20 octobre 2005
Né à Montreuil le 4 février 1937 et demeurant depuis trois ans à
Bagnolet, dans le 93, je me dois de porter à l’attention de mes concitoyens les
faits suivants, dont j’ai été témoin et victime.
Le mardi 11 octobre, j’ai été mis au courant par des voisins de
l’expulsion de familles ivoiriennes habitant 2, passage du Gazomètre,
à Montreuil. Nous nous sommes immédiatement rendus sur les lieux, ma
femme et moi, pour leur porter assistance.
Nous avons regroupé leurs affaires
éparpillés en pleine rue puis il a été décidé, avec les familles et les
personnes solidaires du voisinage, de se réfugier à la maison de
quartier Lounès Matoub, 4-6, place de la République, à Montreuil, pour abriter
les familles et les enfants ainsi que leurs affaires et ainsi interpeller la
mairie de Montreuil sur la nécessité de leur relogement. Un grand
mouvement de solidarité a réuni les habitants de la commune et des
environs.
Dans l’après-midi, un membre du cabinet du maire est venu à la
rencontre des familles, leur proposant 3 jours d’hébergement en hôtel sur le
département ou dans d’autres banlieues lointaines, alors que leurs
enfants sont scolarisés sur Montreuil.
Les familles ont refusé la proposition
estimant que leur situation resterait précaire. Le représentant de
la mairie nous a très clairement menacés d’une intervention policière
afin de nous évacuer. Dans cette éventualité, les familles et les soutiens ont
décidé de se barricader dans la salle d’activités de la maison de
quartier.
L’intervention a commencé vers 20 heures quand, à coups de bélier, les
CRS ont défoncé la porte. Aussitôt l’éclairage a été coupé. Des enfants se
sont mis à hurler.
Alors que nous nous tenions un peu en retrait en
scandant des slogans contre les expulsions, les CRS casqués, visières baissées,
armés sur le pied de guerre -, boucliers, jambières renforcées, tonfas
etc. - nous ont encerclés.
Après avoir renversé et sauvagement jeté en
l’air les sacs des familles, les tables et la nourriture qui s’y
trouvait, ils ont commencé à nous repousser vers la sortie.
Inquiets pour les
femmes et les enfants qui s’étaient réfugiés dans la cuisine, porte fermée,
nous avons formé une chaîne afin de les protéger et d’être témoins de leur
sort, vu la violence de l’intervention.
En vain.
Pour ma part, j’ai été projeté à terre et piétiné. J’ai eu beaucoup de
mal à me relever.
Pour précipiter le mouvement et alors que j’étais déjà
estourbi et en proie au vertige, un CRS a levé sa matraque, mais un
gradé lui a fait signe de ne pas frapper. " Ca va, monsieur ? " , a-t-il
demandé.
Puis me prenant par le bras, il m’a dirigé vers la porte tandis que ma
femme et mes compagnons étaient évacués très brutalement vers la cour,
les uns après les autres ou par petits groupes.
Me trouvant isolé et un des
derniers, j’ai été poussé dans la cour entre deux rangs de CRS.
A mi-distance de la grille qui ferme la cour, j’ai essayé de parler au
commissaire que j’avais vu le matin procéder à l’évacuation du
passage du Gazomètre pour lui rappeler la présence d’enfants dans le local. Il
m’a dit : " C’est ça, c’est ça... Dégage ! "
Je continuais ma route quand deux CRS se sont précipités sur moi. J’ai
reçu un violent coup de poing sur le nez puis un troisième policier, en
civil, qui s’ était joint à eux m’a asséné un très brutal coup de matraque sur
le côté gauche de la tête. Tandis que je titubais, ils m’ont poussé
brutalement vers la sortie et je suis tombé à la renverse sur des
grilles.
On m’a relevé, la tête en sang, alors que j’avais perdu conscience.
Deux personnes m’ont soutenu et emmené m’asseoir au café le plus proche.
On a épongé le sang qui m’aveuglait et appelé les pompiers qui m’ont
emmené avec ma femme à l’hôpital de Montreuil.
Premier bilan :
" Traumatisme crânien, traumatisme facial avec plaie, couture
paupière supérieure de l’oeil gauche, hématome du nez orbite gauche, hématome
du nez avec fracture, fracture de la 7e côte gauche, état de choc
psychologique, incapacité totale de travail personnel (ITTP) de quinze jours, sous
réserve... "
En conséquence je porte plainte contre X pour ces faits de violences
policières que rien ne pouvait justifier, n’ayant à aucun moment menacé
quiconque.
A qui le tour ?
Quand ils sont venus chercher les communistes,
Je n’ai rien dit,
Je n’étais pas communiste.
Quand ils sont venus chercher les syndicalistes,
Je n’ai rien dit,
Je n’ai rien dit, je n’étais pas syndicaliste.
Quand ils sont venus chercher les juifs,
Je n’ai pas protesté,
Je n’étais pas juif.
Quand ils sont venus chercher les catholiques,
Je n’ai pas protesté,
Je n’étais pas catholique.
Puis ils sont venus me chercher
Et il ne restait personne pour protester.
Martin Niemöller (1892-1984) pasteur protestant.
