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Maltraitance animale : un amendement anti-L214 adopté par la commission des finances

Mercredi 05 octobre, un amendement déposé par les Républicains et adopté en commission des finances (lors de l'examen du projet de budget 2023) par la majorité présidentielle, les Républicains et le Rassemblement National, s'en prend directement à la liberté d'informer. Ainsi, prévoit-il de priver de réduction d'impôt les dons aux "aux associations dont les adhérents sont reconnus coupables d’actes d’intrusion sur les propriétés privées agricoles et établissements industriels." Un moyen de faire taire les lanceurs d'alerte de la cause animale, en tapant directement au portefeuille.

Dans le collimateur, l’association L214, comme l’explique l’auteur du texte lui-même, le député LR Marc Le Fur : "Jusqu’ici les associations antispécistes de type L214 qui encouragent des activistes extrémistes à enfreindre toutes les lois sur la propriété en fracturant les entrées des élevages pouvaient bénéficier d’une déduction d’impôts ... Si en séance, les députés confirment le vote de la commission des finances, la loi ne permettra plus à ces associations de bénéficier de cet avantage fiscal si elles continuent à encourager ce type d’action".

La volonté de museler le mouvement animaliste n’est pas nouvelle. Ces dernières années, on a notamment pu le voir à travers la "cellule Demeter", créée en 2019 grâce à l’action conjointe du ministère de l’intérieur et de la FNSEA, ou encore, par la mission d’information parlementaire (suivie d’une proposition de loi) sur les "entraves et obstructions opposées à l’exercice de certaines activités légales", conduite en 2021 sous l’égide du député LR Xavier Breton.

Reste que les intrusions en élevage sont déjà punies par le code pénal et que L214 à déjà été condamnée maintes fois en ce sens. Reste aussi que les enquêtes de L214 sont d’utilité publique. Elles ont permis de révéler au grand public l’horreur de certaines pratiques d’élevage/abattage, dénoncer auprès des pouvoirs publics bon nombre de situations illégales et contribuer ainsi aux avancées sociétales en matière de bien-être animal (interdiction de la castration "à vif" des porcelets, du broyage des poussins, d’élevage de visons pour la fourrure ...).

Que vise cet amendement, à part protéger les auteurs des pires pratiques pour les animaux, museler les lanceurs d’alertes, empêcher l’information du public et, de fait, freiner la nécessaire évolution de la société sur la question du droit des animaux ? Il est au passage intéressant de noter l’absurdité du texte et la mauvaise foi de son auteur. A quel moment L214 a-t-elle encouragé ses adhérents à "enfreindre les lois ... fracturer des entrées ..." ? Et puis, comment ça se contrôle, les adhérents ? Si demain je prends une carte LR et que je vais brûler des voitures, on coupe les subventions du parti ?

Les organisations animalistes et environnementales ont déjà réagi. Une quarantaine d’ONG dont L214, Greenpeace, Welfarm, Oxfam France, CIWF France, la Ligue de Protection des Oiseaux (LPO), Blom, Foodwatch, Générations Futures ... ont fermement dénoncé un amendement qui, s’il était adopté, "toucherait de plein fouet l’ensemble des organisations qui dénoncent les dérives de notre système agricole et industriel, notamment via des actions de désobéissance civile". Voyant dans ce texte "une nouvelle preuve de l’acharnement des pouvoirs publics envers les organisations de la société civile", elles ont appelé les députés à le rejeter.

Sur l’échiquier politique, la question divise. Avec clairement un clivage droite/gauche. Les députés LREM, LR, RN se félicitent de l’amendement pendant que ceux de la Nupes (LFI et EELV en tête) se disent bien déterminés à le combattre. La palme d’or de l’hypocrisie et de la volte face revient quand même à Marine Le Pen qui après moultes déclarations sur le bien-être animal (un peu orientées, il est vrai), s’en prend désormais à ses défenseurs : "Enfin ! Les contribuables français ne financeront plus les associations terrorisant les agriculteurs et salissant le travail de nos éleveurs !"

Voté en Commission, le texte doit désormais passer par le vote des députés au Palais Bourbon. Affaire à suivre donc.

Liens/références

L’amendement des LR
Blog de Marc Le Fur
Mission d’information parlementaire de janvier 2021 sur les "Entraves à l’exercice d’activités légales"
Proposition de loi de septembre 2021 (pas encore examinée par le parlement)
Quelques tweets de responsables politiques référencés ici ou ici

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