « d’apartheid » appliqué à l’état hébreu, n’est pas une invention de Lecoq, fût-il un admirateur de Mandela. La première occurrence vient sous la plume de l’ONG israélienne B’Tselem, c’est elle qui choisit de définir ainsi la politique de son pays. Avec le choix du même mot les militants juifs ont été suivis par Human Right Watch (parlant de Gaza) puis par Amnesty International deux ONG subventionnées par Washington. Le texte de la résolution de Lecoq et du PCF s’appuie essentiellement sur ces trois rapports, nous sommes en mai 2022. Les élections législatives passées, le député soumet son texte à chacun des nouveaux parlementaires, toutes étiquettes confondues. Trente-trois répondent et signent. Une majorité de communistes mais, aussi Adrien Quatennens et Mathilde Panot, l’étoffe des héros de la France Insoumise dont les noms vont disparaitre dans la nuit et le brouillard.
Dans cet avatar la défense des palestiniens est victime le l’idéologie de la « Nouvelle gauche » où le « sociétal » a pris le pas sur le « social », le politique. Même Le Monde – c’est dire si l’heure est grave – s’inquiète enfin de cette prédominance de ce « sociétal » qui tient en main la doxa, le bouquet de tous les critères à cocher si l’on veut être « de gauche ». Le marqueur rouge n’est plus la faiblesse du salaire, le manque et le coût de la nourriture, le chômage, bref la misère. Être de gauche c’est mettre en premier l’usage de l’écriture inclusive. Il y a une vingtaine d’années, en France, c’est le philosophe Jean-Claude Michéa (avant de dérailler ), qui a hurlé contre cet abandon par la gauche de la vraie cause du peuple : la lutte contre la domination capitaliste entrainant la pauvreté. L’affaire Quatennens, celle de la gifle qui en masque une autre donnée à la Palestine, indique le triomphe de ce « sociétal ». Dans le destin d’un militant politique présumé sincère, que pèse le sort de la Palestine face à la violence d’ une gifle donnée à sa femme ?
Si tout va bien pour Lecoq et ses amis de signature, du PCF pour l’essentiel, en mai prochain l’Assemblée Nationale aura à se prononcer sur « l’apartheid israélien ». La chance de succès est faible. Tout ne sera pas perdu : l’honneur sera sauf.
PS. On ne peut mesurer la lâcheté des deux déserteurs de la France Insoumises, et de deux députées socialistes Christine Pires-Beaune et Claudia Rouaux, tout aussi courageuses, qu’en citant les noms des femmes et des hommes qui ont signé cette « Proposition de Résolution » :
Jean Paul LECOQ, Soumya BOUROUAHA, Moetai BROTHERSON, Jean Victor CASTOR, Steve CHAILLOUX, André CHASSAIGNE, Pierre DHARRÉVILLE, Elsa FAUCILLON, Sébastien JUMEL, Emeline K/BIDI, Karine LEBON, Tematai LE GAYIC, Yannick MONNET, Marcellin NADEAU, Davy RIMANE, Stéphane PEU, Fabien ROUSSEL, Nicolas SANSU, Jean Marc TELLIER, Jiovanny WILLIAM, Hubert WULFRANC, Idir BOUMERTIT, Emmanuel FERNANDES, David GUIRAUD, Julie LAERNOES, Charlotte LEDUC, Pascale MARTIN, Francesca PASQUINI, Thomas PORTES, Loïc PRUD’HOMME, Sabrina SEBAIHI, Ersilia SOUDAIS, Aurélien TACHÉ, Bénédicte TAURINE.
Il semble aussi que Danièle Obono, élue LFI, ait rejoint cette liste de kamikazes.