A partir de 1942, la population française fut sous le contrôle de
la police de Vichy. C’était compter sans la Résistance, mais, pour la
majeure partie du pays, les résistants n’étaient que des agitateurs, des
terroristes. Et pourtant ce sont ces trublions qui ont libéré le pays.
Par la suite, la déportation, les camps, la Résistance devinrent pour
quelques uns le pont aux ânes.
Pendant la guerre d’Algérie, ils en avaient perdu la mémoire alors que la répression policière s’abattait sur la
France. Aujourd’hui, certains rigolent de ces " vieilles lunes " sans
se rendre compte que la France de M. Sarkozy risque fort de prendre la
relève de celle de M. Papon.
Pour notre ministre de l’Intérieur, fils d’émigré hongrois, il n’est
pas bon être étranger. Chaque semaine, de nouveaux charters s’envolent à
tire d’ailes pour évacuer Africains, Maghrébins, Asiatiques et
Européens de l’Est. Pour le maniaque du Karcher, qu’importe si ceux qui restent
vivent avec leurs enfants dans la terreur, dans l’angoisse d’une rafle et à
la merci d’employeurs indélicats. Nous attendons l’aurore d’une
nouvelle Résistance. Quelques-uns se sont déjà levés, ils savent que s’ils ne
le font pas, ça pourrait être bientôt leur tour
Jean-Pierre Bastid
Jean-Pierre Bastid est invalide à 80 %. Cinéaste écrivain, il est co-scénariste du film Dupont Lajoie réalisé par Yves Boisset avec Jean Carmet, Pierre Tornade en 1975.
Ce film a pour sujet la recrudescence du racisme en France.
– Sources :
http://forums.france5.fr/arretsurimages
http://nice.indymedia.org/article.php3?id_article=10855
Vidéo expulsions de Montreuil :
1. Les violences policières.
http://videobaseproject.net/video69.html
2. Le nez de Pinocchio (Une lettre visuelle en réponse aux calomnies).
http://videobaseproject.net/video70.html
– Extrait du forum : Roland Gatti, de la Police aux frontières : Reconduire « à tour de bras »,« faire du chiffre ».
15 octobre 2005, par brigitte JEANNOT
je tiens à témoigner, en tant qu’avocat, que dans le cadre d’une procédure de reconduite à la frontière d’une famille (parents + 3 enfants en bas âge) devant le JLD de METZ et le TA de STRASBOURG, les policiers de l’escorte m’ont fait part de leur effroi de devoir retenir des enfants. ils m’ont dit textuellement "Maître, faîtes quelque chose pour arrêter cette situation". il est choquant qu’une personne soit sanctionnée pour avoir dit haut et fort ce que d’autres pensent ou disent à voix basse.
Brigitte JEANNOT, avocat à NANCY
* * *
16 octobre 2005, par un flic bruxellois
Etant moi-même policier, mais à Bruxelles, je suis également confronté à la problématique des expulsions, même si en tant qu’agent de quartier (police de proximité) je ne suis pas celui qui expulse physiquement les personnes, je suis notamment chargé par l’"Office des étrangers" de signifier les "ordres de quitter le territoire" aux personnes n’étant pas ou plus en règle de séjour.
Malgré le discours officiel sur la répression des marchands de sommeil et des autres vampires qui exploitent ces personnes (e.a. certains avocats, voire pseudo-avocats, qui leur promettent monts et merveilles à condition de leur verser une avance minimum de 1.000 euro), les services policiers ou assimilés qui s’occupent d’une manière ou d’une autre des déboutés du droit d’asile et du rapatriement des illégaux, y compris des familles dont les enfants sont scolarisés, mettent la priorité sur "le chiffre", parce qu’un procès-verbal complet contre un marchand de sommeil, un escroc ayant promis la régularisation ou un esclavagiste utilisant des illégaux sur ses chantiers, ça prend du temps à rédiger, il faut respecter certaines règles de droit, auditionner toutes les personnes avec des traducteurs jurés, remplir divers documents administratifs.
Bref, il est plus simple de rafler une dizaine de personnes en séjour illégal, de rédiger un "procès-verbal simplifié" (sans aucune suite judiciaire) et de conduire à l’aéroport le lendemain matin tous ceux pour lesquels l’Office des étrangers a décidé l’expulsion. Et d’en informer la presse pour qu’elle puisse publier que "Ce lundi des policiers de la zone de police X ont effectué une opération dans le quartier de X et ont procédé à l’interpellation de 2 Nigérians, 3 Roumains, 1 Irakien, 4 Equatoriens et 10 Bulgares. Sur les 20 étrangers en séjour illégal, 17 ont immédiatement été conduits à l’aéroport de Zaventem et expulsés du territoire."
Comme en France, le droit à l’expression publique des policiers belges est très limité, ils n’ont même plus le droit, depuis quelques années, de se présenter à une élection politique alors que précédemment l’interdiction se limitait à siéger.
La Réforme des polices belges (fusion polices communales + police judiciaire + gendarmerie) de 1998-2002 a abouti à une gendarmisation des policiers locaux, avec la menace permanente de sanctions en cas d’expression publique, même sans rapport direct avec leur fonction, et même quand cette expression ne se fait qu’en réseau interne (mailings internes).
www.legrandsoir.info/article.php3 ?id_article=2696
– Photo : John © 2005
http://x-poz.org/thumbnails.php?album=89
Sarkozy sème et ... récolte sur Google !